Vu la requête, enregistrée le 21 juin 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Zaara B veuve A, demeurant ..., par la SCP Delbouve, Boudard ; elle demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1000879 du 11 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 19 janvier 2010, du préfet du Nord refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination d'une éventuelle exécution d'office de cette mesure d'éloignement ;
Elle soutient :
- que le préfet et le Tribunal ont fait abstraction des stipulations de l'article 10-1. b) de la convention franco-tunisienne du 16 octobre 2003, permettant aux ascendants tunisiens d'un ressortissant français et de son conjoint de se voir attribuer un titre de séjour de dix ans ; que son fils, de nationalité tunisienne, et sa belle-fille, française, assument sa charge ;
- qu'elle a deux enfants de nationalité française ; qu'elle n'a plus d'enfant en Tunisie ; que son époux était ancien miliaire de carrière de l'armée française ; qu'à ce titre, elle peut prétendre à une retraite complémentaire ; qu'elle souffre d'un problème d'hypertension artérielle sévère ayant nécessité une intervention en 2008 ainsi qu'un traitement lourd ; que, malgré l'avis du 17 décembre 2009 rendu par le médecin inspecteur de santé publique, son état de santé reste toujours préoccupant ; que les moyens médicaux existant en Tunisie ne permettent pas de dispenser le traitement qu'impose sa pathologie ; que le préfet et le Tribunal ont commis une erreur manifeste d'appréciation ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu la décision du 9 juillet 2010 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à Mme B ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 septembre 2010, présenté par le préfet du Nord ; il conclut au rejet de la requête et fait valoir :
- que la requérante ne peut prétendre à l'obtention d'un titre de séjour en application de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'avis du médecin inspecteur de santé publique dans son avis du 17 décembre 2009 indique que, si l'état de santé de Mme B nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle pouvait désormais bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que Mme B n'apporte aucun document médical récent qui mentionnerait la nécessité de son maintien en France et remettrait en cause l'avis du médecin inspecteur ;
- que Mme B ne peut prétendre à l'octroi d'une carte de résident prévue à l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, modifié, celle-ci n'ayant jamais été titulaire d'un titre de séjour ;
- qu'elle ne peut bénéficier des dispositions de l'article 10-1. b) de l'accord franco-tunisien, son fils, avec qui elle demeure, n'ayant pas la nationalité française ;
- qu'il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation ; que le refus de l'admettre au séjour ne porte pas au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme B une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ;
- qu'elle ne justifie pas se trouver dans l'un des cas dans lesquels un étranger ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire en application de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle ne conteste pas être de nationalité tunisienne ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 6 octobre 2010, présenté pour Mme B, qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988, modifié ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret
n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Sylvie
Appèche-Otani, président-assesseur, les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;
Considérant que Mme B, ressortissante tunisienne, est entrée en France le 2 mai 2006, sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa Etats Schengen C non professionnel, valable 30 jours ; que le préfet a rejeté, par un arrêté en date 24 septembre 2008, la demande de titre de séjour faite le 6 juillet 2006 ; que, par un jugement en date du 20 février 2009, le Tribunal administratif de Lille a annulé l'obligation de quitter le territoire français en raison de l'état de santé de Mme B et a enjoint au préfet du Nord de réexaminer sa situation ; qu'elle s'est vu alors délivrer une autorisation provisoire de séjour de trois mois à la suite d'un avis favorable émis le 16 juin 2009 par le médecin inspecteur de santé publique ; que, fin 2009, Mme B a à nouveau sollicité un titre de séjour ; que, par un arrêté en date du 19 janvier 2010, le préfet du Nord a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire au titre de la vie privée et familiale ou une carte de résident de dix ans pour séjour régulier en France d'au moins trois ans ou cinq ans, lui a enjoint de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office de cette mesure d'éloignement ; que Mme B relève appel du jugement du 11 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Considérant, en premier lieu, que les stipulations de l'article 10-1. b) de l'accord
franco-tunisien, modifié, prévoient qu' un titre de séjour d'une durée de dix ans, ouvrant droit à l'exercice d'une activité professionnelle, est délivré de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour sur le territoire français : (...) b) A l'enfant tunisien d'un ressortissant français si cet enfant a moins de vingt et un ans ou s'il est à la charge de ses parents, ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de sa demande de titre datée du 9 décembre 2009, que Mme B a sollicité un titre de séjour en se prévalant, d'une part, de son état de santé nécessitant une prise en charge médicale et, d'autre part, d'un séjour régulier en France depuis au moins 3 ans ou 5 ans ; qu'elle ne peut, dès lors, utilement soutenir pouvoir bénéficier d'un titre de séjour en application des dispositions précitées sur le fondement desquelles ne reposait pas sa demande de titre de séjour ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose, dans sa version alors en vigueur, que : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin inspecteur ou le médecin chef peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat ;
Considérant que Mme B fait valoir qu'elle souffre d'un problème d'hypertension artérielle sévère ayant nécessité en 2008 une double angioplastie d'artères rénales ainsi qu'un traitement lourd ; que, cependant, les documents médicaux qu'elle produit, au demeurant postérieurs à la date de la décision contestée, ne sont pas de nature à infirmer l'avis du médecin inspecteur de santé publique, en date du 17 décembre 2009, reconnaissant, certes, que l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale de longue durée dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais précisant que le traitement peut être dispensé dans son pays d'origine ; qu'elle se prévaut de ce que sa santé risque de se dégrader immédiatement lors de son retour en Tunisie au motif que les moyens médicaux existant en Tunisie ne permettent pas de dispenser le traitement de pointe nécessaire à sa pathologie ; qu'elle ne produit, au soutien de son allégation, aucune pièce probante établissant qu'elle ne pourrait bénéficier dans son pays d'une prise en charge médicale appropriée et qu'elle se trouverait, de ce fait, exposée à des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, dès lors, le préfet n'a pas entaché d'illégalité son refus de titre de séjour ;
Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B est entrée le 2 mai 2006, à l'âge de 72 ans, en France, où vivent deux de ses enfants dont l'un de nationalité française ; qu'elle est veuve depuis l'âge de 66 ans ; qu'elle allègue ne plus avoir d'enfant résidant en Tunisie ; que, par cette allégation dépourvue de tout commencement de preuve, et au demeurant contradictoire avec les indications fournies par la requérante elle-même dans ses demandes de titre de séjour où elle faisait état de onze enfants, dont cinq résidant en Tunisie, elle n'établit pas ne plus avoir d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'en outre, elle ne conteste pas s'être rendue dans son pays d'origine en 2008 et 2009 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que son état de santé l'obligerait à rester auprès de son fils, de nationalité tunisienne, résidant en France ; qu'en outre, la circonstance qu'elle soit veuve d'un ancien militaire de carrière de l'armée française est sans incidence sur la légalité du refus de titre ; qu'il s'ensuit qu'il n'est pas établi que l'autorité préfectorale aurait, pour prendre cette décision, commis une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Zaara B veuve A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.
Copie sera adressée au préfet du Nord.
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N°10DA00729 2