Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Me C...d'Anjou a demandé au tribunal administratif de Rouen l'annulation du titre exécutoire en date du 24 février 2011 par lequel le directeur de la caisse du crédit municipal de Rouen a mis à sa charge la somme de 21 134,09 euros.
Par un jugement n° 1200422 du 12 décembre 2013, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 13 février 2014, le 5 mars 2015 et le 24 septembre 2015, Me d'Anjou, représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 12 décembre 2013 ;
2°) d'annuler le titre exécutoire en litige et, par voie de conséquence, le commandement de payer du 16 novembre 2011 ;
3°) de mettre à la charge de la caisse du crédit municipal de Rouen une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la demande de première instance est recevable ;
- il n'a pas été régulièrement mandaté en qualité d'expert de la caisse du crédit municipal de Rouen ;
- le titre exécutoire ne comporte pas l'indication des nom et prénoms de son auteur ;
- il ne comporte pas les bases de liquidation de la somme réclamée ;
- il n'a pas commis de faute dans l'évaluation de la collection d'art africain de Mme A... ;
- il n'est pas établi que la totalité de la collection lui a été remise pour procéder à sa vente aux enchères publiques ;
- la caisse du crédit municipal de Rouen a accordé un nouveau prêt à Mme A...en 1996 sans qu'il soit procédé à une nouvelle évaluation de la collection ;
- la caisse du crédit municipal de Rouen n'établit pas avoir recherché le recouvrement préalable de sa créance auprès de MmeA... ;
- le montant de la créance réclamée n'est pas justifié.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 17 novembre 2014, le 3 août 2015 et le 1er octobre 2015, la caisse du crédit municipal de Rouen, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Me d'Anjou une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la demande de première instance était tardive ;
- Me d'Anjou, qui a estimé la collection d'art africain, perçu des commissions pour cette mission et procédé à la vente, disposait d'un mandat pour ce faire ;
- Me d'Anjou aurait pu l'avertir d'une baisse de la valeur de la collection ;
- la collection a été remise à Me d'Anjou, qui n'a pas contesté son caractère complet avant la vente ;
- Me d'Anjou a commis des erreurs sur l'origine ethnique de certaines pièces de la collection.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code monétaire et financier ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- la décision du Tribunal des conflits n° 4039 du 11 janvier 2016 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Domingo, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Guyau, rapporteur public.
1. Considérant que la caisse du crédit municipal de Rouen, se fondant sur les dispositions de l'article D. 514-3 du code monétaire et financier, poursuit entre les mains de Me d'Anjou, commissaire-priseur, le recouvrement d'une somme de 21 134,09 euros, correspondant à la différence entre le produit de la vente d'une collection d'art africain évaluée par l'intéressé et les sommes prêtées, sur la base de cette évaluation, à Mme A...et qui n'ont pas été remboursées à la caisse du crédit municipal de Rouen ; que Me d'Anjou relève appel du jugement du 12 décembre 2013 du tribunal administratif de Rouen qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre exécutoire du 24 février 2011 émis par le directeur de la caisse du crédit municipal de Rouen en vue du recouvrement de cette créance ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision " ; que cette notification doit, s'agissant des voies de recours, mentionner, le cas échéant, l'existence d'un recours administratif préalable obligatoire ainsi que l'autorité devant laquelle il doit être porté ou, dans l'hypothèse d'un recours contentieux direct, indiquer si celui-ci doit être formé auprès de la juridiction administrative de droit commun ou devant une juridiction spécialisée et, dans ce dernier cas, préciser laquelle ;
3. Considérant que le titre exécutoire du 24 février 2011 porte l'indication selon laquelle " vous pouvez contester la somme mentionnée au recto en saisissant directement le tribunal judiciaire ou le tribunal administratif compétent selon la nature de la créance " ; que cette seule mention, qui ne précise pas quelle est la juridiction compétente, n'a pu faire courir les délais de recours ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la caisse du crédit municipal de Rouen doit être écartée ;
Sur le titre exécutoire du 24 février 2011 et le commandement de payer du 16 novembre 2011 :
4. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, alors en vigueur : " Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci " ; qu'en vertu de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction alors applicable : " (...) 4° Le titre de recettes individuel ou un extrait du titre de recettes collectif est adressé aux redevables sous pli simple (...) / En application de l'article 4 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif mentionne les nom, prénoms et qualité de la personne qui l'a émis ainsi que les voies et délais de recours. / Seul le bordereau de titres de recettes est signé pour être produit en cas de contestation (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions, d'une part, que le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif adressé au redevable doit mentionner les nom, prénoms et qualité de la personne qu'il l'a émis et, d'autre part, qu'il appartient à l'autorité administrative de justifier en cas de contestation que le bordereau de titre de recettes comporte la signature de l'émetteur ;
5. Considérant que le titre de recettes attaqué, émis le 24 février 2011 par le directeur de la caisse du crédit municipal de Rouen en vue du recouvrement de la somme de 21 134,09 euros auprès de Me D'Anjou, ne comporte ni le nom, ni le prénom, ni la qualité de son auteur ; qu'il n'est pas établi que le bordereau de titre de recettes, qui constitue le titre exécutoire auquel sont annexés les titres de perception individuels, comportait ces mentions et ait été porté à la connaissance de l'intéressé en même temps que le titre de perception litigieux ; que ce dernier est donc intervenu en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 et de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ; qu'il y a donc lieu de l'annuler ainsi que, par voie de conséquence, le commandement de payer du 16 novembre 2011 ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Me d'Anjou est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Me d'Anjou qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la caisse du crédit municipal de Rouen la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de la caisse du crédit municipal de Rouen une somme de 1 000 euros à verser à Me d'Anjou ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1200422 du tribunal administratif de Rouen du 12 décembre 2013, le titre exécutoire du 24 février 2011 et le commandement de payer du 16 novembre 2011 sont annulés.
Article 2 : La caisse du crédit municipal de Rouen versera à Me d'Anjou une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions de la caisse du crédit municipal de Rouen présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Me C... D'Anjou et à la caisse du crédit municipal de Rouen.
Délibéré après l'audience publique du 26 avril 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Michel Hoffmann, président de chambre,
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- M. Laurent Domingo, premier conseiller.
Lu en audience publique le 10 mai 2016.
Le rapporteur,
Signé : L. DOMINGOLe président de chambre,
Signé : M. D...
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Marie-Thérèse Lévèque
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N°14DA00285