Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Me C...d'Anjou a demandé au tribunal administratif de Rouen l'annulation du titre exécutoire en date du 24 février 2011 par lequel le directeur de la caisse du crédit municipal de Rouen a mis à sa charge la somme de 21 134,09 euros.
Par un jugement n° 1200422 du 12 décembre 2013, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 14DA00285 du 23 octobre 2015, la cour administrative d'appel de Douai a renvoyé l'affaire au Tribunal des conflits.
Par une décision n° 4039 du 11 janvier 2016, le Tribunal des conflits a déclaré la juridiction administrative compétente.
Par un arrêt du 10 mai 2016, la cour administrative d'appel de Douai a annulé le jugement n° 1200422, le titre exécutoire du 24 février 2011 et le commandement de payer du 16 novembre 2011.
Par une décision n° 401430 du 16 janvier 2018, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cet arrêt du 10 mai 2016 et a renvoyé l'affaire à la cour.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 13 février 2014, le 5 mars 2015, le 24 septembre 2015, le 24 avril 2018 et le 9 octobre 2018, Me C...d'Anjou, représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 12 décembre 2013 ;
2°) d'annuler le titre exécutoire du 24 février 2011 par lequel le directeur de la caisse du crédit municipal de Rouen a mis à sa charge la somme de 21 134,09 euros et, par voie de conséquence, le commandement de payer du 16 novembre 2011 ;
3°) de mettre à la charge de la caisse du crédit municipal de Rouen une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- la fin de non-recevoir de la tardiveté de la demande de première instance doit être écartée ;
- les moyens tenant à la régularité en la forme du titre de recettes présentés après expiration du délai de recours contentieux en appel étaient recevables car d'ordre public ;
- le titre exécutoire est entaché de vice de forme ; d'une part, il ne comporte pas l'indication des nom et prénoms de son auteur en méconnaissance des dispositions de L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ; d'autre part, il ne comporte pas les bases de liquidation de la somme réclamée ;
- la créance de la caisse du crédit municipal de Rouen était prescrite lorsque le titre exécutoire du 24 février 2011 a été émis ;
- la créance n'est pas justifiée dans son principe ; en effet, la caisse du crédit municipal de Rouen ne justifie pas avoir accordé un prêt régulier à MmeA... ; elle ne justifie pas davantage avoir recherché le recouvrement préalable de sa créance auprès de MmeA... ; lui-même n'a pas été régulièrement mandaté en qualité d'expert de la caisse du crédit municipal de Rouen lors de l'octroi du prêt à Mme A...en 1992 ; la caisse du crédit municipal de Rouen a procédé au renouvellement du prêt accordé en 1992 à Mme A...sans lui demander de procéder, lors de chaque renouvellement, à une nouvelle expertise des biens gagés ; la caisse du crédit municipal de Rouen a commis des fautes qui justifient que lui soit accordée une remise totale du débet ; en particulier, il n'est pas établi que la totalité de la collection donnée en gage par Mme A...lui a été remise pour procéder à sa vente aux enchères publiques ; il n'a lui-même pas commis de faute dans l'évaluation de la collection d'art africain donnée en gage par MmeA... ;
- la créance de la caisse du crédit municipal de Rouen n'est pas justifiée dans son montant.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 17 novembre 2014, le 3 août et 1er octobre 2015, et les 22 mars,1er juin 2018, 15 et 25 octobre 2018, la caisse du crédit municipal de Rouen, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Me d'Anjou une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la demande de première instance était tardive et qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.
Les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, l'arrêt est susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des moyens relatifs à la régularité en la forme du titre exécutoire, que sont la méconnaissance de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales et l'insuffisance de motivation du titre, invoqués après l'expiration du délai d'appel et fondés sur une cause juridique distincte des moyens invoqués pendant ce délai.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de commerce, modifié notamment par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ;
- le code monétaire et financier ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000, notamment son article 52 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rodolphe Féral, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La caisse du crédit municipal de Rouen, se fondant sur les dispositions de l'article D. 541-3 du code monétaire et financier, poursuit entre les mains de Me d'Anjou, commissaire-priseur, le recouvrement d'une somme de 21 134,09 euros correspondant à la différence entre le produit de la vente d'une collection d'art africain évaluée par l'intéressé et les sommes prêtées, sur la base de cette évaluation, à MmeA..., sommes qui n'ont pas été remboursées à la caisse du crédit municipal de Rouen. La caisse du crédit municipal de Rouen a, à cette fin, émis le 24 février 2011 un ordre de recettes à l'encontre de Me d'Anjou, lequel a donné lieu à un avis de sommes à payer de la part du comptable public. Me d'Anjou relève appel du jugement du 12 décembre 2013 du tribunal administratif de Rouen qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce titre de recettes.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. Aux termes des dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". D'une part, cette notification doit, s'agissant des voies de recours, mentionner, le cas échéant, l'existence d'un recours administratif préalable obligatoire ainsi que l'autorité devant laquelle il doit être porté ou, dans l'hypothèse d'un recours contentieux direct, indiquer si celui-ci doit être formé auprès de la juridiction administrative de droit commun ou devant une juridiction spécialisée et, dans ce dernier cas, préciser laquelle. D'autre part, une mention portée sur un titre exécutoire indiquant au débiteur d'une créance qu'il peut la contester devant le tribunal judiciaire ou le tribunal administratif compétent selon la nature de cette créance ne peut faire courir les délais de recours.
3. Il est indiqué sur le titre de recettes émis par la caisse du crédit municipal de Rouen le 24 février 2011 : " Dans le délai de deux mois suivant la notification du présent acte, vous pouvez contester la somme mentionnée au recto en saisissant directement le tribunal judiciaire ou le tribunal administratif compétent selon la nature de la créance ". En conséquence, cette mention, qui ne précise pas quelle est la juridiction compétente, n'a pu faire courir les délais de recours à l'encontre de Me d'Anjou. Par suite, alors que Me d'Anjou a introduit sa requête contre le titre de recettes en litige moins d'un an après en avoir reçu notification, la fin de non-recevoir opposée par la caisse du crédit municipal de Rouen tirée de la tardiveté de la demande de première instance doit être écartée.
Sur le titre de recette et le commandement de payer :
En ce qui concerne la régularité en la forme du titre de recette :
4. Dans sa requête introductive d'instance enregistrée au greffe de la cour le 13 février 2014, Me d'Anjou s'est borné, ainsi qu'il le reconnait dans ses écritures d'appel, à contester le bien-fondé du titre de recettes émis à son encontre par la caisse du crédit municipal de Rouen. Les moyens tirés de l'irrégularité du titre de recettes tenant à la méconnaissance des dispositions de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales et à l'insuffisance des mentions concernant les bases de liquidation de la créance, qui y sont portées, qui ne sont pas des moyens d'ordre public, n'ont été formulés que dans un mémoire enregistré le 5 mars 2015. Ces moyens, fondés sur une cause juridique distincte de celle des moyens soulevés dans la requête initiale et présentée après l'expiration du délai de recours contentieux, ont donc été présentés tardivement et ne sont, pour ce motif, pas recevables.
En ce qui concerne le bien-fondé du titre de recette :
5. Aux termes de l'article D. 514-3 du code monétaire et financier : " Les appréciateurs sont responsables vis-à-vis de la caisse des suites de leurs évaluations. En conséquence, lorsqu'à défaut de dégagement d'un objet ou de renouvellement du gage il est procédé à sa vente et que le produit de cette vente ne suffit pas à rembourser la caisse des sommes qu'elle a prêtées au vu de ces évaluations ainsi que de ce qui lui est dû, tant pour les intérêts afférents à la durée du prêt, augmentée d'un mois si cette durée est de six mois et de deux mois si elle est d'un an, que pour les droits accessoires dus pour la durée du prêt, les appréciateurs sont tenus de lui rembourser la différence. / Toutefois, si cette différence est imputable en tout ou partie à des circonstances particulières et indépendantes de la capacité des appréciateurs, le conseil d'orientation et de surveillance pourra accorder la remise totale ou partielle du débet aux appréciateurs ".
Quant à la prescription :
6. L'article 52 de la loi du 10 juillet 2000 portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques visée ci-dessus avait prévu, en ses dispositions transitoires : " Les actions en responsabilité civile engagées à l'occasion des ventes volontaires et judiciaires de meubles aux enchères publiques, ainsi que des expertises correspondantes et des prisées, en cours à la date de la promulgation de la présente loi, se prescrivent par 10 ans à compter de cette date, à moins que la prescription ne soit acquise selon les règles applicables antérieurement à ce délai ". Enfin, la loi du 17 juin 2008 portant réforme des prescriptions en matière civile visée ci-dessus a modifié les dispositions de l'article L. 321-17 du code de commerce qui prévoient désormais : " Les actions en responsabilité civile engagées à l'occasion des prisées et des ventes volontaires et judiciaire de meuble aux enchères publiques se prescrivent par cinq ans à compter de l'adjudication ou de la prisée ".
7. Me d'Anjou soutient que l'estimation de la collection d'art africain appartenant à Mme A...ayant été réalisée par ses soins en 1992, soit antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 10 juillet 2000, la prescription de dix ans, ainsi que le prévoient les dispositions de l'article 52 de cette loi, a commencé à courir à compter de cette date et que, par suite, lorsque le titre de recette a été émis le 24 février 2011, l'action à son encontre était prescrite.
8. Il résulte toutefois de l'instruction que Me d'Anjou a procédé à la vente de la collection d'art africain déposé en gage par Mme A...auprès de la caisse du crédit municipal de Rouen au cours de trois ventes aux enchères publiques les 25 avril, 20 juin et 7 novembre 2010. Ce n'est qu'à l'issue de cette troisième vente que la caisse du crédit municipal de Rouen a pu avoir connaissance de ce que le produit des ventes ne permettait pas de rembourser le montant des sommes qu'elle avait prêtées à MmeA.... Ainsi, avant cette date du 7 novembre 2010, aucun délai de prescription n'avait pu commencer à courir à l'encontre de la caisse du crédit municipal de Rouen dans la mise en oeuvre de la responsabilité de Me d'Anjou sur le fondement des dispositions de l'article D. 514-3 du code monétaire et financier, les conditions de mise en oeuvre de cette action en responsabilité n'étant pas encore réunies. En conséquence, contrairement à ce que soutient Me d'Anjou, les dispositions transitoires de l'article 52 de la loi du 10 juillet 2000 n'ont pas vocation à s'appliquer. Ainsi, à la date à laquelle les conditions pour mettre en oeuvre la responsabilité de Me d'Anjou sur le fondement des dispositions de l'article D. 514-3 étaient réunies, seules les dispositions précitées de l'article L. 321-17 du code de commerce dans leur rédaction issue de la loi du 17 juin 2008 trouvaient à s'appliquer pour déterminer le délai de prescription applicable à cette action en responsabilité.
9. Or, en application de ces dispositions de l'article L. 321-17 du code de commerce, les actions en responsabilité civile à l'égard des commissaires priseurs se prescrivent par cinq ans à compter du fait générateur du dommage qui peut être la prisée ou l'adjudication. En l'espèce, le fait générateur du dommage subi par la caisse du crédit municipal de Rouen est le montant de la dernière adjudication au cours de laquelle la collection d'art africain appartenant à Mme A...a été mise en vente, l'estimation réalisée de cette collection lors de l'octroi du prêt n'étant, en elle-même, constitutive d'aucun dommage pour la caisse. Dès lors, le délai de prescription de l'action dont disposait la caisse du crédit municipal de Rouen à l'encontre de Me d'Anjou sur le fondement des dispositions de l'article D. 514-3 du code monétaire et financier était de cinq ans à compter de la dernière adjudication intervenue le 7 novembre 2010. Par suite, cette action en responsabilité n'était pas prescrite lorsque le titre de recette a été émis le 24 février 2011.
Quant au principe et au montant de la créance :
10. En premier lieu, Me d'Anjou soutient que la caisse du crédit municipal de Rouen ne justifie pas de l'octroi d'un prêt à Mme A...et n'établit pas que cette dernière n'aurait procédé à aucun remboursement sur le montant emprunté.
11. D'une part, l'ordre de recette émis par la caisse du crédit municipal de Rouen porte la mention " gage n° 9609168 du 3 décembre 1996 ". La caisse du crédit municipal de Rouen produit devant la cour un acte de dépôt daté du 3 décembre 1996 portant le n° 9609168 qui fait état d'un prêt consenti à Mme A...pour un montant de 200 000 francs et de la remise en gage d'une collection d'art africain estimé à 250 000 francs par Me d'Anjou. Il est également constant que l'objet gagé contre la remise des fonds a bien été remis à la caisse du crédit municipal de Rouen et vendu aux enchères publiques sans opposition de l'emprunteur, établissant ainsi la remise des fonds. Ainsi, la caisse du crédit municipal de Rouen justifie de l'existence du prêt consenti par Mme A...le 3 décembre 1996 qui fonde l'émission de l'ordre de recette émis à l'encontre de Me d'Anjou. En outre, ce dernier ne saurait utilement soutenir que l'ensemble des renouvellements antérieurs de prêt ne seraient pas justifiés, dès lors que ces prêts antérieurs ne fondent pas le titre de recette en litige. Par ailleurs, Me d'Anjou ne saurait opposer la circonstance que l'acte de dépôt du 3 décembre 1996 n'est pas signé par l'emprunteur pour faire échec à la mise en oeuvre de sa responsabilité sur le fondement de l'article D. 514-3 du code monétaire et financier, dès lors que l'existence du prêt consenti à Mme A...est démontrée et que l'objet déposé en gage a été vendu.
12. D'autre part, l'article D. 514-7 du code monétaire et financier prévoit que " Le conseil d'orientation et de surveillance détermine la durée des prêts. Celle-ci ne peut excéder deux ans, y incluant la prolongation des prêts. Les emprunteurs ont toutefois la faculté de dégager leurs objets avant le terme du prêt, ou de solliciter à l'échéance de ce dernier le renouvellement de leur engagement. L'accord sur ce renouvellement est subordonné au paiement des intérêts et droits échus et au remboursement de l'excédent du capital prêté, dans le cas où la nouvelle estimation du gage, à laquelle il devra obligatoirement être procédé, ferait ressortir une diminution de valeur ". Aux termes de l'article D. 514-14 du même code " Les biens remis en gage qui, à l'expiration du terme stipulé dans les reconnaissances délivrées aux emprunteurs, n'ont pas été dégagés ou renouvelés, ou pour lesquels un délai complémentaire n'a pas été accordé par le directeur, sont vendus aux enchères publiques pour le compte de l'établissement...".
13. Il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'aucun remboursement partiel du capital ou des intérêts ne peut être réalisé par l'emprunteur en cours de prêt ou à l'échéance de celui-ci. Ainsi, lorsqu'un bien remis en gage par l'emprunteur est vendu aux enchères, cela signifie que l'emprunteur, à l'échéance du prêt, n'a pu en rembourser ni le capital ni les intérêts, le remboursement des seuls intérêts dus sur la durée du prêt lui permettant d'obtenir le renouvellement du prêt. Or, il résulte de l'instruction que la collection d'art africain appartenant à MmeA..., remise en gage contre le prêt qui lui a été accordé le 3 décembre 1996, a été vendue aux enchères publiques par Me d'Anjou au cours de trois ventes aux enchères publiques en 2010. En conséquence, ces ventes établissent l'absence de tout remboursement du capital et des intérêts par MeA..., à l'échéance du prêt de six mois qui lui a été accordé le 3 décembre 1996. Par suite, la caisse du crédit municipal de Rouen doit être regardée comme justifiant du montant de la créance réclamé à Me d'Anjou, qui correspond au capital prêté majoré des intérêts et diminué du montant des produits de la vente de la collection d'art africain.
14. En deuxième lieu, il résulte de la combinaison des dispositions de D. 514-14 du code monétaire et financier citées au point précédent et de l'article D. 514-3 du même code citées au point 5 que la caisse du crédit municipal de Rouen pouvait mettre en oeuvre la responsabilité de Me d'Anjou sans avoir besoin, au préalable, d'exercer des poursuites contre Mme A...afin d'obtenir le remboursement du prêt qu'elle avait consenti à cette dernière.
15. En troisième lieu, il résulte des dispositions de l'article D. 514-7 du code monétaire et financier qu'une nouvelle estimation des objets donnés en gage doit être réalisée chaque fois que le prêt est renouvelé à son échéance. Si Me d'Anjou soutient qu'il n'a pas été mandaté par la caisse du crédit municipal de Rouen pour procéder à une expertise en septembre 1992 lors de l'octroi du premier prêt accordé à MmeA..., cette circonstance, au demeurant non établie, est sans influence dans le présent litige dès lors que le prêt ayant conduit à la vente des objets donnés en gage par Mme A...est celui qui lui a été accordé le 3 décembre 1996. Si le requérant soutient qu'il n'a pas davantage été mandaté pour procéder à une nouvelle expertise de la collection d'art africain de Mme A...lors du renouvellement du prêt consenti à celle-ci le 3 décembre 1996, il ressort toutefois des mentions figurant sur l'acte de dépôt correspondant à ce prêt que les objets donnés en gage ont été évalués à 250 000 francs, qu'un paraphe, non contesté, a été porté dans le cadre réservé à l'appréciateur et qu'il est renvoyé à une précédente expertise réalisée par Me d'Anjou le 30 avril 1993 dont il ne conteste pas être l'auteur. Dans ces conditions, Me d'Anjou doit être regardé comme ayant bien réalisé une expertise de la collection d'art africain appartenant à Mme A...lors de l'octroi de son prêt le 3 décembre 1996.
16. En quatrième lieu, le régime de responsabilité des commissaires priseurs prévus par les dispositions citées au point 5 de l'article D. 514-3 du code monétaire et financier est un régime de responsabilité sans faute. Par suite, Me d'Anjou ne peut utilement soutenir qu'il n'aurait commis aucune faute dans l'appréciation de la valeur de la collection d'art africain appartenant à MmeA....
17. En dernier lieu, il appartient à un commissaire priseur qui estime que la différence entre le produit de la vente et le montant de son estimation est imputable en tout ou partie à des circonstances particulières et indépendantes de ses capacités d'appréciateur de présenter, ainsi que le prévoit le dernier alinéa de l'article D. 514-3 du code monétaire et financier, une demande gracieuse au conseil d'orientation et de surveillance de la caisse de crédit municipal qui pourra, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, accorder la remise totale ou partielle du débet correspondant à l'appréciateur. En revanche, il n'appartient pas au juge, lorsqu'il n'est, comme en l'espèce, saisi que sur le seul terrain contentieux d'une contestation du titre de recette émis à l'encontre d'un commissaire-priseur sur le fondement des dispositions du premier alinéa de l'article D. 514-3 du code monétaire et financier, de prononcer, dans le cadre de l'appréciation du bien-fondé de ce titre, une remise gracieuse partielle ou totale de ce débet. En conséquence, le moyen tiré d'éventuelles circonstances particulières et indépendantes des capacités d'appréciateur du commissaire-priseur, dans le cadre du contentieux du titre de recettes, est inopérant sur l'appréciation du bien-fondé de ce titre de recettes. Par suite, Me d'Anjou ne saurait utilement soutenir, dans le cadre du présent litige, que les fautes commises par la caisse du crédit municipal de Rouen, tenant à l'octroi d'un prêt à Mme A...d'une durée supérieure à deux ans en méconnaissance des dispositions du code monétaire et financier, à son inaction pendant plus de quatorze ans avant de vendre le bien gagé et à une remise incomplète des lots déposés en gage en raison d'une perte et ou d'un vol de certains lots dans les locaux de la caisse, constitueraient des circonstances particulières et indépendantes de ses capacités justifiant une remise totale du débet.
18. Il résulte de tout ce qui précède que Me d'Anjou n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
19. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la caisse du crédit municipal de Rouen, qui n'est pas la partie perdante en la présence instance, une somme au titre des frais non compris dans les dépens exposés par Me d'Anjou devant la cour. En outre, il n'y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Me d'Anjou la somme demandée par la caisse du crédit municipal de Rouen au titre des ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Me d'Anjou est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la caisse du crédit municipal de Rouen présentée sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me C...d'Anjou et à la caisse du crédit municipal de Rouen.
Copie en sera transmise au directeur régional des finances publiques de la région Normandie et du département de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 13 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme jenny Grand d'Esnon, présidente de chambre,
- M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- M. Rodolphe Féral, premier conseiller.
Lu en audience publique le 27 novembre 2018.
Le rapporteur,
Signé : R. FERALLa présidente de chambre,
Signé : J. GRAND d'ESNON
La greffière,
Signé : N. ROMERO
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière
Nathalie Roméro
9
N°18DA00152