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17/03/2016 | FRANCE | N°15DA01781

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 17 mars 2016, 15DA01781


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 1er juillet 2015 du préfet du Pas-de-Calais rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n°1505933 du 19 octobre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par

une requête enregistrée le 9 novembre 2015, M.A..., représenté par MeC..., demande à la cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 1er juillet 2015 du préfet du Pas-de-Calais rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n°1505933 du 19 octobre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 novembre 2015, M.A..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 19 octobre 2015 du tribunal administratif de Lille ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de lui délivrer un certificat de résidence valable 10 ans ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier, faute de répondre au moyen tiré de la méconnaissance du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- il méconnaît les stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- il méconnaît les stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 7 ainsi que celles du f et du h de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- il est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation par le préfet de ses conséquences sur sa situation.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 2 décembre 2015 et le 15 février 2016, le préfet du Pas-de-Calais conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 décembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant algérien, relève appel du jugement du 19 octobre 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er juillet 2015 du préfet du Pas-de-Calais rejetant sa demande de délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1. au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant / (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que du 5 mai 2012 au 6 mai 2013, M. A... a été admis au séjour en qualité d'" étudiant-élève " à raison de la formation d'électricien d'équipement qu'il suivait à cette période au centre de formation professionnelle des adultes ; que dans ces conditions, la décision de lui accorder un tel titre étant devenue définitive en l'absence de contestation, la durée de présence en France requise de l'intéressé pour la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 1 de l'article 6 de cet accord est de quinze ans ; qu'il est constant qu'à la date de l'arrêté contesté, M. A...ne justifiait que d'une durée de présence en France inférieure à quinze ans ;

4. Considérant, toutefois, que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance de titre de séjour sur le fondement de l'une des stipulations de l'accord franco-algérien, le préfet peut exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui appartient, dès lors qu'aucune disposition expresse ne le lui interdit, de régulariser la situation d'un ressortissant algérien, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, dont il justifierait ;

5 Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté qu'à la date de la décision attaquée lui refusant un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale ", M. A...était présent sur le territoire français depuis près de treize années, fût-ce, pour partie, sans être titulaire d'un titre de séjour ; que, jusqu'à ce qu'il ait été mis en possession par l'autorité préfectorale d'un titre de séjour portant la mention " étudiant-élève " valable jusqu'au 6 mai 2013, au motif qu'il était inscrit dans un centre de formation professionnelle pour adultes en vue de valider un titre professionnel d'électricien d'équipement, M. A...justifiait d'une insertion professionnelle, ayant été notamment chauffeur routier, brancardier, puis commerçant, et avait aussi été formé à la conduite d'engins de chantier ; qu'après avoir contracté un mariage le 1er octobre 2005 avec une ressortissante française, ce qui lui a permis de bénéficier d'un certificat de résidence en qualité de conjoint de français, jusqu'à son divorce prononcé par jugement du 5 mars 2010, il s'est vu délivrer à compter du 6 mai 2010 un certificat de résidence en qualité de commerçant, qui a été renouvelé jusqu'au 5 mai 2012 ; que M.A..., qui précise que ses parents sont décédés en Algérie et qu'il y a encore deux frères et deux soeurs, bénéficie en France du soutien de ses deux soeurs de nationalité française et est d'ailleurs hébergé par l'une d'elles, à Calais ; qu'il a ainsi pu nouer en France des liens d'ordre familial et privé depuis son arrivée à la fin de l'année 2002 ; que, dans ces circonstances, eu égard, d'une part, aux conditions et à la durée du séjour en France de M.A..., aux attaches d'ordre familial et privé dont il peut justifier et à la volonté d'insertion professionnelle qu'il a manifestée, il ressort des pièces du dossier qu'en refusant de faire usage de son pouvoir discrétionnaire aux fins de régularisation de la situation administrative de M.A..., le préfet du Pas-de-Calais a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de celle-ci sur la situation personnelle et professionnelle de l'intéressé ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a rejeté sa demande de titre de séjour ; que les décisions l'obligeant à quitter le territoire français et celle fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office doivent, par voie de conséquence, être annulées ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. Considérant que, eu égard au motif d'annulation des décisions en litige ci-dessus retenu, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que M. A...se voie délivrer un certificat de résidence " vie privée et familiale " valable un an, l'autorisant à exercer une activité professionnelle ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de délivrer à M. A...un certificat de résidence valable un an prévu à l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8 Considérant que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle ne peut demander au juge de condamner à son profit la partie perdante qu'au paiement des seuls frais qu'il a personnellement exposés, à l'exclusion de la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle confiée à son avocat mais que l'avocat de ce bénéficiaire peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement à son profit de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

9. Considérant, d'une part, que M. A...n'allègue pas avoir exposé de frais autres que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée par une décision du 7 décembre 2015 ; que, d'autre part, l'avocat de M. A...n'a pas demandé la condamnation de l'Etat à lui verser la somme correspondant aux frais exposés qu'il aurait réclamés à son client si ce dernier n'avait bénéficié d'une aide juridictionnelle totale ; que, dans ces conditions, les conclusions de M. A...tendant à la condamnation de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1505933 du 19 octobre 2015 du tribunal administratif de Lille et l'arrêté du 1er juillet 2015 du préfet du Pas-de-Calais refusant de délivrer un titre de séjour à M.A..., lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel l'intéressé pourrait être reconduit d'office sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Pas-de-Calais de délivrer à M. A...un certificat de résidence valable un an et l'autorisant à exercer une activité professionnelle, portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au ministre de l'intérieur et au préfet du Pas-de-Calais.

Délibéré après l'audience publique du 3 mars 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller.

Lu en audience publique le 17 mars 2016.

L'assesseur le plus ancien,

Signé : O. NIZETLe président de chambre,

président rapporteur,

Signé : P.-L. ALBERTINILe greffier,

Signé : I. GENOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Isabelle Genot

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA01781
Date de la décision : 17/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : SCP WACHEUX et FRENEY

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-03-17;15da01781 ?
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