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31/12/2015 | FRANCE | N°15DA01115

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 31 décembre 2015, 15DA01115


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 2 juin 2015 du préfet de la Seine-Maritime lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant l'Italie ou son pays d'origine comme pays de destination de cette mesure et son arrêté en date du même jour le plaçant en rétention administrative.

Par un jugement n° 1501709 du 5 juin 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 2 juin 201

5 en tant qu'il lui a refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire ainsi que, par v...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 2 juin 2015 du préfet de la Seine-Maritime lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant l'Italie ou son pays d'origine comme pays de destination de cette mesure et son arrêté en date du même jour le plaçant en rétention administrative.

Par un jugement n° 1501709 du 5 juin 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 2 juin 2015 en tant qu'il lui a refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire ainsi que, par voie de conséquence, l'arrêté du même jour décidant son placement en rétention administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 juillet 2015, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 juin 2015 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen en tant qu'il a annulé sa décision du 2 juin 2015 par laquelle il a refusé à M. D...l'octroi d'un délai de départ volontaire et son arrêté du même jour décidant son placement en rétention administrative.

2°) de rejeter la demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Rouen ;

Il soutient que sa décision ne méconnaît pas les dispositions du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile faute d'avoir octroyé à M. D... un délai de départ volontaire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention d'application de Schengen du 14 juin 1985, signée à Schengen le 19 juin 1990 ;

- le règlement (CE) n° 562/2006 du 15 mars 2006 ;

- la directive (CE) n° 2008/115 du 16 décembre 2008 ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Albertini, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que le préfet de la Seine-Maritime relève appel du jugement du 5 juin 2015 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen en tant qu'il a annulé, en son article 1er, la décision du 2 juin 2015 refusant à M. D...l'octroi d'un délai de départ volontaire, dont son arrêté lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et fixant l'Italie ou son pays d'origine comme pays de destination de cette mesure constitue le support, ainsi que par voie de conséquence, en son article 2, l'arrêté en date du même jour décidant le placement de l'intéressé en rétention administrative ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 511-2 de ce code : " Le 1° du I et le a du 3° du II de l'article L. 511-1 sont applicables à l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne : / 1° S'il ne remplit pas les conditions d'entrée prévues à l'article 5 du règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006, établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) ; / 2° Si, en provenance directe du territoire d'un Etat partie à la convention précitée signée à Schengen le 19 juin 1990, il ne peut justifier être entré sur le territoire métropolitain en se conformant aux stipulations de ses articles 19, paragraphe 1 ou 2, 20, paragraphe 1, et 21, paragraphe 1 ou 2, de cette même convention. " ; qu'aux termes de cet article 21 de la convention précitée signée à Schengen le 19 juin 1990 : " 1. Les étrangers titulaires d'un titre de séjour délivré par une des Parties Contractantes peuvent, sous le couvert de ce titre ainsi que d'un document de voyage, ces documents étant en cours de validité, circuler librement pendant une période de trois mois au maximum sur le territoire des autres Parties Contractantes, pour autant qu'ils remplissent les conditions d'entrée visées à l'article 5, paragraphe 1, points a), c) et e), et qu'ils ne figurent pas sur la liste de signalement nationale de la Partie Contractante concernée. / 2. Le paragraphe 1 s'applique également aux étrangers titulaires d'une autorisation provisoire de séjour, délivrée par l'une des Parties Contractantes et d'un document de voyage délivré par cette Partie Contractante. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'ainsi que l'a relevé le préfet de la Seine-Maritime dans les motifs de l'arrêté contesté, M.D..., ressortissant égyptien, a fait valoir être entré sur le territoire français fin mai 2015, alors que le titre de séjour italien dont il était titulaire, qu'il a produit, était expiré le 18 mars 2015 ; que, l'intéressé, au demeurant dépourvu de ressources stables et d'un logement en France, où il n'a pas demandé la délivrance d'un titre de séjour, est entré sur le territoire français alors qu'il ne disposait pas d'un titre de séjour en cours de validité délivré par les autorités italiennes et ne démontrait pas davantage être titulaire d'une autorisation provisoire de séjour ; que, par suite, en soutenant qu'il avait saisi les autorités italiennes d'une demande de renouvellement de son titre de séjour venu à expiration, et qu'un rendez-vous lui aurait été fixé à Milan le 3 juin 2015 pour la délivrance d'un titre de séjour, sans en justifier par les pièces versées au dossier en produisant seulement un passeport égyptien en cours de validité, M. D...ne démontrait pas se trouver dans une situation particulière justifiant de l'octroi d'un délai de départ volontaire ; qu'ainsi il se trouvait, à la date de l'arrêté, dans la situation où, en application des dispositions précitées du a) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet pouvait légalement décider de 1'obliger à quitter le territoire en lui refusant un délai de départ volontaire ; que, par suite, c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen s'est fondé sur ce motif pour annuler la décision du préfet de la Seine-Maritime refusant à M. D...un délai de départ volontaire, et, par voie de conséquence, l'arrêté du préfet le plaçant en rétention ;

4. Considérant qu'il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés devant la juridiction administrative par M. D...;

5. Considérant que le préfet de la Seine-Maritime justifie de la délégation de signature donnée à M. B...C..., directeur de la réglementation et des libertés publiques de la préfecture de la Seine-Maritime par arrêté du 17 avril 2015, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture, à l'effet notamment de signer les décisions en litige ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision contestée manque en fait et doit être écarté ;

6. Considérant que la décision contestée refusant un délai de départ volontaire, qui comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée ;

7. Considérant que, faute pour le jugement attaqué d'avoir été contesté sur ce point, la décision faisant obligation à M. D...de quitter le territoire français est devenue définitive ; que, par suite, l'intéressé n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que la décision lui refusant un délai de départ volontaire serait illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ;

8. Considérant que M. D...ne peut invoquer directement devant le juge national les stipulations des paragraphes 16 et 17 du préambule de la directive 2008/115/CE visée ci-dessus ainsi que des articles 8 et 15 de cette même directive dès lors qu'elles ont été transposées en droit français par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité ; que, par suite, le moyen est inopérant ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : / (...) / 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé ; / (...) " ;

10. Considérant qu'il ressort des motifs de l'arrêté contesté du 2 juin 2015 plaçant M. D... en rétention que ceux-ci énoncent, en faisant expressément référence au 6° de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que, d'une part, l'intéressé qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, ne peut se prévaloir d'une entrée régulière sur le territoire français, qu'il est dépourvu de garanties suffisantes de représentation, faute de justifier d'un domicile personnel certain et sable et de ressources, d'autre part, qu'il ne peut quitter immédiatement le territoire français en raison de la nécessité de prendre les mesures qu'exige l'organisation matérielle de son éloignement et que la mesure de placement en rétention est proportionnée au but recherché ; que ces motifs comportent ainsi, conformément à l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979, l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles la mesure de placement en rétention administrative prise à l'égard de l'intéressé est fondée ; que, par suite et alors même qu'ils ne précisent pas l'ensemble des éléments caractérisant sa situation particulière, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision manque ainsi en fait ;

11. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et des motifs exposés au point 12 que le préfet de la Seine-Maritime, pour estimer que M.D..., qui faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, ne présentait pas des garanties de représentation suffisantes et décider, en conséquence, non de l'assigner à résidence en application de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mais de le placer en rétention administrative sur le fondement de l'article L. 551-1 de ce code, a examiné les particularités de la situation de l'intéressé et n'a pas commis d'erreur d'appréciation ; que, dès lors, ce dernier n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait dû prononcer à son égard une mesure moins coercitive, telle que l'assignation à résidence ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé sa décision du 2 juin 2015 refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire à M. D... et son arrêté en date du même jour le plaçant en rétention administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement du 5 juin 2015 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen sont annulés.

Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Rouen sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...D....

Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 17 décembre 2015 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,

- M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 31 décembre 2015.

L'assesseur le plus ancien,

Signé : O. NIZETLe président de chambre,

président rapporteur,

Signé : P.-L. ALBERTINILe greffier,

Signé : M.-T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

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N°15DA01115

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA01115
Date de la décision : 31/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Paul Louis Albertini
Rapporteur public ?: Mme Pestka

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-12-31;15da01115 ?
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