Vu la requête, enregistrée le 3 août 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par le PREFET DE LA SOMME ; le PREFET DE LA SOMME demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0700927 du 28 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens, à la demande de M. Bouzekrine X, a annulé sa décision du 9 mars 2007 refusant à M. X la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
2°) de confirmer ladite décision ;
Il soutient que le signataire de la décision litigieuse, M. Y, disposait d'une délégation de signature régulière ; qu'en effet, l'arrêté fait mention de son nom, de ses fonctions ainsi que de la délégation de signature accordée par le préfet à M. Y ; que la délégation de signature a été publiée au recueil des actes administratifs du 31 août 2006 et consultable par internet sur le site de la préfecture et donc opposable aux tiers ; que la décision litigieuse ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que si M. X déclare vivre maritalement avec une ressortissante française, depuis près de deux ans, il ne produit aucun élément probant à l'appui de ses allégations ; qu'il apparaît à l'examen du dossier de l'intéressé que la vie commune du couple ne présente pas un caractère ancien, stable et intense, susceptible d'ouvrir droit à la délivrance d'un titre de séjour ; que la volonté de M. X de résider en France ne saurait, à elle seule, lui permettre d'obtenir un titre de séjour ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu l'ordonnance du 8 août 2007 portant clôture de l'instruction au 15 octobre 2007 ;
Vu la décision du 5 septembre 2007 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai admettant M. X au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2007, présenté pour M. Bouzekrine X, demeurant ..., par la SCP Frison, Decramer et Associés ; M. X demande à la Cour de rejeter l'appel du PREFET DE LA SOMME, de confirmer le jugement rendu par le Tribunal administratif d'Amiens le 28 juin 2007 et d'enjoindre audit préfet de se prononcer sur sa situation dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir en application des dispositions de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ; il soutient que la délégation de signature n'était pas régulière et n'avait pas été publiée ; que le PREFET DE LA SOMME a rejeté sa demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans, au préalable, saisir la commission du titre de séjour, formalité pourtant obligatoire dans ce cas ; qu'il est entré régulièrement sur le territoire français ; que, depuis le 10 juillet 2005, il vit maritalement avec une ressortissante française, qu'il a d'ailleurs épousée le 7 juillet 2007 ; qu'il est parfaitement intégré au sein de la société française et ne représente aucune menace pour l'ordre public ; qu'il est, par conséquent, en droit de se voir attribuer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le PREFET DE LA SOMME a commis une erreur manifeste d'appréciation en lui ordonnant de quitter le territoire français et a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 24 septembre 2007, présenté par le PREFET DE LA SOMME ; il conclut aux mêmes fins que sa requête ; il soutient qu'à la date à laquelle il a pris l'arrêté litigieux, la commission du titre de séjour n'avait pas à être saisie,
M. X n'étant pas marié, il ne répondait à aucune des conditions exigées par les articles
L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en outre, l'arrêté préfectoral litigieux du 9 mars 2007 ne méconnaît pas plus et pour la même raison, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret
n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mars 2008 à laquelle siégeaient M. Jean-Claude Stortz, président de chambre, Mme Marie-Christine Mehl-Schouder, président-assesseur et M. Jean-Eric Soyez, premier conseiller :
- le rapport de M. Jean-Claude Stortz, président-rapporteur ;
- et les conclusions de M. Pierre Le Garzic, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant que le PREFET DE LA SOMME relève appel du jugement du
28 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens, à la demande de M. X, a annulé sa décision du 9 mars 2007 refusant à M. X la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par arrêté du 8 août 2006,
M. Michel A, PREFET DE LA SOMME, a donné délégation de signature à
M. Yves Z, secrétaire général de la préfecture de la Somme, pour signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents et, en cas d'absence ou d'empêchement de M. Z, à M. Blaise Y ; que cet arrêté a été publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 31 août 2006 ; que, par suite, l'arrêté attaqué a été signé en vertu d'une délégation de signature régulière et opposable ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif d'Amiens s'est fondé sur le motif qu'il n'était pas établi par le PREFET DE LA SOMME que l'arrêté litigieux a été signé en vertu d'une délégation de signature régulière pour annuler la décision du 9 mars 2007 ;
Considérant qu'il appartient, toutefois, à la Cour administrative d'appel de Douai, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif d'examiner les autres moyens soulevés par
M. X devant le Tribunal administratif d'Amiens et devant la Cour ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » et qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, dans sa rédaction issue du troisième avenant signé le 11 juillet 2001 : « Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (...) 5° au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, ressortissant algérien, est entré en France le 18 mai 2005 à l'âge de 40 ans, sous couvert d'un visa de court séjour, qu'il ne démontre pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine ; que s'il déclare vivre depuis le 10 juillet 2005 avec une ressortissante française, cette circonstance, à elle seule et eu égard au caractère récent de cette relation, ne suffit pas à établir que le refus de délivrance du certificat de résidence sollicité par M. X porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ce refus ; que, par ailleurs, la circonstance que M. X s'est marié avec une ressortissante française le 7 juillet 2007, soit postérieurement à l'arrêté contesté, est sans incidence sur la légalité de
celui-ci ; que, par suite, il n'est pas établi que l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que M. X ne peut, en tout état de cause, se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne sont pas applicables aux ressortissants algériens ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. X ne remplit pas les conditions lui permettant d'obtenir de plein droit un certificat de résidence sur le fondement des stipulations de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; qu'ainsi, le PREFET DE LA SOMME n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour instituée par les dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avant de rejeter sa demande de titre de séjour ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de consultation de cette commission doit être écarté ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il n'est pas établi que le PREFET DE LA SOMME, en l'obligeant à quitter le territoire, a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette obligation sur la situation personnelle de M. X et a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA SOMME est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté du 9 mars 2007 refusant à M. X la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination et à demander le rejet de la demande d'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé » ;
Considérant que le présent arrêt rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. X et n'implique, par suite, aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions présentées par M. X aux fins d'injonction au PREFET DE LA SOMME de délivrer le titre de séjour demandé doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif d'Amiens du 28 juin 2007 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif d'Amiens est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire et à M. Bouzekrine X.
Copie sera transmise au PREFET DE LA SOMME.
N°07DA01222 2