La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/07/2018 | FRANCE | N°17DA01469

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3, 30 juillet 2018, 17DA01469


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...-E... ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010 à raison de la remise en cause de déduction des pensions alimentaires versées à leurs ascendants et du bénéfice de réductions d'impôt afférentes à des investissements outre-mer dans le logement, ainsi que des pénalités afférentes.

Par un jugement n° 1400506 du 23 mai 2017,

le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...-E... ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010 à raison de la remise en cause de déduction des pensions alimentaires versées à leurs ascendants et du bénéfice de réductions d'impôt afférentes à des investissements outre-mer dans le logement, ainsi que des pénalités afférentes.

Par un jugement n° 1400506 du 23 mai 2017, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 23 juillet 2017 et le 28 juin 2018, M. et Mme B...-E..., représentés par Me C...D..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010 et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Odile Desticourt, présidente de chambre,

- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,

- et les observations de Me C...D..., représentant M. et Mme B... -E.à sa charge

Considérant ce qui suit :

1. Par une proposition de rectification du 12 janvier 2012, l'administration fiscale a remis en cause les déductions que M. et Mme B...-E... avaient portées au titre des années 2009 et 2010 dans leurs déclarations de revenus, à raison des pensions alimentaires versées à leurs père et mère respectifs ainsi que le bénéfice de réductions d'impôt afférentes à un investissement outre-mer dans le logement. M. et Mme B...-E... relèvent appel du jugement du 23 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009 et 2010 et des pénalités afférentes.

Sur les conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires au titre des pensions alimentaires :

2. Si l'administration peut, à tout moment de la procédure, invoquer un nouveau motif de droit propre à justifier l'imposition, une telle substitution ne saurait avoir pour effet de priver le contribuable d'aucune garantie procédurale. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'en substituant, en cours d'instance devant le tribunal, le motif tiré de l'absence de réalité de l'état de besoin à celui de l'absence de réalité des versements effectués au bénéfice des parents de M. B..., l'administration aurait privé les contribuables d'une garantie procédurale s'attachant à ce nouveau motif.

3. Aux termes de l'article 156 du code général des impôts : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (...) sous déduction : (...) / II. Des charges ci-après lorsqu'elles n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus des différentes catégories : / (...) 2° (...) ; des pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211 et 367 du code civil ". Aux termes de l'article 205 du code civil : " Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin ". Aux termes de l'article 206 de ce code : " Les gendres et belles-filles doivent également, et dans les mêmes circonstances, des aliments à leur beau-père et belle-mère, (...) ". Aux termes de l'article 208 du même code : " Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit ". Il résulte de ces dispositions que, pour bénéficier de la déduction prévue à l'article 156 précité, le contribuable doit apporter la preuve de la réalité des versements allégués et de l'état de besoin du bénéficiaire des sommes ainsi versées.

4. En se bornant à produire des attestations, dont l'une postérieure aux années en litige, indiquant que le père de M. B...ne perçoit ni pension de retraite, ni allocations familiales, sans toutefois produire d'éléments permettant d'apprécier l'ensemble des ressources de ce dernier, les requérants n'établissent pas l'absence d'un quelconque patrimoine de ce dernier. S'ils justifient des pathologies affectant le père de M.B..., aucune pièce du dossier n'est de nature à attester du montant effectif des dépenses de santé supportées par ce dernier. Les certificats de domiciliation des deux soeurs de M. B...à l'adresse de leur père n'établissent pas qu'elles demeurent.à sa charge Ainsi, il n'est pas démontré que le père de M. B...se trouvait en état de besoin au sens des dispositions de l'article 208 du code civil. Au surplus, les sommes déduites à titre de pension au profit du père de M. B...ont été versées sur le compte de la soeur de M. B...alors qu'aucune pièce ne justifie de l'état d'incapacité juridique de ce dernier qui aurait justifié un tel versement.

5. Si les requérants ont entendu déduire une somme versée au frère de Mme B...au titre des frais funéraires acquittés en 2009 suite au décès de la mère de MmeB..., ils n'établissent pas, par la seule production d'un certificat de décès, l'absence d'actif successoral propre à financer ces dépenses, pas plus que la réalité et le montant effectif de ces frais. Au surplus, ces sommes ont été versées sur le compte bancaire du frère de Mme B...-E..., alors qu'aucune pension versée à des collatéraux ne peut être déduite du revenu imposable.

6. Par suite, l'administration fiscale a pu, à bon droit, réintégrer dans les revenus de M. et Mme B...-E... les sommes déclarées comme versées par ces derniers à titre de pensions alimentaires à leurs ascendants.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales :

7. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration ". Aux termes de l'article L. 80 B du même livre, cette garantie est applicable : " Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal (...) ".

8. Il ressort d'un avis d'imposition du 31 juillet 2004, que l'administration a déduit le montant des pensions versées par M. et Mme B...-E... à leur père suite à une demande expresse de ce dernier. Toutefois, cet avis d'imposition non motivé par lequel l'administration a accordé un dégrèvement, ne constituait pas, au sens des dispositions précitées, une prise de position formelle de l'administration sur l'appréciation d'une situation de fait qui lui serait opposable sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales. Ainsi, les contribuables ne sont pas fondés à se prévaloir de la méconnaissance de la doctrine fiscale.

Sur les conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires au titre d'un investissement outre-mer :

9. Aux termes de l'article 199 undecies A du code général des impôts : " 1. Il est institué une réduction d'impôt sur le revenu pour les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B qui investissent dans les départements et territoires d'outre-mer, dans les collectivités territoriales de Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon et en Nouvelle-Calédonie entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2006 2. La réduction d'impôt s'applique : (...) b) Au prix de revient de l'acquisition ou de la construction régulièrement autorisée par un permis de construire d'un immeuble neuf situé dans les départements, territoires ou collectivités visés au 1, que le propriétaire prend l'engagement de louer nu dans les six mois de l'achèvement ou de l'acquisition si elle est postérieure pendant cinq ans au moins à des personnes, autres que son conjoint ou un membre de son foyer fiscal, qui en font leur habitation principale (...) ". Il résulte de ces dispositions que si, compte tenu de l'engagement pris par le propriétaire de louer le logement à une personne qui en fait sa résidence principale, l'utilisation de cet immeuble selon cette affectation doit en principe, et pour la période susmentionnée, être effective et continue, la vacance du logement pendant cette période ne saurait cependant faire perdre, à elle seule, le droit à réduction d'impôt si le propriétaire justifie que cette vacance n'est pas de son fait, c'est-à-dire établit, notamment, qu'il a accompli les diligences suffisantes pour réaliser effectivement cette location et que les conditions qu'il a fixées pour la mise en location ne font pas normalement obstacle à celle-ci. Si les dispositions précitées ne prévoient pas de délai de vacance précis au-delà duquel le contribuable doit être regardé comme n'ayant pas respecté son engagement de louer l'immeuble nu concerné pendant cinq ans au moins à des personnes qui en font leur habitation principale, la durée obligatoire de celle-ci conduit nécessairement à n'admettre que des vacances courtes et transitoires indépendantes de la volonté du propriétaire et ne portant atteinte que de façon limitée à la continuité de la location.

10. Il résulte de l'instruction, et n'est pas contesté, que la vacance de la location de l'appartement des époux B...-E... pour lequel la réduction d'impôt a été effectuée au titre de l'article 199 undecies précité, a duré deux ans et deux mois, entre le 23 mars 2009 et le 31 mai 2011, soit près d'un tiers de la durée de l'engagement de location souscrit par M. B...le 30 mai 2006.

11. En premier lieu, si M. et Mme B...-E... apportent la preuve que leur appartement qui a subi des infiltrations n'a pu être réparé que le 29 octobre 2010, en raison notamment d'un refus d'accès du propriétaire au logement d'où provenait la fuite, il ne ressort cependant pas des pièces du dossier une quelconque impossibilité de louer l'appartement avant et/ou pendant la réalisation des travaux de pose d'une grille et de peinture. Au surplus, une simple diminution du loyer à proportion de la surface concernée et du temps de réalisation leur avait été conseillée par la responsable juridique de la société SOBEFI Immobilier. Il n'est au demeurant pas contesté que leur logement n'était pas insalubre.

12. En deuxième lieu, les époux B...-E... soutiennent qu'ils ont accompli les diligences suffisantes pour procéder à la location de l'appartement suite aux travaux dès lors que la société SOBEFI Immobilier chargée de la recherche de locataire a publié des offres de location dans les journaux locaux sur la période incriminée et ils ont relancé à plusieurs reprises cette dernière par des mails dont ils justifient. Cependant, ni les attestations fournies par la société indiquant que " tous les moyens ont été mis en oeuvre pour une relocation rapide ", ni les mails produits ne suffisent à justifier du sérieux des recherches effectuées. Au demeurant, si les époux B...allèguent, sans l'établir, que la vacance de leur appartement serait également liée au marché locatif particulièrement difficile sur la zone, ils n'établissent pas avoir admis une baisse significative de leur loyer. Ainsi, M. et Mme B...-E... n'établissent pas avoir accompli toutes les diligences suffisantes pour que leur bien soit immédiatement reloué. Par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a procédé à la reprise des réductions d'impôts dont ils ont bénéficié.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...-E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B...-E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B...-E... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

N°17DA01469


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17DA01469
Date de la décision : 30/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Desticourt
Rapporteur ?: Mme Odile Desticourt
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : GUEY BALGAIRIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/09/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-07-30;17da01469 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award