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21/03/2019 | FRANCE | N°18DA01955

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 21 mars 2019, 18DA01955


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 juillet 2018 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a enjoint de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1806984 du 14 août 2018 le magistrat d

signé par le président du tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté préfectoral....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 30 juillet 2018 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a enjoint de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1806984 du 14 août 2018 le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté préfectoral.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 24 septembre 2018 et le 11 janvier 2019, le préfet du Pas-de-Calais demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la requête de M. A...;

3°) de rejeter les conclusions présentées par M. A...tendant à condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 1000 euros en contrepartie de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 79-597 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président-rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

Sur l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :

1. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'application des règles relatives aux commissions ou désignation d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président. (...) " et aux termes de l'article 62 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " L'admission provisoire est demandée sans forme au président du bureau ou de la section ou au président de la juridiction saisie. (...) L'admission provisoire peut être prononcée d'office si l'intéressé a formé une demande d'aide juridictionnelle sur laquelle il n'a pas encore été définitivement statué ".

2. M. A...a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 février 2019 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai. Par suite, ses conclusions tendant à ce qu'il soit admis à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. M. B...A..., ressortissant tunisien né le 20 mars 1988, serait selon ses déclarations entré en France en septembre 2017. Par un arrêté du 30 juillet 2018, le préfet du Pas-de-Calais lui a enjoint de quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'a assigné à résidence. Le préfet du Pas-de-Calais relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté.

4. Il ressort des pièces du dossier que par un arrêté du 30 juillet 2018, M. A..., est entré irrégulièrement en France en septembre 2017 et qu'il s'y est maintenu. Toutefois, M. A...a déposé le 30 avril 2018, avec une ressortissante française, un dossier auprès de l'officier d'état civil de la mairie de Saint Omer, en vue de la célébration de leur mariage. En application des dispositions de l'article 175-2 du code civil, ce projet de mariage a été porté à la connaissance du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Saint Omer, qui a décidé, le 23 juillet 2018, qu'il serait sursis à la célébration du mariage jusqu'au 10 décembre 2018. Ce sursis a ensuite été prolongé jusqu'au 23 août 2018. Une enquête préliminaire a été confiée aux services de police pour les faits d'organisation de mariage à visée migratoire, pour que les futurs époux soient entendus sur leur projet. M. A...a été entendu le 30 juillet 2018 à 11 h 18, sur le fondement des articles 75 et suivants du code de procédure pénale, par un agent de police judiciaire, dans le cadre de cette enquête préliminaire. A la suite de cette audition concernant son projet de mariage, M. A...a été placé en retenue administrative et a de nouveau été entendu, le même jour, à 14 h 15 sur sa situation administrative. Il s'est vu notifier, encore le même jour, à 16 h 15, une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire accompagnée d'une décision fixant le pays de destination, d'une décision lui faisant interdiction de revenir sur le territoire français avant l'expiration d'un délai d'un an ainsi qu'une assignation à résidence. Il a aussi, le 6 août 2018 été informé de la date de son vol à destination de son pays d'origine. Ces circonstances particulières, antérieures à la fin du sursis de suspension de mariage, révèlent la précipitation avec laquelle l'administration a agi, une fois informée de ce projet de mariage. Par suite, l'obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et interdisant le retour sur ce même territoire pendant un délai d'un an, ainsi que l'assignation à résidence prononcées par le préfet du Pas-de-Calais doivent être regardées comme ayant eu pour motif déterminant de prévenir le mariage de M. A.... L'arrêté du 30 juillet 2018 est, dès lors, entaché de détournement de pouvoir.

5. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Pas-de-Calais n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du 30 juillet 2018 obligeant M. A... à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et l'interdisant de retourner sur le territoire français, ainsi que, par voie de conséquence l'arrêté du même jour ordonnant son assignation à résidence.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

6. L'exécution du présent arrêt n'appelle pas d'autre mesure d'exécution que celle qui a été prescrite par le tribunal administratif de Lille. Les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. A...ne peuvent, dès lors, être accueillies.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. M. A...a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Herdewyn, son avocate, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 700 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A...tendant au bénéfice de l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle.

Article 2 : La requête du préfet du Pas-de-Calais est rejetée.

Article 3 : L'Etat versera à Me Herdewyn, avocate de M.A..., une somme de 700 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette avocate renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. B...A...et à Me C...Herdewyn.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Pas-de-Calais.

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N°18DA01955

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA01955
Date de la décision : 21/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : HERDEWYN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-03-21;18da01955 ?
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