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16/06/2016 | FRANCE | N°15DA01940

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 16 juin 2016, 15DA01940


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 24 mars 2015 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1504521 du 16 novembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 7 décembre 2015

sous le n° 15DA01941, M. A...D..., représentée par Me B...F..., demande à la cour :

1°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 24 mars 2015 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1504521 du 16 novembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 7 décembre 2015 sous le n° 15DA01941, M. A...D..., représentée par Me B...F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire et fixation du pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour en qualité de conjoint de français dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la communauté de vie avec son épouse n'est pas inexistante ;

- il remplissait les conditions lui donnant droit à un titre de séjour de dix ans sur le fondement de l'article 10 alinéa 1 de l'accord franco-tunisien ;

- sa situation n'a pas fait l'objet d'un examen sérieux et particulier ;

- son droit à la vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu ;

- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît son droit à la vie privée et familiale ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays d'éloignement est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour.

Par un mémoire enregistré le 5 avril 2016, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

II. Par une requête, enregistrée le 7 décembre 2015 sous le n° 15DA01940, M. A...D..., représentée par Me B...F..., demande à la cour :

1°) de surseoir à l'exécution du jugement ;

2°) de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de l'arrêt à intervenir ;

3°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'exécution du jugement, qui va le séparer de son épouse, risque d'entrainer des conséquences difficilement réparables ;

- les moyens soulevés à l'appui de sa requête au fond sont sérieux.

Par un mémoire enregistré le 5 avril 2016, commun à la requête au fond, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'exécution du jugement n'entrainerait pas de conséquences difficilement réparables ;

- les moyens ne sont pas sérieux.

M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 janvier 2016 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai qui a désigné Me B...F....

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Christian Bernier, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. A...D..., de nationalité tunisienne, qui a épousé en Tunisie Mme C...E...le 26 juin 2013, est régulièrement entré en France le 1er janvier 2014 muni d'un visa de long séjour ; que sa demande de titre de séjour en qualité de conjoint de Français, présentée le 13 novembre 2013, a été rejetée le 24 mars 2015 pour absence de vie commune par le préfet du Nord qui a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire et a désigné la Tunisie comme pays de destination ;

2. Considérant que par une requête enregistrée sous le n° 15DA01941, M. D...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Nord du 24 mars 2015 ; que par une requête enregistrée sous le n° 15DA01940, il demande à la cour, saisie sur le fondement de l'article R.811-17 du code de justice administrative, de surseoir à l'exécution de ce jugement ; qu'il y a lieu de joindre ces deux requêtes qui ont fait l'objet d'une instruction commune pour y statuer par un seul arrêt ;

Sur la requête n° 15DA01941 :

3. Considérant qu'aux termes du 1° de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 : " Un titre de séjour d'une durée de dix ans, ouvrant droit à l'exercice d'une activité professionnelle, est délivré de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour sur le territoire français : / a) Au conjoint tunisien d'un ressortissant français, marié depuis au moins un an, à condition que la communauté de vie entre époux n'ait pas cessé (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des constatations de l'enquête de police diligentée par le préfet du Nord que, le 1er décembre 2014, M. D...ne résidait pas au domicile du couple et que son épouse n'a pas été en mesure de produire des effets de son mari attestant une résidence effective et récente ni de fournir d'information sur sa situation actuelle, en particulier sur l'endroit où il se trouvait ; qu'il ressort de l'enquête de voisinage qui s'est poursuivie le 2 décembre 2014 que les voisins ont très rarement vu M. D...et que ses rares passages au domicile du couple donnaient lieu à de violentes disputes ; que la production de factures d'eau, de gaz et d'électricité et de quittances de loyers établies au nom des deux conjoints, basées sur des éléments déclaratifs, n'est pas de nature, en elle-même, à établir la réalité d'une vie commune ; que si les deux époux disposent d'un compte joint, il ne ressort pas des mouvement de fonds que M. D...contribue aux ressources du ménage, ni qu'il utilise ce compte pour régler ses dépenses personnelles ; que la copie du passeport de MmeD..., qui s'est rendue en Tunisie avant l'arrivée de son époux en France, et les photographies de vacances produites ne sont pas susceptibles d'établir que la vie commune existait encore à la date à laquelle le préfet a statué sur la demande de titre de séjour ; que l'attestation de Mme D...et celles de personnes présentées comme des amis du couple sont laconiques et peu circonstanciées ; que dans sa requête, M. D...ne fournit aucune indication précise et vérifiable quant à sa situation et à son domicile effectifs ; qu'en l'absence d'éléments probants de nature à infirmer les constatations de l'enquête de police, le préfet du Nord ne s'est pas mépris en estimant que la communauté de vie entre les époux avait cessé ; que le moyen tiré de la violation du 1° de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 doit être écarté ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

6. Considérant que M.D..., qui est sans enfant à charge, a vécu jusqu'à l'âge de vingt-sept ans dans son pays d'origine ; qu'il n'établit ni même ne soutient qu'il aurait développé en France des attaches privées et familiales autres que celles résultant de son mariage ; qu'ainsi, compte tenu de l'absence de vie commune effective entre les époux, la décision attaquée n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ; que, pour les mêmes motifs, M. D...n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet du Nord aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur sa situation personnelle ;

7. Considérant que, la décision de l'administration ayant notamment été précédée d'une enquête de police, la situation de M. D...a fait l'objet d'un examen sérieux et particulier ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus de titre de séjour ;

9. Considérant que la décision par laquelle le préfet du Nord a refusé un titre de séjour à M. D...n'étant pas illégale, le requérant n'est pas fondé à en invoquer l'illégalité à l'appui de sa demande tendant à l'annulation de la décision distincte lui faisant obligation de quitter le territoire et de la décision fixant le pays de destination ;

10. Considérant que les moyens tirés de l'atteinte portée à la vie privée et familiale de M. D...et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'obligation de quitter le territoire français sur sa situation personnelle, qui reprennent ce qui a été précédemment développé à l'appui de la demande tendant à l'annulation du refus de titre de séjour, doivent être écartés par les mêmes motifs ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes ; que par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées ;

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux demandes de son avocate présentées sur ce fondement et sur celui de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Sur la requête n° 15DA01940 :

13. Considérant que le présent arrêt statuant au fond sur les conclusions de M. D... tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Lille, les conclusions de la requête tendant au sursis à l'exécution de ce jugement sont, dès lors, dépourvues d'objet ; qu'il n'y a pas lieu d'y statuer.

DECIDE :

Article 1er : La requête n° 15DA01941 de M. D...est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête enregistrée sous le n° 15DA01940.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...D..., au ministre de l'intérieur et à Me B...F....

Copie en sera transmise pour information au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 2 juin 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Bernier, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Hadi Habchi, premier conseiller,

- Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 16 juin 2016.

L'assesseur le plus ancien,

Signé : H. HABCHILe président de la formation de jugement,

Rapporteur,

Signé: C. BERNIER

Le greffier,

Signé : S. DUPUIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le Greffier en chef,

Par délégation,

Le greffier,

Sylviane Dupuis

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Nos15DA01940,15DA01941


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA01940
Date de la décision : 16/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Bernier
Rapporteur ?: M. Christian Bernier
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : DANSET-VERGOTEN ; DANSET-VERGOTEN ; DANSET-VERGOTEN

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-06-16;15da01940 ?
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