Vu la requête, enregistrée le 27 mai 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SARL LEBLANC, dont le siège social est situé rue du Catillon à Toufflers (59390), par Me Delerue ; la SARL LEBLANC demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0800425, en date du 19 février 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2002, 2003 et 2004 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;
3°) de condamner l'Etat au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient qu'elle était fondée à bénéficier du régime des sociétés mère et filiale prévu à l'article 145 du code général des impôts dès lors que la distribution des dividendes est intervenue avant la cession des titres de la société Putz, soit au cours d'un exercice où elle était effectivement propriétaire desdits titres ; que l'administration, qui supporte la charge de la preuve du caractère anormal de l'acte de gestion, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, n'a pas démontré que la clause de paiement différé contenue dans l'acte de vente d'un terrain à M. Pierre A présentait un tel caractère ; que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la société a effectivement contesté la valorisation des actions de la SARL Comptage Velec Systèmes retenue par l'administration, qui ne tient pas compte de la décote justifiée par le départ à la retraite de deux des quatre salariés de l'entreprise et la perte de savoir-faire subséquente, par la minorité de blocage dont disposait les associés restants et par les perspectives limitées de développement dans le cadre d'un marché fermé ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique qui conclut au rejet de la requête ; il soutient, qu'en application des dispositions de l'article 145 du code général des impôts, la qualité de société mère doit s'apprécier à la date de mise en distribution des produits de la filiale, laquelle est distincte de la mise en paiement ; qu'en l'espèce, l'assemblée générale de la SARL LEBLANC ayant approuvé le 10 janvier 2002 la cession de la totalité des actions de la société Putz, la société requérante n'était pas fondée à se placer sous le régime spécial prévu à l'article 216 du code général des impôts pour déduire des résultats de l'exercice clos le 30 septembre 2002, les dividendes mis en paiement par la société Putz les 13 mars, 9 juillet et 30 septembre 2002 ; que l'acte de cession, en date du 26 octobre 2001, par la société requérante d'un terrain à son gérant et associé, M. Pierre A, prévoyait que la somme due ne serait pas productive d'intérêts et payable au plus tard le 31 décembre 2003 ; que le terrain a été maintenu indûment à l'actif de la société jusqu'à la date du paiement effectif, soit le 9 janvier 2003, sans que la société ne comptabilise la créance détenue sur l'acquéreur ; qu'elle a donc implicitement renoncé aux intérêts qu'elle aurait dû percevoir sur l'avance ainsi consentie qui, eu égard à la longueur du délai de paiement accordé, sans contrepartie, présentait un caractère anormal ; que l'administration était dès lors fondée à réintégrer dans les résultats de la société le montant des intérêts qu'elle aurait dû percevoir ; que la SARL LEBLANC, par l'intermédiaire de son gérant, M. Pierre A, a cédé le 12 novembre 2003, à M. Amaury A, fils du susnommé et gérant de la SARL Comptage Velec Systèmes, l'intégralité des titres qu'elle détenait dans cette dernière société, au prix de 30 000 euros ; que le service a réévalué la valeur de ces titres à 43 705 euros, sans que la société ne critique les modalités de valorisation retenues par l'administration ; que les seuls arguments mis en avant pour justifier la décote pratiquée manquent de pertinence, le départ à la retraite de deux salariés pouvant être anticipé par la formation de nouveaux employés, M. Amaury A conservant une participation majoritaire et la prétendue fermeture du marché n'ayant pas empêché la transaction ; que l'administration était dès lors fondée à réintégrer dans les résultats de la SARL LEBLANC la différence entre le prix de cession des titres et leur valeur vénale, cette différence révélant une libéralité constitutive d'un acte anormal de gestion ;
Vu le mémoire enregistré le 10 décembre 2010 par télécopie et confirmé par la production de l'original le 13 décembre 2010, présenté pour la SARL LEBLANC qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Vladan Marjanovic, premier conseiller, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Fasseu, substituant Me Delerue, pour la SARL LEBLANC ;
Considérant que la SARL LEBLANC relève appel du jugement, en date du 19 février 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie, suite à une vérification de comptabilité, au titre des exercices clos le 30 septembre des années 2002, 2003 et 2004 ;
Sur les conclusions à fin de décharge :
En ce qui concerne le bénéfice du régime fiscal des sociétés mères :
Considérant qu'aux termes de l'article 145 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'exercice en litige : 1. Le régime fiscal des sociétés mères, tel qu'il est défini aux articles 146 et 216, est applicable aux sociétés et autres organismes soumis à l'impôt sur les sociétés au taux normal qui détiennent des participations satisfaisant aux conditions ci-après : (...) b. les titres de participation doivent représenter au moins 5 p. 100 du capital de la société émettrice ; ce pourcentage s'apprécie à la date de mise en paiement des produits de la participation ; qu'aux termes du I de l'article 216 du même code : Les produits nets des participations, ouvrant droit à l'application du régime des sociétés mères et visées à l'article 145, touchés au cours d'un exercice par une société mère, peuvent être retranchés du bénéfice net total de celle-ci, défalcation faite d'une quote-part de frais et charges ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une société ne peut déduire de ses résultats imposables les produits nets des participations qui lui ont été versés au cours de l'exercice que, notamment, dans l'hypothèse où, à la date de mise en paiement desdits produits, les titres de participation qu'elle détient représentent au moins 5 % du capital de la société émettrice ;
Considérant qu'il est constant que la SARL LEBLANC a cédé au cours du mois de janvier 2002 la totalité des 748 titres de participation qu'elle détenait dans le capital de la société Etablissements Pierre Putz et Cie ; qu'ainsi, aux dates des 13 mars, 9 juillet et 30 septembre 2002 auxquelles cette dernière société a mis en paiement les produits que la SARL LEBLANC a déduits, défalcation faite d'une quote-part de frais et charges, de ses résultats de l'exercice 2002, celle-ci ne détenait pas au moins 5 % du capital de la société émettrice ; que l'administration était dès lors fondée à réintégrer dans les résultats imposables dudit exercice les produits correspondants, indûment déduits par la SARL LEBLANC ; qu'en application du b du 1 de l'article 145 précité du code général des impôts, la société requérante ne peut sérieusement soutenir qu'elle peut justifier la déduction litigieuse des produits versés par la société Etablissements Pierre Putz et Cie par la seule détention, au cours de l'exercice, de titres de participation au capital de cette société ; que, de même, la circonstance, au demeurant non démontrée, que la décision de procéder aux distributions litigieuses aurait été prise avant que la SARL LEBLANC ne cède ses titres de participation est sans influence sur le bien-fondé du redressement contesté ;
En ce qui concerne la réintégration des intérêts liés au différé de paiement accordé au gérant de la société :
Considérant que l'abandon de créance consenti par une entreprise au profit d'un tiers ne relève pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, sauf s'il apparaît qu'en consentant un tel avantage l'entreprise a agi dans son propre intérêt ; que, s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer que l'avantage accordé à un tiers sous la forme de la renonciation à la perception d'intérêts constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors qu'elle établit l'existence d'avances sans intérêts consenties par l'entreprise à des tiers et que cette dernière n'est pas en mesure de justifier en retour de contreparties, notamment commerciales ou financières ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par acte notarié en date du 26 octobre 2001, la SARL LEBLANC a cédé à son gérant, M. Pierre A, une maison d'habitation sise à Blandain, en Belgique ; que l'acte de vente mentionne que cette cession est consentie et acceptée moyennant le prix de 8 400 000 francs belges, cette somme n'étant pas productive d'intérêts et payable au plus tard le 31 décembre 2003 ; que l'administration expose, sans être contredite, que cette opération, jusqu'au paiement du prix par M. A le 9 janvier 2003, n'a pas été retranscrite dans les écritures de la SARL LEBLANC, qui a maintenu l'immeuble à son actif et n'a pas comptabilisé la créance qu'elle détenait sur son gérant ; que si la société requérante, qui ne démontre pas que le prix de vente tiendrait compte du différé de paiement accordé à l'acquéreur, soutient que la clause litigieuse prévoyait l'application d'intérêts en cas de non-paiement du prix au terme fixé, il ressort de l'acte notarié évoqué ci-dessus que les intérêts prévus en cas d'impayé ne se seraient appliqués qu'à compter du jour de l'échéance, soit le 31 décembre 2003 ; qu'ainsi, l'administration était fondée à regarder la SARL LEBLANC comme ayant accordé à son gérant un différé de paiement de plus de deux ans, sans intérêts financiers ;
Considérant que, devant la Cour comme devant le tribunal, la SARL LEBLANC ne fournit aucune explication à cette renonciation à percevoir des intérêts et n'établit, ni même n'allègue, en avoir retiré une quelconque contrepartie ; qu'elle n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges, qui n'ont pas méconnu les règles de dévolution de la charge de la preuve rappelées ci-dessus, ont confirmé la réintégration dans ses résultats imposables du montant des intérêts auquel elle a anormalement renoncé ;
En ce qui concerne le redressement lié à la cession des titres de la SARL Comptage Velec Systèmes :
Considérant qu'il est constant que la SARL LEBLANC a cédé, le 12 novembre 2003, l'intégralité des titres qu'elle détenait dans le capital de la SARL Comptage Velec Systèmes à M. Amaury A, gérant de cette dernière société et fils du gérant de la société requérante, pour le prix de 30 000 euros ; que l'administration, estimant ce prix sous-évalué en ce qu'il ne tenait pas compte, notamment, de la valeur des éléments incorporels du fonds de commerce de l'entreprise, a fixé à 43 705 euros la valeur vénale des titres cédés, et réintégré en conséquence dans les résultats de l'exercice clos le 30 septembre 2004, la somme de 13 705 euros correspondant à la différence entre cette valeur vénale et le prix de cession réel ;
Considérant que la SARL LEBLANC qui, devant la Cour comme devant les premiers juges, indique que les évaluations de l'administration et du contribuable ne sont pas très différentes , mais soutient que la valeur comptable des titres doit être corrigée à la baisse pour tenir compte des aléas sociaux pesant sur la SARL Comptage Velec Systèmes du fait de la perte de savoir-faire liée au départ à la retraite prochain de deux de ses ingénieurs, de la minorité de blocage de 40 % que détiendraient les successeurs des deux futurs retraités et de ses faibles perspectives d'avenir au sein d'un marché fermé, ne peut sérieusement soutenir que le tribunal, qui a tenu compte de cette argumentation, aurait entaché son jugement d'erreur en considérant qu'elle ne contestait pas l'estimation de la valeur vénale des titres cédés faite par l'administration ; qu'en l'absence de contestation du bien-fondé des méthodes de calcul retenues par le service pour déterminer la valeur vénale des titres cédés de la SARL Comptage Velec Systèmes et de toute justification à l'appui des allégations rappelées ci-dessus qui justifieraient, selon la société requérante, l'application d'une décote sur la valeur des titres litigieux, celle-ci ne peut valablement contester le redressement en litige ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL LEBLANC n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions en litige ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la SARL LEBLANC doivent, dès lors, être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL LEBLANC est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL LEBLANC et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.
Copie sera transmise au directeur chargé de la direction de contrôle fiscal Nord.
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N°09DA00794