La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/09/2018 | FRANCE | N°18DA00463

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4e chambre - formation à 3, 25 septembre 2018, 18DA00463


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2017 par lequel le préfet du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 1710754 du 17 janvier 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a fait droit à la demande de M.B....

Procédure dev

ant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er mars 2018, le préfet du Pas-de-Calais dema...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2017 par lequel le préfet du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 1710754 du 17 janvier 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a fait droit à la demande de M.B....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er mars 2018, le préfet du Pas-de-Calais demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 17 janvier 2018 ;

2°) de rejeter la demande de première instance de M.B....

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Rodolphe Féral, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 612-6 du code de justice administrative : " Si, malgré une mise en demeure, la partie défenderesse n'a produit aucun mémoire, elle est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les mémoires du requérant ". En l'espèce, la requête a été communiquée le 14 mars 2018 à M.B..., qui a été mis en demeure, le 22 mai 2018, de produire un mémoire en défense. Cette mise en demeure est demeurée sans effet. Il appartient donc à la cour, de vérifier que l'inexactitude des faits exposés dans les mémoires du préfet requérant ne ressort d'aucune pièce du dossier.

2. M.B..., ressortissant algérien né le 28 septembre 1993, a été interpellé par les services de police le 16 décembre 2017 en possession d'un document d'identité italien falsifié. Il a alors fait l'objet, le même jour, d'un arrêté par lequel le préfet du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et l'a interdit de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Le préfet du Pas-de-Calais relève appel du jugement du 17 janvier 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

3. D'une part, aux termes qu'aux termes de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande et procède à la détermination de l'Etat responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou en application d'engagements identiques à ceux prévus par le même règlement, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. / L'enregistrement a lieu au plus tard trois jours ouvrés après la présentation de la demande à l'autorité administrative compétente, sans condition préalable de domiciliation. (...) / ... / Lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont fixées par décret en Conseil d'Etat. La durée de validité de l'attestation est fixée par arrêté du ministre chargé de l'asile. / La délivrance de cette attestation ne peut être refusée au motif que l'étranger est démuni des documents et visas mentionnés à l'article L. 211-1. Elle ne peut être refusée que dans les cas prévus aux 5° et 6° de l'article L. 743-2. Cette attestation n'est pas délivrée à l'étranger qui demande l'asile à la frontière ou en rétention. ". Aux termes de l'article L. 743-1 du même code : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent. ". Enfin, aux termes de l'article L. 743-4 du même code : " Sans préjudice des articles L. 556-1 et L. 743-2, lorsque l'étranger sollicitant l'enregistrement d'une demande d'asile a fait l'objet, préalablement à la présentation de sa demande, d'une mesure d'éloignement prise en application du livre V, celle-ci, qui n'est pas abrogée par la délivrance de l'attestation prévue à l'article L. 741-1, ne peut être mise à exécution avant la notification de la décision de l'office, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet, d'irrecevabilité ou de clôture, ou, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile contre une décision de rejet, avant la notification de la décision de la cour ".

4. D'autre part, aux termes de l'article R. 741-2 du même code : " Lorsque l'étranger présente sa demande auprès de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, des services de police ou de gendarmerie ou de l'administration pénitentiaire, la personne est orientée vers l'autorité compétente. Il en est de même lorsque l'étranger a introduit directement sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sans que sa demande ait été préalablement enregistrée par le préfet compétent. Ces autorités fournissent à l'étranger les informations utiles en vue de l'enregistrement de sa demande d'asile (...) " ;

5. Il résulte de ces dispositions que les services de police doivent orienter l'étranger présentant une demande d'asile devant eux vers le préfet compétent et que celui-ci, hors les cas limitativement énumérés par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est tenu d'enregistrer cette demande et de délivrer une attestation de demande d'asile. L'étranger dispose dans ce cas d'un droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à ce qu'il soit statué sur sa demande.

6. Il ressort des pièces du dossier qu'au cours de l'audition qui a suivi son interpellation, le 16 décembre 2017, M. B...s'est borné à répondre " oui " à la question de savoir s'il craignait des menaces en cas de retour dans son pays et a seulement indiqué qu'il avait quitté son pays " suite à des problèmes familiaux et politiques ", qu'il n'avait pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour en France depuis son arrivée par peur d'être renvoyé en Algérie mais qu'il avait l'intention de solliciter la délivrance d'un titre de séjour pour rester en France et enfin qu'il ne voulait pas retourner dans son pays car " ils vont me mettre en prison ". En l'absence de toute référence expresse à une demande d'asile qu'il souhaiterait déposer, de tels propos généraux et non circonstanciés sur les raisons de son départ de son pays et d'éventuels risques qu'il encourrait en cas de retour en Algérie ne permettent pas de regarder M. B...comme ayant présenté une demande d'asile lors de son audition par les services de police, d'autant que les seuls risques qu'il précise sont de nature familiale et non politique. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que l'intéressé aurait manifesté sa volonté de présenter une demande d'asile à un autre moment préalablement à l'édiction de la décision l'obligeant à quitter le territoire national. Par suite, le préfet du Pas-de-Calais est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a estimé que l'intéressé avait formulé une demande d'asile lors de son audition et qu'en conséquence il avait commis une erreur de droit en obligeant M. B...à quitter le territoire national.

7. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille.

Sur le moyen commun aux décisions contestées :

8. Par un arrêté n° 2017-10-68 en date du 20 mars 2017, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du même jour, le préfet du Pas-de-Calais a donné délégation à M. Richard Smith, Secrétaire général adjoint, à l'effet de signer notamment les décisions contestées. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté comme manquant en fait.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

9. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée (...). ". La décision attaquée mentionne les dispositions du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique notamment que M. B... ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et est, par ailleurs, dépourvu d'un titre de séjour en cours de validité. Ainsi, la décision contestée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée.

10. M. B...ne saurait utilement se prévaloir à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français, par la voie de l'exception, de l'illégalité d'un refus de titre de séjour qui lui aurait été opposé le 16 décembre 2017, dès lors que la décision l'obligeant à quitter le territoire a été prise sur le fondement des dispositions du 1° du I de l'article L. 511-1 qui permettent à l'autorité préfectorale de prononcer une obligation de quitter le territoire français sans refus de titre de séjour préalable. D'ailleurs l'arrêté attaqué du 16 décembre 2017 ne comporte aucune décision refusant à l'intéressé la délivrance d'un titre de séjour.

11. Ainsi qu'il a été dit au point 6, M. B...ne peut être regardé comme ayant présenté une demande d'asile lors de son audition par les services de police à la suite de son interpellation et n'a manifesté à aucun autre moment préalablement à la décision attaquée sa volonté de déposer une telle demande. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision obligeant M. B...à quitter le territoire français est dépourvue de base légale et qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en raison de son intention de demander l'asile en France ne peuvent qu'être écartés.

12. M. B...ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français dès lors que ces stipulations régissent seulement la délivrance d'un titre de séjour aux ressortissants algériens.

13. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".

14. M. B...fait valoir qu'il dispose d'attaches familiales sur le territoire national et en particulier sa tante chez qui il est hébergé. Toutefois, il ressort de ses déclarations devant les services de police qu'il est célibataire et sans enfant à charge et qu'il est entré sur le territoire français un peu plus de six mois seulement avant l'édiction de la décision contestée. Il ressort en outre des pièces du dossier que l'intéressé avait toujours vécu avant son entrée en France à l'âge de vingt-quatre ans dans son pays d'origine où il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales et aucun élément n'établit qu'il aurait noué des liens d'une particulière intensité en France. Dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment eu égard à la durée et aux conditions de séjour de M.B..., la décision attaquée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît pas ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

15. Il résulte de ce qui précède que les conclusions en annulation de la décision obligeant M. B...à quitter le territoire français ne sauraient être accueillies.

Sur le refus d'un délai de départ volontaire :

16. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent, que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision obligeant M. B...à quitter le territoire français à l'encontre de la décision lui refusant un délai de départ volontaire doit être écarté.

17. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...). ".

18. La décision attaquée, qui cite les dispositions précitées, indique notamment que M. B..., qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour et qui, muni d'un document d'identité falsifié, n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, présente un risque de se soustraire à la mesure d'éloignement dont il fait l'objet. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision en litige doit être écarté.

19. Il ressort des pièces du dossier que M. B...ne justifie pas être entré régulièrement sur le territoire français et n'a sollicité ni une protection au titre de l'asile en France, ainsi qu'il a été dit au point 6, ni la délivrance d'un titre de séjour. En outre, l'intéressé, qui a été arrêté en possession d'un document d'identité falsifié et qui s'est borné à déclarer qu'il habitait à Saint-Denis " à côté du métro ", ne présente pas de garanties de représentation suffisantes. Dans ces conditions, même si M. B...soutient qu'il a des membres de sa famille en France et ne s'est jamais soustrait à une mesure d'éloignement, il existait un risque qu'il se soustraie à la mesure d'obligation de quitter le territoire. Par suite, en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire, le préfet du Pas-de-Calais n'a pas commis d'erreur dans son appréciation de la situation de M. B...au regard des dispositions précitées du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur le pays de destination :

20. Il résulte de ce qui a été dit au point 15, que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision obligeant M. B...à quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination doit être écarté.

21. Si M. B...fait valoir que la décision ne mentionne pas qu'il aurait présenté une demande d'asile en Espagne, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait porté cet élément à la connaissance du préfet, en tout état de cause, et s'il soutient également que la décision ne mentionne pas précisément les risques encourus en cas de retour en Algérie, il ressort de ses déclarations devant les services de police lors de son audition que l'intéressé s'est borné à énoncer des craintes sans fournir le moindre détail sur leur nature. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision fixant le pays de renvoi, qui énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, doit être écarté.

22. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. ".

23. M. B...soutient qu'il encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine en raison de son orientation sexuelle, sa famille voulant le tuer. Toutefois, il ne produit aucun élément susceptible d'établir la réalité des faits ainsi allégués, l'existence de risques personnels et actuels en cas de retour en Algérie et l'incapacité des autorités algériennes à le protéger. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :

24. Il résulte de ce qui a été dit au point 15, que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision obligeant M. B...à quitter le territoire français à l'encontre de la décision lui interdisant le retour sur le territoire français doit être écarté.

25. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...)La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...). ".

26. La décision prononçant à l'encontre de M. B...une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, qui mentionne les dispositions du III de l'article L. 511-1 précité, indique notamment qu'il ne séjourne en France que depuis six mois et n'a jamais débuté de procédure pour être en situation régulière, qu'il n'a aucun lien privé ou familial dans ce pays, qu'il n'a pas fait l'objet précédemment d'une mesure d'éloignement et que sa présence sur le territoire ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Ainsi, et contrairement à ce que soutient l'intéressé, cette décision comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée doit être écarté.

27. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 14, la décision attaquée n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. B...une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît pas, dès lors, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

28. Enfin, en se fondant sur la brièveté et les conditions irrégulières du séjour en France de M.B..., sur l'absence de liens privés en France et sur le fait qu'il n'a pas entrepris en France la moindre démarche en vue de régulariser sa situation au regard du séjour, le préfet du Pas-de-Calais a pu, sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation, prononcer à son encontre une interdiction de retour pour une durée d'un an.

29. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Pas-de-Calais est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé son arrêté du 16 décembre 2017.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1710754 du 17 janvier 2018 du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Lille tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Pas-de-Calais en date du 16 décembre 2017 est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...B....

Copie en sera transmise pour information au préfet du Pas-de-Calais.

2

N°18DA00463


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18DA00463
Date de la décision : 25/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Grand d'Esnon
Rapporteur ?: M. Rodolphe Féral
Rapporteur public ?: M. Riou

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-09-25;18da00463 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award