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25/03/2014 | FRANCE | N°12DA00557

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 25 mars 2014, 12DA00557


Vu la requête, enregistrée le 13 avril 2012, présentée pour la SA " Ets C...Nino et Cie ", représentée par son président directeur général, dont le siège est 112 rue du Général Leclerc, BP 78 à Villers-Cotterêts (02602), par Me Antoine Tourbier ;

La SA " Ets C...Nino et Cie " demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1000523-1100977-1102844 du 7 février 2012 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions du 17 décembre 2009 et du 17 janvier 2011 par lesquelles le préfet de l'Oise, d'une part,

l'a mise en demeure de se conformer à la procédure de cessation d'activités de l...

Vu la requête, enregistrée le 13 avril 2012, présentée pour la SA " Ets C...Nino et Cie ", représentée par son président directeur général, dont le siège est 112 rue du Général Leclerc, BP 78 à Villers-Cotterêts (02602), par Me Antoine Tourbier ;

La SA " Ets C...Nino et Cie " demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1000523-1100977-1102844 du 7 février 2012 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions du 17 décembre 2009 et du 17 janvier 2011 par lesquelles le préfet de l'Oise, d'une part, l'a mise en demeure de se conformer à la procédure de cessation d'activités de la carrière souterraine de pierre calcaire du Tranloy dans un délai de trois mois, et, d'autre part, l'a obligée à consigner entre les mains du comptable public une somme de 41 860 euros, ainsi qu'à l'annulation du commandement de payer n° 37 070060 4675451 11/5 du 11 août 2011 par lequel la trésorerie générale de l'Oise l'a mise en demeure de régler sous huit jours la somme de 43 116 euros ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de l'Oise des 17 décembre 2009 et 17 janvier 2011, ainsi que le commandement de payer du 11 août 2011 ;

3°) de la décharger totalement du paiement de la somme de 43 116 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code minier ;

Vu la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 93-3 du 4 janvier 1993 relative aux carrières ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;

Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 pris pour l'application de la loi du 19 juillet 1976 susvisé ;

Vu le décret n° 80-331 du 7 mai 1980 portant règlement général des industries extractives ;

Vu le décret n° 92-1369 du 29 décembre 1962 modifiant le décret du 29 décembre 1962 susvisé et fixant les dispositions applicables au recouvrement des créances de l'Etat mentionnées à l'article 80 de ce décret ;

Vu le décret n° 94-485 du 9 juin 1994 modifiant la nomenclature des installations classées, en application de la loi du 4 janvier 1993 susvisé ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bertrand Baillard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Hubert Delesalle, rapporteur public,

- et les observations de Me Antoine Tourbier avocat de la SA " Ets C...Nino et Cie " ;

Sur la régularité du jugement :

1. Considérant que le tribunal administratif d'Amiens n'avait pas à répondre au moyen soulevé dans une note en délibéré enregistrée le 29 janvier 2012 dans l'instance n° 1000523 tiré de ce que le préfet aurait estimé à tort qu'elle avait la qualité d'exploitant de la carrière dite du Tranloy dès lors que le tribunal a décidé de ne pas rouvrir l'instruction à la suite de l'enregistrement de la note en délibéré ; que, par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité ;

Sur l'arrêté du 17 décembre 2009 du préfet de l'Oise :

2. Considérant que, par un arrêté du 17 décembre 2009 pris sur le fondement des dispositions de l'article L. 512-19 du code de l'environnement, le préfet de l'Oise a mis en demeure la SA " Ets C...Nino et Cie " de se conformer à ses obligations légales relatives à l'arrêt définitif et à la remise en état de la carrière du Tranloy dans un délai de trois mois ;

3. Considérant que l'arrêté attaqué, par lequel le préfet de l'Oise a usé de ses pouvoirs de police des installations classées, est suffisamment motivé en droit et en fait, alors même qu'il ne préciserait pas les atteintes aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ;

4. Considérant qu'il n'est pas établi que le directeur régional de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Picardie n'aurait pas émis l'avis visé par l'arrêté du 17 décembre 2009, lequel n'était, en tout état de cause, pas requis avant l'adoption de cette décision ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. / Les dispositions du présent titre sont également applicables aux exploitations de carrières au sens des articles L. 100-2 et L. 311-1 du code minier " ; qu'aux termes de l'article L. 512-6-1 du même code : " Lorsque l'installation soumise à autorisation est mise à l'arrêt définitif, son exploitant place son site dans un état tel qu'il ne puisse porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et qu'il permette un usage futur du site déterminé conjointement avec le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme et, s'il ne s'agit pas de l'exploitant, le propriétaire du terrain sur lequel est sise l'installation. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 516-1 de ce code : " Les installations dont la mise en activité est subordonnée à l'existence de garanties financières et dont le changement d'exploitant est soumis à autorisation préfectorale sont : / (...) / 2° Les carrières ; / (...) / La demande d'autorisation de changement d'exploitant, à laquelle sont annexés les documents établissant les capacités techniques et financières du nouvel exploitant et la constitution de garanties financières est adressée au préfet. / Cette demande est instruite dans les formes prévues à l'article R. 512-31. La décision du préfet doit intervenir dans un délai de trois mois à compter de la réception de la demande. / (...) / " ;

6. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que l'obligation de remise en état du site imposée par l'article L. 512-6-1 du code de l'environnement pèse sur l'ancien exploitant ou, si celui-ci a disparu, sur son ayant droit ; que lorsque l'exploitant ou son ayant droit a cédé le site à un tiers, cette cession ne l'exonère de ses obligations que si le cessionnaire s'est substitué à lui en qualité d'exploitant ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que si, ainsi que l'a confirmé le tribunal de grande instance de Soissons dans son jugement du 30 septembre 2010, la SA " Ets C...Nino et Cie " a cédé aux consorts B...le fonds de la carrière du Tranloy avec effet au 1er juillet 2009 en vertu d'un protocole transactionnel signé le 2 novembre de la même année, la société requérante, qui était seule bénéficiaire du droit d'exploiter cette carrière depuis 1973, n'a pas disparu ; que la cession du site n'a pas eu pour effet de donner aux consorts B...ou à la SA GroupeB..., créée postérieurement à la cession, la qualité d'ayant droit de la SA " Ets C...Nino et Cie " ; qu'au surplus, aucune demande d'autorisation de changement d'exploitant n'a été adressée à l'autorité administrative par la SA GroupeB... ; que cette société n'avait d'ailleurs pas, à la date de l'arrêté attaqué, repris l'exploitation du site ou même, au demeurant, manifesté son intention de le faire ; que la circonstance que cette situation résulterait d'un comportement intentionnel des consorts B...ou de la SA Groupe B...est sans influence sur la qualité d'exploitant ; que, par suite, la SA " Ets C... Nino et Cie " n'est pas fondée à soutenir que la SA Groupe B...devrait être regardée comme le dernier exploitant de la carrière du Tranloy ; qu'en revanche, étant la société initialement titulaire de l'autorisation d'exploiter dont elle a bénéficié au titre du régime de l'antériorité, le préfet de l'Oise ne s'est pas mépris en mettant en cause la SA " Ets C...Nino et Cie " en sa qualité de dernier exploitant du site en cause ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-19 du code de l'environnement : " Lorsqu'une installation n'a pas été exploitée durant trois années consécutives, le préfet peut mettre en demeure l'exploitant de procéder à la mise à l'arrêt définitif " ;

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport établi le 19 novembre 2009 par l'inspecteur des installations classées, ainsi que du procès-verbal d'infraction du même jour, que l'accès à galerie par laquelle était réalisée l'extraction de pierres calcaires est condamné ; que, d'ailleurs, M. A...C...a indiqué à l'occasion de ce contrôle que l'exploitation du site a cessé depuis une vingtaine d'années, ce qui a été confirmé, d'une part, par le maire de la commune de Bonneuil-en-Valois dans une lettre du 21 janvier 2011 faisant état d'une fin d'exploitation remontant à " au moins 1995 ", et, d'autre part, par un ancien salarié de la société requérante attestant que l'extraction avait cessé à la fin de l'année 1992 ; qu'il n'est pas contesté par la SA " Ets C... Nino et Cie " qu'aucune production n'a été déclarée pour la carrière du Tranloy à l'occasion des enquêtes annuelles réglementaires au titre des années 2006 à 2008 ; que le stockage de 2 000 m3 de blocs de pierre sur le site qui pourraient être vendus ne saurait constituer, en tout état de cause, une exploitation au sens des dispositions précitées de l'article L. 512-19 du code de l'environnement, pas plus que la réalisation, à la supposer établie, de travaux d'aménagement en 1999, dont la teneur exacte n'est à aucun moment précisée ; que l'envoi par le préfet de l'Oise à la SA " Ets C...Nino et Cie " d'une lettre, en novembre 2007, lui demandant de produire l'attestation de renouvellement des garanties financières réglementaires ne saurait davantage être regardé comme une reconnaissance par l'administration de la poursuite de l'activité du site ; que, dans ces conditions, en estimant que l'exploitation de la carrière du Tranloy avait cessé depuis au moins trois années consécutives, le préfet de l'Oise n'a pas commis d'illégalité ;

10. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction, contrairement à ce qui est soutenu et en tout état de cause, que l'inspecteur des installations classées ou le préfet de l'Oise auraient eu un comportement partial à l'égard de la SA " Ets C...Nino et Cie " afin notamment de favoriser la SA GroupeB... ; que, par suite, le moyen tiré du détournement de pouvoir doit être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA " C...Nino et Cie " n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 décembre 2009 du préfet de l'Oise ;

Sur l'arrêté du 17 janvier 2011 du préfet de l'Oise :

12. Considérant que, par un arrêté du 17 janvier 2011, le préfet de l'Oise a ordonné à la SA " C...Nino et Cie " de consigner entre les mains du comptable public la somme de 43 116 euros correspondant au montant de l'engagement des investigations, documents et travaux nécessaires à la mise en sécurité du site du Tranloy ;

13. Considérant qu'il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté du 17 janvier 2011 ;

14. Considérant qu'aux termes de l'article L. 514-5 du code de l'environnement dans sa rédaction applicable à la date de la décision : " Les personnes chargées de l'inspection des installations classées (...) peuvent visiter à tout moment les installations soumises à leur surveillance. / Sauf contrôle inopiné, les inspecteurs des installations classées doivent informer l'exploitant quarante-huit heures avant la visite. Lors de la visite, l'exploitant peut se faire assister d'une tierce personne. / (...) / L'exploitant est informé par l'inspecteur des installations classées des suites du contrôle. L'inspecteur des installations classées transmet son rapport de contrôle au préfet et en fait copie simultanément à l'exploitant. Celui-ci peut faire part au préfet de ses observations. / (...) / " ;

15. Considérant qu'il ressort des termes mêmes du rapport établi le 19 novembre 2009 que le contrôle réalisé le 18 novembre 2008 était inopiné ; que, dès lors, la SA " Ets C...Nino et Cie " ne peut utilement soutenir qu'elle aurait dû être préalablement informée de sa tenue en application des dispositions de l'article L. 514-5 du code de l'environnement telles qu'en vigueur à la date de la décision en litige ;

16. Considérant que si le même article donne la possibilité à l'exploitant d'être assisté lors d'un contrôle par une tierce personne, aucune disposition du code de l'environnement n'impose que l'inspecteur des installations classées l'informe préalablement de cette faculté ou la lui rappelle lors du contrôle ;

17. Considérant qu'en se bornant à faire état du caractère " succinct " du rapport établi le 19 novembre 2009, la SA " Ets C...Nino et Cie " ne met pas la cour à même d'apprécier le bien-fondé de son moyen ;

18. Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 514-5 du code de l'environnement ne prescrivent aucun délai entre la réalisation de la visite de l'installation classée et la rédaction du rapport de contrôle ; que, dès lors, la SA " Ets C...Nino et Cie " ne saurait utilement se prévaloir de la seule circonstance que le rapport, établi à la suite du contrôle inopiné du site du Tranloy réalisé le 28 novembre 2008, l'aurait été tardivement environ un an plus tard ;

19. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux évoqués aux points 7 et 10, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de l'absence de la qualité d'exploitant du site du Tranloy de la SA " Ets C... Nino et Cie " et du détournement de pouvoir ;

20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA " C...Nino et Cie " n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 janvier 2011 du préfet de l'Oise ;

Sur le commandement de payer du 11 août 2011 :

21. Considérant que par les moyens qu'elle invoque, la SA " Ets C...Nino et Cie " ne met pas la cour à même d'apprécier les erreurs qu'a pu commettre le tribunal administratif d'Amiens en se prononçant sur les conclusions dirigées contre le commandement de payer ; que, par suite, ses conclusions tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif d'Amiens sur ce point doivent être rejetées ;

22. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA " Ets C...Nino et Cie " n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SA " Ets C...Nino et Cie " est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA " Ets C...Nino et Cie ", à la société GroupeB..., au directeur département des finances publiques de l'Oise et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Copie sera transmise pour information au préfet de l'Oise.

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N°12DA00557 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1re chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12DA00557
Date de la décision : 25/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement - Régime juridique - Actes affectant le régime juridique des installations - Mise à l'arrêt.

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement - Régime juridique - Pouvoirs du préfet.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Bertrand Baillard
Rapporteur public ?: M. Delesalle
Avocat(s) : TOURBIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2014-03-25;12da00557 ?
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