Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2006, présentée pour la société anonyme UNIBETON, venant aux droits de la société TERUCRIE, dont le siège est Les Technodes, BP 2 à Guerville (78931), par Me Dussert ; la société UNIBETON demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0101410 du 27 juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie, en droits et pénalités, au titre de l'exercice clos en 1993 ;
2°) de prononcer la décharge de la somme demandée ;
Elle soutient que les premiers juges ont commis une erreur de droit relativement aux conventions passées au sein du groupe Ciments Français ; que l'intention des parties était de continuer à faire bénéficier les filiales de la société Arena des services de la société Ciments Français ; que les prestations rendues par cette dernière ne faisaient pas double emploi avec celles de la société Arena Services ; que la déduction de la redevance des prestations dites « de siège » est admise par la jurisprudence et par l'instruction fiscale n° 4 C-6-03 du 14 août 2003 relative aux quartiers généraux ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 novembre 2006, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut au rejet de la requête ; à cette fin, il fait valoir que la société requérante a cessé le 30 novembre 1992 de bénéficier de l'accord conclu le 2 janvier 1992 ; que les prestations alléguées de la société Ciments Français auraient fait double emploi avec celles fournies par Arena Services en application d'une convention du
31 décembre 1992 ; que ces prestations ne sont pas établies ; que la société n'entre pas dans les prévisions de l'instruction fiscale mentionnée ci-dessus ; que la redevance forfaitaire de
1 % versée à la société Ciments Français n'est pas justifiée ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 22 décembre 2006, présenté pour la société UNIBETON, tendant aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; elle soutient, en outre, que les prestations d'Arena Services, d'une part, et de la société Ciments Français, d'autre part, sont distinctes et complémentaires ; que le calcul d'une redevance en pourcentage du chiffre d'affaires a été admis par la jurisprudence ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 février 2007, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut au rejet de la requête par les mêmes moyens que ceux déjà présentés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 juin 2008 à laquelle siégeaient M. Jean-Claude Stortz, président de chambre, Mme Marie-Christine Mehl-Schouder, président-assesseur et M. Jean-Eric Soyez, premier conseiller :
- le rapport de M. Jean-Eric Soyez, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Pierre Le Garzic, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la société TERUCRIE aux droits de laquelle vient la société UNIBETON, relève appel du jugement du 27 juin 2006 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande en décharge du supplément d'impôt sur les sociétés résultant de la réintégration dans ses bénéfices de l'exercice clos en 1993 d'une redevance de 860 000 francs, versée à la société Ciments Français ;
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés en application des dispositions de l'article 221 du même code : « 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges » ;
Considérant qu'il appartient au contribuable, pour l'application des dispositions précitées, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du même code que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; qu'en ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ;
Considérant, en premier lieu, que la société requérante excipe de l'article 4 du contrat du 2 janvier 1992 par lequel la société Ciments Français s'engageait à fournir toutes prestations d'administration générale à la société Arena, ainsi qu'aux filiales de cette dernière, au nombre desquelles figurait la société TERUCRIE, et de l'article 5 qui stipulait en contrepartie pour les sociétés bénéficiaires le versement d'une redevance égale à 1 % du chiffre d'affaires de la branche béton du groupe ; que, toutefois, il est constant que, par un avenant du
30 novembre 1992 à ce contrat, la société Arena Services a été substituée aux droits et obligations de la société Arena et que la nouvelle cocontractante ne détenait aucune participation dans le capital de la société TERUCRIE ; que, dès lors, la société requérante ne saurait justifier de la déduction de la redevance versée au groupe Ciments Français au cours de l'exercice clos en 1993, par un accord qui ne concernait plus depuis le 30 novembre 1992 la société TERUCRIE ;
Considérant, en deuxième lieu, que si la société UNIBETON prétend que la société Ciments Français a continué en 1993 à offrir aux filiales de la société Arena les prestations stipulées dans le contrat conclu le 2 janvier 1992, sans préjudice des termes de l'avenant intervenu à cette date, elle ne démontre pas la réalité de cette contribution au profit de la société TERUCRIE en versant au dossier les tableaux de comptabilité analytique de la société Ciments Français en 1993 ; qu'au surplus, il résulte de l'instruction que la société TERUCRIE était également liée depuis le 31 décembre 1992 par une convention de services à la société Arena Services, dont elle recevait toute assistance dans les domaines juridique, fiscal, des ressources humaines, des finances, de la comptabilité, de l'audit, des assurances et des investissements matériels ; qu'à l'exception des actions de recherche et de développement, les deux accords stipulaient les mêmes prestations ; qu'en se bornant à soutenir que ce second accord avait trait à l'administration générale courante, alors que le premier portait sur des prestations stratégiques, la société requérante n'établit pas que l'accord conclu le 2 janvier 1992 ne faisait pas pour partie double emploi avec celui signé par la société TERUCRIE le 31 décembre 1992 ;
Considérant, en troisième lieu, qu'à supposer même que des prestations de recherche et de développement aient été fournies à cette société par la société Ciments Français en application de la convention du 2 janvier 1992, la redevance litigieuse ne saurait être regardée, en raison de son mode de calcul, fixé forfaitairement à 1 % du chiffre d'affaires de la branche béton des sociétés du groupe, comme le prix de ces prestations ;
Considérant, enfin, que la société requérante ne saurait utilement invoquer l'instruction fiscale n° 4 C-6-03 du 14 août 2003 relative aux quartiers généraux, dans les prévisions de laquelle la société TERUCRIE n'entre pas ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la déduction de la charge litigieuse n'est pas justifiée et que, par suite, la société UNIBETON n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la décharge du supplément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie, en droits et pénalités, au titre de l'exercice clos en 1993 ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société UNIBETON est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme UNIBETON venant aux droits de la société TERUCRIE et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Copie sera transmise au directeur des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal Nord.
N°06DA01236 2