Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La Fédération Industries du Livre, du Papier carton et de la Communication FILPAC-CGT, le syndicat CGT Arjowiggins Wizernes, le comité d'établissement de Wizernes de la société Arjowiggins Papiers Couchés, M. C... I..., M. B...K..., M. H...E...et M. D... G..., ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 20 avril 2015 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Nord-Pas-de-Calais a homologué le document unilatéral élaboré par la société Arjowiggins Papiers Couchés.
Par un jugement n° 1504910 du 9 septembre 2015, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 octobre 2015, la Fédération Industries du Livre, du Papier carton et de la Communication FILPAC-CGT, le syndicat CGT Arjowiggins Wizernes, le comité d'établissement de Wizernes de la société Arjowiggins Papiers Couchés, M. C...I..., M. B... K..., M. H...E...et M. D...G..., représentés par la SCP Michel A..., demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 9 septembre 2015 du tribunal administratif de Lille ;
2°) d'annuler la décision du 20 avril 2015 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Nord-Pas-de-Calais a homologué le document unilatéral élaboré par la société Arjowiggins Papiers Couchés ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à la Fédération Industries du Livre, du Papier carton et de la Communication FILPAC-CGT, une somme de 1 000 euros à verser au syndicat CGT Arjowiggins Wizernes, une somme de 1 000 euros à verser au comité d'établissement de Wizernes de la société Arjowiggins Papiers Couchés, et une somme de 150 euros à verser, séparément, à M. I..., à M.K..., à M. E...et à M.G..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement a omis de statuer sur le moyen tiré du caractère insuffisant de l'information du comité d'entreprise quant à la définition de la branche d'activité " graphique " ;
- la décision d'homologation est insuffisamment motivée au regard des exigences posées par l'article L. 1233-57-4 du code du travail ;
- l'autorité compétente pour statuer n'a pas contrôlé les éléments du dossier ;
- les procès-verbaux des réunions des 23 janvier et 12 février 2015 du comité d'établissement, ont été signés par l'employeur et non par le secrétaire du comité ;
- l'employeur a désigné unilatéralement un secrétaire au comité d'établissement en l'absence des secrétaires élus ;
- l'employeur a modifié unilatéralement le procès-verbal de la réunion du comité d'établissement du 11 mars 2015 ;
- les ordres du jour des réunions du comité central d'entreprise et du comité d'établissement ont été modifiés ;
- les élus n'ont pas eu une information précise quant au périmètre pertinent d'appréciation des difficultés économiques ;
- le périmètre de l'ordre des licenciements normalement défini au niveau de l'entreprise ne pouvait être fixé au niveau du seul établissement de Wizernes que dans le cadre d'un accord collectif majoritaire portant sur le plan de sauvegarde de l'emploi et selon la procédure de la validation de ce dernier ;
- la détermination des catégories professionnelles utiles à la définition des critères d'ordre du licenciement est trop vaste ;
- l'employeur n'a pas recherché loyalement un repreneur ;
- l'employeur, en supprimant des opportunités de reclassement qui avaient dans un premier temps été proposées, n'a pas respecté son obligation de reclassement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 novembre 2015, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2015, la société Arjowiggins Papiers Couchés, représentée par la SCP August et Debouzy avocats, conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Un mémoire présenté pour la Fédération Industries du Livre, du Papier carton et de la Communication FILPAC-CGT, le syndicat CGT Arjowiggins Wizernes, le comité d'établissement de Wizernes de la société Arjowiggins Papiers Couchés, M. C... I..., M. B...K..., M. H... E...et M. D... G..., a été enregistré le 27 novembre 2015.
Vu l'ordonnance en date du 1er décembre 2015 fixant une clôture d'instruction immédiate.
Un mémoire présenté pour la société Arjowiggins Papiers Couchés a été enregistré le 4 janvier 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur,
- les conclusions de Mme Maryse Pestka, rapporteur public,
- et les observations Me A...et MeL..., représentant la Fédération Industries du Livre, du Papier carton et de la Communication FILPAC-CGT, le syndicat CGT Arjowiggins Wizernes, le comité d'établissement de Wizernes de la société Arjowiggins Papiers Couchés, M. C... I..., M. B...K..., M. H... E...et M. D...G..., et les observations de Me F...et de Me J...représentant la société Arjowiggins Papiers Couchés.
1. Considérant que la société Arjowiggins Papiers Couchés SAS, filiale du groupe Arjowiggins, lui-même filiale du groupe Sequana qui contrôle également le goupe Antalis, leader européen de la distribution professionnelle de papier d'impression, emploie 925 salariés ; que son activité est répartie entre une branche graphique, une branche papiers création, une branche sécurité et la branche santé qui comprend les produits pour le secteur médical et hospitalier ; que l'activité graphique est exploitée sur les quatre sites de Bourray, Bessé, Greenfied et Wizernes qui lui sont dédiés ; que, face à la crise du marché du papier, le groupe Arjowiggins a décidé de restructurer la branche graphique en procédant à une cession, ou, en l'absence de repreneur, à la fermeture de l'établissement de Wizernes ; qu'elle a, en conséquence, saisi le 1er avril 2015 le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Nord-Pas-de-Calais d'une demande d'homologation du document unilatéral déterminant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi devant accompagner la fermeture du site de Wizernes ; que la Fédération Industries du Livre, du Papier carton et de la Communication FILPAC-CGT et autres relèvent appel du jugement du 9 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 20 avril 2015 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Nord-Pas-de-Calais a homologué ce document ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que le tribunal administratif de Lille a répondu par le considérant 17 de son jugement au moyen tiré de ce que l'information des membres du comité central d'entreprise aurait été incomplète en raison de l'absence de justification de la délimitation de la branche d'activité graphique ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier faute d'avoir répondu à ce moyen ;
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-57-4 du code du travail : " L'autorité administrative notifie à l'employeur la décision de validation dans un délai de quinze jours (...) et la décision d'homologation dans un délai de vingt et un jours (...). / Elle la notifie, dans les mêmes délais, au comité d'entreprise et, si elle porte sur un accord collectif, aux organisations syndicales représentatives signataires. La décision prise par l'autorité administrative est motivée " ; que si ces dispositions impliquent que la décision qui valide un accord collectif portant plan de sauvegarde de l'emploi, ou la décision qui homologue un document fixant le contenu d'un tel plan, doivent énoncer les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que les personnes auxquelles ces décisions sont notifiées puissent à leur seule lecture en connaître les motifs, elles n'impliquent ni que l'administration prenne explicitement parti sur le respect de chacune des règles dont il lui appartient d'assurer le contrôle en application des dispositions des articles L. 1233-57-2 et L. 1233-57-3 du même code, ni qu'elle retrace dans la motivation de sa décision les étapes de la procédure préalable à son édiction ;
4. Considérant que la décision attaquée fait mention des dispositions de droit applicables, et après avoir rappelé les différentes étapes de la procédure, constate le respect par l'employeur de ses obligations de recherche d'un repreneur ainsi que le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des dispositions des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 du code du travail, prend acte de la prise en compte par l'entreprise des observations formulées par le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Nord-Pas-de-Calais destinées à modifier et à compléter le plan de sauvegarde de l'emploi et présente une analyse globale des différentes mesures présentées dans le plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée ;
5. Considérant qu'en vertu des articles R. 2325-1 et R. 2325-3 du code du travail, le secrétaire du comité d'entreprise, désigné parmi ses membres titulaires, consigne dans les procès-verbaux les délibérations du comité d'entreprise et les communique à l'employeur et aux membres du comité ; qu'il ressort des pièces du dossier que lors des réunions des 23 janvier et 12 février 2015 du comité d'établissement du site de Wizernes, le secrétaire du comité ainsi que le secrétaire adjoint étaient absents ; que, sollicité par l'employeur, aucun autre membre titulaire n'a accepté d'occuper les fonctions de secrétaire ; que dans ces circonstances, l'employeur a pu sans méconnaître les dispositions précitées désigner un représentant de la direction aux fonctions de secrétaire de séance ; qu'au demeurant, il n'est pas allégué que les procès-verbaux précités ne seraient pas un compte rendu fidèle de ces réunions ;
6. Considérant qu'à la suite de la réunion du comité d'établissement du 11 mars 2015 la direction de la société Arjo Wiggins Papiers Couchés SAS a adressé au secrétaire de ce comité des propositions tendant à modifier la rédaction du procès-verbal ; que ces propositions de modification ont été débattues lors de la réunion suivante qui s'est tenue le 3 avril 2015 ; que seules celles qui ont été adoptées à l'unanimité ont été retenues afin de modifier le procès-verbal de la réunion du 11 mars 2015 ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'employeur aurait modifié unilatéralement le procès-verbal de la réunion du comité d'établissement du 11 mars 2015 ;
7. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les ordres du jour du comité d'établissement ou du comité central d'entreprise aient été modifiés par la direction ;
8. Considérant qu'il ressort des propres écritures de la Fédération Industries du Livre, du Papier carton et de la Communication FILPAC-CGT et autres que la définition du secteur d'activité en difficulté économique ressortait de la note explicative fournie le 10 avril 2014 aux membres du comité central d'entreprise et aux membres du comité d'établissement de Wizernes ; qu'ainsi, c'est à tort que les requérants font valoir que l'information du comité central d'entreprise aurait été insuffisante sur ce point ;
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-61 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. / Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2323-15 du même code : " Le comité d'entreprise est saisi en temps utile des projets de restructuration et de compression des effectifs. / Il émet un avis sur l'opération projetée et ses modalités d'application dans les conditions et délais prévus à l'article L. 1233-30, [lorsque l'entreprise] est soumise à l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-24-4 du même code : " A défaut d'accord mentionné à l'article L. 1233-24-1, un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité d'entreprise fixe le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi et précise les éléments prévus aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-57-3 du même code : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié (...) la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise (...), le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; / 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; / 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233 4 et L. 6321-1 " ;
10. Considérant qu'il résulte des dispositions citées ci-dessus que, lorsqu'elle est saisie par un employeur d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail et fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient à l'administration de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise a été régulière ; qu'elle ne peut légalement accorder l'homologation demandée que si ce comité a été mis à même d'émettre régulièrement un avis, d'une part sur l'opération projetée et ses modalités d'application et, d'autre part, sur le projet de licenciement collectif et le plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'il appartient à ce titre à l'administration de s'assurer que l'employeur a adressé au comité d'entreprise, avec la convocation à sa première réunion, ainsi que, le cas échéant, en réponse à des demandes exprimées par le comité, tous les éléments utiles pour qu'il formule ses deux avis en toute connaissance de cause ;
11. Considérant que lorsque l'entreprise appartient à un groupe et que l'employeur est, par suite, amené à justifier son projet au regard de la situation économique du secteur d'activité dont relève l'entreprise au sein de ce groupe, les éléments d'information adressés par l'employeur au comité d'entreprise doivent porter non seulement sur la situation économique du secteur d'activité qu'il a lui-même pris en considération, mais aussi sur les raisons qui l'ont conduit à faire reposer son analyse sur ce secteur d'activité ; que toutefois, d'une part, l'employeur, qui informe et consulte le comité d'entreprise sur son propre projet, n'est pas tenu d'adresser des éléments d'information relatifs à la situation économique d'un autre secteur d'activité que celui qu'il a retenu ; que d'autre part, la circonstance que le secteur d'activité retenu par l'employeur ne serait pas de nature à établir le bien-fondé du projet soumis au comité d'entreprise ne saurait être utilement invoquée pour contester la légalité d'une décision d'homologation ; qu'en effet, l'administration n'a pas à se prononcer, lorsqu'elle statue sur une demande d'homologation d'un document fixant un plan de sauvegarde de l'emploi, sur le motif économique du projet de licenciement collectif, dont il n'appartient qu'au juge du licenciement, le cas échéant ultérieurement saisi, d'apprécier le bien-fondé ;
12. Considérant que la détermination de l'ordre des licenciements a fait l'objet d'un accord collectif intervenu le 26 mars 2015 ; que la circonstance que le document unilatéral présenté aux membres du comité centrale d'entreprise, le 18 mars 2015, et donc antérieurement au 26 mars 2015, ne fasse état, à ce stade, que d'un projet d'accord collectif relatif à la question de l'ordre des licenciements, n'est pas, en l'absence de tout élément établissant que le projet aurait été différent de l'accord effectivement conclu, de nature à établir que l'information des membres du comité central d'entreprise aurait été insuffisante et que ces derniers n'auraient pas donné leur avis en toute connaissance de cause ;
13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-24-1 du code du travail : " Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, un accord collectif peut déterminer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63 ainsi que les modalités de consultation du comité d'entreprise et de mise en oeuvre des licenciements. Cet accord est signé par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés en faveur d'organisations reconnues représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants. (...) " ; que l'article L. 1233-24-2 du même code prévoit que : " l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 porte sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63 / Il peut également porter sur : / (...) / 2° La pondération et le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements mentionnés à l'article L. 1233-5 " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-24-4 de ce code : " A défaut d'accord (...) un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité d'entreprise fixe le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi (...) " ; que l'article L. 1233-5, alors applicable, du même code dispose que : "Lorsque l'employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l'absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements, après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel. / Ces critères prennent notamment en compte : / 1° Les charges de famille, en particulier celles des parents isolés ; /2° L'ancienneté de service dans l'établissement ou l'entreprise ; /3° La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ; / 4° Les qualités professionnelles appréciées par catégorie. / L'employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l'ensemble des autres critères prévus au présent article. " ;
14. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à défaut d'avoir obtenu l'accord majoritaire prévu par les dispositions de l'article L. 1233-24-1 du code du travail, la société Arjowiggins Papiers Couchés a, en application de l'article L. 1233-24-4 du même code, rédigé un document unilatéral dont elle a demandé l'homologation le 1er avril 2015 ; qu'à ce document était joint un accord collectif portant sur les critères d'ordre des licenciements à un niveau inférieur à celui de l'entreprise, signé le 26 mars 2015 avec les organisations CFDT et CFE-CGC détenant une représentativité au niveau de la société de 45,63% ; que, si la définition du périmètre d'application des critères d'ordres des licenciement à un niveau inférieur à celui de l'entreprise n'est envisageable que dans le cadre d'un accord collectif, les dispositions de l'article L. 1233-24-1 du code du travail n'ont pas pour effet, lorsque comme en l'espèce, il est fait application de l'article 1233-24-4 du même code, d'imposer qu'il soit acquis par le seul accord collectif majoritaire prévu pas les dispositions de l'article L. 1233-24-1 ; que, par suite, la Fédération Industries du Livre, du Papier carton et de la Communication FILPAC-CGT et autres ne sont pas fondés à soutenir que le périmètre précité a été fixé illégalement au niveau de l'établissement ;
15. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le périmètre de l'application des critères d'ordre des licenciements a été limité à l'établissement de Wizernes par un accord précité conclu le 26 mars 2015, entraînant la fermeture du site avec le licenciement de l'ensemble des salariés ; que cette circonstance a ainsi privé de tout effet la définition de catégories professionnelles pour l'application des critères d'ordre de licenciement ; que, dès lors, les requérants ne peuvent utilement soutenir que la définition des catégories professionnelles retenues par la société Arjowiggins Papiers Couchés pour l'application des critères d'ordre de licenciement retiendrait un nombre trop important de catégories professionnelles ;
16. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-57-14 du code du travail : " L'employeur ayant informé le comité d'entreprise du projet de fermeture d'un établissement recherche un repreneur. Il est tenu : / 1° D'informer, par tout moyen approprié, des repreneurs potentiels de son intention de céder l'établissement ; / 2° De réaliser sans délai un document de présentation de l'établissement destiné aux repreneurs potentiels ; / (...) / 4° De donner accès à toutes informations nécessaires aux entreprises candidates à la reprise de l'établissement, exceptées les informations dont la communication serait de nature à porter atteinte aux intérêts de l'entreprise ou mettrait en péril la poursuite de l'ensemble de son activité. Les entreprises candidates à la reprise de l'établissement sont tenues à une obligation de confidentialité ; / 5° D'examiner les offres de reprise qu'il reçoit ; / 6° D'apporter une réponse motivée à chacune des offres de reprise reçues, dans les délais prévus à l'article L. 1233-30 " ;
17. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du procès-verbal du comité central d'entreprise qui s'est tenu le 18 mars 2015 que plus d'une centaine d'entreprises exerçant leur activité dans le domaine de la papeterie ont été sollicitées par le cabinet Ernst et Young, mandaté par la société Arjowiggins Papiers Couchés, afin de rechercher un repreneur ; que, parmi ces entreprises, figurent les concurrents directs de la société Arjowiggins Papiers Couchés ; qu'en outre, l'aide de l'agence française pour les investissements internationaux et de la direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services a également été sollicitée, afin de trouver un repreneur ; que la seule circonstance que la plaquette d'information rédigée par le cabinet Ernst et Young et envoyée aux repreneurs potentiels mentionne que le nouveau propriétaire et exploitant du site adaptera l'usine pour s'adresser à d'autres segments de marché, ne permet pas d'établir que la société Arjowiggins Papiers Couchés aurait tenté d'empêcher la reprise du site et méconnu son obligation, définie par les dispositions précitées, de rechercher un repreneur ;
18. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie. / Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. (...) " ;
19. Considérant qu'il ressort de la note d'information produite devant le comité central d'entreprise et devant le comité d'établissement du site de Wizernes, le 10 avril 2014, que la société a le projet de créer des emplois, dans une unité de désencrage sur le site de Bessé, en 2016 ; que cette seule circonstance dont la réalisation, postérieurement à la décision en litige, n'est pas certaine, ne permet pas d'établir que la société aurait méconnu son obligation en s'abstenant de proposer le reclassement de personnes licenciées sur ces emplois ; que, par suite, la décision d'homologation n'est pas davantage pour ce motif entachée d'illégalité ;
20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Fédération Industries du Livre, du Papier carton et de la Communication FILPAC-CGT et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la Fédération Industries du Livre, du Papier carton et de la Communication FILPAC-CGT et autres est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la Fédération Industries du Livre, du Papier carton et de la Communication FILPAC-CGT, le syndicat CGT Arjowiggins Wizernes, le comité d'établissement de Wizernes de la société Arjowiggins Papiers Couchés, M. C...I..., M. B... K..., M. H...E...et M. D... G..., à la société Arjowiggins papiers couchés et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Copie en sera adressée au directeur régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Nord-Pas-de-Calais.
Délibéré après l'audience publique du 14 janvier 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,
- M. Olivier Nizet, président-assesseur,
- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller.
Lu en audience publique le 28 janvier 2016.
Le rapporteur,
Signé : O. NIZETLe président de chambre,
Signé : P.-L. ALBERTINI
Le greffier,
Signé : B. LEFORT
La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier
Béatrice Lefort
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N°15DA01732 3