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08/06/2021 | FRANCE | N°20DA01058

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (ter), 08 juin 2021, 20DA01058


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Service d'Aide aux Toxicomanes a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler les titres de recettes émis à son encontre le 22 janvier 2009 et le 1er juillet 2009 par le centre hospitalier Laënnec de Creil, aux droits duquel vient le groupe hospitalier public du sud de l'Oise, pour des montants respectifs de 107 989 euros et de 95 456,36 euros, de condamner le groupe hospitalier public du sud de l'Oise à lui verser la somme de 15 115,50 euros et la somme de 1 500 euros au titre des dispos

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Service d'Aide aux Toxicomanes a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler les titres de recettes émis à son encontre le 22 janvier 2009 et le 1er juillet 2009 par le centre hospitalier Laënnec de Creil, aux droits duquel vient le groupe hospitalier public du sud de l'Oise, pour des montants respectifs de 107 989 euros et de 95 456,36 euros, de condamner le groupe hospitalier public du sud de l'Oise à lui verser la somme de 15 115,50 euros et la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1300511 du 17 décembre 2015, le tribunal administratif d'Amiens a annulé le titre de recettes du 22 janvier 2009, a mis à la charge du groupe hospitalier public du sud de l'Oise la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de la demande de l'association.

Par un arrêt n° 16DA00402 du 19 juin 2018, la cour administrative d'appel de Douai a annulé le jugement n° 1300511 du 17 décembre 2015 du tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a prononcé l'annulation du titre de recettes d'un montant de 107 989 euros, émis le 22 janvier 2009, et qu'il a mis à la charge du groupe hospitalier public du sud de l'Oise la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions présentées par les parties.

Par une décision n° 423413 du 22 juillet 2020, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 19 juin 2018, a renvoyé l'affaire à la même cour et a condamné le groupe hospitalier public du sud de l'Oise à verser au Service d'Aide aux Toxicomanes une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 février 2016, le groupe hospitalier du sud de l'Oise, représenté par Me D... C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant que le tribunal a partiellement fait droit à la demande de première instance de l'association Service d'Aide aux Toxicomanes en annulant le titre de recettes du 22 janvier 2009, en mettant à sa charge une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté ses propres conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de mettre à la charge du Service d'Aide aux Toxicomanes la somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la santé publique ;

- loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 84-131 du 24 février 1984 ;

- le décret n° 88-976 du 13 octobre 1988 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A... B..., première conseillère,

- et les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une convention du 10 janvier 2001, le centre hospitalier Laënnec de Creil, aux droits duquel vient le groupe hospitalier public du sud de l'Oise, a mis à disposition de l'association Service d'Aide aux Toxicomanes, association relevant de la loi de 1901, une infirmière à mi-temps et un praticien hospitalier à concurrence de 75 % de son temps de travail. Par un avenant à cette convention, signé le 16 avril 2002, la quotité du service accompli par l'infirmière au sein du Service d'Aide aux Toxicomanes a été portée à 90 %, les 40 % supplémentaires étant pris en charge par l'association. Par une convention signée le 3 mai 2004, les mêmes parties ont prévu que le centre hospitalier Laënnec de Creil mettrait à disposition du Service d'Aide aux Toxicomanes un praticien hospitalier, à hauteur de 70 % de son temps de travail. Le 22 janvier 2009, le centre hospitalier Laënnec de Creil a émis un premier titre de recettes à l'encontre du Service d'Aide aux Toxicomanes, d'un montant de 107 989 euros, concernant des " frais de fonctionnement antérieurs " afférents aux années 2004 à 2007, correspondant à la rémunération d'une fraction du temps de travail accompli par l'infirmière et par le praticien hospitalier mis à disposition de l'association durant cette période. Le 1er juillet 2009, le centre hospitalier Laënnec de Creil a émis un second titre de recettes, d'un montant de 94 456,36 euros, concernant des " frais de fonctionnement antérieurs " afférents à l'année 2008, correspondant à la rémunération du temps de travail accompli par l'infirmière et par le praticien hospitalier au sein du Service d'Aide aux Toxicomanes au cours de cette année. Une nouvelle convention de mise à disposition a été signée le 6 novembre 2009, pour l'exécution de laquelle, l'association a estimé qu'une somme de 15 115,50 euros lui restait due par le groupe hospitalier public du sud de l'Oise. Le 27 décembre 2012, le groupe hospitalier public du sud de l'Oise a adressé à l'association Service d'Aide aux Toxicomanes une mise en demeure de payer les sommes correspondant aux deux titres exécutoires du 22 janvier et du 1er juillet 2009. L'association Service d'Aide aux Toxicomanes a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler ces deux titres de recettes et de condamner le groupe hospitalier public du sud de l'Oise à lui verser la somme de 15 115,50 euros. Par un jugement du 17 décembre 2015, le tribunal a annulé le titre de recettes du 22 janvier 2009, a mis à la charge du groupe hospitalier public du sud de l'Oise la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de la demande de l'association. Par un arrêt du 19 juin 2018, la cour administrative d'appel de Douai a annulé le jugement du 17 décembre 2015 en tant qu'il a prononcé l'annulation du titre de recettes du 22 janvier 2009 et mis à la charge du groupe hospitalier public du Sud de l'Oise la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions présentées par les parties. Le Conseil d'Etat, saisi d'un pourvoi du Service d'Aide aux Toxicomanes, a annulé cet arrêt par une décision du 22 juillet 2020 et renvoyé l'affaire à la même cour.

Sur l'appel principal du groupe hospitalier public du sud de l'Oise :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la requête :

2. Aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf dispositions contraires, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 et R. 751-4-1 (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le groupe hospitalier du sud de l'Oise a reçu notification du jugement attaqué le 21 décembre 2015. Sa requête a été enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel le 22 février 2016, dans le délai imparti par les dispositions précitées. Par suite, le Service d'Aide aux Toxicomanes n'est pas fondé à soutenir que la requête d'appel du groupe hospitalier du sud de l'Oise est tardive.

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance du Service d'Aide aux Toxicomanes tendant à l'annulation du titre de recettes du 22 janvier 2009 d'un montant de 107 989 euros :

S'agissant de la tardiveté de la demande :

4. Aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. " Aux termes du 2° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, alors applicable : " L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite. " Le non-respect de l'obligation d'informer le débiteur sur les voies et les délais de recours, prévue par l'article R. 421-5 du code de justice administrative, ou l'absence de preuve qu'une telle information a été fournie, est de nature à faire obstacle à ce que le délai de forclusion, prévu par l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, lui soit opposable.

5. Toutefois, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. Dans une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours ou l'absence de preuve qu'une telle information a été fournie ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par les textes applicables, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable.

6. S'agissant des titres exécutoires, sauf circonstances particulières dont se prévaudrait son destinataire, le délai raisonnable ne saurait excéder un an à compter de la date à laquelle le titre, ou à défaut, le premier acte procédant de ce titre ou un acte de poursuite a été notifié au débiteur ou porté à sa connaissance.

7. Il résulte de l'instruction que l'association Service d'Aide aux Toxicomanes a reçu notification, le 26 janvier 2009, du titre de recettes émis le 22 janvier 2009 par le centre hospitalier Laënnec de Creil à hauteur de 107 989 euros, comme l'atteste le cachet apposé sur la copie conforme de l'avis des sommes à payer qui lui a été adressée par le comptable public. Le recto de ce document constituant l'ampliation prévue par les dispositions du 4° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, dont une copie est produite par l'association, ne renvoyait au verso qu'en ce qui concerne l'indication des modalités de paiement et non de contestation du titre de recettes. Il ne résulte pas non plus de l'instruction que le titre de recettes du 22 janvier 2009 aurait donné lieu à une décision expresse de rejet d'un recours gracieux assortie de l'indication des voies et délais de recours ou à l'envoi d'un acte de poursuites comportant cette indication. Dès lors, le délai de recours de deux mois prévu par les dispositions du 2° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales n'était pas opposable au Service d'Aide aux Toxicomanes, qui pouvait exercer un recours juridictionnel dans un délai raisonnable à compter de la date à laquelle le titre, ou à défaut, le premier acte procédant de ce titre avait été notifié au débiteur ou porté à sa connaissance. En l'espèce, à la suite de l'intervention de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de l'Oise, le centre hospitalier Laënnec de Creil avait informé l'association, par un courrier du 24 juin 2009 puis au cours d'une réunion du 28 septembre 2009, que l'allocation par l'agence régionale de l'hospitalisation de Picardie d'une nouvelle dotation de 100 000 euros permettrait tant la poursuite de leur coopération que l'apurement progressif de la dette antérieure et qu'il demandait au comptable public de suspendre le recouvrement du titre de recettes du 22 janvier 2009. Par ailleurs, une nouvelle convention avait été signée le 6 novembre 2009, prévoyant au profit de l'association la mise à disposition à temps partiel, par le centre hospitalier, d'un médecin et d'une infirmière. Ces éléments montraient, d'une part, que le centre hospitalier Laennec de Creil ne pouvait qu'être regardé comme ayant décidé d'abandonner le recouvrement du titre exécutoire en litige et, d'autre part, que la mise en demeure adressée par le groupe hospitalier public du sud de l'Oise au Service d'Aide aux Toxicomanes le 27 décembre 2012, reçue le 28 décembre suivant, devait en conséquence être regardée comme une nouvelle décision susceptible de contestation devant le juge administratif. Dans ces conditions, en saisissant le 28 février 2013 le tribunal administratif d'une demande tendant à l'annulation du titre de recettes en litige, l'association Service d'Aide aux Toxicomanes n'a pas exercé son recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. Le groupe hospitalier public du sud de l'Oise n'est donc pas fondé à soutenir que la demande de première instance du Service d'Aide aux Toxicomanes était irrecevable comme tardive.

S'agissant du défaut de production de l'intégralité de l'acte attaqué :

8. Il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal que le Service d'Aide aux Toxicomanes a demandé l'annulation du titre exécutoire du 22 janvier 2009 en produisant une copie du recto du document que l'association avait reçu de l'administration. Cette copie faisait apparaître l'ensemble des éléments constitutifs du titre contesté. En la produisant, l'association a donc satisfait à l'obligation prévue, à peine d'irrecevabilité, par les dispositions précitées de l'article R. 412-1 du code de justice administrative. Le groupe hospitalier public du sud de l'Oise n'est donc pas fondé à soutenir que la demande de première instance du Service d'Aide aux Toxicomanes était irrecevable pour ce motif.

S'agissant de l'absence de réclamation préalable :

9. Dès lors qu'aucune disposition de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, ni aucun principe général n'impose l'exercice d'un recours administratif préalable à la saisine du juge, le groupe hospitalier du sud de l'Oise ne peut en tout état de cause utilement se prévaloir de l'irrégularité du recours administratif du Service d'Aide aux Toxicomanes préalablement à la saisine du tribunal administratif d'Amiens pour soutenir que la demande de première instance de ladite association était irrecevable pour ce motif.

S'agissant du défaut d'habilitation du président de l'association à agir en justice :

10. Il ressort des pièces produites devant les premiers juges que le conseil d'administration de l'association Service d'Aide aux Toxicomanes a autorisé, par délibération du 28 février 2013, son président à agir dans l'instance devant le tribunal. Le groupe hospitalier public du sud de l'Oise n'est donc pas fondé à soutenir que la demande de première instance du Service d'Aide aux Toxicomanes était irrecevable pour ce motif.

En ce qui concerne la légalité du titre de recettes du 22 janvier 2019 d'un montant de 107 989 euros :

11. Lorsqu'une partie à un contrat administratif soumet au juge un litige relatif à l'exécution d'un contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat. Toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel.

12. En l'espèce, il résulte de l'instruction que par la convention du 10 janvier 2001 et son avenant signé le 16 avril 2002, le centre hospitalier Laënnec de Creil, aux droits duquel vient le groupe hospitalier public du sud de l'Oise et l'association Service d'Aide aux Toxicomanes ont convenu de la mise à disposition d'une infirmière et d'un praticien hospitalier par le centre hospitalier à l'association, sans qu'aucune stipulation conventionnelle n'ait prévu de remboursement par l'association des rémunérations servies par le centre hospitalier, l'article 4 de ladite convention relatif aux modalités financières relatives au temps de travail du médecin et de l'infirmière rappelant que l'Etat avait dégagé des crédits pour la prise en charge sanitaire des toxicomanes, affectés dans le budget de la dotation globale du centre hospitalier. Pour obtenir le remboursement par l'association des rémunérations servies à l'infirmière et au médecin mis à sa disposition, le groupe hospitalier du sud de l'Oise soutient, d'une part, que la convention avait un contenu illicite, d'autre part, que l'exonération de remboursement devait cesser dès lors que le centre hospitalier ne percevait plus les financements correspondants.

S'agissant de la mise à disposition de l'infirmière :

13. D'une part, aux termes de l'article 48 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, dans sa version applicable au litige : " La mise à disposition est la situation du fonctionnaire qui demeure dans son corps d'origine, est réputé occuper son emploi, continue à percevoir la rémunération correspondante, mais qui effectue son service dans une autre administration que la sienne. (...) ". Aux termes de l'article 49 de cette même loi : " La mise à disposition est également possible auprès d'organismes d'intérêt général et des organisations internationales intergouvernementales. / Un décret en Conseil d'Etat fixe les cas, les conditions et la durée de la mise à disposition lorsqu'elle intervient auprès de tels organismes ou organisations. "

14. D'autre part, aux termes de l'article 1er du décret n° 88-976 du 13 octobre 1988, dans sa version applicable au litige : " Les fonctionnaires des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée peuvent, avec leur accord, être mis à la disposition : (...) / 2° D'un organisme d'intérêt général, public ou privé ; (...) ". Aux termes de l'article 2 de ce même décret : " (...) / Lorsqu'elle intervient en application du 2° de l'article 1er, la mise à disposition est prononcée par la même autorité. Elle ne peut intervenir qu'après qu'une convention ait été passée entre l'établissement et l'organisme d'accueil. / Cette convention définit notamment le nombre de fonctionnaires mis à disposition, la nature et le niveau des activités qu'ils exercent, leurs conditions d'emploi et les modalités du contrôle et de l'évaluation desdites activités. Elle prévoit le remboursement par l'organisme d'accueil de la rémunération du ou des fonctionnaires intéressés. Elle peut toutefois prévoir l'exonération partielle ou totale, temporaire ou permanente, de ce remboursement. (...) ".

15. En l'espèce, eu égard à son caractère non lucratif et à sa vocation de lutte contre les addictions toxicologiques, l'association Service d'Aide aux Toxicomanes doit être regardée comme un organisme d'intérêt général au sens des dispositions précitées de l'article 49 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986. Il s'ensuit que, compte tenu des dispositions légales et règlementaires citées aux points 13 et 14 du présent arrêt, le groupe hospitalier du sud de l'Oise n'est pas fondé à se prévaloir du prétendu contenu illicite de la convention du 10 janvier 2001 et de son avenant signé le 16 avril 2002 mettant à disposition de ladite association une infirmière du centre hospitalier de Creil, pour s'exonérer de son exécution. Par ailleurs, en énonçant expressément à l'article 4 de la convention en litige que l'Etat a dégagé des crédits pour la prise en charge sanitaire des toxicomanes, affectés dans le budget de la dotation globale du centre hospitalier, les parties doivent être regardées comme ayant entendu prévoir l'exonération totale pour l'association du remboursement de la rémunération de l'infirmière ainsi mise à disposition. Dans ces conditions, à défaut de dénonciation de la convention ou de modification des stipulations relatives aux conditions financières de cette mise à disposition, le groupe hospitalier du sud de l'Oise ne pouvait émettre le titre de recettes contesté afin d'obtenir le remboursement des rémunérations servies à l'infirmière mise à disposition du Service d'Aide aux Toxicomanes.

S'agissant de la mise à disposition du praticien hospitalier :

16. Aux termes de l'article 4 du décret n° 84-131 du 24 février 1984, alors applicable au litige : " Sous réserve de leur accord, les praticiens hospitaliers, nommés dans un établissement, peuvent exercer leurs fonctions dans plusieurs établissements mentionnés à l'article 1er. Leur activité peut également être répartie entre un établissement hospitalier public et un établissement privé à but non lucratif participant à l'exécution du service public hospitalier ou qui y concourt. (...) ". Aux termes de l'article 46 bis du même texte : " Les praticiens hospitaliers en position d'activité dans un établissement public de santé peuvent, avec leur accord et en demeurant dans cette position statutaire, être mis à disposition d'une administration de l'Etat, d'un établissement public de l'Etat, d'un syndicat inter-hospitalier ou d'un groupement de coopération sanitaire dont est membre leur établissement d'affectation, dès lors que ce syndicat ou ce groupement est autorisé à exercer les missions d'un établissement de santé ou à gérer une pharmacie à usage intérieur ou d'un groupement d'intérêt public entrant dans l'un des cas prévus aux articles L. 6115-1 et L. 6134-1 du code de la santé publique. "

17. En l'espèce, il ne résulte de l'instruction aucun élément permettant de considérer que l'association Service d'Aide aux Toxicomanes aurait été membre d'un groupement de coopération sanitaire avec le centre hospitalier Laënnec de Creil. Cette association ne peut davantage être regardée comme un établissement privé à but non lucratif participant à l'exécution du service public hospitalier. Il s'ensuit que l'association Service d'Aide aux Toxicomanes n'était pas au nombre des organismes auprès desquels pouvait être mis à disposition un praticien hospitalier. Le groupe hospitalier du sud de l'Oise est donc fondé à soutenir que la mise à disposition prévue par la convention du 10 janvier 2001 d'un praticien hospitalier n'étant pas licite, cette convention doit être écartée dans cette mesure.

18. Toutefois, si une personne publique peut prétendre, sur un fondement quasi-contractuel, au remboursement de celles de ses dépenses qui l'ont indûment appauvrie et qui ont été source d'un enrichissement sans cause pour un tiers, c'est à la condition de démontrer que les versements dont elle demande le remboursement ont indûment enrichi ce dernier.

19. En l'espèce, si le groupe hospitalier du sud de l'Oise soutient que le titre exécutoire en litige est fondé sur l'enrichissement sans cause du Service d'Aide aux Toxicomanes et son appauvrissement corrélatif, il ne l'établit pas alors qu'il résulte de l'instruction que le temps de travail du personnel hospitalier mis à disposition de l'association était rémunéré par des crédits d'Etat affectés à la dotation globale de l'hôpital et qu'il n'est pas établi, ni même soutenu que ce personnel hospitalier n'aurait pas accompli la mission d'aide aux toxicomanes qui lui était dévolue. Il s'ensuit que le groupe hospitalier public du sud de l'Oise ne pouvait fonder le titre de recettes contesté sur l'enrichissement sans cause du Service d'Aide aux Toxicomanes. Dès lors, le groupe hospitalier du sud de l'Oise n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé le titre de recette du 22 janvier 2009 d'un montant de 107 989 euros émis à l'encontre de l'association Service d'Aide aux Toxicomanes.

20. Il résulte de tout ce qui précède que la requête du groupe hospitalier du sud de l'Oise dirigée contre le jugement n° 1300511 du 17 décembre 2015 du tribunal administratif d'Amiens doit être rejetée.

Sur l'appel incident de l'association Service d'Aide aux Toxicomanes :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande tendant à l'annulation du titre de recettes du 1er juillet 2019 d'un montant de 94 456,36 euros :

21. Il ressort des pièces du dossier que le titre de recettes daté du 1er juillet 2009, reçu par l'association le 15 juillet 2009, comportait l'indication des voies et délais de recours prévue par l'article R. 421-5 du code de justice administrative. Par ailleurs, le courrier du 27 juillet 2009 adressé par le Service d'Aide aux Toxicomanes au centre hospitalier Laënnec de Creil qui ne comportait pas de demande d'annulation du titre de recettes, mais une simple demande d'explications et qui a donné lieu à une rencontre entre les deux organismes, ne constituait pas un recours gracieux de nature à interrompre le délai de recours contentieux de deux mois prévu par les dispositions précitées de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales. Ainsi, les conclusions tendant à l'annulation de ce titre de recettes, enregistrées le 28 février 2013 au greffe du tribunal administratif d'Amiens, étaient tardives et, par suite, irrecevables.

22. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le groupe hospitalier public du sud de l'Oise, que le Service d'Aide aux Toxicomanes n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a déclaré irrecevable sa demande tendant à l'annulation du titre de recettes du 1er juillet 2009.

En ce qui concerne la recevabilité des conclusions tendant au paiement de la somme de 15 115,50 euros :

23. La demande de paiement d'une somme de 15 115,50 euros adressée par le Service d'Aide aux Toxicomanes au centre hospitalier Laënnec de Creil est relative à l'exécution d'une convention de mise à disposition signée le 6 novembre 2009. Elle soulève donc un litige distinct de celui, objet de l'appel principal, relatif à la créance en vue desquels les titres de recettes du 22 janvier 2009 et du 1er juillet 2009 ont été émis, dont l'objet était le remboursement des rémunérations versées à des personnels mis à disposition de l'association en vertu de conventions de mise à disposition signées les 10 janvier 2001 et 3 mai 2004. Il s'ensuit que les conclusions d'appel incident du Service d'Aide aux Toxicomanes tendant au paiement de cette somme sont irrecevables.

24. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions d'appel incident formées par l'association Service d'Aide aux Toxicomanes à l'encontre du jugement n° 1300511 du 17 décembre 2015 du tribunal administratif d'Amiens doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'association Service d'Aide aux Toxicomanes, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le groupe hospitalier du sud de l'Oise demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge du groupe hospitalier du sud de l'Oise une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l'association Service d'Aide aux Toxicomanes et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du groupe hospitalier public du sud de l'Oise est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel incident de l'association Service d'Aide aux Toxicomanes sont rejetées.

Article 3 : Le groupe hospitalier du sud de l'Oise versera à l'association Service d'Aide aux Toxicomanes une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au groupe hospitalier public du sud de l'Oise et à l'association Service d'Aide aux Toxicomanes.

2

N°20DA01058


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 20DA01058
Date de la décision : 08/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Fin des contrats - Nullité.

Procédure - Introduction de l'instance - Délais - Expiration des délais - Existence ou absence d'une forclusion.


Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: Mme Anne Khater
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : SELAS BRET BREMENS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-06-08;20da01058 ?
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