La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/07/2019 | FRANCE | N°19DA00625

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 09 juillet 2019, 19DA00625


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2018 par lequel le préfet du Nord a ordonné son transfert aux autorités espagnoles

Par un jugement n° 1809271 du 13 novembre 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 mars 2019, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 13 novembre 2018 ;

2°) d'annuler l'ar

rêté du 11 octobre 2018 par lequel le préfet du Nord a ordonné son transfert aux autorités espagnoles;

3°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2018 par lequel le préfet du Nord a ordonné son transfert aux autorités espagnoles

Par un jugement n° 1809271 du 13 novembre 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 mars 2019, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 13 novembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2018 par lequel le préfet du Nord a ordonné son transfert aux autorités espagnoles;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

----------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Rodolphe Féral, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., ressortissant guinéen né le 10 octobre 1998, relève appel du jugement du 13 novembre 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tenant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Nord du 11 octobre 2018 ordonnant son transfert aux autorités espagnoles.

Sur la régularité de la procédure préalable :

2. Aux termes du paragraphe 4 de l'article 23 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 4. Une requête aux fins de reprise en charge est présentée à l'aide d'un formulaire type et comprend des éléments de preuve ou des indices tels que décrits dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, et/ou des éléments pertinents tirés des déclarations de la personne concernée, qui permettent aux autorités de l'État membre requis de vérifier s'il est responsable au regard des critères définis dans le présent règlement. / La Commission adopte, par voie d'actes d'exécution, des conditions uniformes pour l'établissement et la présentation des requêtes aux fins de reprise en charge. (...) ". Aux termes de l'article 25 du même règlement : " 1. L'État membre requis procède aux vérifications nécessaires et statue sur la requête aux fins de reprise en charge de la personne concernée aussi rapidement que possible et en tout état de cause dans un délai n'excédant pas un mois à compter de la date de réception de la requête. Lorsque la requête est fondée sur des données obtenues par le système Eurodac, ce délai est réduit à deux semaines. / 2. L'absence de réponse à l'expiration du délai d'un mois ou du délai de deux semaines mentionnés au paragraphe 1 équivaut à l'acceptation de la requête, et entraîne l'obligation de reprendre en charge la personne concernée, y compris l'obligation d'assurer une bonne organisation de son arrivée. ". Aux termes de l'article 15 du règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 : " 1. Les requêtes et les réponses, ainsi que toutes les correspondances écrites entre Etats membres visant à l'application du règlement (UE) n° 604/2013, sont, autant que possible, transmises via le réseau de communication électronique " DubliNet " établi au titre II du présent règlement / (...) / 2. Toute requête, réponse ou correspondance émanant d'un point d'accès national visé à l'article 19 est réputée authentique. / 3. L'accusé de réception émis par le système fait foi de la transmission et de la date et de l'heure de réception de la requête ou de la réponse ". Enfin, aux termes de l'article 19 du même règlement : " 1. Chaque État membre dispose d'un unique point d'accès national identifié. / 2. Les points d'accès nationaux sont responsables du traitement des données entrantes et de la transmission des données sortantes. / 3. Les points d'accès nationaux sont responsables de l'émission d'un accusé de réception pour toute transmission entrante. / (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que la demande de reprise en charge de M. A..., adressée par le préfet du Nord aux autorités espagnoles par l'intermédiaire du point d'accès national établi auprès du ministre de l'intérieur, a été transmise le 19 juin 2018 au moyen du réseau de communication " DubliNet ", qui permet des échanges d'informations fiables entre les autorités nationales qui traitent les demandes d'asile. Bien qu'émanant de ce point d'accès national et non directement du système " DubliNet ", l'accusé de réception versé aux débats par le préfet du Nord permet, en vertu de la présomption d'authenticité prévue par les dispositions précitées du 2 de l'article 15 du règlement (CE) n° 1560/2003 du 2 septembre 2003 en faveur de toute requête, réponse ou correspondance émanant d'un point d'accès national, d'attester que les autorités espagnoles ont été effectivement saisies de la demande de reprise en charge de M. A... sur leur territoire, dès lors que ce dernier n'avance aucun élément de nature à permettre de renverser cette présomption. En outre, les autorités espagnoles ayant gardé le silence sur cette demande, elles sont réputées avoir donné leur accord implicite au terme du délai de réponse prévu par le règlement, comme en témoigne le " constat d'accord implicite " établi par le point d'accès national et transmis le 12 septembre aux autorités espagnoles, sans que cette nouvelle transmission n'ait suscité de réaction de leur part. M. A... n'est, par suite, pas fondé à soutenir qu'il ne serait pas démontré que la demande de reprise en charge formée par le préfet du Nord aurait bien été envoyée aux autorités espagnoles et reçue par ces dernières, ni que l'expiration du délai imparti à ces autorités pour répondre à cette demande n'aurait pu faire naître une acceptation implicite de leur part.

Sur l'appréciation portée par l'autorité préfectorale sur la situation de l'intéressé :

4. M. A... fait état de ce qu'il est inscrit au Lycée professionnel à Wasquehal depuis le 21 septembre 2018 en seconde professionnelle Hygiène Propreté Stérilisation et qu'il est suivi médicalement pour une hépatite B. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. A... n'était présent que depuis quelques mois à la date de la décision de transfert, qu'il n'avait jamais séjourné auparavant sur le territoire national et qu'il ne dispose d'aucune attache privée ou familiale en France. Lors de son entretien individuel il a d'ailleurs indiqué vivre en concubinage avec une compatriote en Guinée et avoir un enfant avec cette dernière. Son inscription scolaire depuis moins d'un mois à la date de la décision ne saurait suffire à établir l'existence d'attaches personnelles en France. En outre, s'il fait état de son état de santé et produit des documents médicaux attestant qu'il est suivi pour une hépatite B, il n'établit pas que cette pathologie ne pourrait être prise en charge par des soins appropriés en Espagne où il est transféré. Par suite, eu égard notamment à la faible ancienneté du séjour de M. A..., la décision prescrivant son transfert en Espagne n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

5. Enfin, l'article 17 du règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 prévoit la possibilité pour chaque Etat membre de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans ce règlement ou de demander à un autre Etat membre de prendre l'intéressé en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable au titre des critères fixés par ce règlement.

6. Toutefois, aucune des seules circonstances énoncées au point 4 n'est de nature à révéler que, pour refuser de faire bénéficier M. A... de la clause discrétionnaire prévue par les dispositions, rappelées au point précédent, de l'article 17 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013, le préfet du Nord aurait commis une erreur manifeste d'appréciation.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., au ministre de l'intérieur et à Me B....

Copie en sera transmise au préfet du Nord.

2

N°19DA00625


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19DA00625
Date de la décision : 09/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Lavail Dellaporta
Rapporteur ?: M. Rodolphe Féral
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : CLAISSE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-07-09;19da00625 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award