Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen à titre principal de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 769 195,15 euros, assortie des intérêts au taux légal. La caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe-Seine-Maritime a demandé dans le cadre de cette instance que l'Etat lui verse la somme de 1 035 464,49 euros au titre de ses débours provisoire, assortie des intérêts au taux légal.
Par un jugement n° 1603311 du 6 juin 2019, le tribunal administratif de Rouen a rejeté la demande de M. C... et les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe-Seine-Maritime.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée sous le n°19DA01868, le 5 août 2019, la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe-Seine-Maritime, représentée par Me F... D..., demande à la cour :
1) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 317 440,16 euros, avec intérêts ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens, l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 454-1 du code de la sécurité sociale ainsi que la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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II. Par une requête enregistrée sous le n° 19DA01869 le 5 août 2019 et deux mémoires enregistrés le 11 août 2019 et le 25 avril 2021, M. C..., représenté par Me B... A..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 6 juin 2019 ;
2°) à titre principal de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 740 616,21 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'arrêt à intervenir, ou à titre subsidiaire à lui verser une provision de 1 200 000 euros et de désigner un expert pour évaluer ses préjudices ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- la loi n° 2013-431 du 28 mai 2013 ;
- le décret n°82-453 du 28 mai 1982 ;
- le décret n°82-642 du 24 juillet 1982 ;
- le décret n° 99-269 du 6 avril 1999 ;
- le décret n° 2013-1373 du 27 décembre 2013 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public ;
- et les observations de Me B... A... pour M. C....
Considérant ce qui suit :
1. M. E... C..., conducteur hautement qualifié de véhicules poids lourd de la société Perrier transports, a été chargé de livrer le 22 juillet 2011, une armoire métallique pesant 471 kilogrammes et d'une hauteur de près de deux mètres, sur le site du Grand Quevilly du centre d'études techniques de l'équipement Normandie-Centre et commandée par ce dernier à la société MDM. Après avoir déchargé cette armoire de son camion, la palette support s'est coincée dans le caniveau d'écoulement des eaux, en limite de l'aire de livraison. L'armoire a alors basculé sur M. C... lorsque celui-ci a cherché à décoincer la palette, lui occasionnant de graves blessures et une lourde incapacité partielle permanente. M. C... a recherché la responsabilité de l'Etat devant le tribunal administratif de Rouen pour obtenir une indemnisation complémentaire à celle obtenue au titre de l'accident du travail. Il relève appel du jugement du 6 juin 2019 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande. La caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe-Seine-Maritime, par une requête distincte, relève également appel de ce jugement.
2. Les requêtes de la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe-Seine-Maritime et de M. C... sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
3. Si les centres d'études techniques de l'équipement, auparavant placés sous la direction du préfet de région de leur siège, sont désormais regroupés au sein d'un établissement public autonome, le centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement, créé par la loi du 28 mai 2013 portant diverses dispositions en matière d'infrastructures et de services de transports, les obligations au titre des contentieux liés aux activités précédant la création de cet établissement public restent de la compétence de l'Etat. Par suite, M. C... est fondé à rechercher la responsabilité de l'Etat pour l'accident qui lui est survenu le 22 juillet 2011 sur le site du Grand Quevilly du centre d'études techniques de l'équipement Normandie-Centre.
4. En premier lieu, il n'est pas sérieusement contesté qu'aucun contrat ne liait l'entreprise Perrier transports, qui n'était que prestataire de livraison pour le fournisseur, au centre d'études techniques de l'équipement. Les dispositions du décret du 6 avril 1999 portant approbation du contrat type applicable aux transports publics routiers de marchandises pour lesquels il n'existe pas de contrat type spécifique, aujourd'hui codifiées dans le code des transports, ne peuvent donc en tout état de cause, s'appliquer à la livraison effectuée par M. C..., contrairement à ce que celui-ci soutient.
5. En deuxième lieu, M. C... et la caisse primaire d'assurance maladie se prévalent des dispositions des articles R. 4515-1 et suivants du code du travail, applicables aux administrations de l'Etat, en vertu du décret du 25 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique. La ministre de la transition écologique soutient en défense que ces dispositions ne s'appliquaient pas en l'espèce, l'article L. 4515-1 du code du travail ne concernant que les " travaux réalisés dans un établissement par une entreprise extérieure ". Toutefois, l'article R. 4515-1 du code du travail pris pour l'application de cette disposition législative dispose que : " Les dispositions du présent chapitre s'appliquent aux opérations de chargement ou de déchargement réalisées par des entreprises extérieures transportant des marchandises, en provenance ou à destination d'un lieu extérieur à l'enceinte de l'entreprise utilisatrice, dite " entreprise d'accueil ". Ces dispositions s'appliquent donc aux faits de l'espèce, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Rouen et à ce que soutient à nouveau en appel la ministre de la transition écologique.
6. Aux termes de l'article R. 4515-8 du code du travail : " Le protocole de sécurité est établi dans le cadre d'un échange entre les employeurs intéressés, préalablement à la réalisation de l'opération. Chacune des opérations ne revêtant pas le caractère répétitif défini à l'article R. 4515-3 donne lieu à un protocole de sécurité spécifique. " et aux termes de l'article R. 4515-10 du même code : " Lorsque le prestataire ne peut pas être identifié préalablement par l'entreprise d'accueil ou lorsque l'échange préalable n'a pas permis de réunir toutes les informations nécessaires, par dérogation aux dispositions de l'article R. 4515-8, l'employeur de l'entreprise d'accueil fournit et recueille par tout moyen approprié les éléments qui se rapportent au protocole de sécurité. ".
7. Le centre d'études techniques de l'équipement a mis en place le 6 décembre 2007, le protocole de sécurité pour les livraisons prévu par les articles R.4515-5 et R.4515-8 du code du travail. Ce protocole rappelait que les livraisons doivent avoir lieu aux horaires prévus, que le centre ne fournit aucun matériel de manutention et que le déchargement est effectué par le seul livreur. Le centre d'études techniques de l'équipement a transmis aux livreurs habituels du site ce protocole ainsi que le 7 juillet 2011, une note sur les horaires de livraison.
8. En l'absence de possibilité d'identification du prestataire de la livraison, le centre d'études techniques de l'équipement n'était pas tenu d'établir de protocole de sécurité spécifique pour ce prestataire et M. C... ne peut se prévaloir ne pas avoir reçu ces informations, dont les horaires de livraison, avant son arrivée alors que la société Perrier transports qui n'intervenait pas habituellement sur le site, n'a jamais contacté le centre d'études techniques pour l'informer de la date de la livraison et s'enquérir des conditions de déchargement.
9. Il résulte de l'instruction que M. C... est arrivé sur le site en dehors des horaires de livraison, au moment de la pause méridienne. S'il soutient que la livraison aurait dû être refusée, en tout état de cause, le protocole de sécurité propre au centre d'études techniques de l'équipement prévoyait la présence d'un seul agent du centre pour réceptionner la livraison et non pour réaliser le déchargement qui était, aux termes de ce protocole, de la seule responsabilité du transporteur. Il ne résulte pas plus de l'instruction que le centre se serait engagé à assister le livreur pour les opérations de déchargement. M. C... ne disposant d'aucun matériel pour décharger l'armoire, il a demandé à l'agent du centre d'études techniques de l'équipement la fourniture d'un transpalette. Comme l'a mis en évidence le rapport établi par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la société Perrier transports, la palette s'est coincée au niveau d'une grille de l'aire de livraison, M. C... a alors cherché à la surélever avec une cale, puis à retirer cette cale avec une clé du camion, ce qui a fait basculer l'armoire. Le rapport a mis en évidence que par ailleurs la palette de support de l'armoire était trop petite eu égard à la hauteur de cette dernière. Ce rapport attribue également la cause du dommage à l'existence d'une pente dans une partie de l'aire de livraison. La caisse primaire d'assurance maladie soutient que cette aire d'accueil des livraisons n'était pas correctement aménagée, en méconnaissance des dispositions du décret du 25 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique. Toutefois, compte-tenu de l'ensemble des faits qui viennent d'être exposés, la cause déterminante du dommage ne résulte ni dans les manœuvres entreprises par le véhicule sur cette aire, ni dans son encombrement allégué, ni dans la présence d'un caniveau, ni dans l'existence d'une pente, mais dans le fait que le livreur ne disposait pas de matériel adapté pour décharger une armoire particulièrement lourde et encombrante, posée sur une palette support sous-dimensionnée et favorisant son déséquilibre, puis dans les risques qu'il a pris en tentant de la décoincer.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... et la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe-Seine-Maritime ne sont pas fondés à se plaindre que par le jugement contesté, le tribunal administratif de Rouen ait rejeté leurs demandes. Par suite, M. C... n'est pas non plus fondé à demander à titre subsidiaire une provision. Sa demande d'expertise doit également être rejetée une telle expertise n'étant pas utile à la solution du litige, La présente instance ne comprenant aucun dépens, les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie, à ce titre, ne peuvent qu'être rejetées. De même, les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ne peuvent qu'être rejetées, le présent arrêt ne comportant aucune condamnation au profit de cette caisse. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font également obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat les sommes demandées à ce titre par la caisse primaire d'assurance maladie et par M. C....
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C..., n° 19DA01869, est rejetée.
Article 2 : La requête de la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe- Seine-Maritime, n° 19DA01868 est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C..., à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe-Seine-Maritime ainsi qu'à la ministre de la transition écologique.
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N°19DA01868, 19DA01869
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N°"Numéro"