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22/01/2019 | FRANCE | N°17DA00052

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 22 janvier 2019, 17DA00052


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Garage A...a demandé au tribunal administratif de Lille la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 et des pénalités afférentes.

Par un jugement n° 1304694 du 2 novembre 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 janvier 2017 et

9 mai 2018, ce mémoire n'ayant pas été communiqué, la SARL GarageA..., représentée par Me B...D..., de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Garage A...a demandé au tribunal administratif de Lille la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 et des pénalités afférentes.

Par un jugement n° 1304694 du 2 novembre 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 janvier 2017 et 9 mai 2018, ce mémoire n'ayant pas été communiqué, la SARL GarageA..., représentée par Me B...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de la décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 et des pénalités afférentes ;

3°) en tout état de cause, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Xavier Fabre, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., représentant la SARL GarageA....

Considérant ce qui suit :

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

1. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) ".

2. Par une proposition de rectification du 30 août 2012, l'administration fiscale a indiqué qu'elle remettait en cause, sur le fondement du 1. de l'article 39 du code général des impôts, des factures, qu'elle vise précisément, émises par l'EURL Philippe A...et dont la société appelante, à savoir la société SARL GarageA..., s'est acquittée. Elle précise que le gérant de la société n'a apporté aucune précision sur la nature exacte des prestations présentées comme effectuées en exécution d'une convention de prestations de service signée entre ces deux sociétés le 1er septembre 2010, que ces charges ne pouvaient donc être regardées comme appuyées de justifications suffisantes et qu'elles ne pouvaient ainsi être admises en déduction. Par ces éléments, qui permettaient à la société de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation concernant la remise en cause de la déduction de ces factures, l'administration fiscale a suffisamment motivé sa proposition de rectification. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales doit, par suite, être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires :

En ce qui concerne les frais de restaurant :

3. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre (...) 5. Sont également déductibles les dépenses suivantes : / (...) f. Les frais de réception, y compris les frais de restaurant (...) Les dépenses ci-dessus énumérées peuvent également être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure où elles sont excessives et où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise. / (...) ".

4. Il résulte de l'instruction que le service a refusé la déductibilité de charges, au titre de l'article 39 du code général des impôts, correspondant à des frais de restaurant et des bouteilles d'alcool dont les bénéficiaires ne sont, soit pas du tout identifiés, soit indiqués comme étant des membres de la police, de la gendarmerie ou de deux communes du Pas-de-Calais.

5. La société Garage A...n'apporte aucun élément de nature à établir que les frais de restaurant, dont les bénéficiaires ne sont par ailleurs aucunement identifiés, présentent un caractère professionnel et ont ainsi été exposés dans l'intérêt de l'entreprise.

6. Les autres dépenses dont la déduction a été remise en cause par le service concernent des frais de restaurant et des cadeaux de bouteilles d'alcool dont les bénéficiaires seraient des personnes appartenant à des institutions publiques locales, l'identité de ces institutions figurant sur un document produit en première instance. A supposer même que ces personnes, dont l'identité n'est pas connue, appartiennent effectivement aux institutions publiques dont la société fait état, cette dernière, par les quelques factures de dépannage produites, au demeurant postérieures à la période contrôlée, n'apporte pas d'éléments probants de nature à établir que de tels repas et cadeaux auraient été susceptibles de lui permettre d'améliorer les résultats de la société. Elle n'établit ainsi pas que ces dépenses ont été exposées dans l'intérêt de l'entreprise. C'est par suite à juste titre que l'administration fiscale a remis en cause la déduction de ces frais de restaurant et cadeaux.

En ce qui concerne les prestations de holding :

7. Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.

8. En vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis. La seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense. Le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration.

9. Il résulte de l'instruction qu'à compter du 1er octobre 2010 et jusqu'au 1er décembre 2011 au moins, la société Garage A...a versé mensuellement à l'EURL Philippe A...la somme de 4 500 euros hors taxes. M. C...A...est gérant et associé unique de ces deux sociétés. Pour justifier de ces versements, la société appelante s'est prévalue, d'une part, d'une convention de groupe datée du 1er septembre 2010 conclue entre la société Philippe A...et la société Garage A...et, d'autre part, d'un procès-verbal de délibérations de l'associé unique, datées du 24 septembre 2010. Par la première de ces délibérations, cet associé a précisé les prestations qui seraient fournies par l'EURLA.... Par la seconde, il a fixé à 4 500 euros hors taxes, le paiement à effectuer par la filiale à la société mère holding.

10. Il résulte de l'instruction que la société appelante, dont le gérant, M. C...A..., ainsi qu'il a été dit au point précédent, est le même que celui de l'EURL A...émettrice des factures en cause, n'a pas été en mesure d'apporter une quelconque précision sur la nature exacte des prestations prétendument réalisées dont la nature, telle que définie notamment dans la convention du 1er septembre 2010, est d'ailleurs particulièrement imprécise. Si les différents documents produits par la société font bien état de l'intervention de M. C...A...au bénéfice de la société appelante, il n'est à aucun moment précisé, et il n'est pas plus justifié à l'instance, qu'il serait intervenu au titre de l'EURL Philippe A...alors qu'il est par ailleurs gérant de la SARL GarageA.... Dans ces conditions, la réalité même de la réalisation de ces prestations par l'EURL Philippe A...n'est pas établie et c'est à juste titre que le service a remis en cause la déduction de ces charges.

En ce qui concerne la remise en compte d'un avoir comptabilisé à l'exercice clos en 2011 :

11. Il résulte de l'instruction que, dans son grand livre, la société Garage A...a indiqué, au titre des " prestations holding ", au débit, d'une part, quinze factures d'un montant de 4 500 euros chacune, soit une somme totale de 67 500 euros, dont la déduction a été remise en cause par le service et, d'autre part, une somme de 2 700 euros portant le libellé " EURL A...2010 " qui, au vu des pièces du dossier, ne fait pas partie des sommes contestées par l'administration fiscale mentionnées ci-dessus. Figure par ailleurs au crédit de ce même compte, au 31 décembre 2011, la somme de 6 000 euros portant le libellé " 4098 avoir a rece holding ". Le solde du compte en cause à la date de clôture de l'exercice 2011 s'élève à la somme de 64 200 euros.

12. Si l'administration fiscale fait valoir, de manière lapidaire, que l'avoir de 6 000 euros mentionné au point précédent ne serait pas justifié, il demeure qu'elle ne saurait remettre en cause la déduction d'une somme supérieure à celle effectivement comptabilisée en charges. La société appelante est par suite fondée à demander la réduction en base du rappel, au titre de l'exercice clos en 2011, d'une somme de 3 300 euros correspondant à la différence entre l'avoir de 6000 euros porté en crédit et la somme de 2700 euros débitée en paiement à l'EURL.

Sur la majoration pour manquement délibéré :

13. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ".

14. En relevant que la réalité des prestations de holding prétendument réalisée n'était pas établie, que le dirigeant de la société, qui est par ailleurs également gérant et associé unique de l'EURL Philippe A...ne pouvait l'ignorer, alors qu'en outre et au demeurant, les montants facturés étaient d'importance puisqu'ils représentaient environ 9 % du chiffre d'affaires, l'administration fiscale apporte la preuve, qui lui incombe, du caractère délibéré du manquement imputé à la société. C'est par suite à juste titre que le service a mis à la charge de la société appelante la majoration de 40 % de l'article 1729 du code général des impôts.

15. Il résulte de ce qui a été dit aux points 1 à 14 que la société Garage A...est uniquement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille n'a pas fait droit à sa demande de réduction en base du rappel contesté d'une somme de 3 300 euros au titre de l'exercice clos en 2011. Le jugement de première instance du tribunal administratif de Lille doit donc, dans cette mesure, être réformé.

Sur les frais liés au litige :

16. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la société Garage A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La société Garage A...est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôts sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'exercice clos en 2011 dans la mesure d'une réduction en base des rappels d'un montant de 3 300 euros.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL Garage A...est rejeté.

Article 3 : Le jugement du 2 novembre 2016 du tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Garage A...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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N°17DA00052


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA00052
Date de la décision : 22/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : Mme Desticourt
Rapporteur ?: Mme Dominique Bureau
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : GUEY BALGAIRIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-01-22;17da00052 ?
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