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28/05/2014 | FRANCE | N°12DA01848

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 28 mai 2014, 12DA01848


Vu la requête et les mémoires complémentaires, enregistrés les 18 décembre 2012, 8 février 2013 et 11 mars 2013, présentés pour M. B...A..., demeurant..., par Me Francis Monamy ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0907035 du 4 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 8 juin 2009 par lesquels le préfet du Pas-de-Calais a délivré à la société Infinivent les permis de construire trois éoliennes sur le territoire de la commune de Sus-Saint-Léger et cinq éoliennes s

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Vu la requête et les mémoires complémentaires, enregistrés les 18 décembre 2012, 8 février 2013 et 11 mars 2013, présentés pour M. B...A..., demeurant..., par Me Francis Monamy ;

M. A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0907035 du 4 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 8 juin 2009 par lesquels le préfet du Pas-de-Calais a délivré à la société Infinivent les permis de construire trois éoliennes sur le territoire de la commune de Sus-Saint-Léger et cinq éoliennes sur celui de la commune de Grand-Rullecourt, ainsi qu'à l'annulation du refus de retirer ces arrêtés et à la mise à la charge de l'Etat du versement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés du 8 juin 2009 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le décret n° 85-453 du 23 avril 1985 pris pour l'application de la loi du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Perrine Hamon, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hubert Delesalle, rapporteur public,

- et les observations de Me Francis Monamy, avocat de M.A..., et de Me Sabine Le Boulch, avocat de la société Infinivent ;

1. Considérant que M.A..., propriétaire dans la commune de Sus-Saint-Léger d'une maison d'habitation et d'un terrain utilisé aux fins de piste d'atterrissage, relève appel du jugement du 4 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de huit arrêtés du 8 juin 2009 par lesquels le préfet du Pas-de-Calais, après l'annulation contentieuse du précédent refus qu'il avait opposé à cette société, a délivré à la société Infinivent l'autorisation de construire huit éoliennes dont cinq (nos E5, E6, E8, E9 et E10) sur le territoire de la commune de Grand-Rullecourt et trois (nos E3, E4 et E7) sur celui de la commune de Sus-Saint-Léger ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il ressort des termes du jugement attaqué que les premiers juges ont suffisamment motivé leur réponse aux moyens tirés, d'une part, de l'absence de production par la pétitionnaire des autorisations d'occupation du domaine public requises pour le projet et, d'autre part, de l'absence de nouvelle instruction par le préfet de la demande de permis de construire après le dépôt de rapports émanant des autorités militaires ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la demande de première instance :

Sur la légalité des permis attaqués :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 553-2 du code de l'environnement dans sa version applicable au litige : " I. - L'implantation d'une ou plusieurs installations produisant de l'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent dont la puissance installée totale sur un même site de production, au sens du troisième alinéa (2°) de l'article 10 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, excède 2,5 mégawatts, est subordonnée à la réalisation préalable : / a) De l'étude d'impact définie à la section 1 du chapitre II du titre II du livre Ier du présent code (...) ; / b) D'une enquête publique soumise aux prescriptions du chapitre III du titre II du livre Ier du présent code (...) " ; qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977, dans sa version alors applicable et désormais codifié à l'article R. 122-3 du code de l'environnement : " I. - Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. / II. - L'étude d'impact présente successivement : / 1° Une analyse de l'état initial du site et de son environnement, portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, affectés par les aménagements ou ouvrages ; / 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur la faune et la flore, les sites et paysages, le sol, l'eau, l'air, le climat, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la protection des biens et du patrimoine culturel et, le cas échéant, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l'hygiène, la santé, la sécurité et la salubrité publique ; / 3° Les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d'environnement, parmi les partis envisagés qui font l'objet d'une description, le projet présenté a été retenu ; / 4° Les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement et la santé, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes ; / 5° Une analyse des méthodes utilisées pour évaluer les effets du projet sur l'environnement mentionnant les difficultés éventuelles de nature technique ou scientifique rencontrées pour établir cette évaluation ; (...) " ;

4. Considérant que les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'étude d'impact comporte un volet écologique, étudiant le milieu naturel existant et l'impact du projet sur la faune et la flore, complété par un " diagnostic écologique des milieux naturels " de plus de cent trente pages réalisé par un cabinet spécialisé ; que l'étude écologique produite par le requérant, réalisée par un ingénieur du génie rural qui n'a pas procédé à une étude sur place mais se borne à critiquer la méthodologie employée par le pétitionnaire, ne suffit pas à remettre en cause la validité de cette partie de l'étude d'impact ; que le moyen tiré de l'insuffisance de cette étude doit, dès lors, être écarté, en tout état de cause, comme manquant en fait ;

6. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter le moyen tiré de l'insuffisante publicité de l'avis d'ouverture de l'enquête publique ;

7. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-15 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable, en vertu du 4 de l'article 26 du décret n° 2007-18 du 18 janvier 2007 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme, à la date à laquelle les demandes de permis de construire litigieux ont été déposées : " Le service chargé de l'instruction de la demande procède, au nom de l'autorité compétente pour statuer, à cette instruction et recueille auprès des personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, les accords, avis ou décisions prévus par les lois ou règlements en vigueur (...) " ; qu'aux termes des premier et quatrième alinéas de l'article L. 421-2-1 du code de l'urbanisme, dans sa version alors applicable à l'espèce en vertu des mêmes dispositions : " Dans les communes où un plan local d'urbanisme a été approuvé, le permis de construire est délivré par le maire au nom de la commune. / (...) / Sont toutefois délivrés ou établis, au nom de l'Etat, par le maire ou le représentant de l'Etat dans le département après avis du maire ou du président de l'établissement public compétent, les autorisations ou actes relatifs à l'utilisation et à l'occupation du sol concernant : / (...) / b) Les ouvrages de production, de transport, de distribution et de stockage d'énergie, (...) ; un décret en Conseil d'Etat détermine la nature et l'importance de ces ouvrages ;/ (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 490-3 du même code dans sa rédaction alors applicable : " Les décisions relatives aux autorisations d'occupation ou d'utilisation du sol et le certificat de conformité concernant l'édification d'ouvrages de production, de transport, de distribution et de stockage d'énergie ainsi que les travaux effectués sur ces ouvrages sont prises, sous réserve des dispositions de l'article R. 490-4 : / 1° Par le préfet, au nom de l'Etat, lorsque cette énergie n'est pas destinée, principalement, à une utilisation directe par le demandeur de l'autorisation ou de l'acte sollicité ; / (...) " ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, d'une part, un permis de construire n'est délivré suivant une procédure régulière que si les différents services ou autorités compétents ont été mis à même de donner leur avis sur le projet et que, d'autre part, le préfet doit recueillir l'avis du maire avant de se prononcer sur une demande d'autorisation de construire portant sur l'implantation d'éoliennes dont la production n'est pas destinée principalement à une utilisation directe par le demandeur de l'autorisation ;

8. Considérant qu'il est constant que le maire de la commune de Sus-Saint-Léger, ainsi que son frère, sont propriétaires chacun d'un terrain sur lequel serait implantée l'une des éoliennes du projet ; que, dans ces conditions, l'avis émis par le maire sur le projet de construction de ces éoliennes était entaché d'irrégularité ; que, toutefois, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ; qu'en l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que le vice a privé les intéressés d'une garantie ou que, compte tenu des solutions de rejet retenues à deux reprises par le préfet du Pas-de-Calais sur les demandes de permis de construire malgré l'avis favorable du maire, il a exercé une influence sur le sens de la décision ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 20 du décret n° 85-453 du 23 avril 1985 dans sa rédaction applicable au litige : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables ou non à l'opération " ;

10. Considérant que s'il est constant que les conclusions de la commission d'enquête, qui se limitent pour l'essentiel à des considérations d'ordre général sur l'énergie éolienne, ne sont pas suffisamment motivées pour justifier son avis favorable assorti de quelques recommandations ; que, toutefois, il ressort de l'examen du rapport établi par la commission d'enquête qu'après un classement thématique des nombreuses observations recueillies pendant l'enquête publique et qui portaient sur les caractéristiques essentielles du projet, la commission y a répondu de manière synthétique en faisant connaître sa position personnelle ; que ces réponses peuvent, dans les circonstances de l'espèce, être regardées comme les motifs qui l'ont finalement conduite à émettre, dans le cadre de ses conclusions, un avis favorable assorti de recommandations ; que, dans ces conditions, l'irrégularité formelle constatée n'a ni privé les intéressés de la garantie attachée à l'exigence de conclusions motivées, ni exercé d'influence sur les résultats de l'enquête publique ;

11. Considérant que le projet soumis à l'enquête publique comportait un volet paysager qui a été complété par une étude paysagère réalisée en 2004 sur l'insertion du projet ; que cette étude, postérieure à l'enquête publique, n'ayant fait qu'apporter des précisions sur l'impact visuel des éoliennes projetées, ne constitue pas une modification substantielle du projet et n'a, en l'espèce, ni porté atteinte à l'information du public, ni exercé, à elle seule, une influence sur les résultats de l'enquête publique ; que, par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que cette étude complémentaire aurait dû être soumise à une nouvelle enquête publique ;

12. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-28 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date des décisions attaquées : " Le chef du service de l'Etat dans le département chargé de l'instruction adresse un projet de décision au maire ou, dans les cas prévus à l'article R. 422-2, au préfet " ; que l'autorité administrative qui doit se prononcer à nouveau sur une demande à la suite de l'annulation contentieuse de sa première décision n'est tenue de procéder formellement à une nouvelle instruction que si l'instruction initiale est entachée d'un vice ou dans l'hypothèse d'un changement des circonstances de droit ou de fait ;

13. Considérant qu'à supposer que le nouvel avis émis le 20 mai 2009 par les autorités militaires concernant l'impact du projet sur le fonctionnement du radar militaire de Lucheux constitue, comme le soutient M.A..., une circonstance de fait nouvelle imposant que soit, à nouveau, consulté le directeur départemental de l'équipement, cette irrégularité n'a pas, en tout état de cause et dans les circonstances de l'espèce, privé les intéressés d'une garantie ; qu'il ne ressort pas non plus des pièces du dossier qu'elle aurait été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise par le préfet du Pas-de-Calais, alors qu'il est constant que celui-ci a rejeté à deux reprises les demandes de permis de construire, avant d'y faire droit à la suite des annulations prononcées le 16 novembre 2006 par la cour administrative d'appel de Douai ainsi que, le 2 avril 2009, par le tribunal administratif de Lille ;

14. Considérant que M. A...n'a invoqué, dans le délai d'appel, que des moyens de légalité externe ; que s'il a, ensuite, soulevé, dans un mémoire enregistré après l'expiration de ce délai, des moyens de légalité interne tirés, en premier lieu, de ce que le volet paysager du dossier de demande de permis de construire était insuffisant, en deuxième lieu, de ce que ce même dossier ne contenait pas les autorisations d'occupation du domaine public nécessaires au projet et, en dernier lieu, de ce que les permis attaqués méconnaissent l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, ces moyens, qui sont fondés sur une cause juridique distincte de celle sur laquelle reposent les moyens invoqués dans le délai d'appel, et qui ne sont pas d'ordre public, présentent le caractère d'une prétention nouvelle en appel tardivement présentée, et sont donc irrecevables ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A...le versement à la société Infinivent d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du même code ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : M. A...versera à la société Infinivent une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., à la société Infinivent et au ministre du logement et de l'égalité des territoires.

Copie sera adressée pour information au préfet du Pas-de-Calais.

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N°12DA01848


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12DA01848
Date de la décision : 28/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Procédure d'attribution.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: Mme Perrine Hamon
Rapporteur public ?: M. Delesalle
Avocat(s) : MONAMY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2014-05-28;12da01848 ?
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