Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'Office public de l'habitat de la communauté urbaine de Cherbourg a demandé au tribunal administratif de Rouen de réformer l'ordonnance du 30 novembre 2015 par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Caen a taxé et liquidé le montant des frais et honoraires de l'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Caen, M. C... B..., pour mener l'expertise afférente à l'opération de construction de douze logements sociaux individuels construits sur la commune de Portbail pour son compte, à la somme de 47 036,12 euros toutes taxes comprises.
Par un jugement n° 1600231 du 27 février 2018, le tribunal administratif de Rouen a ramené les frais et honoraires alloués à M. B... à la somme de 19 000 euros toutes taxes comprises.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 18 avril 2018, le 24 mai 2018, le 8 mars 2019, le 17 septembre 2019, le 30 octobre 2019 et le 10 décembre 2019, M. B..., représenté par Me D... A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de confirmer l'ordonnance du 30 novembre 2015 par laquelle le président du tribunal administratif de Caen a taxé et liquidé à 47 036,12 euros toutes taxes comprises les frais et honoraires de l'expertise qui lui a été confiée ;
3°) de mettre à la charge de l'Office public de l'habitat de la communauté urbaine de Cherbourg la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Anne Khater, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public ;
- et les observations de Me D... A..., représentant M. C... B....
Considérant ce qui suit :
1. Par une ordonnance du 23 janvier 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Caen a désigné M. B... pour mener une expertise portant sur l'opération de construction de douze logements sociaux individuels sur la commune de Portbail (Manche) pour le compte de l'Office public de l'habitat de la communauté urbaine de Cherbourg, l'office reprochant au maître d'oeuvre des différences de surfaces habitables, au regard des pièces contractuelles du marché, sur l'ensemble des constructions. M. B... a déposé son rapport le 21 octobre 2015 et ses frais et honoraires ont été liquidés et taxés, par une ordonnance du 30 novembre 2015 du vice-président du tribunal administratif de Caen, à la somme de 47 036,12 euros toutes taxes comprises. Par un jugement n° 1600231 du 27 février 2018, le tribunal administratif de Rouen a ramené les frais et honoraires alloués à M. B... à la somme de 19 000 euros toutes taxes comprises. M. B... relève appel de ce jugement et demande la confirmation de l'ordonnance du 30 novembre 2015 par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Caen a liquidé et taxé à 47 036,12 euros toutes taxes comprises ses frais et honoraires.
Sur les fins de non-recevoir opposées au demandeur de première instance :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 761-5 du code de justice administrative : " Les parties, l'Etat lorsque les frais d'expertise sont avancés au titre de l'aide juridictionnelle ainsi que, le cas échéant, l'expert, peuvent contester l'ordonnance mentionnée à l'article R. 761-4 du code de justice administrative devant la juridiction à laquelle appartient l'auteur de l'ordonnance. "
3. L'Office public de l'habitat de la communauté urbaine de Cherbourg étant partie à l'instance introduite devant le juge des référés du tribunal administratif de Caen ayant conduit à la désignation de M. B... pour mener une expertise portant sur l'opération de construction en litige dont elle était le maître d'ouvrage, M. B... n'est pas fondé à soutenir, quels que fussent les conventions signées avec les assureurs des parties sur la prise en charge effective des frais d'expertise, que l'Office public de l'habitat de la communauté urbaine de Cherbourg n'avait pas intérêt à contester la liquidation et la taxation desdits frais et honoraires.
4. En second lieu, aux termes de l'article R. 421-13 du code de la construction et de l'habitation : " Le conseil d'administration se réunit au moins trois fois par an, sur convocation de son président. La convocation au conseil d'administration est de droit lorsqu'elle est demandée par le tiers au moins de ses membres. L'ordre du jour des délibérations doit être porté à la connaissance des membres du conseil au moins dix jours à l'avance, sauf urgence dûment motivée. "
5. L'Office public de l'habitat de la communauté urbaine de Cherbourg produit la délibération de son conseil d'administration du 11 octobre 2019 autorisant son directeur général à ester en justice en vue de la contestation de l'ordonnance du 30 novembre 2015 par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Caen a liquidé et taxé les frais et honoraires de M. B.... S'il ressort de cette délibération que les membres ont été convoqués le 3 octobre 2019, soit huit jours avant la séance, le délai de dix jours prévu à l'article R. 421-13 précité du code de la construction et de l'habitation concerne le délai dans lequel l'ordre du jour est porté à la connaissance des membres du conseil, et non la date de réception de la convocation en tant que telle. En tout état de cause, il n'est pas établi que le délai de convocation de huit jours aurait privé les membres d'une garantie, ni exercé une influence sur le sens de la décision prise. La fin de non-recevoir soulevée par M. B... à l'encontre du demandeur de première instance doit donc être écartée.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
6. Aux termes de l'article R. 621-11 du code de justice administrative : " Les experts et sapiteurs mentionnés à l'article R. 621-2 ont droit à des honoraires, sans préjudice du remboursement des frais et débours. / Chacun d'eux joint au rapport un état de ses vacations, frais et débours. / Dans les honoraires sont comprises toutes sommes allouées pour étude du dossier, frais de mise au net du rapport, dépôt du rapport et, d'une manière générale, tout travail personnellement fourni par l'expert ou le sapiteur et toute démarche faite par lui en vue de l'accomplissement de sa mission. / Le président de la juridiction, après consultation du président de la formation de jugement (...) fixe par ordonnance, conformément aux dispositions de l'article R. 761-4, les honoraires en tenant compte des difficultés des opérations, de l'importance, de l'utilité et de la nature du travail fourni par l'expert ou le sapiteur et des diligences mises en oeuvre pour respecter le délai mentionné à l'article R. 621-2. Il arrête sur justificatifs le montant des frais et débours qui seront remboursés à l'expert. (...) ".
En ce qui concerne les frais et débours :
7. Il résulte de l'instruction que M. B... a établi un relevé de frais et débours faisant état de frais de déplacement engagés à hauteur de 882 euros, de frais de secrétariat engagés à hauteur de 2 684,25 euros dont 2 231,25 euros de frais de dactylographie, 279,93 euros de frais de photocopies et 173,07 euros de frais de dossiers, ainsi que de frais d'affranchissement engagés à hauteur de 205,52 euros. M. B... n'a toutefois produit ni devant les premiers juges, ni devant le juge d'appel, de justificatif permettant d'arrêter le montant de ces frais et débours alors qu'il a assuré lui-même les taches de secrétariat. S'il a exposé des frais d'affranchissement pour l'envoi de seize lettres recommandées avec accusé de réception aux parties à l'expertise entre les mois de février et avril 2015, le coût d'un envoi postal en recommandé avec accusé de réception d'une lettre de 50 grammes à 100 grammes était de 7,35 euros en 2015, soit un montant de 117, 60 euros, qu'il y a lieu de retenir au titre des frais et débours.
En ce qui concerne les honoraires :
8. Il n'appartient pas au président de juridiction, taxant et liquidant les frais d'une expertise par décision administrative sur le fondement de l'article R. 621-11 du code de justice administrative, ni au juge saisi d'un recours contre cette ordonnance, de se prononcer sur la régularité des opérations de l'expertise. Dès lors, la circonstance, à la supposer établie, que les opérations d'expertise se seraient déroulées dans des conditions non conformes au principe du contradictoire ou la circonstance que le rapport d'expertise serait entaché de nullité en méconnaissance des dispositions de l'article R. 621-6 du code de justice administrative, sont sans incidence sur la fixation des honoraires de l'expert.
9. En revanche, il appartient au juge taxateur de fixer les honoraires en tenant compte des difficultés des opérations, de l'importance, de l'utilité et de la nature du travail fourni par l'expert et des diligences mises en oeuvre pour respecter le délai mentionné à l'article R. 621-2 du code de justice administrative.
10. M. B..., expert désigné, avait pour mission : "- d'examiner les douze logements sociaux individuels BBC construits sur la commune de Portbail pour le compte de Presqu'île Habitat et de réunir tous les documents utiles ; / - de vérifier les surfaces habitables de l'ensemble des logements et de dire si elles sont conformes aux pièces contractuelles du marché et aux documents du permis de construire ; / - de constater les non-conformités aux règles d'accessibilité aux personnes handicapées ; / - d'examiner les désordres, malfaçons ou défauts de conformité avec les règlementations, marchés, devis, normes ou D.T.U. qui seront signalés ; / - de vérifier les conditions de l'implantation des immeubles litigieux ainsi que les conditions de réalisation des plans d'exécution ; / - de vérifier si la surface habitable indiquée sur les plans a une incidence quelconque sur l'évaluation des marchés ; / - de rechercher la ou les cause(s) des désordres, malfaçons, ou défauts de conformité, et de dire en particulier s'ils proviennent d'une erreur de conception ou de surveillance, d'un défaut d'exécution ou de contrôle, ou d'autres causes ; / - de préciser en particulier si le maître d'oeuvre a exécuté sa mission de conseil et de direction, conformément aux usages et règles professionnelles ; / - de fournir tous éléments techniques et de fait susceptibles de permettre au tribunal de déterminer les responsabilités éventuellement encourues ; / - de déterminer les travaux nécessaires pour remédier aux malfaçons, défauts de conformité et désordres, d'en évaluer précisément le coût ; / - de déterminer le préjudice pouvant résulter de l'erreur de surface et des défauts de conformité, en particulier les troubles de jouissance et gênes entraînés par les défauts de réfection, ainsi que l'ensemble des préjudices subis. "
11. Il résulte de l'instruction que M. B... n'a procédé à la mesure et au calcul des seules surfaces utiles que de trois logements correspondant aux trois maisons-types du plan de construction, ne remplissant pas ainsi les deux premières missions qui lui ont été confiées. En outre, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, M. B... a conclu à l'absence de désordres, malfaçons ou non-conformités alors qu'il a relevé une réduction des surfaces habitables d'environ 1,5 % sur les trois logements visités. Il n'a pas davantage procédé à la vérification des conditions d'implantation des immeubles litigieux alors qu'il a outrepassé sa mission en se prononçant notamment sur l'opportunité du projet immobilier. La difficulté relative des opérations, l'utilité partielle du rapport d'expertise et la nature du travail fourni justifiaient donc de ramener les honoraires dus à M. B..., sur la base de quatre semaines de travail, à raison de trente-cinq heures par semaine, rémunérées à un taux horaire de 130 euros toutes taxes comprises, à la somme totale de 18 200 euros toutes taxes comprises.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Rouen a, par le jugement dont il est relevé appel, ramené les frais et honoraires qui lui ont été alloués à la somme de 19 000 euros toutes taxes comprises.
Sur les frais liés à l'instance :
13. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à l'Office public de l'habitat de la communauté urbaine de Cherbourg et au Garde des Sceaux, ministre de la justice.
Copie en sera adressée au président du tribunal administratif de Caen, à la SAS Lloyd's France, à la SAS Ingenierie IGC, à la SARL Maçonnerie Lavarde, à la société d'exploitation Joseph Lelong et Fils, à la SARL Michel Lepetit et à l'EURL Gautier Serge.
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N°18DA00795