Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SARL MMF Services a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012 et des rappels des taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont réclamés pour la période du 1er avril 2009 au 31 mars 2012 et, d'autre part, l'annulation de l'avis de mise en recouvrement du 8 octobre 2013 des impositions précitées.
Par un jugement n° 1400725-1403858 du 13 octobre 2016, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 19 décembre 2016, le 2 janvier 2017 et le 10 octobre 2017, la SARL MMF Services, représentée par Me A...B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 13 octobre 2016 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012 et des rappels des taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont réclamés pour la période du 1er avril 2009 au 31 mars 2012 ;
3°) d'annuler l'avis de mise en recouvrement du 8 octobre 2013 ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de commerce ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rodolphe Féral, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public.
1. Considérant que la SARL MMF Services, qui exerce une activité de conseil, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 1er avril 2009 au 31 mars 2012 et, en matière d'impôt sur les sociétés, sur les exercices clos les 31 mars 2010, 2011 et 2012 ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a notifié à la SARL MMF Services les rehaussements envisagés par proposition de rectification du 19 avril 2013, reçue le 3 mai suivant ; que les impositions supplémentaires correspondantes ont été mises en recouvrement par avis du 8 octobre 2013 ; que la SARL MMF Services a présenté devant le tribunal administratif d'Amiens deux requêtes, l'une tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012 et des rappels des taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont réclamés pour la période du 1er avril 2009 au 31 mars 2012 et l'autre, tendant à l'annulation de l'avis de mise en recouvrement du 8 octobre 2013 ; que la SARL MMF Services relève appel du jugement du 13 octobre 2016 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a joint ces deux requêtes et les a rejetées ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que l'avis de mise en recouvrement, adopté en application de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales, n'est pas un acte de poursuite et a pour seul objet d'authentifier et de fixer la créance de l'administration et constitue par la même la phase ultime de la procédure d'imposition ; qu'ainsi sa régularité ne peut être contestée que par la voie du recours de plein contentieux d'assiette prévu par les dispositions de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales et des conclusions présentées en excès de pouvoir contre cet avis de mise en recouvrement et tendant à son annulation sont irrecevables ; qu'en conséquence, le tribunal administratif d'Amiens en jugeant que la SARL MMF Services, lorsqu'elle lui a demandé l'annulation de l'avis de mise en recouvrement du 8 octobre 2013, devait être regardée comme demandant la décharge des impositions visées par cet avis de mise en recouvrement a requalifié les conclusions dont il était saisi ; qu'en se bornant à rejeter ces conclusions aux fins de décharge, il n'a pas omis de statuer sur les conclusions aux fins d'annulation, lesquelles, si elles avaient été interprétées comme telles, auraient été irrecevables ; que, par suite, le moyen selon lequel le tribunal aurait statué infra petita doit être écarté ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : (...) / 2° à l'impôt sur les sociétés, les personnes morales passibles de cet impôt qui n'ont pas déposé dans le délai légal leur déclaration, sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 68 (...) " ; que les articles L. 67 et L. 68 du livre des procédures fiscales imposent la notification d'une mise en demeure au contribuable n'ayant pas satisfait à ses obligations déclaratives, avant d'engager la procédure de taxation d'office ou d'évaluation d'office prévue aux 1°, 2°, 4° et 5° de l'article L. 66 ;
4. Considérant que la SARL MMF Services soutient que l'administration fiscale ne lui a jamais adressé de mises en demeure de souscrire ses déclarations d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2009, 2010, 2011 et 2012 ; que l'administration fiscale allègue qu'elle a mis en demeure, les 15 mai 2012 et 2 juillet 2012, la société requérante de régulariser sa situation dans un délai de trente jours au titre des exercices clos les 31 mars 2011 et 31 mars 2012 ; qu'il appartient à l'administration fiscale d'établir que les requérants ont reçu ces mises en demeure ; que pour ce faire, l'administration fiscale produit deux attestations émanant de la Poste du Blanc-Mesnil qui lui ont été adressées le 2 février 2013 indiquant, pour l'une, que " l'objet recommandé n°1a06947790110 a été distribué le 18 mai 2012 à votre destinataire " et, pour l'autre, que " l'objet recommandé n°1a07108280471 a été distribué le 5 juillet 2012 à votre destinataire " ; qu'en l'absence de production de l'avis d'envoi ou de l'avis de réception de la notification de redressement, permettant d'établir une correspondance avec le numéro du courrier recommandé adressé à la SARL MMF Services et en l'absence de toute mention dans les attestations du nom de la société requérante et de l'adresse à laquelle ils auraient été adressés, les attestations postales, en raison de leurs imprécisions, ne suffisent pas à apporter la preuve requise de ce que la SARL MMF Services a été destinataire des mises en demeure prévues par les dispositions de l'article L. 68 du livre des procédures fiscales ; que l'administration fiscale ne saurait se prévaloir de mentions manuscrites des numéros de recommandés portées sur les copies des deux mises en demeure dès lors que n'est pas établie la date à laquelle ces mentions ont été apposées ; que, dans ces conditions, la SARL MMF Services est fondée à soutenir qu'à défaut d'envoi des mises en demeure prévues par les dispositions de l'article L. 68 du livre des procédures fiscales, l'administration fiscale ne pouvait avoir recours à la procédure de taxation d'office au titre des exercices clos les 31 mars 2011 et 31 mars 2012 et que la procédure est donc irrégulière au titre de ces deux exercices ; qu'en revanche, la SARL MMF Services ne saurait utilement soutenir que la procédure serait également irrégulière pour le même motif au titre des exercices clos en 2009 et 2010 dès lors qu'elle n'a présenté aucune conclusion aux fins de décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2009 et que pour l'année 2010, l'administration fiscale a mis en oeuvre la procédure de redressement contradictoire et non une procédure de taxation d'office ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis (...) de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires (...) " ; qu'il résulte de l'instruction que la SARL MMF Services, postérieurement à la réception de la proposition de rectification, a adressé le 5 mai 2013 un courrier à l'administration fiscale dans lequel elle indiquait " Nous sommes au regret de constater que vous maintenez l'ensemble des rectifications pour l'exercice 2008-2009. Comme vous ne tenez pas compte des observations du contribuable, nous vous prions de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires " ; qu'il résulte des termes de ce courrier que la société requérante ne demandait la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qu'au titre de l'exercice clos 2008-2009 et non pour d'autres exercices ; que, par suite, la SARL MMF Services n'est pas fondée à soutenir que la procédure de redressement contradictoire mise en oeuvre au titre de l'exercice clos le 31 mars 2010 serait irrégulière au motif que l'administration fiscale n'aurait pas saisi la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires comme elle l'avait demandé dans son courrier du 5 mai 2013 ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 256-8 du livre des procédures fiscales : " (...) Le comptable public compétent pour établir l'avis de mise en recouvrement est soit celui du lieu de déclaration ou d'imposition du redevable, soit, dans le cas où ce lieu a été ou aurait dû être modifié, celui compétent à l'issue de ce changement, même si les sommes dues se rapportent à la période antérieure à ce changement (...) " ; que ces dispositions, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, offrent, en cas de transfert de siège social de la société, une alternative entre le comptable territorialement compétent à l'issue du transfert et le comptable territorialement compétent avant ce changement pour établir l'avis de mise en recouvrement et non une compétence exclusive au comptable territorialement compétent à l'issue de ce transfert ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'avis de mise en recouvrement portant sur la période du 1er avril 2009 au 31 mars 2012 a été établi par le comptable public de Soissons, le 8 octobre 2013 ; que même si à cette date, la SARL MMF Services avait transféré son siège social au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis) depuis le mois de juillet 2013, ce transfert de siège social n'avait pas ôté au comptable public de Soissons, territorialement compétent avant le transfert de siège social de la société, sa compétence pour établir l'avis de mise en recouvrement en litige ; qu'ainsi, l'avis de mise en recouvrement établi le 8 octobre 2013 n'est pas entaché d'une irrégularité au regard des dispositions de l'article R. 256-8 du livre des procédures fiscales ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL MMF Services est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 mars 2011 et 31 mars 2012 ;
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La SARL MMF Services est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 31 mars 2011 et 31 mars 2012.
Article 2 : Le jugement n° 1400725-1403858 du 13 octobre 2016 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : L'Etat versera à la SARL MMF Services une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL MMF Services et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
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N°16DA02441