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03/12/2015 | FRANCE | N°15DA00837

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3 (bis), 03 décembre 2015, 15DA00837


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 11 février 2015 du préfet du Pas-de-Calais lui faisant obligation de quitter sans délai le territoire français et fixant le pays dont il revendique la nationalité comme pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1501281 du 14 février 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par

une requête, enregistrée le 20 mai 2015, M.C..., représenté par Me B... A..., demande à la cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...C...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 11 février 2015 du préfet du Pas-de-Calais lui faisant obligation de quitter sans délai le territoire français et fixant le pays dont il revendique la nationalité comme pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1501281 du 14 février 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 mai 2015, M.C..., représenté par Me B... A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 14 février 2015 du tribunal administratif de Lille ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 11 février 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, de réexaminer sa situation et dans cette attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat à verser à son conseil la somme de 2 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire est entachée d'incompétence de l'auteur de l'acte ;

- la motivation en droit de la décision est incomplète et erronée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'il est demandeur d'asile en Autriche.

Une mise en demeure a été adressée le 18 août 2015 au préfet du Pas-de-Calais, qui n'a pas produit de mémoire.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 avril 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;

- le règlement n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant qu'il y a lieu par adoption des motifs retenus par les premiers juges d'écarter le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte ;

2. Considérant que l'arrêté contesté comporte les considérations de fait et de droit sur lesquelles il se fonde ; qu'est sans influence sur sa légalité la circonstance qu'il comporte le visa de textes abrogés ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté ;

3. Considérant qu'en vertu du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dans plusieurs cas, notamment lorsqu'il ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire ou qu'il s'y est irrégulièrement maintenu ; qu'une telle mesure peut également être décidée, selon l'article L. 511-2 du même code, à l'égard de l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui n'a pas respecté les conditions d'entrée prévues dans le règlement n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 ou qui, en provenance directe d'un Etat partie à la convention d'application de l'accord de Schengen signée le 19 juin 1990, ne justifie pas être entré sur le territoire français ou s'y être maintenu conformément aux stipulations de cette convention ;

4. Considérant que l'article L. 531-1 du même code dispose que : " Par dérogation aux articles L. 213-2 et L. 213-3, L. 511-1 à L. 511-3, L. 512-2 à L. 512-5, L. 513-1 et L. 513-3, l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 212-1, L. 212-2, L. 311-1 et L. 311-2 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne " ; que l'article L. 531-2 prévoit en ses deuxième, troisième et quatrième alinéas que de telles mesures de réadmission peuvent également être prises à l'encontre de l'étranger qui, en provenance du territoire d'un Etat partie à la convention d'application de l'accord de Schengen, est entré ou a séjourné sur le territoire métropolitain sans se conformer aux stipulations de cette convention que mentionne le deuxième alinéa de l'article L. 531-2, à l'encontre de l'étranger détenteur d'un titre de résident de longue durée-CE en cours de validité accordé par un autre Etat membre et qui n'a pas régularisé sa situation en France, enfin, à l'encontre de l'étranger détenteur d'une carte de séjour temporaire portant la mention " carte bleue européenne " en cours de validité accordée par un autre Etat membre de l'Union européenne lorsque lui est refusée en France la délivrance de la carte de séjour temporaire portant cette mention ou lorsque la " carte bleue européenne " qu'il détient expire ou lui est retirée durant l'examen de sa demande en France ;

5. Considérant qu'il ressort de ces dispositions que le champ d'application des mesures obligeant un étranger à quitter le territoire français et celui des mesures de remise d'un étranger à un autre Etat ne sont pas exclusifs l'un de l'autre et que le législateur n'a pas donné à l'une de ces procédures un caractère prioritaire par rapport à l'autre ; qu'il s'ensuit que, lorsque l'autorité administrative envisage une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger dont la situation entre dans le champ d'application de l'article L. 531-1 ou des deuxième à quatrième alinéas de l'article L. 531-2, elle peut légalement soit le remettre aux autorités compétentes de l'Etat membre de l'Union européenne ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen d'où il provient, sur le fondement des articles L. 531-1 et suivants, soit l'obliger à quitter le territoire français sur le fondement de l'article L. 511-1 ; que ces dispositions ne font pas non plus obstacle à ce que l'administration engage l'une de ces procédures alors qu'elle avait préalablement engagé l'autre ; que, toutefois, si l'étranger demande à être éloigné vers l'Etat membre de l'Union européenne ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen d'où il provient, ou s'il est résident de longue durée dans un Etat membre ou titulaire d'une " carte bleue européenne " délivrée par un tel Etat, il appartient au préfet d'examiner s'il y a lieu de reconduire en priorité l'étranger vers cet Etat ou de le réadmettre dans cet Etat ;

6. Considérant, qu'en revanche, les stipulations de l'article 31-2 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile impliquent nécessairement que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit autorisé à demeurer provisoirement sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande ; que, dès lors, lorsqu'en application des stipulations des conventions internationales conclues avec les Etats membres de l'Union européenne, l'examen de la demande d'asile d'un étranger ne relève pas de la compétence des autorités françaises mais de celles de l'un de ces Etats, la situation du demandeur d'asile n'entre pas dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais dans celui des dispositions du premier alinéa de l'article L. 531-2 du même code ; qu'en vertu de ces dispositions, la mesure d'éloignement en vue de remettre l'intéressé aux autorités étrangères compétentes pour l'examen de sa demande d'asile ne peut être qu'une décision de réadmission prise sur le fondement de l'article L. 531-1 ;

7. Considérant que M.C..., se déclarant de nationalité afghane, a été interpellé à Calais le 11 février 2015 par les services de police ; que le requérant n'a pas déclaré, lors de son audition, avoir déposé une demande d'asile en Autriche, ni même d'ailleurs avoir transité dans ce pays ; que la circonstance que le préfet n'a pas fait droit à sa demande d'accès aux informations contenues dans le fichier Eurodac n'est pas de nature à laisser présumer qu'il serait demandeur d'asile en Autriche ; que ni la teneur du courrier de France Terre d'asile ni celle de l'ordonnance du juge judiciaire se prononçant sur la prolongation de sa rétention, qui mentionne l'existence d'un courrier de demande de réadmission vers l'Autriche, ne permettent d'établir qu'il serait effectivement demandeur d'asile dans ce pays ; que, dans ces conditions, la situation de M. C... n'entrant pas dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Pas-de-Calais n'a pas commis d'erreur de droit en l'obligeant à quitter le territoire français et en s'abstenant de le réadmettre en Autriche ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Pas-de-Calais.

Délibéré après l'audience publique du 19 novembre 2015 à laquelle siégeaient :

- M. Olivier Nizet, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 3 décembre 2015.

L'assesseur le plus ancien,

Signé : J-J. GAUTHE

Le président

de la formation de jugement,

Signé : O. NIZETLe greffier,

Signé : B. LEFORT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Béatrice Lefort

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3 (bis)
Numéro d'arrêt : 15DA00837
Date de la décision : 03/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. Nizet
Rapporteur ?: M. Olivier Nizet
Rapporteur public ?: Mme Pestka
Avocat(s) : HERDEWYN

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-12-03;15da00837 ?
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