Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Aviva Assurances a demandé de condamner le centre hospitalier universitaire d'Amiens à lui verser la somme globale de 34 662,86 euros en remboursement des sommes qu'elle a versées à M. D...et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise en exécution d'un jugement du tribunal de grande instance de Beauvais du 6 septembre 2010.
Par un jugement n°1203113 du 27 novembre 2014, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 janvier 2015, le 22 juin 2016 et le 28 juin 2016, la SA Aviva Assurances représentée par Me F...A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 27 novembre 2014 du tribunal administratif d'Amiens ;
2°) de condamner le centre hospitalier universitaire d'Amiens à lui verser la somme globale de 34 662,86 euros en remboursement des sommes qu'elle a versées à M. D...et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise ;
3°) de condamner le centre hospitalier universitaire d'Amiens à lui verser la moitié des frais d'expertise liquidés à la somme de 1 100 euros ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire d'Amiens une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué a fait une application erronée des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;
- elle peut se prévaloir de la subrogation légale prévue à l'article 1251 du code civil ;
- la responsabilité du centre hospitalier universitaire d'Amiens est engagée au regard de l'infection nosocomiale contractée par M. D...dans cet établissement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mars 2015, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), représenté par Me E...C...conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la SA Aviva Assurances d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il n'a vocation qu'à la prise en charge du préjudice de la victime d'un accident médical ou d'une infection nosocomiale ou de ses ayants-droit, à l'exclusion des recours des tiers tenus à indemnisation de la victime même subrogés dans les droits de celle-ci ;
- il n'a pas la qualité d'auteur responsable du dommage et ne peut être tenu au paiement de la dette au sens des dispositions du 3° de l'article 1251 du code civil.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 3 juillet 2015 et le 27 juin 2016, le centre hospitalier universitaire d'Amiens, représenté par la SCP Montigny et Doyen, conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à ce que soient écartées des débats les correspondances échangées entre avocats ;
3°) à la mise à la charge de la SA Aviva Assurances d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la demande devant le tribunal était irrecevable faute de précision sur le fondement de son action ;
- il n'est pas justifié de l'indemnisation effective de l'assuré ;
- le jugement du tribunal de grande instance de Beauvais du 6 septembre 2010 ne lui est pas opposable ;
- sa responsabilité ne peut être engagée en l'absence de preuve de ce qu'une infection nosocomiale aurait été contractée au sein du centre hospitalier universitaire d'Amiens ;
- le montant des sommes réclamées est excessif ;
- le secret professionnel institué par la loi du n° 71-1130 du 31 décembre 1971 interdit de divulguer le contenu de correspondances échangées entre avocats.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président assesseur,
- les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public,
- et les observations de Me F...A...représentant la société Aviva Assurances.
1. Considérant que le 15 août 2000, M. B...D...a été victime d'un accident provoqué par l'éclatement d'un pneu d'un engin agricole appartenant à M.H..., assuré auprès de la société Aviva Assurances, le blessant à la jambe gauche ; qu'après avoir été hospitalisé au centre hospitalier universitaire d'Amiens (CHU) pour le traitement de ses blessures, l'état de santé de M. D...a été aggravé par l'apparition d'une infection par staphylocoque doré contractée lors de son hospitalisation ; que, par un jugement du 6 septembre 2010, le tribunal de grande instance de Beauvais a condamné la société Aviva Assurances à verser à la victime des indemnités en réparation des différents préjudices subis et à rembourser à la caisse primaire d'assurance de l'Oise les frais que celle-ci avait exposés pour le compte de son assuré social ; que la société Aviva Assurances relève appel du jugement du 27 novembre 2014 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté, en tant qu'elle était irrecevable, sa demande tendant à ce que le centre hospitalier d'Amiens soit condamné à lui rembourser une partie des sommes qu'elle avait acquittées à la suite du jugement du tribunal de grande instance de Beauvais ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que lorsque l'auteur d'un dommage ou son assureur, condamné, comme en l'espèce, par le juge judiciaire à en indemniser la victime, saisit la juridiction administrative d'un recours en vue de faire supporter la charge de la réparation par la collectivité publique de la part du dommage lui incombant, sa demande, quel que soit le fondement de sa responsabilité retenu par le juge judiciaire, n'a pas le caractère d'une action récursoire par laquelle il ferait valoir des droits propres à l'encontre de cette collectivité mais d'une action subrogatoire fondée sur les droits de la victime indemnisée à l'égard de cette collectivité ;
3. Considérant que la société Aviva Assurances, qui s'est prévalue dans sa demande de première instance du jugement cité au point 1, a sollicité du tribunal administratif d'Amiens la condamnation du CHU d'Amiens à lui verser la somme globale de 34 662,86 euros en remboursement des sommes qu'elle avait acquittées en exécution de ce jugement au profit de M. D... et de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise ; qu'elle devait ainsi nécessairement être entendue comme se prévalant du bénéfice de la subrogation de plein droit en application des dispositions générales du 3° de l'article 1251 du code civil ; que la société Aviva Assurances est dès lors fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa requête comme irrecevable ; que, par suite, le jugement attaqué doit être annulé ;
4. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif d'Amiens pour qu'il statue à nouveau sur la demande de la société Aviva Assurances ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
6. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHU d'Amiens la somme que la SA Aviva Assurances demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que les dispositions du même article font obstacle à ce que les sommes demandées à ce titre par le CHU d'Amiens et l'ONIAM soient mises à la charge de la SA Aviva Assurances ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1203113 du 27 novembre 2014 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.
Article 2 : La société Aviva Assurances est renvoyée devant le tribunal administratif d'Amiens pour qu'il soit statué sur sa demande.
Article 3 : Les conclusions des parties tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Aviva Assurances, au centre hospitalier universitaire d'Amiens et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.
Délibéré après l'audience publique du 5 juillet 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Michel Hoffmann, président de chambre,
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- M. Laurent Domingo, premier conseiller.
Lu en audience publique le 19 juillet 2016.
Le rapporteur,
Signé : M. I... Le président de chambre,
Signé : M. G...
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le Greffier
Marie-Thérèse Lévèque
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N°15DA00115