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04/06/2019 | FRANCE | N°18DA00154

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 04 juin 2019, 18DA00154


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) GPN Sport a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, à titre principal, la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er mars 2009 au 31 janvier 2013 ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012 et, à titre subsidiaire, la décharge des pénalités pour manoeuvres frauduleuses mi

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) GPN Sport a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, à titre principal, la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er mars 2009 au 31 janvier 2013 ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012 et, à titre subsidiaire, la décharge des pénalités pour manoeuvres frauduleuses mises à sa charge sur le fondement du c. de l'article 1729 du code général des impôts.

Par un jugement n° 1502144 du 23 novembre 2017, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 janvier 2018, la SARL GPN Sport, représentée par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) à titre principal, de la décharger des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er mars 2009 au 31 janvier 2013 ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012.

3°) à titre subsidiaire, de la décharger seulement des pénalités pour manoeuvres frauduleuses mises à sa charge sur le fondement du c. de l'article 1729 du code général des impôts.

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Xavier Fabre, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,

- et les observations de Me A...représentant la SARL GPN Sport.

Considérant ce qui suit :

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

1. Aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis soit de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts, soit de la Commission nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 H du même code, soit de la commission départementale de conciliation prévue à l'article 667 du même code. / (...) ". Aux termes de l'article R. 60-3 du même livre : " L'avis ou la décision de la commission départementale ou nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ou du comité consultatif du crédit d'impôt pour dépenses de recherche doit être motivé. Il est notifié au contribuable par l'administration des impôts ".

2. A la demande de la société, le dossier de la société GPN Sport a été examiné par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires (CDITCA) Cette commission a rendu son avis lors de sa séance du 24 juin 2014 en considérant que les anomalies de la comptabilité de la société n'étaient pas telles que l'administration fiscale ait pu l'écarter purement et simplement mais que, cependant, les rehaussements de chiffre d'affaires étaient justifiés en raison de l'absence de justificatifs pour certains retours ayant donné lieu à annulation de ventes. La circonstance que l'avis rendu par la CDITCA, qui est suffisamment motivé, serait entaché d'une erreur de droit ou aurait procédé à une mauvaise analyse de l'affaire qui lui était soumise, n'est pas de nature à rendre cet avis irrégulier.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

3. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. / (...) ".

4. La société GPN Sport utilise, pour la gestion de son activité, un logiciel de caisse et un logiciel de comptabilité. S'il résulte de l'instruction que certaines bandes de caisse, dont le nombre n'est d'ailleurs pas précisé par l'administration fiscale, sont manquantes, il résulte cependant de la proposition de rectification du 3 septembre 2013 que la société a remis au service vérificateur des fichiers de caisse couvrant la période vérifiée et reprenant les informations suivantes : magasin ; modèle ; code article ; date et heure de transaction ; quantité positive (retour) ou négative (vente) ; le prix de vente TTC positif (vente) ou négatif (retour) ; n° de caisse. Par ailleurs, il résulte également de l'instruction que pour chaque période, ces fichiers reprennent globalement par article le chiffre d'affaires réalisé ainsi que la quantité vendue. Si ces informations, qui n'ont par ailleurs fait l'objet d'aucune remise en cause par le service, ne sont pas aussi exhaustives que celles figurant sur les tickets de caisse, les insuffisances de la comptabilité de la société, pour regrettables qu'elles soient, ne sont pas telles, ainsi que l'a d'ailleurs estimé la CDITCA, qu'elles soient constitutives de graves irrégularité de nature à justifier que la comptabilité de la société soit purement et simplement écartée alors que le seul point de désaccord entre la société et le service ne porte en réalité que sur la question des retours d'articles ayant, pour certains, donné lieu à des sorties d'espèces non assorties de justificatifs, ce qui représente environ 1 % seulement du chiffre d'affaires. Ainsi, et quand bien même l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission, la charge de la preuve incombe à l'administration.

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

5. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ". Aux termes de l'article 269 du même code : " 1. Le fait générateur de la taxe se produit : / a) Au moment où la livraison, l'acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectué ; / (...) ".

6. Il n'est pas contesté que les retours sous code divers ayant donné lieu à rappels de taxe sur la valeur ajoutée sont dépourvus de tout justificatif. Par suite, l'administration fiscale apporte la preuve, qui lui incombe, du bien-fondé de ces rappels.

En ce qui concerne les rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés :

7. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. / 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ".

8. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6, c'est à juste titre que l'administration fiscale a procédé aux majorations du résultat imposable de la société GPN Sport.

Sur les majorations :

9. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) / c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses (...) ".

10. Il résulte de l'instruction que les retours sous code " divers " ayant donné lieu à remboursement en espèces et pour lesquels la société n'a pas produit de justificatifs sont limités tant en nombre qu'en pourcentage de chiffre d'affaires. Par les seuls éléments produits, l'administration fiscale n'apporte pas la preuve que la société aurait fictivement créé des retours permettant des sorties de caisse d'espèces, notamment par des remboursements ne correspondant à aucune vente initiale. Le service n'apporte ainsi pas la preuve, qui lui incombe, de manoeuvres frauduleuses imputables à la société.

11. Si l'administration fiscale demande à la cour, à titre subsidiaire, de substituer la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses par celle de 40 % pour manquement délibéré, l'administration fiscale, par les mêmes éléments que ceux indiqués au point précédent, n'apporte pas la preuve qui lui incombe du caractère intentionnel des manquements imputables à la société qui se limitent, au vu des pièces du dossier, à l'absence de production de justificatifs pour des retours ayant donné lieu à remboursement en espèces.

12. Il résulte de ce qui a été dit aux points 10 et 11, d'une part que la société GPN Sport est fondée à demander la décharge de la majoration de 80 % mises à sa charge sur le fondement du c. de l'article 1729 du code général des impôts et, d'autre part, que la demande de substitution de la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses par celle de 40 % pour manquement délibéré doit être rejetée.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante pour l'essentiel, la somme de 1 500 euros à verser à la SARL GPN Sport sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La SARL GPN Sport est déchargée de la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses mise à sa charge sur le fondement du c. de l'article 1729 du code général des impôts.

Article 2 : L'Etat versera à la SARL GPN Sport la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le jugement n°1502144 du 23 novembre 2017 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL GPN Sport et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera transmise pour information à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

N°18DA00154 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA00154
Date de la décision : 04/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. Lavail Dellaporta
Rapporteur ?: M. Xavier Fabre
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : DEMAILLY

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-06-04;18da00154 ?
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