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30/04/2019 | FRANCE | N°18DA01933

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3, 30 avril 2019, 18DA01933


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...veuve B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 17 août 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a prononcé, pour une nouvelle période de quarante-cinq jours, son assignation à résidence.

Par un jugement n° 1803206 du 24 août 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a fait droit à cette demande, a enjoint à l'Etat de réexaminer la situation de Mme C...et a mis à la charge de l'Etat la somme de 600 euros

verser à son conseil au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...veuve B...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 17 août 2018 par lequel la préfète de la Seine-Maritime a prononcé, pour une nouvelle période de quarante-cinq jours, son assignation à résidence.

Par un jugement n° 1803206 du 24 août 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a fait droit à cette demande, a enjoint à l'Etat de réexaminer la situation de Mme C...et a mis à la charge de l'Etat la somme de 600 euros à verser à son conseil au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 septembre 2018, la préfète de la Seine-Maritime demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme C...devant le tribunal administratif de Rouen.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Julien Sorin, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. La préfète de la Seine-Maritime interjette appel du jugement du 24 août 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a, à la demande de MmeC..., ressortissante algérienne née le 8 juillet 1971, annulé son arrêté du 17 août 2018 prononçant, pour une nouvelle période de quarante-cinq jours, l'assignation à résidence de l'intéressée.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

2. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.-L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) 5° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...) 7° Ayant fait l'objet d'une décision d'assignation à résidence en application des 1° à 6° du présent article ou de placement en rétention administrative en application de l'article L. 551-1, n'a pas déféré à la mesure d'éloignement dont il fait l'objet ou, y ayant déféré, est revenu en France alors que cette mesure est toujours exécutoire (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme C...a fait l'objet, le 25 septembre 2017, d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Le 5 juillet 2018, elle a fait l'objet d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de renvoi, lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, et l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. La préfète de la Seine-Maritime a prononcé, le 17 août 2018, une nouvelle assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Mme C...soutient qu'à la date de cette décision, son éloignement ne demeurait pas une perspective raisonnable. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la préfète de la Seine-Maritime établit avoir, le jour de la première assignation à résidence, contacté la direction centrale de la police de l'air et des frontières pour demander un vol. Il ressort de " l'accusé de réception de la demande de routing d'éloignement ", produite par la préfète en première instance, que, à défaut de vol disponible, l'éloignement de Mme C...ne pouvait avoir lieu avant le 9 août 2018. La préfète a, au demeurant, réitéré sa demande de " routing " le 21 août 2018, à la suite de la décision en litige. Dans ces conditions, il est établi qu'à la date de la décision en litige, l'éloignement de Mme C... demeurait une perspective raisonnable. Dès lors, la préfète de la Seine-Maritime a pu, sans méconnaître les dispositions citées au point 2 du 5° du I de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, décider l'assignation à résidence de l'intéressée. Dès lors, la préfète de la Seine-Maritime est fondée à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé, pour ce motif, l'arrêté du 17 août 2018 prononçant l'assignation à résidence de Mme C...pour une nouvelle durée de quarante-cinq jours.

4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme C...à l'encontre de l'arrêté attaqué devant le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen.

Sur la légalité de l'arrêté du 17 août 2018 :

5. Aux termes de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision d'assignation à résidence est motivée (...) ".

6. La décision ordonnant l'assignation à résidence de Mme C... indique les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Elle vise notamment les dispositions du 7° de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et mentionne que l'intéressée a fait l'objet, par arrêté du 5 juillet 2018, d'une obligation de quitter le territoire français sans délai assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans, à laquelle elle n'a pas déféré, et d'une première assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours, qu'elle a remis son passeport, et justifie d'un domicile. La circonstance que la préfète de la Seine-Maritime n'ait pas indiqué les raisons pour lesquelles elle a fixé à quarante-cinq jours la durée de cette assignation ou choisi les modalités de cette assignation n'est pas de nature à regarder l'arrêté litigieux comme insuffisamment motivé. L'ensemble des éléments précités permettaient d'ailleurs à Mme C...de pouvoir contester utilement cette décision. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être écarté.

7. Il ne résulte ni de la motivation de l'arrêté en litige, ni d'aucune autre pièce du dossier, que la préfète de la Seine-Maritime n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de Mme C...avant de prendre la décision contestée.

8. Ainsi qu'il a été dit au point 3, Mme C...a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai et d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans et son éloignement demeure une perspective raisonnable. La circonstance qu'elle dispose de garanties de représentation effectives est sans incidence sur le bien-fondé de la décision d'assignation à résidence, dans la mesure où l'absence de garanties ne constitue pas une des conditions propres à justifier une telle mesure en vertu des dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En l'absence de précision sur l'incompatibilité de son état psychologique avec les modalités de son assignation à résidence sur le territoire des communes de la circonscription de sécurité publique de Rouen, où elle réside, qui l'obligent à se présenter deux fois par semaine dans les locaux de la police aux frontières de Rouen, celles-ci ne constituent pas une mesure disproportionnée par rapport au but poursuivi par cette décision qui tend à l'exécution de la décision d'éloignement. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle doit, dès lors, être écarté. Enfin, et en tout état de cause, au regard des critères fixés par les dispositions précitées de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatifs à l'assignation à résidence, Mme C...ne peut utilement soutenir que la décision en litige méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en faisant valoir qu'elle a été mariée à un ressortissant français, que le décès de celui-ci a eu un fort impact psychologique sur elle, qu'elle a tissé des liens sur le territoire français, et qu'elle n'a pas d'enfant en Algérie.

9. Il résulte de tout ce qui précède qu'aucun des moyens soulevés par Mme C...devant le tribunal administratif de Rouen n'est fondé. Par voie de conséquence, la préfète de la Seine-Maritime est fondée à demander l'annulation du jugement du 24 août 2018 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen ainsi que le rejet de la demande de première instance de MmeC....

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1803206 du 24 août 2018 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande de première instance de Mme C...est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme A... C... veuveB....

Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

4

N°18DA01933


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA01933
Date de la décision : 30/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Courault
Rapporteur ?: M. Julien Sorin
Rapporteur public ?: Mme Leguin
Avocat(s) : CABINET AMELE MANSOURI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/05/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-04-30;18da01933 ?
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