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10/03/2016 | FRANCE | N°14DA00896

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 10 mars 2016, 14DA00896


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme J...ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 24 octobre 2012 par laquelle le maire de la commune de Daubeuf-près-Vatteville (Eure) a délivré un permis de construire tacite à M. D...K...en vue d'édifier une maison individuelle d'habitation au lieudit " Mont Joyeux ", sur les parcelles cadastrées G 314 et G 295.

Par un jugement n° 1203689 du 20 mars 2014, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande.

Procédure devan

t la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 27 mai ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme J...ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 24 octobre 2012 par laquelle le maire de la commune de Daubeuf-près-Vatteville (Eure) a délivré un permis de construire tacite à M. D...K...en vue d'édifier une maison individuelle d'habitation au lieudit " Mont Joyeux ", sur les parcelles cadastrées G 314 et G 295.

Par un jugement n° 1203689 du 20 mars 2014, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 27 mai 2014 et 27 juillet 2015, M. et Mme H...J..., représentés par Me G...I..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision de permis de construire tacite du 24 octobre 2012 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Daubeuf-près-Vatteville la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les plans versés au dossier de permis de construire sont insuffisants au regard des exigences de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme ;

- le projet autorisé, qui ne s'insère pas dans le bâti ancien et typique qui l'environne, est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'autorisation a été délivrée en méconnaissance des dispositions de l'article R. 2224-17 du code général des collectivités territoriales ;

- le projet méconnaît les dispositions de la zone NC du plan d'occupation des sols de la commune dès lors que le pétitionnaire ne démontre pas la nécessité d'une habitation à proximité de son exploitation agricole ;

- un bâtiment d'élevage agricole se situant à moins de 50 mètres du projet, le permis de construire tacite méconnaît les dispositions du règlement sanitaire départemental de l'Eure ;

- la construction d'habitat isolé étant interdite par le schéma de cohérence territoriale du pays du Vexin Normand, en dehors de tout groupement d'au moins quatre habitations, l'autorisation en litige est entachée d'illégalité ;

- le permis de construire est entaché d'un détournement de pouvoir.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juillet 2014, la commune de Daubeuf-près-Vatteville, représentée par la SCPB..., Cosse, Gruau, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. et Mme J...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 5 septembre 2014 et 26 janvier 2016, M. D... K..., représenté par Me C...L..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. et Mme J... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 de justice administrative et, en outre, à ce que les époux appelants soient condamnés à payer une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article R. 741-12 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 7 janvier 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 29 janvier 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code l'urbanisme ;

- le règlement sanitaire départemental de l'Eure approuvé le 10 janvier 1985 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Hadi Habchi, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,

- les observations de Me G...I..., représentant M. et MmeJ..., de Me F...A..., substituant Me E...B..., représentant la commune de Daubeuf-près-Vatteville, et de Me C...L..., représentant M.K....

Sur la légalité du permis de construire :

1. Considérant que le plan des façades et des toitures, le plan en coupe du terrain ainsi que les photographies joints au dossier de demande de permis de construire déposé le 27 juillet 2012 font apparaître l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain et fournissent les précisions quant à son insertion dans l'environnement proche et le paysage lointain ; que la notice descriptive et le plan de masse après travaux, dont il n'est pas établi qu'ils comporteraient des éléments erronés, ont permis à l'administration d'apprécier le positionnement de la construction, ses dimensions ainsi que les conditions d'accès ; que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme J..., il ne ressort pas du dossier de demande que le projet de construction était déjà réalisé à la date du 27 juillet 2012 ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le dossier de demande de permis de construire méconnaîtrait les prescriptions de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

2. Considérant que si M. et Mme J...dénoncent l'atteinte que porterait le projet de construction à l'environnement et aux lieux avoisinants, ils ne précisent pas quelles dispositions aurait été méconnues ; qu'en tout état de cause et pour le surplus, il ne ressort pas des pièces versées au dossier que la construction projetée, notamment eu égard à ses dimensions modestes et à son implantation, porterait atteinte au caractère des lieux avoisinants ou à l'intérêt paysager du hameau du " Mont Joyeux " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2224-17 du code général des collectivités territoriales : " Les systèmes d'assainissement non collectif doivent permettre la préservation de la qualité des eaux superficielles et souterraines (...) " ;

4. Considérant qu'il ne ressort pas de l'étude d'aptitude du sol du 29 avril 2009, et de l'avis, du reste favorable, émis le 3 juillet 2012 par le service instructeur de la communauté de communes des Andelys et de ses environs, que le système d'assainissement individuel prévu par M. K...porterait atteinte à la qualité des eaux du secteur du " Mont Joyeux " ; que, par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant que les dispositions de l'article NC 1 du plan d'occupation des sols de la commune de Daubeuf-près-Vatteville, applicables à l'espèce, interdisent toute construction sauf lorsqu'il s'agit " d'occupations ou d'utilisations du sol suivantes : (...) / les constructions à usage d'habitation exclusivement destinées au logement des personnes dont la présence permanente est nécessaire pour assurer la surveillance, la sécurité et l'entretien des établissements autorisés dans la zone / (...) " ; qu'il ressort des pièces versées au dossier que l'élevage de bovins de M. K...nécessite sa présence quotidienne permanente, pour la traite, les vêlages, et plus généralement pour la surveillance et le soin des bêtes ; que, dans ces conditions, le projet de construction d'une maison d'habitation d'une surface de plancher de 139 m² destinée à accueillir cet éleveur doit être regardé comme lié à l'activité agricole exercée par le pétitionnaire au sens des dispositions de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune, sans que M. et Mme J...puissent utilement faire valoir que M. K...aurait pu chercher à occuper un logement existant plutôt que demander à édifier une construction neuve ; que, par suite, c'est sans méconnaître les dispositions du plan d'occupation des sols que le maire a pu délivrer le permis de construire en litige ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 153-3 du règlement sanitaire départemental de l'Eure, modifié en dernier lieu par l'arrêté préfectoral du 10 janvier 1985 : " La conception et le fonctionnement des établissements d'élevage ne doivent pas constituer une nuisance excessive ou présentant un caractère permanent pour le voisinage (...) " et qu'aux termes de l'article 153-4 du même règlement : " Sans préjudice de l'application des documents d'urbanisme existant dans la commune (...), l'implantation des bâtiments renfermant des animaux doit respecter les règles suivantes : (...) / les autres élevages, à l'exception des élevages de type familial et de ceux de volailles et de lapins, ne peuvent être implantés à moins de 50 mètres des immeubles habités ou habituellement occupés par des tiers (...) " ;

7. Considérant qu'il est constant que le projet se situe à moins de 40 mètres d'un bâtiment existant, appartenant à l'exploitation de M. et MmeJ... ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que ce bâtiment à usage agricole pour lequel les appelants ont bénéficié d'un permis de construire délivré par le maire de la commune de Daubeuf-près-Vatteville le 10 novembre 1998 est prévu pour stocker du matériel ; qu'en l'absence de déclaration régulière de changement de destination, c'est à bon droit que l'autorité administrative a pris en considération la destination du bâtiment telle qu'elle a été initialement autorisée, et non l'usage qui en a été fait par les exploitants après l'obtention du permis de construire du 10 novembre 1998 ; qu'en tout état de cause et pour le surplus, il n'est pas établi qu'à la date de la décision attaquée, le bâtiment de M. et Mme J...abriterait encore des animaux ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du règlement sanitaire départemental de l'Eure doit être écarté ;

8. Considérant que la construction n'entrant pas dans les cas limitativement énumérés à l'article L. 122-1-5 du code de l'urbanisme, les appelants ne peuvent utilement soutenir que le permis de construire contesté aurait été pris en violation des dispositions du point 3 de l'axe IV du schéma de cohérence territoriale du pays du Vexin normand, approuvé le 16 avril 2009, aux termes desquels la construction d'habitat isolé est interdite en dehors de tout groupement d'au moins quatre habitations ; qu'en tout état de cause, il ressort des pièces versées au dossier, notamment du plan cadastral fourni à l'appui du dossier de première instance, que le terrain d'assiette du projet s'insère dans un hameau existant constitué d'une dizaine d'habitations dans le secteur dit du " Mont-Joyeux " ;

9. Considérant que si M. et Mme J...invoquent une " collusion frauduleuse " entre le maire de la commune de Daubeuf-près-Vatteville et le pétitionnaire, le détournement de pouvoir n'est pas établi ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme J...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande ;

Sur la condamnation à une amende pour recours abusif :

11. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 euros " ;

12. Considérant que la faculté prévue par ces dispositions constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions de M. K...tendant à ce que M. et Mme J...soient condamnés à une telle amende, ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par M. et Mme J...sur ce fondement ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ces derniers la somme de 2 000 euros que réclame M. K...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, ainsi qu'une somme de 2 000 euros demandée par la commune de Daubeuf-près-Vatteville sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme J...est rejetée.

Article 2 : M. et Mme J...verseront à la commune de Daubeuf-près-Vatteville une somme de 2 000 euros et à M. D...K... une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. K...sur le fondement de l'article R. 741-12 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme H...J..., à M. D...K...et à la commune de Daubeuf-près-Vatteville.

Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Eure.

Délibéré après l'audience publique du 25 février 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Bernier, président-assesseur,

- M. Hadi Habchi, premier conseiller,

- Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller.

Lu en audience publique le 10 mars 2016.

Le rapporteur,

Signé : H. HABCHILe président-assesseur,

En application de l'article R. 222-26

du code de justice administrative,

Signé : C. BERNIER

Le greffier,

Signé : S. DUPUIS

La République mande et ordonne au ministre du logement et de l'habitat durable en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

Par délégation,

Le greffier,

Sylviane Dupuis

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14DA00896
Date de la décision : 10/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. Bernier
Rapporteur ?: M. Hadi Habchi
Rapporteur public ?: M. Riou
Avocat(s) : OTTAVIANI

Origine de la décision
Date de l'import : 25/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2016-03-10;14da00896 ?
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