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24/03/2016 | FRANCE | N°15DA00641

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 24 mars 2016, 15DA00641


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir les deux arrêtés du 24 novembre 2014 et du 29 janvier 2015 par lesquels le préfet de l'Oise lui a refusé, d'une part, la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, a ordonné son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1500733 du 3 février 2015, le magistrat désigné par le prés

ident du tribunal administratif de Lille a annulé les décisions du 24 novembre 2014 l'ob...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir les deux arrêtés du 24 novembre 2014 et du 29 janvier 2015 par lesquels le préfet de l'Oise lui a refusé, d'une part, la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, a ordonné son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1500733 du 3 février 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé les décisions du 24 novembre 2014 l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et fixant le pays de destination, ainsi que l'arrêté du 29 janvier 2015 ordonnant son placement en rétention administrative, a enjoint au préfet de l'Oise de procéder au réexamen de sa situation, et a rejeté le surplus des conclusions de M.D..., y compris celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 17 avril 2015 et 4 janvier 2016, le préfet de l'Oise demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Lille ;

Il soutient que :

- c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a estimé que l'étranger n'avait pas reçu notification de la décision de rejet de sa demande d'asile, par la Cour nationale du droit d'asile ;

- qu'il n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les moyens articulés par l'intéressé contre la décision obligeant M. D...à quitter le territoire français, la décision fixant le pays de destination et celle prononçant son placement en rétention ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 novembre 2015, M. A...D..., représenté par la SCP Caron, Daquo, Amouel, B..., conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention contre les tortures et autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants, adoptée à New York le 10 décembre 1984 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Hadi Habchi, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'il est admis à séjourner en France en application des dispositions du chapitre Ier du présent titre, l'étranger qui demande à bénéficier de l'asile se voit remettre un document provisoire de séjour lui permettant de déposer une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. L'office ne peut être saisi qu'après la remise de ce document au demandeur. Après le dépôt de sa demande d'asile, le demandeur se voit délivrer un nouveau document provisoire de séjour. Ce document est renouvelé jusqu'à ce que l'office statue et, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile, jusqu'à ce que la cour statue " ; que selon les termes de l'article L. 742-3 du même code : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. Le a du 3° du II de l'article L. 511-1 n'est pas applicable " ;

2. Considérant que l'article R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que la décision de la Cour nationale du droit d'asile est notifiée par le secrétaire général de la Cour à l'étranger, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, versées en cause d'appel, que contrairement à ce qu'a soutenu M. D...devant le magistrat délégué par le président du tribunal administratif, l'intéressé a régulièrement reçu notification, le 26 novembre 2013, de la décision de la Cour nationale du droit d'asile du 14 novembre 2013, rejetant sa demande d'asile ; que, dès lors, c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a retenu le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions combinées des articles L. 742-3 et R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour annuler les décisions du 24 novembre 2014 obligeant M. D...à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination, ainsi que celle ordonnant, le 29 janvier 2015, son placement en rétention administrative ;

4. Considérant qu'il appartient, toutefois, à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D...devant la juridiction administrative ;

Sur l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour :

5. Considérant que M. Julien Marion, secrétaire général de la préfecture de l'Oise qui a signé l'arrêté attaqué, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de l'Oise du 26 août 2013, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de l'Oise le même jour, à l'effet de signer tout arrêté relevant des attributions de l'Etat dans le département, à l'exception de certaines matières parmi lesquelles ne figure pas l'arrêté contesté ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur doit être écarté ;

6. Considérant que l'arrêté attaqué, qui vise notamment les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que celles de l'article L. 511-1 de ce code, est suffisamment motivé en droit ; que la décision de refus de séjour fait également état de la situation personnelle et familiale de l'intéressé et de ses conditions d'entrée sur le territoire français ; que, par suite, M. D...n'est pas fondé à soutenir que le refus de séjour n'est pas motivé ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (ses six enfants de nationalité congolaise) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) " ; et qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 pris en application de l'article R. 313-22 précité : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. (...) " ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que le médecin de l'agence régionale de santé de Picardie a rendu le 16 octobre 2014 l'avis prévu par les dispositions citées au point 7 ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de saisine de ce médecin manque en fait ;

9. Considérant que, par arrêté du directeur général de l'agence régionale de santé de Picardie du 6 septembre 2013, le docteur René Faure, médecin au sein de cette agence, avait reçu délégation à l'effet de signer les avis relatifs aux demandes de titre de séjour relevant du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, M. D...n'est pas fondé à soutenir que le médecin signataire de l'avis du 16 octobre 2014 n'était pas compétent ;

10. Considérant que le caractère illisible de la signature du médecin de l'agence régionale de santé de Picardie sur l'avis émis le 16 octobre 2014, qui ne suffit pas à établir que le signataire ne serait pas le même que l'auteur de l'avis mentionné sur le cachet apposé sur le document, est par lui-même sans incidence sur la régularité de cet avis ;

11.Considérant que, contrairement à ce que soutient l'intéressé, l'avis du 16 octobre 2014, qui énonce que M. D...nécessite une prise en charge dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé qui peut voyager sans risque, est suffisamment précis et motivé ; qu'il comporte ainsi l'ensemble des informations nécessaires pour que l'autorité préfectorale compétente puisse se prononcer sur la demande dont elle était saisie ;

12. Considérant, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le médecin de l'agence régionale de santé de Picardie aurait inexactement apprécié la situation médicale de l'étranger, ni qu'il se serait fondé sur des éléments erronés concernant la situation sanitaire du pays de destination ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été prise sur le fondement d'un avis rendu irrégulièrement doit être écarté ;

13. Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier, notamment des certificats médicaux et des ordonnances médicales émises entre 2013 et 2014 que M.D..., ressortissant congolais, souffre de plusieurs pathologies qui nécessitent une prise en charge médicale, dont un syndrome psychotique sévère avec forte somatisation ; que, toutefois, par les pièces qu'il produit, l'intéressé ne contredit, en tout état de cause, pas utilement l'avis médical sur lequel s'est notamment fondé le préfet de l'Oise, ni l'existence d'un traitement disponible en République démocratique du Congo ou la possibilité de le suivre dans son pays, en dépit des évènements traumatisants qu'il y aurait vécus ;

14. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.D..., né le 5 mai 1973, est entré en France le 24 avril 2012 démuni de tout visa ou document de séjour ; qu'il s'y est maintenu à la faveur de l'instruction de sa demande d'asile, rejetée en janvier 2013 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, puis par la Cour nationale du droit d'asile en novembre 2013 ; que l'intéressé a déjà fait l'objet d'un refus de séjour et d'une mesure d'éloignement le 23 mai 2014 et n'apporte, par ailleurs, aucune preuve de son insertion professionnelle effective sur le territoire français, en dépit de ses activités de secouriste bénévole ; qu'il a également conservé des attaches familiales fortes en République démocratique du Congo, où demeurent... ; qu'en outre, s'il se prévaut d'une relation amoureuse avec une ressortissante française, avec laquelle il était sur le point de contracter mariage, lequel a été célébré le 4 juillet 2015, soit postérieurement à l'arrêté attaqué, il ressort toutefois des pièces versées au dossier que la vie commune était très récente à la date du refus de séjour en litige ; qu'aucun enfant n'est né de son union avec Mme L. ; qu'ainsi, eu égard aux conditions du séjour de l'intéressé et à sa durée, le préfet de l'Oise n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. D...une atteinte disproportionnée aux buts en vue duquel le refus de titre de séjour a été pris ; qu'il n'a, dès lors, pas violé les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

15. Considérant que, pour les raisons énoncées aux points 13 et 14, le préfet de l'Oise n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision de refus de titre de séjour sur la situation personnelle de l'intéressé ;

16. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) " ;

17. Considérant que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers remplissant effectivement toutes les conditions pour se voir délivrer l'un des titres de plein droit mentionnés dans les articles du code auxquels renvoient les dispositions précitées ; qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 13 à 15 que le requérant ne pouvait bénéficier de plein droit d'un titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de saisine de la commission du titre de séjour doit être écarté ;

18. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la décision de refus de titre de séjour n'est pas entachée d'illégalité ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours :

19. Considérant que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la mesure d'éloignement manque en fait, ainsi qu'il a été dit au point 5 ;

20. Considérant que la décision obligeant M. D...à quitter le territoire français dans le délai de trente jours comporte les éléments de droit et les circonstances de fait sur lesquels le préfet de l'Oise se fonde ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée ;

21. Considérant que, pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 14, le préfet de l'Oise n'a pas porté une atteinte excessive au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé ; qu'en outre, il ne ressort pas des pièces versées au dossier que cette mesure d'éloignement aurait été prise pour faire obstacle à son union célébrée en juillet 2015 ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ; que, pour ces raisons également, le préfet n'a pas davantage entaché sa décision d'éloignement d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

22. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés au point 13, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être écarté ;

23. Considérant que M. D...ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait sollicité un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions ; qu'au demeurant, il ne démontre pas, par les pièces qu'il produit, tant en première instance qu'en appel, que sa situation personnelle, notamment au plan médical, relèverait de motifs humanitaires ou de circonstances exceptionnelles ;

24. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la décision obligeant M. D...à quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

25. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 24 que M. D...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français pour soutenir que la décision fixant le pays de destination serait privée de base légale ;

26. Considérant que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la mesure d'éloignement manque en fait, ainsi qu'il a été dit au point 5 ;

27. Considérant que si la motivation de fait de la décision fixant le pays de destination ne se confond pas nécessairement avec celle obligeant l'étranger à quitter le territoire français, la motivation en droit de ces deux décisions est identique et résulte des termes mêmes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel est, du reste, mentionné dans la décision attaquée ; qu'ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination n'est pas suffisamment motivée en droit ; que, par ailleurs, le préfet de l'Oise a suffisamment motivé sa décision en mentionnant que M. D...n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision fixant le pays de destination doit être écarté ;

28. Considérant qu'il ne ressort d'aucune des pièces versées au dossier de première instance, ni d'aucun élément probant versé en appel que M. D...serait exposé, en raison de l'engagement politique qu'il allègue, à des risques de torture ou à des menaces personnelles en cas de retour en République démocratique du Congo ; que, par suite, le préfet n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni violé les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

29. Considérant que si M. D...se prévaut des stipulations de l'article 3 de la convention contre la torture et autres traitements cruels et inhumains, il n'apporte aucun élément probant à l'appui de son allégation, selon laquelle il subirait des actes de torture dans le cas où il serait incarcéré ; que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point précédent, ce moyen ne peut qu'être écarté ;

30. Considérant que, compte tenu des raisons énoncées au point 14, le préfet de l'Oise n'a pas porté une atteinte excessive au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé en fixant la République démocratique du Congo comme pays de destination ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ;

Sur la décision prononçant le placement en rétention de l'intéressé :

31. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 24, que M. D...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français pour soutenir que la décision de placement en rétention administrative serait privée de base légale ;

32. Considérant que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision de placement en rétention manque en fait, ainsi qu'il a été dit au point 5 ;

33. Considérant que la décision en litige comporte les considérations de fait et de droit sur lesquelles le préfet de l'Oise se fonde ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée ;

34. Considérant qu'il ressort des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et notamment du III de son article L. 512-1, que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises les décisions par lesquelles l'autorité administrative place l'étranger en rétention administrative ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 fixant les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision de placement en rétention administrative ;

35. Considérant que, contrairement à ce que soutient M.D..., la circonstance que l'étranger ait contesté devant la juridiction administrative la décision l'obligeant à quitter le territoire français du 24 novembre 2014, ne fait pas légalement obstacle à ce que le préfet de l'Oise édicte, le 29 janvier 2015, une mesure de rétention administrative en vue d'assurer l'exécution de la mesure d'éloignement dont l'intéressé fait l'objet, en application des dispositions du 6° de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté ;

36. Considérant que les dispositions pertinentes du 6° de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettent au préfet d'ordonner la mise en rétention administrative, à défaut d'une assignation à résidence, d'un étranger pour lequel est envisagée l'exécution d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français prise depuis moins d'un an ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation (...) " ;

37. Considérant que si M. D...fait état dans ses écritures de l'adresse qu'il a déclarée chez Mme L., il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de la décision, il y résidait de manière stable et régulière ; qu'en outre, il a lui-même déclaré auprès de l'administration qu'il se trouvait sans domicile fixe ; qu'en outre, l'intéressé, qui a déclaré lors de son audition par les services de police ne pas souhaiter retourner en République démocratique du Congo, ne conteste pas s'être précédemment soustrait à une mesure d'éloignement ; qu'ainsi, il doit être regardé comme ne présentant pas des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque d'une nouvelle soustraction à l'obligation de quitter le territoire français ; que, dès lors, le préfet de l'Oise a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation au regard de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ordonner le placement en rétention administrative de M. D...;

38. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces versées au dossier que l'état de santé de M. D... faisait obstacle à ce le préfet de l'Oise prononçât une décision de placement en rétention administrative à son encontre ; qu'il n'est pas établi par M. D...que celui-ci ne puisse pas bénéficier du traitement par médicaments qui lui a été prescrit ;

39. Considérant qu'eu égard à la nécessité de prendre les mesures qu'exigeait l'organisation matérielle du retour de M. D...dans son pays d'origine et compte tenu de ce qui a été dit aux points 37 et 38, le préfet de l'Oise a pu légalement décider de placer l'intéressé en rétention administrative, plutôt que de l'assigner à résidence ;

40. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de l'Oise est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé sa décision d'obligation de quitter le territoire français, celle fixant le pays de destination, ainsi que la décision de placement en rétention administrative de l'étranger ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1500733 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille du 3 février 2015 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Lille et ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. A...D...et à MeC... B.ses six enfants de nationalité congolaise

Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Oise.

Délibéré après l'audience publique du 10 mars 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,

- M. Christian Bernier, président-assesseur,

- M. Hadi Habchi, premier conseiller.

Lu en audience publique le 24 mars 2016.

Le rapporteur,

Signé : H. HABCHILe premier vice-président de la cour,

Président de chambre,

Signé : O. YEZNIKIAN

Le greffier,

Signé : S. DUPUIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

Par délégation,

Le greffier,

Sylviane Dupuis

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N°15DA00641 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA00641
Date de la décision : 24/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02-01 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour. Demande de titre de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Hadi Habchi
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : SCP CARON-DAQUO-AMOUEL-PEREIRA

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-03-24;15da00641 ?
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