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10/06/2021 | FRANCE | N°19DA02642

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation a 3, 10 juin 2021, 19DA02642


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé par trois requêtes distinctes au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 2 février 2017 par laquelle le maire de la commune de Canteleu a refusé de lui appliquer l'arrêté du 9 juillet 2015 portant reconstitution de sa carrière, d'enjoindre à la commune de procéder à l'exacte application de l'arrêté du 9 juillet 2015 dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir et de mettre à la charge de la commune une somme de 1 500 euros à lui verser au titr

e de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, d'annuler la décision...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé par trois requêtes distinctes au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 2 février 2017 par laquelle le maire de la commune de Canteleu a refusé de lui appliquer l'arrêté du 9 juillet 2015 portant reconstitution de sa carrière, d'enjoindre à la commune de procéder à l'exacte application de l'arrêté du 9 juillet 2015 dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir et de mettre à la charge de la commune une somme de 1 500 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, d'annuler la décision du 7 décembre 2017 par laquelle le maire de Canteleu a procédé au rappel des sommes versées en exécution de l'arrêté du 9 juillet 2015 et de mettre à la charge de la commune une somme de 2 500 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, enfin d'annuler le titre exécutoire n° 542 émis le 6 mars 2018 à son encontre par la commune de Canteleu pour un montant de 3 252,89 euros, de la décharger totalement de l'obligation de payer cette somme et de mettre conjointement et solidairement à la charge de la commune et du trésorier une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement commun n° 1700840, 1800022 et 1801150 du 18 octobre 2019 le tribunal administratif de Rouen a annulé le titre exécutoire du 6 mars 2018 portant régularisation d'un trop perçu de traitement par Mme B... pour un montant de 3 252,89 euros, mis à la charge de la commune de Canteleu le versement d'une somme de 1 200 euros à Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 décembre 2019, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 2 février 2017 du maire de Canteleu refusant de lui appliquer l'arrêté du 9 juillet 2015 portant reconstitution de sa carrière et d'enjoindre à la commune de procéder à l'exacte application de l'arrêté du 9 juillet 2015 et celles tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 décembre 2017 du maire de Canteleu procédant au rappel des sommes versées en exécution de l'arrêté du 9 juillet 2015 ;

2°) d'annuler la décision du 2 février 2017 par laquelle le maire de Canteleu a refusé de lui appliquer l'arrêté du 9 juillet 2015 portant reconstitution de sa carrière ;

3°) d'annuler la décision du 7 décembre 2017 par laquelle le maire de Canteleu a procédé au rappel des sommes versées en exécution de l'arrêté du 9 juillet 2015 ;

4°) d'enjoindre à la commune de Canteleu de procéder à l'exacte application de l'arrêté du 9 juillet 2015 dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de la commune une somme de 2 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur-public ;

- et les observations de Me A... représentant la commune de Canteleu.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... a été recrutée le 1er avril 1980 en qualité d'auxiliaire de puériculture par la commune de Canteleu. Elle a été titularisée le 1er avril 1983. A l'issue d'un mi-temps thérapeutique, et compte tenu des indications fournies par le médecin de prévention en décembre 2007, Mme B... a été affectée à mi-temps sur un poste au centre culturel et, à mi-temps à la direction des ressources humaines, sur des missions de secrétariat. Elle a demandé, par lettres du 29 mars 2010 puis du 17 octobre 2011, à réintégrer un poste affecté exclusivement, ou principalement, au centre culturel, dans le cadre d'un temps partiel à 80 % ou d'un temps plein. Le maire de Canteleu, par arrêté du 25 octobre 2011, l'a toutefois nommée adjointe administrative principale de première classe, à temps non complet, à raison de vingt-huit heures par semaine. S'estimant lésée par cette décision ne lui permettant de percevoir des rémunérations qu'à hauteur de 80 % d'un temps plein, Mme B... a saisi le tribunal administratif de Rouen qui, par un jugement n° 1200635 du 16 décembre 2014 devenu définitif, après avoir constaté que la lettre du 17 octobre 2011 s'analysait sans ambiguïté comme une demande d'autorisation d'effectuer un service à temps partiel au poste occupé précédemment à l'Espace Culturel François Mitterand, a annulé l'arrêté du 25 octobre 2011 précité, ainsi que la décision rejetant son recours gracieux, au motif qu'un emploi à temps non complet n'avait pas été régulièrement créé.

2. Le maire de Canteleu a alors notifié à Mme B... un arrêté du 9 juillet 2015 la réintégrant sur un poste à temps complet avec effet au 1er novembre 2011, dont l'article 4 précisait " la prise en compte pour du temps complet en constitution, en liquidation, pour le montant garanti et pour la durée d'assurance dans sa pension constituée auprès de la Caisse Nationale de Retraites des Agents des Collectivités Locales ". La commune, par un courrier du 29 mars 2016, a indiqué procéder à des régularisations de rémunération et a ainsi versé à Mme B... un rappel de salaires à concurrence de 5,71 % d'un temps plein, au titre des années 2011, 2012, 2013 et 2014. Le 9 janvier 2017, Mme B... a sollicité la " régularisation totale " de sa situation en soulignant qu'elle avait été placée à temps plein alors que seule une partie de ses rémunérations lui avait été reversée. Par un courrier du 2 février 2017, le maire de Canteleu a refusé d'accéder à sa demande au motif que l'absence effective d'exercice des fonctions n'ouvrait pas droit à un rappel de rémunération. Puis par courrier du 7 décembre 2017, le maire l'a informée devoir procéder à un rappel de trop-perçu en raison de l'absence de service fait, correspondant à 5,71 % de traitement au titre de la période litigieuse. La commune a émis un titre exécutoire n° 542 le 6 mars 2018, demandant le versement d'un montant de 3 252,89 euros au titre de la régularisation du trop-perçu de traitement pour les années 2011 à 2015. Par un jugement commun n° 1700840, 1800022 et 1801150 du 18 octobre 2019, le tribunal administratif de Rouen a annulé le titre exécutoire du 6 mars 2018 pour défaut d'indication des bases de liquidation, et rejeté le surplus des conclusions des parties. Mme B... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions du maire de Canteleu du 2 février et du 7 décembre 2017.

Sur la régularité du jugement :

3. Contrairement à ce que soutient Mme B..., s'agissant de la décision du 7 décembre 2017, les premiers juges ont expressément écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée en estimant que l'exécution du jugement du 16 décembre 2014 du tribunal administratif de Rouen n'impliquait pas le paiement par la commune d'heures non travaillées. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision du 2 février 2017 :

4. Contrairement à ce qu'allègue l'appelante, la décision du 2 février 2017 du maire de Canteleu qui refuse sa demande tendant à être rémunérée au taux de 100 % n'a pu avoir pour effet de retirer l'arrêté du 9 juillet 2015, qui ne se prononçait pas sur le temps de service effectivement effectué, mais se bornait à la placer administrativement sur un poste à temps complet. Le maire de Canteleu était fondé à opposer à Mme B... l'absence de service fait à temps plein, cette dernière n'ayant pas, en pratique, réalisé un service à temps complet sur la période litigeuse. Par suite, le moyen tiré du retrait illégal d'un acte créateur de droits manque en fait et doit être écarté. Les conclusions dirigées contre la décision du 2 février 2017 doivent donc être rejetées.

En ce qui concerne la décision du 7 décembre 2017 :

5. Aux termes de l'article 60 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les fonctionnaires à temps complet, en activité ou en service détaché, qui occupent un emploi conduisant à pension du régime de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales ou du régime général de la sécurité sociale peuvent, sur leur demande, sous réserve des nécessités de la continuité et du fonctionnement du service et compte tenu des possibilités d'aménagement de l'organisation du travail, être autorisés à accomplir un service à temps partiel qui ne peut être inférieur au mi-temps. (...) /Les fonctionnaires autorisés à travailler à temps partiel perçoivent une fraction du traitement, de l'indemnité de résidence et des primes et indemnités de toute nature afférentes soit au grade de l'agent et à l'échelon auquel il est parvenu, soit à l'emploi auquel il a été nommé. Cette fraction est égale au rapport entre la durée hebdomadaire du service effectué et la durée résultant des obligations hebdomadaires de service réglementairement fixées pour les agents de même grade exerçant à temps plein les mêmes fonctions dans l'administration ou le service concerné. /Toutefois, dans le cas de services représentant 80 ou 90 p. 100 du temps plein, cette fraction est égale respectivement aux six septièmes ou aux trente-deux trente-cinquièmes du traitement, des primes et indemnités mentionnées à l'alinéa précédent. (...) " .

6. Le jugement du 16 décembre 2014 mentionné au point 1 a constaté que par la lettre du 17 octobre 2011, Mme B... avait fait une demande d'autorisation d'effectuer un service à temps partiel au poste occupé et que cette demande avait été implicitement rejetée par le maire de Canteleu. Mais ce dernier n'a pris aucune décision la plaçant en temps partiel, puisque l'arrêté du 9 juillet 2015 l'a placée sur un poste à temps complet. Dès lors, Mme B... n'ayant pas été autorisée à travailler à temps partiel, elle ne peut prétendre à percevoir la fraction de traitement prévue par les dispositions précitées de l'article 60 de la loi du 26 janvier 1984, soit 5,71 % supplémentaire. La commune, qui lui a versé à tort en mars 2016, un complément de revenu à hauteur de 5,71 %, a donc pu décider de procéder au recouvrement de ce paiement indu.

7. Aux termes de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : " Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive ".

8. La décision du 7 décembre 2017 a été édictée dans le délai de deux ans à compter de la mise en paiement de mars 2016. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 et de ce que la décision du 7 décembre 2017 emporterait retrait illégal de la décision du 29 mars 2016 et porterait atteinte au principe de sécurité juridique doivent également être écartés.

9. Pour le même motif que celui exposé au point 4, le moyen tiré du retrait illégal de l'arrêté du 9 juillet 2015 doit être écarté. Il en est de même du moyen tiré du détournement de pouvoir qui n'est pas établi en l'espèce.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Rouen a rejeté le surplus de sa demande. Doivent par voie de conséquence, être rejetées ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... une somme au titre des frais exposés par la commune de Canteleu et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Canteleu au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et à la commune de Canteleu.

4

N°19DA02642


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 19DA02642
Date de la décision : 10/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Analyses

54-01-07-02 Procédure. Introduction de l'instance. Délais. Point de départ des délais.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SELARL EBC AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-06-10;19da02642 ?
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