La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/06/2019 | FRANCE | N°18DA02044

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 04 juin 2019, 18DA02044


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C..., épouseD..., a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1800651 du 7 juin 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 octobre 2018,

Mme A...C..., épouseD..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C..., épouseD..., a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1800651 du 7 juin 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 octobre 2018, Mme A...C..., épouseD..., représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 7 juin 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2017 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Seine-Maritime, sous astreinte de cent euros par jour de retard, de lui délivrer, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, subsidiairement, de lui remettre, dans un délai de huit jours à compter de cet arrêt, une autorisation provisoire de séjour en vue du réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, ladite condamnation valant renonciation au versement de l'aide juridictionnelle, ou à titre subsidiaire en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

---------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- la convention franco-suisse du 4 juillet 1949 relative à la construction et à l'exploitation de l'aéroport de Bâle-Mulhouse, publiée par décret n° 53-537 du 13 mai 1953.

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Rodolphe Féral, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A...C..., ressortissante algérienne née le 7 janvier 1985, a épousé le 15 juin 2016 un ressortissant français. Mme C...est entrée en France le 13 août 2016 munie d'un passeport en cours de validité revêtu d'un visa de court séjour visiteur valable entre le 29 mars 2016 et le 24 septembre suivant, portant la mention " carte de séjour à solliciter dans les deux mois suivant l'arrivée ". Le 22 septembre 2016, elle a demandé la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint d'un ressortissant Français. Mme C...relève appel du jugement du 7 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 octobre 2017 par lequel la préfète de la Seine Maritime a refusé de lui délivrer le titre de séjour qu'elle avait demandé, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé l'Algérie comme pays de destination.

Sur la décision de refus de séjour :

2. D'une part, aux termes de l'article 6 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; / (...) ". Aux termes de l'article 9 de cet accord : " (...) les ressortissants algériens venant en France pour un séjour inférieur à trois mois doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa délivré par les autorités françaises. / (...) ". Aux termes de l'article 22 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 : " 1. Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties Contractantes sont tenus de se déclarer, dans les conditions fixées par chaque Partie Contractante, aux autorités compétentes de la Partie Contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque Partie Contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la Partie Contractante sur lequel ils pénètrent. / (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 2 la convention franco-suisse du 4 juillet 1949 relative à la construction et à l'exploitation de l'aéroport de Bâle-Mulhouse : " (...) 6. Pour faciliter l'exercice des contrôles de douane et de police, les installations et les bâtiments comprendront trois secteurs : / - un secteur affecté aux services français chargés du contrôle des voyageurs et marchandises en provenance ou à destination de la France ; / - un secteur affecté aux services suisses chargés du contrôle des voyageurs et marchandises en provenance ou à destination de la Suisse ; / - un secteur, englobant les pistes, affecté aux services généraux de l'aéroport et au trafic des voyageurs et marchandises... ". Aux termes de l'article 8 de la même convention, intitulé " Zone réservée au contrôle suisse dans l'aéroport " : " 1. Conformément à l'article 2, il sera créé dans l'enceinte de l'aéroport une zone nettement délimitée à l'intérieur de laquelle les Autorités suisses auront le droit de contrôler, à tous points de vue, les voyageurs et les marchandises provenant ou à destination de la Suisse. / 2. Pour l'exercice de ce contrôle, les Autorités suisses appliqueront leurs lois et règlements nationaux. / 3. Ce contrôle s'effectuera avant ou après le contrôle français suivant qu'il s'agit de voyageurs et de marchandises en provenance ou à destination de la Suisse... ". Il résulte de ces dispositions que l'aéroport de Bâle-Mulhouse est constitué d'un secteur français et d'un secteur suisse et que les autorités douanières suisses ne sont compétentes que pour contrôler les voyageurs en provenance ou à destination de la Suisse.

4. Il est constant que Mme C...au moment de son entrée sur le territoire français n'a pas souscrit la déclaration exigée par les dispositions citées au point 2 de l'article 22 de la convention de Schengen. Mme C...soutient cependant que son entrée sur le territoire n'était pas irrégulière en ce qu'elle n'était pas tenue à cette obligation de déclaration. Selon elle, l'article 22 de la Convention de Schengen ne pouvant lui être opposé dès lors qu'elle n'est jamais passée par le territoire suisse avant son arrivée en France, mais qu'elle est arrivée directement en France depuis l'Algérie. Il est cependant constant que son passeport est revêtu d'un tampon apposé par les autorités douanières suisses. Or, ainsi qu'il a été dit au point précédent, les autorités douanières suisses sont uniquement présentes dans le secteur suisse de l'aéroport et compétentes pour contrôler les voyageurs à destination de la Suisse. Si la requérante soutient qu'elle a effectué un vol direct vers la France Alger-Mulhouse, la copie de son billet d'avion indique cependant comme destination " Mulhouse Basel ". En outre, l'intéressée n'apporte aucun élément de nature à démontrer qu'elle n'aurait pas quitté le secteur suisse de l'aéroport à destination de la Suisse. Ainsi, et quand bien même l'aéroport de Bâle-Mulhouse est situé sur le territoire français, Mme C...doit être regardée comme étant entrée au sein de l'espace Schengen par la Suisse avant de se rendre en France. En conséquence, alors que Mme C... ne soutient pas qu'elle appartiendrait à une catégorie d'étrangers dispensé de souscrire la déclaration prévue par les stipulations 22 de la convention de Schengen, la préfète de la Seine-Maritime a pu se fonder sur les stipulations de l'article 6-2 de l'accord franco-algérien.

5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

6. Il ressort des pièces du dossier que Mme C...est entrée en France le 13 août 2016 à l'âge de 31 ans, pour y rejoindre son conjoint qu'elle avait épousé un an auparavant, et avait toujours vécu avant cette date en Algérie où elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales. Il ressort également des pièces du dossier que Mme C...était séparée de son mari à la date de la décision attaquée. Si l'intéressée se prévaut de la présence en France de membres de sa famille, elle n'établit pas l'intensité des liens qu'elle entretiendrait avec eux. Ainsi, l'intéressée ne justifie pas de liens familiaux ou amicaux stables, durables et intenses en France. Dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment eu égard à la durée de séjour de MmeC..., la décision attaquée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît ainsi pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée.

7. Il résulte de ce qui précède Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour serait illégale.

Sur l'obligation de quitter le territoire national :

8. Lorsqu'un refus de titre de séjour est assorti d'une obligation de quitter le territoire français, la motivation de cette dernière se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé, de motivation spécifique. En l'espèce, la décision portant refus de titre de séjour comporte l'énoncé des éléments de fait et de droit sur lesquels s'est fondé la préfète de la Seine-Maritime pour prendre sa décision. Elle mentionne en particulier les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par conséquent, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

9. Il résulte de ce qui a été dit au point 7 que Mme C...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire national.

10. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales devra être écarté. Pour les mêmes motifs, la préfète de la Seine-Maritime n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée.

11. Il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire national serait illégale.

Sur la décision fixant le pays de destination :

12. La décision fixant le pays de destination vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment son article L. 513-2, précise la nationalité de Mme C...et indique que celle-ci n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à ces dispositions ni aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Cette décision énonce ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

13. Mme C...soutient qu'étant séparée de son conjoint, elle risque de subir des traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Algérie par sa famille. Toutefois, elle ne produit au soutien de ses allégations aucun élément susceptible d'établir les risques personnels qu'elle encourrait en cas de retour en Algérie. Par suite, la décision fixant l'Algérie comme pays destination n'a méconnu ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

14. Il résulte de ce qui a été dit au point 11 que Mme C...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire national à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.

15. Il résulte de tout ce qui précède que MmeC..., épouseD..., n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de MmeC..., épouseD..., est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C..., épouseD..., au ministre de l'intérieur et à MeB....

Copie en sera transmise au préfet de la Seine-Maritime.

2

N°18DA02044


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA02044
Date de la décision : 04/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Lavail Dellaporta
Rapporteur ?: M. Rodolphe Féral
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : SELARL MADELINE-LEPRINCE-MAHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-06-04;18da02044 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award