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18/06/2019 | FRANCE | N°19DA00043

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 18 juin 2019, 19DA00043


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 5 janvier 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui a indiqué qu'à l'expiration de ce délai elle pourrait être reconduite d'office à destination du pays dont elle la nationalité ou de tout autre pays vers lequel elle serait légalement admissible.

Par un j

ugement n° 1802292 du 16 octobre 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 5 janvier 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui a indiqué qu'à l'expiration de ce délai elle pourrait être reconduite d'office à destination du pays dont elle la nationalité ou de tout autre pays vers lequel elle serait légalement admissible.

Par un jugement n° 1802292 du 16 octobre 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Mme D...A..., représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire valable un an et portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de cent euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime, à titre subsidiaire, de lui délivrer, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de cent euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 contre renonciation de la part de ce conseil au bénéfice de l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale de New York relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Xavier Fabre, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

Sur la régularité du jugement :

1. Si Mme A...soutient que le jugement de première instance serait entaché de contradictions entre les points 3 et 7, la contradiction de motifs affecte le bien-fondé d'une décision juridictionnelle et non sa régularité. Le moyen tiré de ce que le jugement serait irrégulier doit, par suite, être écarté.

Sur le refus de titre de séjour :

2. L'arrêté en litige comporte une analyse précise et circonstanciée de la situation personnelle de l'intéressée. Par suite, contrairement à ce que soutient MmeA..., la préfète de la Seine-Maritime a, avant de prendre une décision de refus de séjour à son encontre, procédé à un examen particulier de sa situation personnelle.

3. Aux termes des stipulations de l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les membres de la famille qui s'établissent en France sont mis en possession d'un certificat de résidence de même durée de validité que celui de la personne qu'ils rejoignent. Sans préjudice des dispositions de l'article 9, l'admission sur le territoire français en vue de l'établissement des membres de famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de validité d'au moins un an, présent en France depuis au moins un an sauf cas de force majeure, et l'octroi du certificat de résidence sont subordonnés à la délivrance de l'autorisation de regroupement familial par l'autorité française compétente (....) ". Aux termes de l'article 7 bis du même accord : " Les ressortissants algériens visés à l'article 7 peuvent obtenir un certificat de résidence de dix ans s'ils justifient d'une résidence ininterrompue en France de trois années. / Il est statué sur leur demande en tenant compte des moyens d'existence dont ils peuvent faire état, parmi lesquels les conditions de leur activité professionnelle et, le cas échéant, des justifications qu'ils peuvent invoquer à l'appui de leur demande. / Le certificat de résidence valable dix ans, renouvelé automatiquement, confère à son titulaire le droit d'exercer en France la profession de son choix, dans le respect des dispositions régissant l'exercice des professions réglementées. / Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : / (...) d) Aux membres de la famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence valable dix ans qui sont autorisés à résider en France au titre du regroupement familial ; / (...) ". Enfin, aux termes du titre II du protocole annexé au même accord : " Les membres de la famille s'entendent du conjoint d'un ressortissant algérien (...) ".

4. Le regroupement familial, lorsqu'il est autorisé au profit du conjoint d'un ressortissant algérien résidant en France, a pour objet de rendre possible la vie commune des époux, ainsi qu'il résulte notamment des stipulations de l'article 4 de l'accord franco-algérien. Par suite, le préfet peut rejeter la demande de certificat de résidence lorsque le demandeur est séparé de son conjoint depuis une date antérieure à la décision relative à la demande de certificat de résidence présenté par l'intéressé.

5. Il ressort des pièces du dossier que Mme A...entrée en France le 29 décembre 2016 munie de son passeport national en cours de validité revêtu d'un visa long séjour, valable du 29 novembre 2016 au 27 février 2017, portant la mention " regroupement familial ". Il est constant qu'à la date de l'arrêté attaqué, Mme A...était séparée de son conjoint, M.B.... Par suite la préfète de la Seine-Maritime a pu légalement, pour ce seul motif, refuser de faire droit à la demande présentée par l'intéressée.

6. A la date de l'arrêté attaqué, Mme A...n'est en France que depuis un an environ. Elle est séparée de son mari. Si certains membres de sa famille se trouvent en France, notamment deux tantes, l'une résidant à Paris et l'autre à Saint-Pierre-lès-Elbeuf, il n'est ni soutenu ni allégué qu'elle serait dépourvue de toute famille en Algérie, pays où elle a vécu jusqu'à l'âge de 30 ans. Elle a certes donné naissance à un garçon, prénommé Amir, né le 14 septembre 2017 à Saint-Aubin-lès-Elbeuf mais cet enfant, de nationalité algérienne, est en très bas âge et peut suivre sa mère en Algérie, les liens étant rompus entre la mère de l'enfant et son mari. Au vu de l'ensemble de ces éléments, la décision de refus de titre de séjour n'a pas porté une atteinte excessive au droit de Mme A...au respect de sa vie privée et familiale au regard des objectifs en vue desquels cette décision a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

7. La décision de refus de séjour, qui n'a ni pour objet ni pour effet de séparer Mme A... de son fils Amir ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3-1 de la convention de New York relative aux droits de l'enfant.

8. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressée, et notamment des violences conjugales alléguées, l'opportunité d'une mesure de régularisation. Il appartient seulement au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation portée sur la situation personnelle de l'intéressée.

9. Il ressort des pièces du dossier que Mme A...a quitté le domicile conjugal le 11 février 2017 et est allée habiter, dans un premier temps, chez une tante à Paris puis, dans un second temps, chez une autre tante à Saint-Pierre-lès-Elbeuf, après un passage dans un foyer à Paris. Le certificat médical rédigé le 11 février 2017 par un médecin du centre hospitalier de Charleville-Mézières se borne, pour l'essentiel, à reprendre les déclarations de Mme A...et à constater une " ecchymose temporale à droite sans signe de fracture ", sans en établir la cause. Si Mme A...a déposé, le 11 février 2017, une plainte contre son mari pour violences elle n'indique pas les suites qui ont été données à cette plainte. Ainsi, au vu des seules pièces produites au dossier, la réalité des violences conjugales dont Mme A...dit avoir été victime n'est pas établie. Par ailleurs, Mme A...est hébergée de façon précaire chez sa tante. Au vu des pièces du dossier elle est dépourvue de ressources propres et n'exerce pas d'activité professionnelle. Par voie de conséquence, et au regard également des éléments de fait rappelés au point 6, en n'exerçant pas son pouvoir de régularisation, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.

10. Si Mme A...soutient que la décision de refus de séjour est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, ce moyen doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux relevés aux points 6, 7 et 9.

11. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 10 que la décision de refus de séjour n'est pas entachée d'illégalité.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

12. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de séjour ne peut qu'être écarté.

13. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour le même motif que celui figurant au point 6.

14. La décision portant obligation de quitter le territoire français n'a ni pour objet ni pour effet de séparer l'enfant en très bas âge, prénommé Amir, de sa mère alors que, par ailleurs, les liens sont coupés entre Mme A...et son époux. Au vu des pièces du dossier, rien ne fait obstacle à ce que cet enfant soit scolarisé en Algérie, pays dont il a la nationalité. Les stipulations de l'article 3-1 de la convention de New York relative aux droits de l'enfant n'ont ainsi pas été méconnues.

15. Le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux figurant aux points 6, 9 et 14.

16. Il résulte de ce qui a été dit aux points 12 à 15 que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité.

Sur la décision fixant le pays de destination :

17. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

18. Il résulte de ce qui a été dit au point 17 que la décision fixant le pays de destination n'est pas entachée d'illégalité.

19. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Les conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice et 37 de la loi du 10 juillet 1991 à hauteur d'appel doivent être également rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...A...au ministre de l'intérieur et à MeC....

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 19DA00043
Date de la décision : 18/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Lavail Dellaporta
Rapporteur ?: M. Xavier Fabre
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-06-18;19da00043 ?
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