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24/01/2017 | FRANCE | N°15DA00250

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3, 24 janvier 2017, 15DA00250


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... D...a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010.

Par un jugement n° 1203516 du 11 décembre 2014, le tribunal administratif de Rouen a fixé à 8 580 euros le montant de la pension alimentaire déductible des revenus de Mme D... pour l'année 2010, a prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu résultant de la différen

ce entre le montant rappelé pour l'année 2010 et celui résultant de la prise en compte d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... D...a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010.

Par un jugement n° 1203516 du 11 décembre 2014, le tribunal administratif de Rouen a fixé à 8 580 euros le montant de la pension alimentaire déductible des revenus de Mme D... pour l'année 2010, a prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu résultant de la différence entre le montant rappelé pour l'année 2010 et celui résultant de la prise en compte de la pension alimentaire ainsi fixée, et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 février 2015, Mme D..., représentée par Me C... D...G..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette le surplus de sa demande, sauf en ce qui concerne la prise en compte des charges de l'immeuble situé à Verneuil-sur-Avre (Eure) pour la détermination de son déficit foncier ;

2°) de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010, à l'exception des droits supplémentaires résultant du rejet des charges de l'immeuble situé à Verneuil-sur-Avre (Eure) pour la détermination de son déficit foncier.

Elle soutient que :

- elle est en droit de déduire au titre des frais professionnels, pour la détermination de son revenu net, les frais de double résidence et de trajets supportés pour son activité professionnelle ;

- elle justifie des autres frais professionnels rejetés par l'administration ;

- l'administration fiscale devait prendre en compte, pour la détermination des frais supportés pour sa mère et déductibles de son revenu global à titre de pension alimentaire, ceux correspondant aux dépenses courantes, devant être évalués à un tiers du salaire minimum interprofessionnel de croissance ;

- c'est à tort que l'administration a refusé de prendre en compte, pour la détermination de son déficit foncier, les charges qu'elle a supportées pour un immeuble dont elle ne s'est pas réservé la jouissance.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête et, par la voie d'un recours incident, demande à la cour de remettre à la charge de Mme D... la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010 à concurrence de la réduction prononcée par le jugement attaqué du tribunal administratif de Rouen et de réformer dans cette mesure ce jugement.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dominique Bureau, première conseillère,

- et les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public.

1. Considérant qu'à la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale a mis à la charge de Mme D... une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2010, partiellement maintenue à la suite de la réclamation de la contribuable ; que, par un jugement du 11 décembre 2014, le tribunal administratif de Rouen a partiellement rejeté la demande de Mme D... tendant à la décharge de l'imposition supplémentaire maintenue à sa charge par l'administration fiscale ; que Mme D... relève dans cette mesure appel de ce jugement, sauf en ce qui concerne les rappels de droit résultant du rejet des charges supportées pour l'immeuble situé à Verneuil-sur-Avre (Eure) pour la détermination de son déficit foncier ; que, par la voie d'un recours incident, le ministre des finances et des comptes publics relève appel du jugement du 11 décembre 2014, en tant que le tribunal administratif de Rouen a fait partiellement droit à la demande de Mme D... ;

Sur l'appel principal de Mme D... :

En ce qui concerne la déduction des frais professionnels :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 83 du code général des impôts : " Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : / (...) 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales. / La déduction à effectuer du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut (...) ; elle est fixée à 10 % du montant de ce revenu. (...) / Les bénéficiaires de traitements et salaires sont également admis à justifier du montant de leurs frais réels (...) " ;

S'agissant des frais de double résidence :

3. Considérant que revêtent, notamment, le caractère de frais professionnels, déductibles en vertu de ces dispositions, les dépenses qu'un contribuable occupant un emploi salarié dans une localité éloignée de celle où la résidence de son foyer est établie doit exposer, tant pour se loger à proximité du lieu de son travail que pour effectuer périodiquement les trajets entre l'une et l'autre localités, dès lors que la double résidence ne résulte pas d'un choix de simple convenance personnelle, mais est justifiée par une circonstance particulière ;

4. Considérant, d'une part, que Mme D... a déclaré, au titre de ses frais réels, les taxes foncière et d'habitation, ainsi que les frais d'assurance et de copropriété afférents au logement situé à Bernay (Eure), à proximité de l'établissement où elle exerce la profession d'enseignante ; que la circonstance que, bien que son état de santé lui impose de résider à proximité de son lieu de travail, elle souhaite continuer à occuper la maison située à La-Bonneville-sur-Iton (Eure), où elle vivait depuis 1973, ne constitue pas une circonstance particulière de nature à justifier la déduction, en tant que frais professionnels, des dépenses afférentes à un second logement et de trajets entre les deux résidences, mais constitue un choix de simple convenance personnelle ; que c'est, par suite, à bon droit que l'administration fiscale, qui a admis dans la réponse aux observations de la contribuable le caractère déductible de la part de ces frais, ainsi que celle des frais d'électricité et d'eau affectés à la pièce réservée par la requérante à l'exercice de son activité professionnelle et calculés au prorata de la superficie de cette pièce par rapport à celle du logement, a rejeté la déduction du surplus de ces frais, ainsi que celle du coût des trajets entre les deux résidences et du coût de location d'un garage situé au Bernay ;

S'agissant des autres frais :

5. Considérant qu'il résulte des dispositions, citées au point 2, de l'article 83 du code général des impôts, que seuls les frais professionnels justifiés par le contribuable, tant dans leur principe que dans leur montant, peuvent être admis en déduction ;

6. Considérant, en premier lieu, que Mme D... n'établit ni la réalité des déplacements qu'elle soutient avoir effectués, pour des raisons professionnelles, à destination d'Evreux, Paris et Rouen, où se situent les services du rectorat et où elle affirme avoir été convoquée à six reprises, ni l'utilisation à cette fin de son véhicule personnel ; qu'elle n'est, par suite, pas fondée à demander la déduction des frais d'utilisation de son véhicule pour les trajets allers-retours correspondants ;

7. Considérant, en second lieu, que Mme D... n'établit pas davantage le caractère professionnel de ses frais de téléphonie, en particulier ceux d'acquisition d'un second téléphone cellulaire ; qu'elle ne démontre pas plus par ses seules affirmations, l'usage exclusivement professionnel d'un abonnement internet et de logiciels non spécifiques dont elle a fait l'acquisition, et ne donne aucun élément permettant de déterminer la part des coûts correspondants imputable à l'exercice de son activité d'enseignante ; qu'elle ne justifie pas avoir, par ailleurs, exposé des frais de fournitures diverses autres que ceux justifiés par les factures et tickets de caisses admis par l'administration, à hauteur de 1 273 euros en produisant d'autres tickets de caisse ou factures, soit non datés et insusceptibles d'être rattachés à l'année d'imposition, soit dont l'objet est insuffisamment précis ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 7, que Mme D... n'est pas fondée à contester la substitution par l'administration fiscale de la déduction forfaitaire de 10 % prévue au 3° de l'article 83 du code général des impôts à celle des frais réels qu'elle a déclarés ;

En ce qui concerne la déduction de la pension alimentaire versée à la mère de Mme D... :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (...) sous déduction : / (...) II. Des charges ci-après lorsqu'elles n'entrent pas en compte pour l'évaluation des revenus des différentes catégories : 2° (...) pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211, 367 et 767 du code civil à l'exception de celles versées aux ascendants quand il est fait application des dispositions prévues aux 1 et 2 de l'article 199 sexdecies " ; qu'aux termes de l'article 205 du code civil : " Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin. (...) " ;

10. Considérant qu'après avoir refusé de ternir compte, pour déterminer la situation du foyer fiscal de Mme D..., d'une part supplémentaire pour sa mère, au motif que celle-ci ne vivait pas au domicile de la contribuable, mais dans une maison d'accueil pour personnes âgées, l'administration fiscale, admettant l'état de besoin de cette dernière, a accepté de déduire pour la détermination du revenu net imposable au titre de l'année 2010, une somme de 7 503 euros, correspondant à la différence entre, d'une part, les dépenses justifiées par Mme D..., à hauteur de 24 838 euros pour les frais d'hébergement, de 564 euros pour le téléphone et 32 euros pour l'assurance d'habitation, et d'autre part, la somme de 17 931 euros correspondant au montant de la pension dont sa mère était bénéficiaire ; que Mme D..., qui ne justifie pas avoir effectivement supporté des frais supplémentaires pour les besoins de la vie courante de sa mère, n'est pas fondée à demander à ce titre une déduction évaluée forfaitairement à un tiers du salaire minimum interprofessionnel de croissance ;

En ce qui concerne le déficit foncier déductible :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (...) sous déduction : / I. du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus ; (...) / Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation : / (...) 3° Des déficits fonciers, lesquels s'imputent exclusivement sur les revenus fonciers des dix années suivantes ; (...) / L'imputation exclusive sur les revenus fonciers n'est pas non plus applicable aux déficits fonciers résultant de dépenses autres que les intérêts d'emprunt. L'imputation est limitée à 10 700 euros. La fraction du déficit supérieure à 10 700 euros et la fraction du déficit non imputable résultant des intérêts d'emprunt sont déduites dans les conditions prévues au premier alinéa (...) " ; qu'aux termes de l'article 15 du même code : " (...) II Les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu (...) " ;

12. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les charges afférentes aux logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne peuvent pas venir en déduction pour la détermination du revenu foncier compris dans le revenu global soumis à l'impôt sur le revenu ; que la réserve de jouissance est établie, notamment, par l'accomplissement ou non de diligences ayant pour objet de donner le bien en location ; qu'il appartient au propriétaire d'apporter la preuve qu'il a offert à la location pendant l'année en cause le logement resté vacant au titre duquel il demande la déduction de charges foncières et qu'il a pris toutes les dispositions nécessaires pour le louer ;

13. Considérant qu'en se bornant à produire la photographie de la pancarte portant la mention " à louer " installée au balcon d'un immeuble, à faire état d'appels téléphoniques de deux locataires potentiels qui n'y ont finalement pas donné suite et à invoquer une situation économique difficile, Mme D... n'établit pas avoir accompli au cours de l'année 2010 toutes diligences pour mettre son bien en location, alors même qu'en novembre 2010, elle a fait remplacer la chaudière, en panne depuis l'été ; qu'elle doit ainsi être regardée comme s'étant réservé la jouissance de ce logement au cours de l'année considérée ; qu'elle ne pouvait, par suite, tenir compte des frais supportés pour cet immeuble pour la détermination de son déficit foncier ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a partiellement rejeté sa demande ;

Sur le recours incident du ministre :

15. Considérant que Mme D... ne justifie pas, par la seule production d'un avis d'échéance de cotisation pour un contrat " santé retraite + chirurgie " dont les règlements par ses soins ne sont pas établis, avoir effectivement payé pour sa mère des cotisations de mutuelle ; qu'ainsi, le ministre de l'économie et des finances est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a estimé que le montant total à régler de 1 077 euros figurant sur ce document devait en application des dispositions, citées au point 9, du 2° du II de l'article 256 du code général des impôts, être déduit pour la détermination du revenu net imposable de Mme D... au titre de l'année 2010 ; qu'il y a lieu, par suite, de remettre à la charge de cette dernière la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010, en droits et pénalités, à concurrence de la décharge prononcée par le jugement du tribunal administratif de Rouen n° 1203516 du 11 décembre 2014 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : La cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle Mme D... a été assujettie au titre de l'année 2010 est remise à sa charge, à concurrence de la décharge prononcée par le jugement du tribunal administratif de Rouen n° 1203516 du 11 décembre 2014.

Article 3 : Le jugement n° 1203516 du tribunal administratif de Rouen du 11 décembre 2014 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... D...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 10 janvier 2017 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme B...A..., première conseillère,

- Mme Dominique Bureau, première conseillère.

Lu en audience publique le 24 janvier 2017.

Le rapporteur,

Signé : D. BUREAULe président-assesseur,

Signé : M. F...

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier

Marie-Thérèse Lévèque

2

N°15DA00250


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA00250
Date de la décision : 24/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Détermination du revenu imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. Lavail Dellaporta
Rapporteur ?: Mme Dominique Bureau
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : DUMORTIER-MEYNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 07/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-01-24;15da00250 ?
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