La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/09/2014 | FRANCE | N°13DA00094

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3 (ter), 25 septembre 2014, 13DA00094


Vu la requête, enregistrée le 18 janvier 2013, présentée pour M. D... A..., demeurant..., Mme I...B..., demeurant..., et M. G... A..., demeurant..., par la SELARL Enard-Bazire ;

M. A...et autres demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002886 du 29 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à verser à M. D... A...la somme de 61 496,79 euros, à Mme I...B...la somme de 57 662,68 euros, et à M. G...A...la somme de 52 662,68 euros, ces sommes étant majorées des intérêts au taux lég

al à compter de la date de la réclamation préalable ;

2°) de condamner l'Eta...

Vu la requête, enregistrée le 18 janvier 2013, présentée pour M. D... A..., demeurant..., Mme I...B..., demeurant..., et M. G... A..., demeurant..., par la SELARL Enard-Bazire ;

M. A...et autres demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002886 du 29 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à verser à M. D... A...la somme de 61 496,79 euros, à Mme I...B...la somme de 57 662,68 euros, et à M. G...A...la somme de 52 662,68 euros, ces sommes étant majorées des intérêts au taux légal à compter de la date de la réclamation préalable ;

2°) de condamner l'Etat à leur verser ces sommes, augmentées des intérêts au taux légal et la somme versée à Mme B...étant, en outre, augmentée de la capitalisation des intérêts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 35 euros au titre de la contribution d'aide juridique ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu l'arrêté du ministre de l'écologie et du développement durable du 7 février 2005 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire, notamment, les élevages de bovins soumis à déclaration au titre du livre V du code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur,

- et les conclusions de Mme Perrine Hamon, rapporteur public ;

Sur la recevabilité du mémoire en défense du ministre de l'égalité des territoires et du logement :

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. H...E..., chef du bureau des affaires juridiques de l'urbanisme a reçu, par décision du 2 janvier 2013, régulièrement publiée au Journal officiel du 5 janvier 2013, délégation du directeur des affaires juridiques du ministère pour présenter les mémoires en défense au nom de l'Etat ; que, par suite, l'irrecevabilité opposée au mémoire du ministre par les appelants doit, en tout état de cause, être écartée ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant, d'une part, qu'il résulte des dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative que la décision doit contenir le visa des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application ; que, si le jugement vise le code de l'urbanisme mais omet de faire mention du code de l'environnement sur lequel le tribunal s'est pourtant fondé, tant ce dernier code que l'article dont il est fait application sont toutefois repris dans les motifs du jugement ; que, dès lors, l'irrégularité entachant les visas est sans influence sur la régularité du jugement pris dans son ensemble ;

3. Considérant que, d'autre part, si le contenu des articles L. 431-20 et R. 112-2 du code de l'urbanisme et celui de l'article L. 513-1 du code de l'environnement, dont il est fait application, ne sont pas cités dans les motifs du jugement, cette omission n'est pas contraire à l'article R. 741-2 du code de justice administrative ; qu'au demeurant, elle ne fait pas obstacle à la compréhension de la solution retenue par le tribunal administratif dont le jugement est suffisamment motivé ;

Sur les conclusions indemnitaires :

4. Considérant que, le 20 octobre 2004, M. A...a obtenu un certificat d'urbanisme en vue de la réalisation d'un lotissement en quatre parcelles sur un terrain dont il est propriétaire sur la commune de Mesnil-Mauger ; que, le 26 juillet 2005, M. A...a obtenu quatre certificats d'urbanisme en vue de la réalisation d'une donation-partage entre ses trois enfants et la vente de la quatrième parcelle ; que l'EARL Saint-Jouarre a déclaré en préfecture le 7 août 2005 un accroissement de son cheptel de quarante à soixante-cinq vaches laitières ; que, le 27 septembre 2005, le maire de Mesnil-Mauger a accordé, au nom de l'Etat, un permis de construire à l'EARL Saint-Jouarre pour l'édification d'une fumière, annulé par jugement du tribunal administratif de Rouen du 16 juillet 2009, en raison d'une méconnaissance des dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 et du caractère incomplet du dossier de permis de construire ; que la requête d'appel présentée par l'EARL Saint-Jouarre a été rejetée par ordonnance de la cour administrative d'appel de Douai, le 6 octobre 2009 ; que les certificats d'urbanisme délivrés à M. A... ont été prorogés tacitement le 26 juillet 2006, puis retirés le 11 avril 2007 en raison de la présence, à moins de 100 mètres du projet, de l'élevage de bovins exploité par l'EARL Saint-Jouarre ; que, le 28 février 2010, le maire de la commune de Mesnil-Mauger a délivré à l'EARL Saint-Jouarre un permis de construire une fumière dont la demande d'annulation a été rejetée par le tribunal administratif de Rouen, par jugement du 29 novembre 2012 ; qu'enfin, les consorts A...relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté leurs conclusions tendant à obtenir réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait des informations erronées contenues dans les certificats d'urbanisme positifs délivrés le 26 juillet 2005 et prorogés le 26 juillet 2006 et de l'illégalité des permis de construire délivrés à l'EARL Saint-Jouarre les 27 septembre 2005 et 28 février 2010 ;

En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat du fait de la délivrance des permis de construire du 27 septembre 2005 et du 28 février 2010 à l'EARL Saint-Jouarre :

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les préjudices invoqués par les requérants et qui sont liés aux frais de donation-partage, à la réalisation d'une entrée charretière, à la valeur des fonds en cause ou à d'éventuelles pertes de loyers, ainsi qu'au préjudice moral lié à l'échec d'une donation-partage équitable entre les enfants de M. D as, résultent non de la délivrance des permis de construire mentionnés ci-dessus, mais uniquement, compte tenu de l'augmentation du cheptel de bovins de l'EARL Saint-Jouarre, de l'application de la législation relative aux installations classées qui fait obstacle aux constructions projetées ; que, par suite, les permis de construire délivrés les 27 septembre 2005 et 28 février 2010, fussent-ils illégaux, sont sans lien avec ces préjudices ; qu'en outre, s'ils réclament également le remboursement des frais de procédure, ceux-ci, à supposer d'ailleurs qu'ils puissent tous se rattacher aux instances dirigées contre les permis de construire en litige, devaient être, en tout état de cause, réclamés à l'occasion de chacune des instances pour lesquelles ils ont été engagés ;

En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat du fait de la délivrance des certificats d'urbanisme des 26 juillet 2005, prorogés le 26 juillet 2006 :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime : " Lorsque des dispositions législatives ou réglementaires soumettent à des conditions de distance l'implantation ou l'extension de bâtiments agricoles vis-à-vis des habitations et immeubles habituellement occupés par des tiers, la même exigence d'éloignement doit être imposée à ces derniers à toute nouvelle construction et à tout changement de destination précités à usage non agricole nécessitant un permis de construire, à l'exception des extensions de constructions existantes (...) " ; qu'en application de l'article 2.1.1 de l'annexe I de l'arrêté du ministre de l'écologie et du développement durable du 7 février 2005 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire, notamment, les élevages de bovins soumis à déclaration au titre du livre V du code de l'environnement : " Les bâtiments d'élevage et leurs annexes sont implantés à au moins 100 mètres des habitations des tiers " ;

7. Considérant qu'à la date de délivrance des certificats d'urbanisme du 26 juillet 2005, les dispositions de l'article 2.1.1 de l'annexe I de l'arrêté du ministre de l'écologie et du développement durable du 7 février 2005 ne s'appliquaient pas dès lors que l'élevage de bovins de l'EARL Saint-Jouarre n'était pas encore soumis à déclaration ; que ce n'est que le 7 août 2005 que l'EARL Saint-Jouarre a déclaré un accroissement de son cheptel de quarante à soixante-cinq bovins, imposant l'implantation des bâtiments agricoles à une distance de recul de 100 mètres des habitations des tiers et rendant applicables à ces derniers les dispositions de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime ; que, par suite, les informations contenues dans les certificats d'urbanisme délivrés le 26 juillet 2005 n'étant pas erronées, aucune faute ne saurait être reprochée à l'Etat ;

8. Considérant, en revanche, que la prorogation des certificats d'urbanisme positifs, le 26 juillet 2006, est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat, dès lors qu'à cette date, la présence, à moins de 100 mètres du projet, de l'élevage de bovins exploité par l'EARL Saint-Jouarre ne permettait plus la construction d'habitations sur les parcelles en litige ;

9. Considérant, cependant, que les frais de notaire et de géomètre engagés pour la rédaction de l'acte de donation-partage ne sauraient être indemnisés dès lors qu'ils ont été exposés antérieurement à la prorogation des certificats d'urbanisme, du 15 décembre 2005 au 21 mars 2006 et sont donc sans lien avec les illégalités constatées ;

10. Considérant que le préjudice lié à une perte de valeur des terrains, qui demeure éventuelle, est, en tout état de cause, et ainsi qu'il a été dit au point 5, lié à l'exploitation existante implantée à moins de 100 mètres de ces terrains ; qu'il est donc sans lien avec les illégalités commises ;

11. Considérant que les pertes des loyers relatifs aux parcelles en litige constituent, en tout état de cause, un préjudice purement éventuel ;

12. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'aménagement d'une entrée sur la route départementale n° 120 et d'un chemin d'accès aurait été exposé en pure perte dès lors qu'il n'est pas contesté qu'il permet l'accès de la propriété appartenant à Mme C...née A...qui a obtenu un permis de construire ; que ces frais ne sont donc pas au nombre d'un préjudice indemnisable ;

13. Considérant que les frais de constat d'huissier exposés pour établir l'absence d'affichage régulier du permis de construire délivré le 27 septembre 2005, ainsi, qu'à les supposer établis, les frais de déplacement et de reproduction des plans, ne sont pas en lien direct avec l'illégalité de la prorogation des certificats d'urbanisme du 26 juillet 2006 ; qu'en tout état de cause, leur remboursement aurait dû être réclamé, le cas échéant, à l'occasion des instances contentieuses pour lesquels ils ont été engagés ;

14. Considérant que le préjudice moral lié à l'échec d'une donation-partage équitable entre les enfants de M. A...trouve sa cause non dans les illégalités commises dans l'application de la législation de l'urbanisme mais, ainsi qu'il a été dit au point 5, dans les règles relatives à la présence d'une installation classée, qui relèvent d'une autre législation ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leurs conclusions indemnitaires ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et au titre de la contribution à l'aide juridique doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...et autres est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à Mme F...C..., à Mme I...B..., à M. G... A..., à L'EARL Saint-Jouarre et au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité.

''

''

''

''

N°13DA00094 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3 (ter)
Numéro d'arrêt : 13DA00094
Date de la décision : 25/09/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-04-01-03-01 Responsabilité de la puissance publique. Réparation. Préjudice. Caractère direct du préjudice. Absence.


Composition du Tribunal
Président : Mme Erstein
Rapporteur ?: M. Olivier Nizet
Rapporteur public ?: Mme Hamon
Avocat(s) : ENARD-BAZIRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2014-09-25;13da00094 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award