Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 5 juin 2008 par télécopie et régularisée par la réception de l'original le 10 juin 2008, et la lettre, enregistrée le
16 juillet 2008, présentées pour M. Mohammed X, demeurant ..., par la SCP Caron, Daquo, Amouel ; il demande à la Cour :
11) d'annuler le jugement n° 0800069, en date du 24 avril 2008, par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du
10 décembre 2007, par lequel le préfet de l'Aisne a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;
2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aisne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale », dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte ;
Il soutient que le préfet de l'Aisne a commis une erreur de droit en estimant que l'absence de production d'un visa de long séjour était une condition de recevabilité de sa demande de titre de séjour ; que ses liens avec la France n'ont jamais été rompus ; qu'il a dû repartir au Maroc en raison de l'état de santé de son père ; que ses deux enfants nés en France de son premier mariage sont repartis avec lui et n'ont jamais été séparés de leur père ; que son fils né au Maroc de son second mariage y réside avec sa mère ; qu'il est en instance de divorce avec cette dernière ; qu'il a créé en France en 2006 une SARL avec ses deux fils ; que l'éloignement de M. X risque de remettre en cause la pérennité de cette entreprise ; que le préfet de l'Aisne a commis une erreur manifeste d'appréciation et a méconnu le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 juillet 2008, présenté par le préfet de l'Aisne, qui demande à la Cour de rejeter la requête ; il soutient que M. X n'étant pas à la charge de ses deux enfants français, il ne pouvait se voir délivrer une carte de séjour temporaire en application du 2° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, sauf exception, la délivrance d'une carte de séjour temporaire est subordonnée à la production d'un visa de long séjour ; que M. X ne justifie ni de ressources propres, ni d'une insertion dans la société française et n'apporte pas la preuve de l'absence de liens familiaux dans son pays d'origine, son épouse et l'un de ses enfants résidant au Maroc et M. X n'établissant pas qu'une procédure de divorce aurait été engagée devant une juridiction marocaine ; que le requérant a quitté la France en 1987, ses enfants étant alors âgés de deux et cinq ans, et n'est revenu en France qu'en 2004 ; qu'en première instance, M. X soutenait que ses enfants Idris et Mehdi avaient été confiés à la garde de leur mère, alors que devant la Cour de céans, il soutient que ceux-ci ont vécu avec lui au Maroc ; qu'il n'établit pas avoir financé leurs études ; que la décision portant refus de séjour n'a pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le projet de M. X de création d'une société d'audit a reçu un avis défavorable de la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne ; que
M. X n'a que la qualité d'associé dans la société « Diagaudit », le gérant étant son fils Mehdi ; que l'arrêté attaqué n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle du refus de séjour ;
Vu la décision en date du 1er septembre 2008 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à M. X ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret
n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;
Vu la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2008 à laquelle siégeaient M. Gérard Gayet, président de chambre, Mme Marie-Christine Mehl-Schouder, président-assesseur et M. Xavier Larue, conseiller :
- le rapport de M. Xavier Larue, conseiller ;
- et les conclusions de M. Alain de Pontonx, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X relève appel du jugement n° 0800069, en date du 24 avril 2008, par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 10 décembre 2007, par lequel le préfet de l'Aisne a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination en cas de renvoi ;
Considérant que M. X invoque en appel les moyens déjà développés devant le Tribunal administratif d'Amiens, et appuyés par les mêmes éléments, tirés de ce que le préfet de l'Aisne aurait commis une erreur de droit en fondant sa décision sur l'absence de production par le requérant d'un visa de long séjour, et de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait insuffisamment motivée ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter ces moyens ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée / (...) / » ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au
bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;
Considérant que si M. X, de nationalité marocaine, est entré en France en 2004, il est constant qu'il résidait dans son pays d'origine depuis 1987, date à laquelle il a quitté le sol français après avoir divorcé de sa première femme de nationalité française ; que s'il soutient n'avoir jamais été séparé de ses deux enfants nés en France de sa première union, ceux-ci l'ayant rejoint au Maroc après son départ du territoire français, il n'apporte aucun élément au soutien de cette allégation, au demeurant contradictoire avec les autres arguments présentés qui font état de la garde desdits enfants par sa première épouse après le prononcé du divorce ; qu'il n'établit pas davantage être divorcé de sa seconde épouse qui réside au Maroc avec un autre de ses enfants mineur ; qu'il n'est donc pas dépourvu de toutes attaches familiales dans son pays d'origine ; que si
M. X soutient que son retour au Maroc mettrait en péril la SARL, créée en 2006 et dont il est associé avec ses deux fils aînés, cette circonstance ne saurait être tenue pour établie dès lors qu'il soutient également être à la charge de ses fils ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de M. X au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le préfet de l'Aisne n'a ni méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction présentées sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Mohammed X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.
Copie sera transmise au préfet de l'Aisne.
N°08DA00892 2