Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...D...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 12 décembre 2017 du préfet de l'Aisne lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination de l'éloignement.
Par un jugement n° 1800127 du 22 février 2018, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés le 19 mars 2018, le 19 juillet 2018 et le 27 septembre 2018, MmeD..., représentée par Me A...C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 12 décembre 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aisne de réexaminer sa demande de titre de séjour, sous astreinte de 10 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président-rapporteur,
- et les observations de Me A...C..., représentant MmeD....
Le rapport de M. Paul-Louis Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. MmeD..., ressortissante de la République du Congo née le 26 avril 1983, déclare être entrée en France le 28 juin 2015. Elle a formulé une demande d'asile le 4 septembre 2015. Sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 7 décembre 2015, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 6 septembre 2016. Elle s'est ensuite vu délivrer une autorisation de séjour temporaire valable du 7 février 2017 au 6 août 2017 en raison de son état de santé. Le 28 juin 2017, Mme D...a sollicité le renouvellement de ses droits au séjour, sur le même fondement. Par un arrêté du 12 décembre 2017, le préfet de l'Aisne a refusé d'accorder à Mme D...le titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme D...relève appel du jugement du 22 février 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Mme D...a présenté le moyen tiré de l'irrégularité du jugement dans un mémoire enregistré le 19 juillet 2018, postérieurement à la date d'expiration du délai d'appel, lequel a commencé à courir à compter du 24 avril 2018, et sans qu'elle n'ait présenté antérieurement de moyen se rattachant à cette cause juridique. Par suite, le moyen est irrecevable.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne les moyens soulevés à l'encontre de l'ensemble des décisions :
3. Les décisions contestées visent les textes dont elles font application et énoncent les considérations de droit et de fait sur lesquelles elles se fondent. Ces considérations sont suffisamment développées pour mettre utilement Mme D...en mesure de discuter les motifs de ces décisions et le juge d'exercer son contrôle en pleine connaissance de cause. Ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation ne peut qu'être écarté. Pour les mêmes motifs, ces décisions ne sont pas entachées d'un défaut d'examen particulier de la situation personnelle de la requérante.
En ce qui concerne la légalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français :
4. Aux termes de L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Aux termes de l'article L. 511-4 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".
5. Mme D...soutient que son état de santé nécessite un suivi médical régulier, dont elle ne pourra bénéficier en République du Congo. Néanmoins, il ressort des pièces du dossier que le collège des médecins de l'OFII a estimé, dans son avis du 2 novembre 2017, que le défaut de la prise en charge médicale de la pathologie dont souffrait la requérante nécessitait un suivi médical et que l'absence de soins ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Si Mme D...a versé au dossier plusieurs documents médicaux qui établissent qu'elle fait l'objet d'un suivi médical et reçoit un traitement médicamenteux, leur teneur ne donne aucune précision quant aux conséquences susceptibles de résulter d'une interruption du traitement suivi par l'intéressée et ne permettent donc pas de remettre en cause l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII, qui a considéré que le défaut de soins ne devrait pas avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par ailleurs, la circonstance qu'il n'existerait pas de traitement adapté à sa pathologie en République du Congo est sans influence sur la légalité de l'arrêté puisque, comme il vient d'être dit, le défaut de soins ne devrait pas avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, Mme D...n'est pas fondée à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet de l'Aisne a méconnu les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "
7. Mme D...soutient qu'elle est entrée en France en 2015, qu'elle y est parfaitement insérée, qu'il y suit une formation d'assistante de vie, et y vit avec son enfant, né en 2011, qui est scolarisé. Toutefois, si elle verse au débat une attestation de formation et des rapports de stage, ces éléments ne démontrent pas une intégration professionnelle stable et d'une particulière intensité. Elle ne justifie pas non plus avoir noué des liens sociaux d'une particulière intensité. De plus, la requérante n'établit pas, ni même n'allègue, être dépourvue d'attaches familiales en République du Congo où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-deux ans. Par conséquent, eu égard au jeune âge de son enfant et à l'avis du collège de médecins de l'OFII, elle ne justifie d'aucun obstacle à la reconstitution de la cellule familiale en République du Congo. Ainsi, compte tenu des circonstances de l'espèce, la décision attaquée n'a pas porté au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs de refus de séjour et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la situation personnelle de MmeD....
8. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission du titre de séjour " est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 312-2 de ce code : " Le préfet ou, à Paris, le préfet de police saisit pour avis la commission lorsqu'il envisage de refuser de délivrer ou de renouveler l'un des titres mentionnés aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 à l'étranger qui remplit effectivement les conditions qui président à leur délivrance ".
9. Il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ou stipulations. Mme D...n'entre dans aucune des catégories d'étrangers pouvant prétendre à l'obtention d'un titre de séjour de plein droit. Par suite, le préfet de l'Aisne n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour. Ainsi, le moyen tiré de ce vice de procédure doit être écarté.
10. Il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de titre de séjour et celle l'obligeant à quitter le territoire français sont entachées d'illégalité.
En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :
11. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné :/(...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ".
12. Mme D...soutient qu'elle craint pour sa vie et son intégrité physique, en cas d'exécution de la mesure de reconduite, du fait des activités politiques de son époux décédé. Elle ne produit toutefois aucun élément de nature à appuyer ses déclarations ou à étayer le caractère réel et actuel des mauvais traitements auxquels elle serait susceptible d'être exposée en cas de retour dans son pays d'origine. En outre, sa demande d'asile a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile. Par suite, le préfet de l'Aisne n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction, assorties d'astreinte ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D..., au ministre de l'intérieur et à Me A...C....
Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Aisne.
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N°18DA00599
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N°"Numéro"