Vu la requête, enregistrée le 14 mars 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Lucien A, demeurant ..., par la SELARL M.COULON et Cie ; M. et Mme Lucien A demandent à la Cour :
1°) l'annulation du jugement n° 0607827 du Tribunal administratif de Lille du 10 janvier 2008 qui a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils sont assujettis au titre des années 2003 et 2004 ;
2°) la décharge des impositions contestées ;
3°) la condamnation de l'Etat à leur payer la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que c'est à bon droit qu'ils ont déduit des revenus fonciers tirés de leur participation dans les SCI 15/17 rue de Béthune et Commerce Béthune , le montant de travaux de réparation et d'amélioration de leur immeuble loué à la société Veuve Auguste Dewas et cie dès lors qu'ils avaient pour but, en application d'une transaction réglant un litige avec leur locataire, de mettre les locaux en conformité avec la destination de l'immeuble ; que ces travaux étaient déductibles au sens de l'article 31 du code général des impôts et du paragraphe 2 de l'instruction n° 5 D 22-24 du 15 septembre 1993 ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 juillet 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique qui conclut au rejet de la requête aux motifs que les travaux qui ont consisté à réaménager complètement les locaux existants pour accroître la surface commerciale sont des travaux de reconstruction ayant accru le patrimoine des requérants, qui ne sont pas déductibles du revenu foncier au sens de l'article 31 du code général des impôts ; que la circonstance que ces travaux ont dû être réalisés en application des articles 1719 et 1720 du code civil est sans influence sur la nature et la déductibilité fiscale des dépenses correspondant à ces travaux ; que la doctrine invoquée n'est pas opposable en application de l'article L. 80A du livre des procédures fiscales dès lors qu'elle est purement interprétative ;
Vu le mémoire, enregistré le 18 août 2008, présenté pour M. et Mme Lucien A, par Me Vergriete ; ils concluent aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens et soutiennent, au surplus, que les travaux pris en charge par les SCI étaient dissociables des autres travaux ; que ces travaux sont déductibles en application de la doctrine administrative 5 D 22-24 (paragraphe 2) du 10 mars 1999 ; qu'ils le sont également au titre de l'article 13 du code général des impôts dès lors qu'ils ont été engagés pour la conservation du revenu foncier des propriétaires ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Bertrand Boutou, premier conseiller, les conclusions de M. Patrick Minne, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;
Sur les conclusions tendant à la décharge des impositions contestées :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 31 du code général des impôts: I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : 1° Pour les propriétés urbaines : a. Les dépenses de réparation et d'entretien, les frais de gérance et de rémunération des gardes et concierges, effectivement supportés par le propriétaire ; (...) b. Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement ; b bis. Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux professionnels et commerciaux destinées à protéger ces locaux des effets de l'amiante ou à faciliter l'accueil des handicapés, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement (...) ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme A ont déduit de leurs revenus fonciers des années 2003 et 2004, tirés de leurs participations dans les SCI 15/17 rue de Béthune et Commerce Béthune , le montant de travaux réglés en application d'une transaction signée avec le locataire d'une de leurs propriétés affectée au commerce de détail dans le centre de Lille ; que cette transaction prévoyait que le propriétaire prendrait en charge une participation de 649 333 euros hors taxes sur un montant total de travaux de 2 850 000 euros, portant essentiellement, au vu des factures produites, sur le lot gros oeuvre de l'opération ; que le descriptif du lot gros oeuvre fait apparaître que lesdits travaux ont eu pour objet de restructurer complètement l'immeuble, en démolissant les planchers de tous les niveaux, puis en reprenant les fondations de l'immeuble afin de permettre l'exploitation de niveaux supplémentaires à des fins commerciales ; qu'il n'est pas contesté que le premier étage de l'immeuble auparavant affecté à usage de réserve a été étendu dans l'emprise d'une courette intérieure pour y aménager une extension de la surface commerciale auparavant cantonnée au rez-de-chaussée de l'immeuble et que les étages supérieurs, constitués d'anciens greniers ont été ensuite affectés à l'exploitation ; qu'un ascenseur et un escalator ont été créés ; que des escaliers ont été aménagés et d'autres supprimés ; que les cloisonnements intérieurs ont été entièrement modifiés ; que la façade a été remaniée et la toiture refaite ; que compte tenu de leur ampleur, ces travaux constituent des travaux de reconstruction accroissant la valeur du patrimoine du propriétaire et ne peuvent être qualifiés de simples travaux d'amélioration, de réparation ou d'entretien ; que la circonstance que les propriétaires ont dû prendre en charge ces travaux au titre des obligations découlant des articles 1719 et 1720 du code civil est sans influence sur l'appréciation de leur caractère déductible du point de vue fiscal ; qu'enfin, les contribuables ne produisent aucune pièce au dossier permettant de dissocier de l'ensemble de l'opération le montant de travaux qui pourraient se rattacher à la catégorie des travaux d'entretien, de réparation ou d'amélioration, déductibles du revenu foncier au sens de l'article 31 du code général des impôts ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 13 du code général des impôts : 1. Le bénéfice ou revenu imposable est constitué par l'excédent du produit brut, y compris la valeur des profits et avantages en nature, sur les dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu (...) ; que dès lors que les dépenses en litige sont relatives aux travaux de reconstruction d'un immeuble dont la déduction du revenu foncier est exclue explicitement par les dispositions précitées de l'article 31 du code général des impôts, les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir des dispositions de l'article 13 précité du code général des impôts en soutenant que compte tenu du but poursuivi par la réalisation de ces travaux, destinés à pérenniser le bail signé avec le locataire, ces dépenses ont été exposées en vue de l'acquisition ou de la conservation d'un revenu ;
En ce qui concerne l'application de la doctrine :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. ;
Considérant que les termes du paragraphe 2 de la doctrine administrative 5 D 22-24 du 10 mars 1999 invoqués par les contribuables n'ont qu'un caractère interprétatif de la loi fiscale ; qu'ils ne peuvent par suite être utilement opposés à l'administration fiscale sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, pas plus d'ailleurs que ceux de l'instruction identique du 15 septembre 1993 qui avait, en tout état de cause, été abrogée précédemment aux années d'imposition en litige ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;
Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. et Mme Lucien A doivent, dès lors, être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2003 et 2004 ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Lucien A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.
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N°08DA00473