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22/09/2015 | FRANCE | N°14DA00917

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 22 septembre 2015, 14DA00917


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... E...épouse A...a demandé de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme de 110 050 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis à raison de sa contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C.

Par un jugement n° 1200645 du 27 mars 2014, le tribunal administratif d'Amiens a condamné l'ONIAM à verser à Mme A...une somme de 20 000 euros en réparation des préjudi

ces subis ainsi qu'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... E...épouse A...a demandé de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme de 110 050 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis à raison de sa contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C.

Par un jugement n° 1200645 du 27 mars 2014, le tribunal administratif d'Amiens a condamné l'ONIAM à verser à Mme A...une somme de 20 000 euros en réparation des préjudices subis ainsi qu'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 mai 2014 et le 12 septembre 2014, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler le jugement du 27 mars 2014 du tribunal administratif d'Amiens ;

2°) de rejeter la demande de MmeA... ;

3°) à titre subsidiaire, de réduire à 4 140 euros le montant de l'indemnité accordée et de réformer en ce sens le jugement du tribunal administratif.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties on été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Guyau, rapporteur public.

1. Considérant que Mme A...a été contaminée par le virus de l'hépatite C à l'occasion des transfusions de produits sanguins réalisées en 1979 au cours de son hospitalisation à l'hôpital Saint-Louis à Paris ; qu'elle a saisi l'ONIAM, le 10 juin 2011, d'une demande d'indemnisation des préjudices résultant de cette contamination ; que, par lettre du 2 janvier 2012, cet établissement public lui a opposé la déchéance quadriennale prévue par la loi du 31 décembre 1968 ; que l'ONIAM relève appel du jugement du 27 mars 2014 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a, d'une part, écarté l'exception de prescription et, d'autre part, l'a condamné à verser à Mme A...la somme de 20 000 euros en réparation des préjudices subis ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 1142-52 du code de la santé publique : " Le directeur (...) assure la direction de l'établissement. Il accomplit tous les actes qui ne sont pas réservés au conseil d'administration en vertu des dispositions de l'article R. 1142-46. (...) Le directeur peut déléguer sa signature à ses collaborateurs dans les conditions prévues par le règlement intérieur de l'office " ; que selon l'article 26 du règlement intérieur de l'ONIAM adopté par délibération du conseil d'administration du 27 avril 2010 conformément aux dispositions de l'article R. 1142-46 du code précité, le directeur peut donner délégation de signature au directeur juridique et au secrétaire général à l'effet de signer au nom du directeur et dans la limite de leurs attributions respectives, tous actes, décisions, contrats ainsi que toutes propositions d'engagement et d'ordonnance de paiement ou de virement, tous ordres de reversement et toutes demandes de titre de perception ; que par décision du 11 octobre 2011, produite pour la première fois en appel, le directeur de l'ONIAM a délégué sa signature à Mme D...B..., directrice juridique, pour signer en son nom tout acte ou décision engageant l'établissement ; que l'ONIAM justifie ainsi de la qualité de Mme B...pour opposer la prescription quadriennale de la loi du 31 décembre 1968 à la demande de MmeA... ; que, par suite, l'ONIAM est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a écarté l'exception de prescription quadriennale et l'a condamné à verser une indemnité de 20 000 euros à MmeA... ;

3. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner, sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer, les autres moyens soulevés par MmeA... ;

4. Considérant que l'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 dispose que : " Sont prescrites, au profit de l'État, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public. " ; que l'article L. 1142-28 du code la santé publique dispose que : " Les actions tendant à mettre en cause la responsabilité des professionnels de santé ou des établissements de santé publics ou privés à l'occasion d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins se prescrivent par dix ans à compter de la consolidation du dommage (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1221-14 du même code, issu de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 susvisée : " Les victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l'hépatite B ou C ou le virus T-lymphotropique humain causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang réalisée sur les territoires auxquels s'applique le présent chapitre sont indemnisées au titre de la solidarité nationale par l'office mentionné à l'article L. 1142-22 dans les conditions prévues à la seconde phrase du troisième alinéa de l'article L. 3122-1, aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3122-2, au premier alinéa de l'article L. 3122-3 et à l'article L. 3122-4, à l'exception de la seconde phrase du premier alinéa (...) " ;

5. Considérant qu'alors qu'en raison des spécificités des responsabilités en cause, la réparation des dommages résultant des contaminations transfusionnelles par le virus de l'hépatite C incombait à l'Etablissement français du sang (EFS), substitué dans les droits et obligations, créances et dettes liées aux activités antérieurement exercées par les centres de transfusion sanguine, l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008 a eu pour objet de faire intervenir l'ONIAM aux lieu et place de l'EFS ; que, hors le cas où une faute dans les soins a concouru à la réalisation du dommage, un établissement hospitalier ne peut voir sa responsabilité engagée à raison d'une contamination imputable aux produits sanguins qu'il a transfusés ; qu'ainsi, lorsqu'est en cause la mauvaise qualité des produits sanguins, les actions en réparation des dommages résultant d'une contamination transfusionnelle ne tendent pas à rechercher la responsabilité d'établissements ou de professionnels de santé à l'occasion d'actes de soins, mais à obtenir l'indemnisation des préjudices liés au vice du produit sanguin administré, lequel trouve sa source dans les activités de collecte, de traitement et de fourniture des produits sanguins ; que les dispositions de l'article L. 1142-28 du code de la santé publique, issues de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, qui ont porté à dix ans à compter de la date de consolidation du dommage le délai dans lequel se prescrivent les actions tendant à mettre en cause la responsabilité des professionnels de santé ou des établissements de santé à raison d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins, n'ont eu ni pour objet ni pour effet de modifier le régime de prescription des actions tendant à obtenir réparation des conséquences dommageables des contaminations transfusionnelles ; qu'ainsi, en l'absence de dispositions législatives expresses contraires, le régime de prescription applicable à ces actions est demeuré, avant comme après l'intervention de la loi du 17 décembre 2008, celui, de droit commun, prévu par la loi du 31 décembre 1968 ; qu'enfin, s'agissant d'une créance indemnitaire détenue sur une collectivité publique au titre d'un dommage corporel qu'il lui incombe de réparer, le point de départ du délai de prescription prévu par ces dispositions est le premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les infirmités liées à ce dommage ont été consolidées ;

6. Considérant, en l'espèce, que le fait générateur de la créance détenue par Mme A... est constitué par la consolidation de son état de santé, le 28 novembre 2002, date à laquelle la réparation des dommages subis par une victime d'une contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C était à la charge de l'Etablissement français du sang ; qu'en application des dispositions précitées de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968, le délai de prescription a commencé à courir le 1er janvier 2003 pour s'achever le 31 décembre 2006 ; qu'en l'absence de toute disposition législative en ce sens, le transfert à l'ONIAM de la mission d'indemniser les dommages subis par les victimes de contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C ne saurait avoir pour effet d'ouvrir un nouveau délai de prescription, alors, au surplus, que la créance de Mme A..., qui ne saurait légitimement prétendre qu'elle en ignorait l'existence ou aurait été empêchée de faire valoir ses droits en méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, était déjà éteinte à la date de ce transfert ; que, par conséquent, la créance que Mme A... détenait sur l'Etablissement français du sang était prescrite à la date de la demande d'indemnisation amiable formée auprès de l'ONIAM le 10 juin 2011 ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ONIAM est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens n'a pas fait droit à l'exception de prescription quadriennale dont il se prévalait et l'a condamné à verser une indemnité de 20 000 euros à MmeA... ; que, par voie de conséquence, l'appel incident de Mme A...ainsi que ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetés ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 27 mars 2014 est annulé.

Article 2 : La demande de Mme A...devant le tribunal administratif d'Amiens est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de Mme A...présentées par la voie de l'appel incident et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à Mme F...A....

Copie sera adressée à la Mutuelle nationale des hospitaliers et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Aisne.

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N°14DA00917


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14DA00917
Date de la décision : 22/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

18-04-02-01 Comptabilité publique et budget. Dettes des collectivités publiques - Prescription quadriennale. Régime de la loi du 31 décembre 1968. Champ d'application.


Composition du Tribunal
Président : M. Hoffmann
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : SELARL COUBRIS COURTOIS et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-09-22;14da00917 ?
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