Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 3 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Aisne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé l'Algérie comme pays de destination en cas d'exécution d'office de cette obligation et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an et d'enjoindre au préfet de l'Aisne de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir.
Par un jugement n° 1903056 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 3 juillet et 30 septembre 2020, Mme C... épouse B..., représentée par Me A... E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 3 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Aisne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé l'Algérie comme pays de destination en cas d'exécution d'office de cette obligation et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aisne de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
----------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- l'accord conclu le 27 décembre 1968 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Anne Khater, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... épouse B..., ressortissante algérienne née le 30 juillet 1980, est entrée en France le 7 juillet 2017 munie d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. Le 12 avril 2019, elle a sollicité son admission au séjour afin d'accompagner son enfant malade, Jibril B... né le 3 avril 2013. Par un arrêté du 3 juillet 2019, le préfet de l'Aisne a, après avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration émis le 27 juin 2019, refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé l'Algérie comme pays de destination en cas d'exécution d'office de cette obligation et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Par un jugement n° 1903056 du 19 novembre 2019, dont Mme B... relève appel, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Aisne de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours.
2. En premier lieu, si Mme B... soutient que la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée, ce moyen, qui n'est assorti d'aucune précision nouvelle en appel, a été écarté à bon droit par le tribunal au point 4 du jugement attaqué, dont il y a lieu d'adopter les motifs sur ce point.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si leur présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour est délivrée aux parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, ou à l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité parentale sur ce mineur, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ".
4. Si ces dispositions, qui prévoient la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour au bénéfice des parents d'enfants dont l'état de santé répond aux conditions prévues par le 11° de l'article L. 313-11 du même code, ne sont pas applicables aux ressortissants algériens dont la situation est entièrement régie par les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que le préfet, dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire d'appréciation, délivre à ces ressortissants une autorisation provisoire de séjour pour l'accompagnement d'un enfant malade. Il s'ensuit que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le préfet de l'Aisne a commis une erreur de droit en considérant qu'aucune stipulation de l'accord franco-algérien ne prévoit l'admission au séjour d'un parent accompagnant un enfant mineur algérien nécessitant des soins en France, alors qu'il a examiné sa demande dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire d'appréciation. Ce moyen doit donc être écarté.
5. En troisième lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que, pour refuser l'admission au séjour de Mme B..., le préfet de l'Aisne s'est fondé notamment sur l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, en date du 17 juin 2019, selon lequel si l'état de santé de Jibril B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, l'intéressé peut y bénéficier d'un traitement approprié. A cet égard, il ressort des pièces du dossier et, en particulier, des différentes pièces médicales, ordonnances et certificats, produits devant les premiers juges que Jibril présente un syndrome de l'X fragile entrainant un trouble du développement intellectuel avec retard mental et des troubles du comportement de type autistique et que depuis son arrivée sur le territoire français, en juillet 2017, il bénéficie, pour ces troubles, d'une prise en charge psychologique d'ordre comportemental. Il ressort cependant des pièces produites par le préfet de l'Aisne que l'ensemble des spécialités médicales ou paramédicales que requiert la prise en charge pluridisciplinaire des troubles du développement et troubles du comportement de Jibril sont disponibles en Algérie. Le rapport psychologique produit pour la première fois en appel par Mme B..., en date du 10 octobre 2019 mais qui peut être regardé comme révélant une situation antérieure, se borne à indiquer que " malheureusement l'Algérie ne dispose pas de structure spécialisée pour ses enfants autistes ". Cette allégation peu circonstanciée ne permet donc pas de remettre en cause sérieusement l'appréciation portée par le préfet de l'Aisne sur la possibilité pour Jibril de bénéficier d'une prise en charge appropriée à son état de santé dans son pays d'origine. Il s'ensuit que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision par laquelle le préfet de l'Aisne lui a refusé l'admission au séjour pour accompagner son enfant malade, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
6. En quatrième lieu, pour les mêmes raisons que celles évoquées au point précédent, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
7. En cinquième lieu, si Mme B... soutient que l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ce moyen, qui n'est assorti d'aucune précision nouvelle en appel, a été écarté à bon droit par le tribunal au point 6 du jugement attaqué, dont il y a lieu d'adopter les motifs sur ce point.
8. En dernier lieu, en vertu du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français dont elle détermine la durée, en tenant compte de la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français.
9. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères que ces dispositions énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse, à sa seule lecture, en connaître les motifs.
10. En l'espèce, pour justifier qu'il soit fait interdiction à Mme B... de retourner sur le territoire français durant une année, le préfet de l'Aisne a indiqué que si l'intéressée n'avait pas fait l'objet de précédentes mesures d'éloignement et qu'elle ne représentait pas une menace pour l'ordre public, elle ne justifiait cependant ni d'une présence, ni de liens personnels et familiaux en France anciens et stables. Par suite, le préfet de l'Aisne, qui a examiné l'ensemble des critères prévus par les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a suffisamment motivé sa décision en fait et en droit.
11. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête en appel de Mme B..., que cette dernière n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent donc être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... épouse B..., au ministre de l'intérieur et à Me A... E....
Copie sera adressée au préfet de l'Aisne.
2
N°20DA00923