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29/12/2010 | FRANCE | N°10DA00568

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 29 décembre 2010, 10DA00568


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 11 mai 2010 sous le n°10DA00568 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, et régularisée par dépôt de l'original le 14 mai 2010, présentée pour l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX, représenté par son directeur, dont le siège social est 36 avenue du Général de Gaulle tour Gallieni II à Bagnolet Cedex (93175), par Me Olivier Saumon ; l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0903723 du 28 avril 2010 par laquelle le juge des réf

érés du Tribunal administratif de Lille, à la demande de Mme Marie José B ...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 11 mai 2010 sous le n°10DA00568 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, et régularisée par dépôt de l'original le 14 mai 2010, présentée pour l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX, représenté par son directeur, dont le siège social est 36 avenue du Général de Gaulle tour Gallieni II à Bagnolet Cedex (93175), par Me Olivier Saumon ; l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0903723 du 28 avril 2010 par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Lille, à la demande de Mme Marie José B veuve A, agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de son époux, M. Francis A, décédé le 19 décembre 1999, a prescrit une expertise aux fins de déterminer s'il existe un lien de causalité partiel ou total entre les vaccinations contre l'hépatite B que son époux a reçues et les pathologies qu'il a développées ultérieurement ;

2°) de juger prescrite toute action visant à la prise en charge par l'ONIAM ou l'Etat des séquelles de la vaccination de M. A contre l'hépatite B ;

3°) d'ordonner la mise hors de cause de l'Etat ;

4°) de rejeter les demandes de Mme A et de la condamner aux entiers dépens ;

L'ONIAM soutient que Mme A n'a pas justifié sa qualité d'ayant-droit du défunt ; que c'est à tort que le juge des référés a retenu la prescription décennale ; que la jurisprudence confirme que l'ONIAM ne possède pas la qualité d'auteur responsable des dommages à indemniser mais intervient au titre de la solidarité nationale ; que seuls le médecin responsable de l'injection voire l'employeur peuvent se voir opposer le délai de prescription décennale ; qu'eu égard aux dispositions de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique l'ONIAM est la seule autorité compétente pour statuer que le dossier de M. Francis A ; que la demande dirigée contre l'Etat est irrecevable et l'expertise inutile ;

Vu, enregistré le 28 Septembre 2010 , le mémoire en défense présenté pour Mme A ; celle-ci conclut au rejet de la requête ;

elle fait valoir que sa qualité d'ayant-droit de M A est incontestable au vu des pièces qu'elle produit ; que le délai de prescription est le délai décennal dans la mesure notamment où la responsabilité est celle de l'Etat ; que celui-ci n'a pas demandé sa mise hors de cause ;

Vu le mémoire enregistré par télécopie le 8 Octobre 2010 et régularisé par dépôt de l'original le 14 octobre 2010, présenté par le ministre de la santé et des sports ; celui-ci conclut à l'annulation de l'ordonnance attaquée ; il soutient que l'expertise est inutile, d'une part, la demande étant irrecevable en tant que dirigée contre l'Etat et, d'autre part, seule la prescription quadriennale étant opposable et acquise ;

Vu, enregistré par télécopie le 18 Octobre 2010 et régularisé par dépôt de l'original le 21 octobre 2010, le mémoire présenté pour l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX ; celui-ci conclut aux même fins que sa requête, par les mêmes moyens à l'exception de celui tiré du défaut de qualité pour agir de Mme A qu'il abandonne ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 2005-1768 du 30 décembre 2005 relatif aux nouvelles missions confiées à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales par la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique et modifiant le code de la santé publique (dispositions réglementaires) ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision en date du 21 juin 2010 par laquelle le président de la Cour a désigné M. Guillaume Mulsant, président, en qualité de juge des référés en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 555-1 du code de justice administrative : Sans préjudice des dispositions du titre II du livre V du présent code, le président de la cour administrative d'appel ou le magistrat qu'il désigne à cet effet est compétent pour statuer sur les appels formés devant les cours administratives d'appel contre les décisions rendues par le juge des référés ; qu'aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction. Il peut notamment charger un expert de procéder, lors de l'exécution de travaux publics, à toutes constatations relatives à l'état des immeubles susceptibles d'être affectés par des dommages ainsi qu'aux causes et à l'étendue des dommages qui surviendraient effectivement pendant la durée de sa mission. Les demandes présentées en application du présent chapitre sont dispensées du ministère d'avocat si elles se rattachent à des litiges dispensés de ce ministère. ;

Considérant qu'aux termes de l'article L 3111-9 du code de la santé publique : Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation intégrale des préjudices directement imputables à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre, est assurée par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales institué à l'article L.1142-22, au titre de la solidarité nationale. (...) Jusqu'à concurrence de l'indemnité qu'il a payée, l'office est, s'il y a lieu, subrogé dans les droits et actions de la victime contre les responsables du dommage.

Considérant que l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX fait appel de l'ordonnance n° 0903723 du 28 avril 2010 par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Lille, à la demande de Mme Marie José B veuve A, agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de son époux, M. Francis A, décédé le 19 décembre 1999, a prescrit une expertise aux fins de déterminer s'il existe un lien de causalité partiel ou total entre les vaccinations contre l'hépatite B que son époux a reçues et les pathologies qu'il a développées ultérieurement ;

Considérant que, dans son mémoire enregistré le 18 Octobre 2010, l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX a expressément renoncé à contester la qualité pour agir de Mme A, admise par le juge de première instance et dont l'absence ne ressort pas des pièces du dossier ;

Considérant que, dès lors que l'Etat était défendeur devant le juge de première instance et que celui-ci a ordonné que l'expertise ait lieu en sa présence, son mémoire enregistré le 8 Octobre 2010, présenté par le ministre de la santé et des sports, tendant à l'annulation de l'ordonnance attaquée constitue un mémoire en appel, tardif ;

Sur la demande de mise hors de cause de l'Etat :

Considérant qu'aux termes de l'article 7 du décret visé ci-dessus du 30 décembre 2005 : Les demandes présentées au titre de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique antérieurement à l'entrée en vigueur du présent décret et qui n'ont pas fait l'objet à cette date d'une décision de l'Etat sont instruites par l'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, mentionné à l'article L. 1142-22, et examinées par la commission mentionnée à l'article R. 3111-25. L'avis rendu par la commission est transmis sans délai au ministre chargé de la santé qui présente, s'il y a lieu, l'offre d'indemnisation à la victime ou à ses ayants droit par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. La victime ou ses ayants droit font connaître au ministre par lettre recommandée avec demande d'avis de réception s'ils acceptent l'offre d'indemnisation qui leur est faite.

Considérant que les dispositions de l'article R 532-3 du code de justice administrative qui ne font pas obstacle à ce que l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX conteste l'ordonnance attaquée en tant que l'Etat n'a pas été mis hors de cause pour le motif qu'une demande dirigée contre celui-ci serait irrecevable ;

Considérant que le juge des référés, saisi sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, ne peut faire droit à une demande d'expertise si cette dernière est formulée à l'appui de prétentions indemnitaires dont il est établi qu'elles sont irrecevables ou prescrites ; que, dans l'hypothèse où est opposée une forclusion ou une prescription, il lui incombe de prendre parti sur ces points ; que, par suite, le juge des référés du Tribunal administratif de Lille a commis une erreur de droit en rejetant la demande de mise hors de cause de l'Etat pour le motif que s'il y faisait droit il préjudicierait au principal alors que tant l'Office que l'Etat soutenaient que l'expertise était inutile à l'égard de l'Etat du fait de l'irrecevabilité de toute demande indemnitaire dirigée contre lui ; que son ordonnance du 28 Avril 2010 doit ainsi être annulée dans cette mesure ;

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article L 3111-9 du code de la santé publique et de l'article 7 du décret du 30 décembre 2005 qu'à compter du 1er Janvier 2006, les demandes d'indemnisation des conséquences d'une vaccination obligatoire présentées après cette date seront examinées et, le cas échéant, satisfaites par l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX, quelle que soit la date de la vaccination ; que Mme A ne se prévaut d'aucune demande présentée avant le 1er Janvier 2006 et ne fait état d'aucune faute possible de l'Etat, se limitant invoquer un droit à indemnisation fondé sur la solidarité nationale et ne soutient pas que la présence d'un représentant de l'Etat aux opérations d'expertise serait utile en soi ; que, par suite, il appartiendra, éventuellement, au seul OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX de l'indemniser des préjudices résultant du décès de son époux et celui-ci soutient à bon droit que la présence de l'Etat aux opérations d'expertise serait inutile ;

Sur l'exception de prescription quadriennale :

Considérant qu'aux termes de l'article L 1142-28 du code de la santé publique : Les actions tendant à mettre en cause la responsabilité des professionnels de santé ou des établissements de santé publics ou privés à l'occasion d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins se prescrivent par dix ans à compter de la consolidation du dommage. ;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes des dispositions de l'article L. 1142-28 du code de la santé publique que le législateur a entendu instituer une prescription décennale se substituant à la prescription quadriennale instaurée par la loi du 31 décembre 1968 pour ce qui est des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics en matière de responsabilité médicale ; qu'il s'ensuit que ces créances sont prescrites à l'issue d'un délai de dix ans à compter de la date de consolidation du dommage ;

Considérant que l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX fait valoir, d'une part, qu'il indemnise les victimes des conséquences d'une vaccination obligatoire au titre de la solidarité nationale et non sur le fondement d'une faute commise et, d'autre part, qu'il ne figure pas au nombre des personnes auxquelles le délai de prescription décennal est opposable en application des dispositions de l'article ; qu'il en déduit que seule la prescription de droit commun de 4 ans instituée par la loi visée ci-dessus du 31 Décembre 1968 lui est opposable ;

Considérant que les dispositions des articles L 1142-1 et suivants du code de la santé publique instituent un mécanisme selon lequel l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX établissement public d'Etat, peut être amené à indemniser les victimes d'accidents thérapeutiques, soit au titre de la solidarité nationale, soit en se substituant à l'assureur de la personne responsable ; que les victimes d'un accident thérapeutique disposent d'un délai de 10 ans pour déterminer si elles entendent demander à la personne éventuellement responsable de les indemniser, la possibilité de la mise en cause de l'office, y compris au titre de la solidarité nationale, pouvant n'apparaître qu'à l'occasion de l'action ainsi entreprise ; qu'ainsi, cette mise en cause pouvant n'intervenir, de par la loi, que postérieurement ou concomitamment à une action engagée contre un professionnel de santé ou un établissement de santé, l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX ne peut soutenir à bon droit que seul le délai de prescription de 4 ans institué par la loi du 31 Décembre 1968 serait applicable aux actions dirigées contre lui et il peut seulement opposer le délai de 10 ans fixé par l'article L 1142-28 du code de la santé publique ;

Considérant que, par suite, l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX est seulement fondé à demander l'annulation de l'ordonnance n°0903723 du 28 avril 2010 en tant que le juge des référés du Tribunal administratif de Lille n'a pas mis l'Etat hors de cause ;

ORDONNE :

Article 1er: L'article 3 de l'ordonnance n° 0903723 du juge des référés du Tribunal administratif de Lille en date du 28 avril 2010 est annulé en tant qu'il a prévu que les opérations d'expertise qu'il décide auront lieu au contradictoire de l'Etat.

Article 2 : La demande de Mme Marie-José A devant le Tribunal administratif de Lille est rejetée en tant qu'elle est dirigée contre l'Etat.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX, à Mme Marie-José A, à l'association de protection et de réinsertion du Nord, à la caisse primaire d'assurance maladie d'Armentières ainsi qu'au ministre de la santé et des sports.

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N°10DA00568 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 10DA00568
Date de la décision : 29/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: M. Larue
Avocat(s) : ASSOCIATION D'AVOCATS VATIER et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2010-12-29;10da00568 ?
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