Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 14 septembre 2017 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui a indiqué qu'à l'expiration de ce délai elle pourrait être reconduite à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre pays pour lequel elle établit être légalement admissible.
Par un jugement n° 1802251 du 7 juin 2018, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 septembre 2018, Mme B...E...épouseA..., représentée par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) d'enjoindre au préfet du Nord, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande de certificat de résidence, de prendre, à l'issue de ce réexamen, une nouvelle décision dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et, dans l'attente de ce réexamen de lui délivrer un récépissé de demande de certificat de résidence ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me D...sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 contre renonciation de la part de ce conseil au bénéfice de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- la convention d'application de l'accord de Schengen ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Xavier Fabre, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
Sur les conclusions à fin d'annulation :
1. D'une part, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; / (...) ". Aux termes de l'article 9 de cet accord : " (...) les ressortissants algériens venant en France pour un séjour inférieur à trois mois doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa délivré par les autorités françaises. / (...) ". Aux termes de l'article 22 de la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 : " 1. Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties Contractantes sont tenus de se déclarer, dans les conditions fixées par chaque Partie Contractante, aux autorités compétentes de la Partie Contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque Partie Contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la Partie Contractante sur lequel ils pénètrent. / (...) ".
2. D'autre part, en vertu de l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile une décision de remise peut être prise sur le fondement de son article L. 531-1 à l'encontre de l'étranger qui, en provenance du territoire d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, est entré sur le territoire métropolitain sans souscrire, au moment de l'entrée sur ce territoire, la déclaration obligatoire prévue par l'article 22 de la même convention, alors qu'il était astreint à cette formalité. Aux termes de l'article R. 212-6 du même code, inséré au sein d'une section 3 intitulé " Dispense de produire la déclaration d'entrée sur le territoire français mentionnée à l'article L. 531-2 ", figurant au chapitre II " Dispense " du Titre Ier relatif aux conditions d'admission : " L'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse n'est pas astreint à la déclaration d'entrée sur le territoire français : / 1° S'il n'est pas assujetti à l'obligation du visa pour entrer en France en vue d'un séjour d'une durée inférieure ou égale à trois mois ; / 2° Ou s'il est titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, d'une durée supérieure ou égale à un an, qui a été délivré par un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ; toutefois, la déclaration doit être souscrite par les résidents d'Etats tiers qui sont désignés par arrêté du ministre chargé de l'immigration ". Aux termes de l'article R. 211-32 de ce code figurant dans une sous-section 5 intitulée " Déclaration d'entrée sur le territoire mentionnée à l'article L. 531-2 ", au sein d'une section 4 " Autres documents " du Chapitre Ier " Documents exigés " du Titre Ier " Conditions d'admission " : " La déclaration obligatoire mentionnée à l'article L. 531-2 est, sous réserve des dispositions de l'article R. 212-6, souscrite à l'entrée sur le territoire métropolitain par l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne et qui est en provenance directe d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 ".
3. Mme B...E..., née en octobre 1986 en Algérie, de nationalité algérienne, s'est mariée le 7 novembre 2015 en Algérie avec M. C...A..., de nationalité française, domicilié.... Après avoir atterri en Belgique, à l'aéroport de Charleroi, Mme A...est entrée en France le 13 janvier 2017 munie de son passeport revêtu d'un visa " familleF... " délivré le 6 septembre 2016 par le consulat général de France à Alger et valable pour un séjour d'une durée maximale de 90 jours dans l'Espace Schengen entre le 6 septembre 2016 et le 4 mars 2017. Elle a sollicité, le 13 juin 2017, en préfecture du Nord, la délivrance d'un certificat de résidence en qualité de " conjoint de français ".
4. Le préfet du Nord, pour refuser la demande de titre de séjour par l'arrêté attaqué, s'est fondé sur les circonstances, d'une part, que MmeA..., titulaire certes d'un visa valide délivré par les autorités françaises en Algérie, mais provenant d'un autre Etat membre de l'espace Schengen, n'avait pas souscrit la déclaration d'entrée prévue tant par la convention de Schengen que par les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que, d'autre part, elle n'entrait pas dans le cadre d'une des exceptions à cette obligation de souscription d'une déclaration d'entrée prévues par l'article R. 212-6 de ce même code.
5. Mme A...ne conteste pas ne pas avoir souscrit cette déclaration d'entrée mais soutient qu'elle en était dispensée en se prévalant des dispositions de l'article R. 212-1 du même code.
6. Aux termes des dispositions de l'article R. 212-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, figurant au sein d'une section 1 intitulée " Dispense de produire l'ensemble des documents mentionnés au 2° de l'article L. 211-1 ", du chapitre II intitulé " dispense " lui-même inséré dans un Titre Ier relatif aux conditions d'admission : " Sont dispensés de présenter les documents prévus à l'article R. 211-3 et aux sections 3 et 4 du chapitre Ier du présent titre : / (...) 4° L'étranger titulaire d'un visa portant la mention " famille F...", délivré aux conjoints de ressortissants français et aux membres de leur famille définis au 2° de l'article L. 314-11 ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 211-1 du même code : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : / (...) / 2° Sous réserve des conventions internationales, du justificatif d'hébergement prévu à l'article L. 211-3, s'il est requis, et des autres documents prévus par décret en Conseil d'Etat relatifs, d'une part, à l'objet et aux conditions de son séjour et, d'autre part, s'il y a lieu, à ses moyens d'existence, à la prise en charge par un opérateur d'assurance agréé des dépenses médicales et hospitalières, y compris d'aide sociale, résultant de soins qu'il pourrait engager en France, ainsi qu'aux garanties de son rapatriement ; / (...) ".
7. Il résulte des termes mêmes des dispositions citées au point 2 ci-dessus de l'article R. 211-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que les dérogations à l'obligation de souscription d'une déclaration d'entrée prévues par l'article R. 212-6 de ce code ne sont pas exclusives d'autres dérogations fixées réglementairement. Or, par application combinée des dispositions des articles R. 212-1 et R. 211-32 de ce code, l'étranger titulaire d'un visa portant la mention " famille de français " est dispensé de présenter une déclaration d'entrée. Dans ces conditions, MmeA..., titulaire d'un tel visa, était dispensée de l'obligation de justifier d'une déclaration d'entrée sur le territoire français peu important à cet égard le fait que les dispositions de l'article R. 212-1 du même code figurent au sein d'une section 1 intitulée " Dispense de produire l'ensemble des documents mentionnés au 2° de l'article L. 211-1 " et que le 2° de l'article L. 211-1 du même code ne concerne pas les déclarations d'entrée sur le territoire français, dès lors que les titres d'une section d'un code sont dépourvus de toute portée juridique. Il suit de là que, dès lors que Mme A...disposait alors d'un visa valide en qualité de conjoint de ressortissant français, délivré par les autorités françaises en Algérie, le préfet du Nord n'a pu légalement lui opposer qu'elle ne serait pas entrée régulièrement en France.
8. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande d'annulation de la décision de refus de séjour et, par voie de conséquence, des autres décisions figurant à cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Compte tenu du motif d'annulation retenu, et alors qu'il n'est pas contesté que Mme A...remplit les autres conditions pour l'obtention du titre sollicité à titre principal, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Nord ou à tout autre préfet qui serait devenu compétent pour connaître de la demande de titre de séjour de l'intéressée, de délivrer à Mme A...un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
10. Il y a lieu, dans les circonstances de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante à l'instance, la somme de 1 000 euros à verser à Me D...sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve de renonciation de la part de ce conseil au bénéfice de la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 7 juin 2018 du tribunal administratif de Lille est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 14 septembre 2017 du préfet du Nord pris à l'encontre de Mme A...est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet du Nord ou à tout autre préfet désormais compétent de délivrer à MmeA..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ".
Article 4 : L'Etat versera à Me D...la somme de 1 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve de renonciation de sa part au bénéfice de la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A..., au ministre de l'intérieur, au préfet du Nord et à MeD....
N° 18DA01973 2