La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/09/2015 | FRANCE | N°14DA00228

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3, 22 septembre 2015, 14DA00228


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007 et 2008 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1103718 du 5 décembre 2013, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 6 février 2014 et le 26 juin 2014, M. B..., représenté

par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 5 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Rouen la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007 et 2008 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1103718 du 5 décembre 2013, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 6 février 2014 et le 26 juin 2014, M. B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 5 décembre 2013 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Domingo, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Guyau, rapporteur public.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter, outre la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base des redressements, ceux des motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées et qui sont nécessaires pour permettre au contribuable de formuler ses observations de manière entièrement utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;

2. Considérant que la proposition de rectification du 9 décembre 2010 faisant suite à l'examen contradictoire de situation fiscale d'ensemble, dont M. B...a fait l'objet au titre des années 2007 et 2008, mentionnait les dispositions de l'article 111 c du code général des impôts relatif aux rémunérations et avantages occultes ; qu'elle précisait que le requérant, gérant de la société B...Express, avait encaissé sur son compte bancaire personnel des sommes provenant de chèques émis ou de virements ordonnés par des sociétés françaises ou étrangères dont l'activité était proche de celle de sa société et dont le caractère non professionnel n'avait pas été établi ; que le service relevait en outre que la vérification de comptabilité de la société B...Express avait permis de constater que le règlement de certaines factures émises au nom de la société Cocoon, également cliente de la société précitée, avaient été encaissées sur le compte bancaire personnel de l'intéressé et dont les montants étaient détaillés ; que ce document, dont les mentions ne comportaient aucune contradiction de nature à égarer le contribuable sur la compréhension des motifs des rectifications apportées à ses revenus imposables, comportait les précisions permettant à M. B...de présenter utilement ses observations et était ainsi suffisamment motivé ; que, par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article L. 57 précité du livre des procédures fiscales doit être écarté ;

3. Considérant que M. B...ne saurait utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la documentation administrative 13 L-1513 qui, relative à la procédure d'imposition, ne peut être regardée comme comportant une interprétation de la loi fiscale au sens de cet article ;

Sur les pénalités :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) / c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses (...) " ; qu'en vertu de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable " ;

En ce qui concerne l'application des pénalités pour manoeuvres frauduleuses :

5. Considérant que si l'administration relève dans sa proposition de rectification du 9 décembre 2010 que M.B..., gérant de la société, ne pouvait ignorer l'origine et la nature des chèques qu'il encaissait directement sur ses comptes bancaires personnels provenant soit de personnes physiques clientes de la société B...Express soit de la société Cocoon, ces seuls éléments ne sont pas de nature à caractériser l'existence de la part de l'intéressé, de démarches ou de procédés destinés à égarer l'administration dans son contrôle ; que, dès lors, le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que le service a appliqué, aux redressements en cause, les majorations pour manoeuvres frauduleuses ;

6. Considérant toutefois qu'il appartient au juge, dans une telle hypothèse, alors même que l'administration ne le saisirait pas d'une demande en ce sens, de rechercher si les éléments qui étaient invoqués par l'administration pour justifier des pénalités pour manoeuvres frauduleuses permettraient, à défaut d'établir ces dernières, de caractériser la mauvaise foi du contribuable et de substituer, au besoin d'office, à la majoration de 80 % appliquée par l'administration la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue par l'article 1729 du code général des impôts ;

7. Considérant qu'en l'espèce, compte tenu des circonstances qui ont justifié le redressement contesté, notamment le fait que M.B..., gérant de la société, ne pouvait pas ignorer l'origine et la nature des chèques qu'il encaissait directement sur son compte bancaire, l'administration justifie du manquement délibéré du contribuable ; qu'il y a lieu, par suite, de substituer d'office à la majoration de 80 %, la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par l'article 1729 du code général des impôts ;

En ce qui concerne l'application des pénalités pour manquement délibéré :

8. Considérant que l'administration est en droit, à tout moment de la procédure contentieuse, de justifier d'une pénalité en modifiant son fondement juridique, à la double condition que la substitution de base légale ainsi opérée ne prive le contribuable d'aucune des garanties de procédure prévues par la loi et que le service invoque, au soutien de cette substitution de base légale, des faits qu'elle avait retenus pour motiver la pénalité initialement appliquée ;

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que dans sa décision du 27 octobre 2011, prise sur la réclamation préalable de M.B..., l'administration a substitué aux pénalités pour manoeuvres frauduleuses initialement appliquées aux rappels d'impôts sur le revenu résultant des rectifications relatives à l'encaissement des sommes versées ou virées par des sociétés françaises ou étrangères sur le compte bancaire personnel de l'intéressé, les majorations de 40 % pour manquement délibéré visées par les dispositions précitées du a) de l'article 1729 du code général des impôts ; que dans la proposition de rectification adressée au requérant le 9 décembre 2010, l'administration s'est notamment fondée sur la circonstance que le contribuable avait volontairement encaissé sur son compte bancaire personnel des chèques ou virements émis par des sociétés tierces en règlement de créances antérieures de la société B...Express et dont il ne pouvait ignorer le caractère imposable ; que l'administration doit être regardée comme ayant établi l'intention délibérée de M. B...d'éluder l'impôt ; que dans ces conditions, et alors que M. B... n'a été privé d'aucune garantie, ce dernier n'est pas fondé à soutenir que les conditions requises pour que l'administration puisse régulièrement procéder à la substitution de base légale précitée, n'étaient pas réunies ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen ne lui a pas accordé la décharge des pénalités pour manoeuvres frauduleuses en leur substituant celles applicables en cas de manquement délibéré ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. B...présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les pénalités pour manquement délibéré au taux de 40 % assortissant les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. B... a été assujetti au titre des années 2007 et 2008 sont substituées aux pénalités pour manoeuvres frauduleuses au taux de 80 %.

Article 2 : M. B... est déchargé des pénalités au taux de 80 % dans la limite de la réduction du taux applicable mentionné à l'article 1er.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Rouen du 5 décembre 2013 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

''

''

''

''

3

N°14DA00228


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14DA00228
Date de la décision : 22/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations.

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations - Pénalités pour manquement délibéré (ou mauvaise foi).


Composition du Tribunal
Président : M. Hoffmann
Rapporteur ?: M. Laurent Domingo
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : SCP DHALLUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2015-09-22;14da00228 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award