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01/12/2015 | FRANCE | N°15DA00543

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 01 décembre 2015, 15DA00543


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...D...a demandé au tribunal administratif d'Amiens l'annulation de l'arrêté du 4 novembre 2014 du préfet de la Somme lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de la Russie.

Par un jugement n° 1404624 du 10 mars 2015, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 avril 2015, MmeD..., représentée par Me B..

., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 10 mars 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...D...a demandé au tribunal administratif d'Amiens l'annulation de l'arrêté du 4 novembre 2014 du préfet de la Somme lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de la Russie.

Par un jugement n° 1404624 du 10 mars 2015, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 avril 2015, MmeD..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 10 mars 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2014 du préfet de la Somme ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Somme de lui délivrer dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour.

Elle soutient que :

- la situation de son enfant n'a pas été prise en compte ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de la Somme qui n'a pas produit de mémoire.

Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 avril 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Domingo, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeD..., de nationalité russe née le 11 mai 1991, relève appel du jugement du 10 mars 2015 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Somme lui refusant la délivrance du titre de séjour qu'elle sollicitait, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite ;

Sur le refus de séjour :

2. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Somme, qui a bien pris en compte la présence d'un enfant au sein de la cellule familiale de la requérante, se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation de l'intéressée ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ;

4. Considérant que si la requérante fait valoir qu'elle est entrée en France le 27 novembre 2012 pour solliciter le statut de réfugiée, qu'elle demeure depuis lors sur ce territoire en compagnie de son époux d'origine arménienne et de son enfant né sur le territoire national le 10 mai 2013, il ressort toutefois des pièces du dossier, d'une part, que l'époux de Mme D... se trouve également en situation irrégulière et fait l'objet d'une mesure d'éloignement, d'autre part, qu'elle ne justifie pas être dans l'impossibilité de poursuivre sa vie privée en dehors du territoire français ; que si elle soutient que son époux est d'une nationalité différente de la sienne, cette circonstance demeure sans incidence sur la légalité d'une décision de refus de séjour ou d'obligation de quitter le territoire français, seules les décisions fixant le pays de destination pouvant être contestées au motif qu'il existerait, du fait de la différence de nationalité, un risque de séparation du couple et des enfants dans deux pays distincts ; que, dans les circonstances de l'espèce, et eu égard tant à la durée qu'aux conditions de séjour en France de l'intéressée, le préfet n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée ; que, par suite, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont été méconnues ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la décision attaquée serait, au cas particulier, entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de MmeD... ;

5. Considérant que la décision de refus de séjour, qui n'a pas par elle-même pour effet de rompre l'unité de la famille, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur l'obligation de quitter le territoire :

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à exciper à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français de l'illégalité du refus de séjour qui lui a été opposé ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 5, que la décision attaquée ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante ;

Sur le pays de destination :

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté préfectoral du 4 novembre 2014 refusant un titre de séjour à Mme D...et lui faisant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours prévoit, en son article 5, que l'intéressée pourra, à l'expiration de ce délai, être reconduite d'office à destination de la Russie ou de tout autre pays pour lequel elle établirait être légalement admissible ; que l'arrêté similaire concernant son époux prévoit que ce dernier pourra être reconduit d'office à destination de la Russie ou de tout autre pays pour lequel il établirait être légalement admissible ; que chacun de ces deux arrêtés permet de renvoyer les époux dans un même pays, de même que leur enfant ; que si Mme D... fait désormais valoir que son mari ne détiendrait pas la nationalité russe, il est toutefois constant qu'il s'est lui-même déclaré d'une telle nationalité lors de son enregistrement auprès des services préfectoraux ; qu'en outre, et à supposer même que M. D...ait conservé sa nationalité arménienne, il résulte des termes de l'article 13 de la loi russe sur la nationalité entrée en vigueur le 1er juillet 2002, qu'étant légalement marié à une citoyenne russe depuis au moins trois ans, il peut prétendre à l'obtention de cette nationalité ; que, par suite, Mme D...n'est pas fondée à soutenir qu'en fixant la Russie comme pays à destination duquel elle pourrait être éloignée, le préfet de la Somme aurait commis une erreur d'appréciation et méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

10. Considérant, enfin, que si Mme D...fait valoir qu'elle encourt des risques en cas de retour en Russie à raison de son origine arménienne, l'intéressée, dont la demande d'asile a été au demeurant rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 8 septembre 2014 qui avait souligné le caractère sommaire et confus de ses déclarations, n'apporte pas plus d'éléments probants de nature à établir la réalité des craintes personnelles qu'elle encourrait en cas de retour en Russie ; qu'elle n'est dès lors pas fondée à soutenir que le préfet aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet de la Somme.

Délibéré après l'audience publique du 17 novembre 2015 à laquelle siégeaient :

- M. Michel Hoffmann, président de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Laurent Domingo, premier conseiller.

Lu en audience publique le 1er décembre 2015.

Le rapporteur,

Signé : L. DOMINGOLe président de chambre,

Signé : M. C...

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

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N°15DA00543


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA00543
Date de la décision : 01/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. Hoffmann
Rapporteur ?: M. Laurent Domingo
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : SCP CARON-DAQUO-AMOUEL-PEREIRA

Origine de la décision
Date de l'import : 10/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-12-01;15da00543 ?
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