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01/12/2015 | FRANCE | N°15DA00350

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 01 décembre 2015, 15DA00350


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lille l'annulation des décisions du 3 décembre 2014 du préfet du Nord l'obligeant à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire à destination de son pays d'origine et l'assignant à résidence.

Par un jugement n° 1408760 du 9 décembre 2014, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 février 2015,

M.A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Lille l'annulation des décisions du 3 décembre 2014 du préfet du Nord l'obligeant à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire à destination de son pays d'origine et l'assignant à résidence.

Par un jugement n° 1408760 du 9 décembre 2014, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 février 2015, M.A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille du 9 décembre 2014 ;

2°) d'annuler les décisions du 3 décembre 2014 du préfet du Nord ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de procéder, dans un délai de d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à un nouvel examen de sa situation, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans l'attente de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me C...en vertu de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le risque de fuite défini par l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile méconnaît les objectifs de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le refus de lui accorder un délai de départ volontaire n'est pas légalement justifié.

La requête a été communiquée au préfet du Nord qui n'a pas produit de mémoire.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 janvier 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Domingo, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant marocain né le 18 juillet 1988, relève appel du jugement du 9 décembre 2014 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 3 décembre 2014 du préfet du Nord l'obligeant à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire à destination de son pays d'origine et l'assignant à résidence ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant que la décision attaquée comporte les considérations de droit et de fait, notamment des éléments de la vie privée et familiale du requérant, sur lesquelles elle se fonde ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...est entré en France en septembre 2013 selon ses déclarations, soit quinze mois avant la décision attaquée ; que si l'intéressé fait valoir qu'il entretient, depuis mai 2014, une relation avec une ressortissante française dont l'état de santé psychologique est fragile et avec qui il s'est marié postérieurement à la décision attaquée, il ne ressort pas des pièces du dossier que la présence de M. A...aux côtés de cette dernière présente un caractère indispensable ; qu'en outre, M. A...n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où résident ses parents et ses frères et soeurs et où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de 25 ans ; que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment tant à la durée qu'aux conditions de séjour en France de M.A..., dont la communauté de vie avec sa future épouse, qui n'a débuté que le 16 septembre 2014, était très récente à la date de la mesure d'éloignement, le préfet du Nord n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale et n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le préfet n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de M. A...;

Sur le refus d'accorder un délai de départ volontaire :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) c) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après l'expiration de son titre de séjour, de son récépissé de demande de carte de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 1er de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 : " La présente directive fixe les normes et procédures communes à appliquer dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, conformément aux droits fondamentaux en tant que principes généraux du droit communautaire ainsi qu'au droit international, y compris aux obligations en matière de protection des réfugiés et de droits de l'homme (...) " ; que le 7) de l'article 3 de la même directive définit le " risque de fuite " comme le fait qu'il existe des raisons, dans un cas particulier et sur la base de critères objectifs définis par la loi, de penser qu'un ressortissant d'un pays tiers faisant l'objet de procédures de retour peut prendre la fuite ;

6. Considérant qu'en estimant que, dans les cas énumérés au 3° précité du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il existe, sauf circonstance particulière, un risque que l'étranger se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français, le législateur, a, pour définir le risque de fuite prévu par les dispositions précitées de la directive du 16 décembre 2008, retenu des critères objectifs qui ne sont pas incompatibles avec cette directive ; qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, le moyen tiré de l'incompatibilité de la loi avec la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 doit être écarté ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que M. A... s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration, le 13 février 2014, de son autorisation provisoire de séjour et n'a entrepris aucune démarche pour renouveler cette autorisation ; qu'en l'absence de circonstances particulières dans la situation de M. A...justifiant que lui soit accordé un délai de départ volontaire, c'est à bon droit que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a estimé que ce seul motif suffisait à légalement justifier la décision du préfet du Nord ;

Sur le pays de renvoi :

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander, par voie d'exception ou par voie de conséquence, l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi ;

Sur l'assignation à résidence :

9. Considérant que la décision attaquée comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée ;

10. Considérant qu'il ne ressort des pièces du dossier ni que le préfet du Nord aurait commis une erreur d'appréciation en décidant d'assigner l'intéressé à résidence, mesure au demeurant moins coercitive qu'un placement en rétention administrative, ni qu'il se serait estimé, à tort, tenu de fixer la durée d'assignation à résidence à quarante-cinq jours ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 17 novembre 2015 à laquelle siégeaient :

- M. Michel Hoffmann, président de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Laurent Domingo, premier conseiller.

Lu en audience publique le 1er décembre 2015.

Le rapporteur,

Signé : L. DOMINGOLe président de chambre,

Signé : M. D...

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

Marie-Thérèse Lévèque

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N°15DA00350


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15DA00350
Date de la décision : 01/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. Hoffmann
Rapporteur ?: M. Laurent Domingo
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : HERDEWYN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-12-01;15da00350 ?
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