Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D...B...a demandé au tribunal administratif de Lille l'annulation de la décision du 8 avril 2011 par laquelle le conseil régional de l'ordre des pédicures-podologues du Nord-Pas-de-Calais a rejeté sa demande de renouvellement de dérogation pour le maintien de son cabinet secondaire, et de la décision du 1er décembre 2011 par laquelle le conseil national de l'ordre des pédicures-podologues a rejeté son recours contre la décision du conseil régional tout en l'autorisant exceptionnellement à maintenir son cabinet secondaire pour une période de six mois.
Par un jugement n° 1202940 du 11 février 2014, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 1er décembre 2011 du conseil national de l'ordre des pédicures-podologues et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de MmeB....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 6 mars 2014, MmeB..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 11 février 2014 ;
2°) d'annuler la décision du 8 avril 2011 du conseil régional de l'ordre des pédicures-podologues du Nord-Pas-de-Calais ;
3°) d'annuler la décision du 1er décembre 2011 du conseil national de l'ordre des pédicures-podologues ;
4°) de mettre à la charge du conseil régional de l'ordre des pédicures-podologues du Nord-Pas-de-Calais une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le principe du contradictoire a été méconnu dès lors qu'elle n'a pas été entendue par le conseil régional de l'ordre ;
- elle n'a pas eu connaissance du rapport de la commission des dérogations ;
- la décision du conseil régional de l'ordre est insuffisamment motivée ;
- le mémoire en défense produit par le conseil régional de l'ordre devant le conseil national de l'ordre n'a pas été signé par la présidente du conseil régional et comporte des données erronées ;
- la décision du conseil régional de l'ordre est entachée d'une erreur d'appréciation au regard des besoins des patients.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 octobre 2014, le conseil régional de l'ordre des pédicures-podologues du Nord-Pas-de-Calais et le conseil national de l'ordre des pédicures-podologues, représentés par la SCP Barthélémy, Matuchansky, Vexliard, Poupot, concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme B...sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la requérante est sans intérêt à agir contre la décision du 1er décembre 2011 du conseil national de l'ordre des pédicures-podologues qui a été annulée par les premiers juges ;
- le caractère contradictoire de la procédure n'a pas été méconnu ;
- le principe des droits de la défense ne s'applique pas aux décisions des instances ordinales statuant sur des demandes de maintien de cabinet secondaire ;
- les décisions attaquées n'avaient pas à être motivées ;
- en tout état de cause le moyen manque en fait ;
- il n'y a pas eu d'erreur d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Guyau, rapporteur public.
1. Considérant que Mme D...B...exerçait la profession de pédicure-podologue dans un cabinet principal à Villeneuve d'Ascq et dans un cabinet secondaire à Lesquin ; que, par une décision du 8 avril 2011, le conseil régional de l'ordre des pédicures-podologues du Nord-Pas-de-Calais a refusé d'accorder le renouvellement au-delà du 15 mars 2011 de la dérogation dont elle bénéficiait depuis trois ans pour le maintien de son cabinet secondaire ; que, par une décision du 1er décembre 2011, le conseil national de l'ordre des pédicures-podologues a rejeté le recours formé par Mme B...contre la décision du conseil régional ; que Mme B...relève appel du jugement du 11 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé pour incompétence la décision du 1er décembre 2011 du conseil national de l'ordre des pédicures-podologues et a rejeté le surplus de sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 avril 2011 prise par le conseil régional de l'ordre des pédicures-podologues du Nord-Pas-de-Calais ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 1er décembre 2011 du conseil national de l'ordre des pédicures-podologues :
2. Considérant que les appels formés contre les jugements des tribunaux administratifs ne peuvent tendre qu'à l'annulation ou la réformation du dispositif du jugement attaqué ; que, par suite, n'est pas recevable, quels que soient les motifs retenus par les premiers juges, l'appel dirigé contre un jugement qui, par son dispositif, fait intégralement droit aux conclusions de la demande qu'avait présentée l'appelant en première instance ;
3. Considérant que par sa requête susvisée, Mme B...défère à la cour le jugement par lequel dans l'article 1er de son dispositif, le tribunal administratif de Lille a, à sa demande, annulé la décision du 1er décembre 2011 du conseil national de l'ordre des pédicures-podologues rejetant le recours qu'elle avait introduit à l'encontre de la décision du conseil régional de cet ordre professionnel prise le 8 avril 2011 ; qu'ainsi, ce jugement a fait entièrement droit aux conclusions de la demande dont il était saisi en ce qui concerne la décision prononcée par le conseil national de l'ordre des pédicures-podologues ; que, dès lors, les conclusions de la requête dirigées contre l'article 1er du jugement attaqué ne sont pas recevables et doivent être rejetées ;
Sur les conclusions d'annulation de la décision du 8 avril 2011 du conseil régional de l'ordre des pédicures-podologues du Nord-Pas-de-Calais :
4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 4322-79 du code de la santé publique : " Le pédicure-podologue ne doit avoir, en principe, qu'un seul cabinet. Toutefois la création ou le maintien d'un ou plusieurs cabinets secondaires peuvent être autorisés si le besoin des patients le justifie du fait d'une situation géographique ou démographique particulière. L'autorisation est accordée par le conseil régional de l'ordre du lieu où est envisagée l'implantation du ou des cabinets secondaires. Si le cabinet principal se situe dans une autre région, le conseil régional de l'ordre de cette dernière doit donner son avis motivé. L'autorisation est donnée à titre personnel et n'est pas cessible. Le conseil régional de l'ordre doit informer immédiatement le conseil national de l'ordre de la dérogation accordée " ; qu'aux termes de l'article R. 4322-81 du même code, dans sa rédaction issue du même décret : " Les autorisations de cabinets secondaires prévues aux articles R. 4322-79 et R. 4322-80 sont accordées pour une période de trois ans renouvelables. Toutefois l'autorisation de cabinet secondaire peut être retirée à tout moment par l'autorité qui l'a accordée lorsque les conditions nécessaires à son obtention ne sont plus remplies " ;
5. Considérant qu'il résulte des termes mêmes des dispositions précitées du code de la santé publique qu'elles n'instituent, à l'issue de la période triennale au cours de laquelle le praticien a pu maintenir son activité dans un cabinet secondaire, aucun droit au renouvellement de la dérogation précédemment accordée ; qu'ainsi, le refus de renouvellement de cette dérogation, qui ne constitue ni une sanction ni une mesure prise en considération de la personne, dès lors qu'il est fondé sur des données objectives liées aux besoins des patients dans une aire géographique déterminée, n'a pas à être précédé d'une procédure contradictoire ; que, par suite, la requérante, qui a pu en tout état de cause présenter des observations écrites et qui n'établit pas avoir demandé à présenter des observations orales devant le conseil régional de l'ordre, n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait dû être convoquée à une audition avant que la décision attaquée ne soit prise ;
6. Considérant qu'en vertu de l'article 20 du règlement intérieur applicable aux conseils régionaux de l'ordre des pédicures-podologues, les demandes de dérogation pour le maintien d'un cabinet secondaire sont instruites par une commission spéciale de trois membres dont le rapport est ensuite transmis à l'instance ordinale régionale ; qu'aucune disposition législative ou règlementaire n'impose que ce rapport, qui constitue un simple document de travail interne ne liant pas l'instance délibérante du conseil régional de l'ordre, soit communiqué au praticien qui sollicite une dérogation ;
7. Considérant que la décision attaquée, qui énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la commune de Lesquin, où est implanté le cabinet secondaire de la requérante, dispose déjà de six cabinets principaux de pédicures-podologues pour une population de moins de 30 000 habitants ; que le cabinet de Mme B... est en outre situé dans une zone urbaine comprenant 29 cabinets principaux de pédicures-podologues situés dans un rayon de cinq kilomètres, représentant 20 à 25 praticiens pour 100 000 habitants ; qu'enfin, le cabinet principal de l'intéressée, implanté à Villeneuve d'Asq, se situe à moins de six kilomètres de son cabinet secondaire, de telle sorte que l'incidence de la fermeture de ce dernier sur la clientèle sera nécessairement réduite ; que, dans ces conditions, eu égard aux caractéristiques de la discipline en cause, l'offre de soins ne peut être regardée comme présentant une carence ou une insuffisance au regard des besoins de la population au sens des dispositions précitées de l'article R. 4322-79 du code de la santé publique ; que dès lors, MmeB..., qui n'établit ni que les données informatiques issues du logiciel " Podemo " sur lesquelles s'est notamment fondée l'instance ordinale seraient erronées ou inexistantes, ni que le maintien du cabinet secondaire serait opportun en prenant en considération des données démographiques constatées sur l'ensemble du canton de Seclin Nord, n'est pas fondée à soutenir qu'en lui refusant le renouvellement de la dérogation qu'elle sollicitait, le conseil régional de l'ordre des pédicures-podologues du Nord-Pas-de-Calais aurait fait une inexacte application des dispositions précitées du code de la santé publique ;
9. Considérant que la légalité d'une décision s'appréciant à la date à laquelle elle a été prise, la requérante ne saurait utilement se prévaloir d'un projet de construction d'un lotissement à proximité de son cabinet secondaire ; qu'enfin le moyen, à le supposer bien fondé, tiré des répercussions éventuelles de la décision attaquée sur le volume de son activité professionnelle, demeure sans incidence sur la légalité de la décision du 8 avril 2011 ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 8 avril 2011 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B...le versement d'une somme globale de 1 500 euros au conseil national et au conseil régional de l'ordre des pédicures-podologues du Nord-Pas-de-Calais au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Mme B...versera une somme globale de 1 500 euros au conseil national et au conseil régional de l'ordre des pédicures-podologues du Nord-Pas-de-Calais au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B..., au conseil régional de l'ordre des pédicures-podologues du Nord-Pas-de-Calais et au conseil national de l'ordre des pédicures-podologues.
Délibéré après l'audience publique du 23 octobre 2015 à laquelle siégeaient :
- M. Michel Hoffmann, président de chambre,
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- M. Laurent Domingo, premier conseiller.
Lu en audience publique le 4 novembre 2015.
Le rapporteur,
Signé : M. LAVAIL DELLAPORTALe président de chambre,
Signé : M. C...
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le Greffier
Marie-Thérèse Lévèque
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N°14DA00410