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04/05/2016 | FRANCE | N°15DA00994

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 04 mai 2016, 15DA00994


Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 17 juin 2015, 9 mars 2016 et 30 mars 2016, la société anonyme L'immobilière européenne des mousquetaires, représentée par Me E...C..., demande à la cour :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 13 mars 2015 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a refusé de lui délivrer l'autorisation préalable requise en vue de procéder à la création d'un ensemble commercial sur le territoire de la commune de Vimy (Pas-de-Calais) ;

2°) de lui délivrer l'a

utorisation en cause ;

3°) d'enjoindre, à défaut, à la Commission nationale d'aménageme...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 17 juin 2015, 9 mars 2016 et 30 mars 2016, la société anonyme L'immobilière européenne des mousquetaires, représentée par Me E...C..., demande à la cour :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 13 mars 2015 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a refusé de lui délivrer l'autorisation préalable requise en vue de procéder à la création d'un ensemble commercial sur le territoire de la commune de Vimy (Pas-de-Calais) ;

2°) de lui délivrer l'autorisation en cause ;

3°) d'enjoindre, à défaut, à la Commission nationale d'aménagement commercial de lui délivrer l'autorisation d'exploitation sollicitée ;

4°) mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la société Dengi ne disposait pas d'un intérêt à agir devant la Commission nationale d'aménagement commercial ;

- la composition de la Commission nationale d'aménagement commercial était irrégulière ;

- la Commission a inexactement apprécié le projet au regard notamment de l'aménagement, de l'accès et de la circulation piétonnière et routière ;

- elle a commis une erreur d'appréciation en estimant que le projet ne contribuerait pas à l'animation de la vie urbaine et à l'aménagement harmonieux du territoire de l'agglomération de Vimy ;

- c'est à tort qu'elle s'est fondée, pour refuser l'autorisation en cause, sur l'insuffisance de desserte en transports en commun sur le site ;

- le projet entraîne la création de sols perméables et de végétalisation importante, de sorte que la Commission nationale a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en retenant une trop grande artificialisation des sols au droit de l'arrière de l'emprise foncière ;

- le projet répond aux objectifs d'aménagement du territoire et de développement durable au regard des dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 24 novembre 2015 et 23 mars 2016, la société Dengi, représentée par Me A...I..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société L'immobilière européenne des mousquetaires de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est tardive ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 février 2016, la société Nicoladis et la société Basly Distribution, représentées par Me J...F..., concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société L'immobilière européenne des mousquetaires de la somme de 1 500 euros à verser à chacune des sociétés sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mars 2016, la société Atac, représentée par Me G...D..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société L'immobilière européenne des mousquetaires de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est tardive ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 3 décembre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 30 mars 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 ;

- loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Hadi Habchi, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,

- et les observations de Me E...C..., représentant la société L'immobilière européenne des mousquetaires, de Me L...B..., représentant la société Dengi, et de Me H...K..., représentant la société Atac.

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel :

1. Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que la société L'immobilière des mousquetaires a reçu notification de la décision en litige, le 20 avril 2015 ; que, par suite, la requête de la société L'immobilière des mousquetaires enregistrée au greffe de la cour le 17 juin 2015 n'est pas tardive ;

Sur l'appréciation de la Commission nationale d'aménagement commercial :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce dans sa rédaction résultant de l'article 49 de la loi du 18 juin 2014, qui était entré en vigueur à la date de la décision attaquée : " (...) La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale (...) ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue (...) de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / (...) ; / 3° En matière de protection des consommateurs : / a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; / (...) " ;

3. Considérant que, par la décision contestée du 13 mars 2015, la Commission nationale d'aménagement commercial a annulé, à la demande des sociétés Dengi, Nicoladis et Basly Distribution, la décision du 28 octobre 2014 par laquelle la commission départementale d'aménagement commercial du Pas-de-Calais avait autorisé la création d'un ensemble commercial d'une surface de vente de 7 766 m² sur la commune de Vimy (Pas-de-Calais), composé d'un supermarché à enseigne " Intermarché " de 2 466 m², d'un magasin de bricolage de 4 093 m², d'une moyenne surface de 952 m² dédiée à l'équipement de la personne ou de la maison, de deux boutiques d'une surface totale de 255 m² et d'un " drive " de 185,50 m² incluant deux pistes de ravitaillement ; que pour refuser de délivrer l'autorisation sollicitée, elle s'est fondée sur trois motifs tirés, pour le premier, d'un effet négatif sur l'animation de la vie urbaine de l'agglomération de Vimy au regard de la distance par rapport au centre-ville et de l'importance de la surface de vente, pour le deuxième, d'une insuffisance de desserte par les transports en commun et par les voies cyclables, et, pour le troisième, d'une " artificialisation " des sols à l'arrière de l'emprise foncière et d'une méconnaissance d'un objectif de " compacité " du parc de stationnement de deux cent quatre-vingt-neuf places ;

En ce qui concerne l'atteinte à l'animation de la vie urbaine :

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet, destiné à réhabiliter une friche de type industriel et commercial, comportant des bâtiments auparavant affectés à un garage et une entreprise de revêtements et peintures, est situé en sortie d'agglomération sur un axe routier important à quelque 650 mètres du centre ville de la commune de Vimy qui comprend environ de 4 800 habitants ; que la surface de vente dédiée à l'alimentation inférieure à 2 500 m² est mesurée ; qu'elle complétera l'offre existante par rapport aux petits commerces de Vimy et pourra contribuer à recentrer une partie de la clientèle sur cette commune en évitant une évasion vers les centres commerciaux alimentaires de taille équivalente implantés dans les communes voisines notamment d'Avion et de Méricourt ; que la surface de vente dédiée au bricolage, la plus importante du projet, offrira pour les habitants de Vimy et alentours une offre nouvelle et complémentaire de celle d'Avion ; que, par suite, et en dépit des avis négatifs des ministres concernés, il n'apparaît pas que la création du projet nuira à l'animation de la vie urbaine et rurale du fait de la localisation du projet, de son manque d'intégration urbaine ou de sa taille ; que le projet tend également à rapprocher l'offre commerciale de lieux de vie au sens du 3° de l'article L. 752-6 du code de commerce ;

En ce qui concerne l'accessibilité :

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'il n'est pas prévu de pistes cyclables pour accéder à cet ensemble commercial et que la ligne du réseau local de transports en commun qui dessert déjà le site à une faible amplitude horaire journalière ; que, toutefois, ces circonstances ne justifient pas, à elles seules, le refus de l'autorisation sollicitée ; qu'en outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'accès des voitures par la route départementale 917 présente un risque sérieux ; que, par suite, c'est à tort que la Commission nationale d'aménagement commercial a retenu le motif tiré de la faible accessibilité du site, pour refuser l'autorisation au regard du d) du 1° ou du a) du 3° de l'article L. 752-6 du code de commerce ;

En ce qui concerne le développement durable :

6. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 4, le projet a vocation à assurer la résorption d'une ancienne friche industrielle et commerciale importante, et comporte, en outre, près de 22 % d'espaces verts et végétalisés ; qu'ainsi et alors même qu'environ 25 % du terrain n'était pas recouvert de bitume, le projet n'apparaît pas comme favorisant une imperméabilisation des sols par rapport à l'existant ; que le parking ne méconnaît pas davantage l'objectif d'une utilisation économe de l'espace ; que, par suite, la Commission nationale a commis une erreur d'appréciation au regard de l'objectif fixé par le législateur en matière de développement durable, défini au a) du 2° de l'article L. 752-6 du code de commerce ou par rapport au critère du b) du 1° du même article ;

7. Considérant que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la société L'immobilière européenne des mousquetaires, cette dernière est fondée à demander l'annulation de la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial du 13 mars 2015 ;

8. Considérant qu'à la date à laquelle la cour statue, le présent arrêt n'implique pas nécessairement la délivrance d'une décision d'autorisation par la Commission nationale d'aménagement commercial ;

9. Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à la société L'immobilière européenne des mousquetaires, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche, ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur leur fondement par la société Dengi, la société Nicoladis, la société Atac et la société Basly Distribution ;

DÉCIDE :

Article 1er : La décision du 13 mars 2015 de la Commission nationale d'aménagement commercial rejetant la demande de la société L'immobilière européenne des mousquetaires est annulée.

Article 2 : L'Etat versera à la société L'immobilière européenne des mousquetaires la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les autres conclusions des parties sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société L'immobilière européenne des mousquetaires, à la société Dengi, à la société Nicoladis, à la société Basly Distribution, à la société Atac, à la Commission nationale d'aménagement commercial et au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.

Copie en sera transmise pour information à la préfète du Pas-de-Calais.

Délibéré après l'audience publique du 21 avril 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,

- M. Christian Bernier, président-assesseur,

- M. Hadi Habchi, premier conseiller.

Lu en audience publique le 4 mai 2016.

Le rapporteur,

Signé : H. HABCHILe premier vice-président de la cour,

Président de chambre,

Signé : O. YEZNIKIAN

Le greffier,

Signé : S. DUPUIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

Par délégation,

Le greffier,

Sylviane Dupuis

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA00994
Date de la décision : 04/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-043 Urbanisme et aménagement du territoire. Autorisations d`utilisation des sols diverses. Autorisation d`exploitation commerciale (voir : Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique).


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Hadi Habchi
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : MALLE TITRAN AVOCATS ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-05-04;15da00994 ?
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