Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...D...et Mme B...E...épouse D...ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler, pour excès de pouvoir, les arrêtés du 22 janvier 2018 par lesquels le préfet de l'Oise leur a refusé à chacun la délivrance d'un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être reconduits d'office.
Par un jugement nos 1800521, 1800522 du 2 mai 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2018, M. et MmeD..., représentés par Me C..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces arrêtés ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, de leur délivrer un titre de séjour, à défaut, de procéder à un nouvel examen de leur situation après les avoir mis en possession d'une autorisation provisoire de séjour.
Ils soutiennent que :
- la décision refusant de délivrer un titre de séjour à M. D...a été prise en méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision refusant de délivrer un titre de séjour à Mme D...méconnaît, quant à elle, les dispositions du 7° de cet article et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- pour refuser de faire bénéficier Mme D...de l'admission exceptionnelle au séjour prévue à l'article L. 313-14 du même code, le préfet de l'Oise a méconnu cette disposition et commis une erreur manifeste d'appréciation ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 novembre 2018, le préfet de l'Oise conclut au rejet de la requête.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et MmeD..., ressortissants kosovars nés respectivement le 7 septembre 1974 et le 12 mai 1980, seraient entrés sur le territoire français, selon leurs déclarations, le 16 septembre 2015. Ils ont chacun formé une demande d'asile qui a été rejetée par des décisions du 29 juillet 2016 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides confirmées le 6 avril 2017 par la Cour nationale du droit d'asile. M. D...a alors sollicité la délivrance d'un titre de séjour en faisant état de difficultés de santé. Mme D...a également sollicité son admission au séjour au titre de la vie privée et familiale. Toutefois, par deux arrêtés du 22 janvier 2018, le préfet de l'Oise a refusé de faire droit à ces demandes, a assorti ces refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel les intéressés pourraient être reconduits d'office. M. et Mme D...relèvent appel du jugement du 2 mai 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de ces arrêtés.
Sur la légalité de l'arrêté pris à l'égard de M.D... :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de l'Oise s'est prononcé sur la demande d'admission au séjour pour raison médicale que lui avait présentée M. D...au vu notamment d'un avis émis le 30 septembre 2017 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, en vertu duquel, si l'état de santé de l'intéressé rend nécessaire une prise en charge médicale et si le défaut d'une telle prise en charge peut entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dont ce dernier dispose. Pour refuser de délivrer à M. D...le titre de séjour qu'il sollicitait, le préfet de l'Oise s'est approprié les motifs de cet avis, après avoir fait lui-même le constat, au terme de l'examen auquel il s'est livré de la demande de l'intéressé, que ce dernier n'avait produit aucun élément de nature à les remettre en cause.
4. Si, en cause d'appel, M. D...se réfère à un rapport publié le 6 mars 2017 par l'association suisse d'aide aux réfugiés (OSAR), il ne produit toutefois pas ce document, mais se borne à en citer quelques extraits, selon lesquels les établissements de soins présents au Kosovo, y compris dans la capitale Pristina, seraient en nombre insuffisant, mettraient en oeuvre des technologies désuètes et manqueraient de personnels qualifiés, de matériels, ainsi que de médicaments, la qualité des prestations de soins s'en trouvant amoindrie. Un autre extrait de ce document préciserait que des sommes non négligeables demeureraient à la charge des patients, ce qui constituerait un obstacle à l'accès aux soins pour de nombreuses personnes, en dépit de l'existence d'un système d'assurance maladie, qui, de surcroît, ne prendrait pas en charge certaines pathologies. Toutefois, ces seules considérations d'ordre général concernant la situation prévalant au Kosovo, qui n'ont trait qu'à certains aspects de celle-ci et qui sont dépourvues de toute précision circonstanciée se rapportant à la situation particulière de M.D..., ainsi qu'aux pathologies dont celui-ci est atteint, ne sont pas, à elles seules, de nature à remettre en cause l'appréciation à laquelle s'est livrée le préfet de l'Oise, au vu notamment de l'avis précité, selon laquelle M. D... peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé qui y sont disponibles. Il suit de là que la décision de refus de séjour n'a pas été prise en méconnaissance des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. D...n'est ainsi pas fondé à en demander l'annulation, ni, par voie de conséquence, celle des décisions du même jour lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de cette mesure.
Sur la légalité de l'arrêté pris à l'égard de MmeD... :
5. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger (...) dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. (...) ".
6. Mme D...fait état de la présence auprès d'elle de son époux, qui bénéficie d'une prise en charge médicale en France, ainsi que de celle de leurs deux enfants, respectivement nés en 2001 et en 2010 et qui sont scolarisés en première année préparatoire au certificat d'aptitude professionnelle d'installateur thermique et en première année de cours élémentaire. Il est toutefois constant que Mme D...et son époux, dont, comme il a été dit au point 4, le maintien en France ne se justifie pas pour raison médicale, ont tous deux fait l'objet, le même jour, d'un arrêté du préfet de l'Oise leur refusant la délivrance d'un titre de séjour et leur faisant obligation de quitter le territoire français. En outre, Mme D...n'établit, ni d'ailleurs n'allègue, qu'elle serait dépourvue d'attaches familiales proches dans son pays d'origine, où elle a habituellement vécu durant trente-cinq ans, en tenant pour établie la date de son entrée en France. Enfin, Mme D...n'a fait état auprès de l'autorité préfectorale d'aucune perspective d'insertion professionnelle sur le territoire français. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que des circonstances particulières feraient obstacle à ce que Mme D...reconstitue, avec son époux et leurs enfants, leur vie familiale dans leur pays d'origine, ni, en particulier, à ce que leurs enfants y poursuivent leur scolarité. Dans ces circonstances et eu égard notamment aux conditions du séjour de MmeD..., la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Elle n'a, dès lors, été prise en méconnaissance ni des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni des dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. Enfin, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que Mme D...a demandé son admission au séjour sur le seul fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il ne ressort pas des motifs de l'arrêté pris à son égard que le préfet de l'Oise aurait examiné d'office, ce qu'il n'était pas tenu de faire, si elle pouvait être admise à titre exceptionnel au séjour, elle ne peut utilement soutenir que le refus de séjour qui lui a été opposé aurait été pris en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du même code. Elle ne peut plus utilement invoquer le moyen tiré de ce que, pour refuser de la faire bénéficier de cette admission exceptionnelle au séjour, le préfet de l'Oise aurait commis une erreur manifeste d'appréciation.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 2 mai 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs demandes. Leurs conclusions à fin d'injonction assortie d'astreinte doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D..., à Mme B...E...épouse D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet de l'Oise.
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