Vu la requête, enregistrée le 22 février 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Hamdi X, demeurant ..., par Me Bali ; M. X demande à la Cour :
11) d'annuler le jugement n° 0502075 en date du 9 janvier 2007 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 juillet 2005 du préfet de l'Eure refusant de l'admettre au séjour ;
2°) d'annuler ladite décision pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet de l'Eure, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 800 euros sur le fondement de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. X soutient :
- que la décision de refus de séjour attaquée est insuffisamment motivée au regard des exigences posées par l'article 3 de la loi du 11 juin 1979, en ce qu'elle ne fait aucune mention de l'acte de recueil légal aux termes duquel l'exposant a été confié en tutelle à un oncle et une tante résidant en France ;
- qu'il considère l'oncle et la tante qui l'ont recueilli en application d'un acte de « kafala », s'occupent quotidiennement de lui, subviennent à ses besoins et veillent avec intérêt sur sa scolarité, comme ses propres parents ; qu'en ne prenant pas en compte l'existence de tels liens personnels et familiaux en France, qui l'unissent à des proches constituant sa véritable famille, le refus de séjour attaqué est entaché d'erreur de fait et porte au droit de l'exposant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, méconnaissant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- que la décision attaquée aura pour effet de compromettre la scolarité qu'il poursuit avec succès en France ; que cette décision procède ainsi d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences qu'elle comporte sur sa situation personnelle ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu l'ordonnance en date du 12 mars 2007, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Douai fixe la clôture de l'instruction au 14 mai 2007 ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2007, présenté par le préfet de l'Eure ; le préfet conclut au rejet de la requête ;
Le préfet soutient :
- à titre principal, que la requête d'appel, qui ne contient aucune critique du jugement attaqué mais se borne à reprendre les moyens présentés en première instance, est irrecevable comme insuffisamment motivée ;
- à titre subsidiaire au fond, que la décision de refus de séjour attaquée est suffisamment motivée ;
- que M. X, entré en France en novembre 2004 sous couvert d'un visa de court séjour à l'âge de 18 ans, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sans avoir bénéficié de la procédure de regroupement familial et alors qu'il était majeur ; que, dès lors, la circonstance qu'il aurait été confié à ses oncle et tante demeurant en France par un acte de « kafala » est sans incidence sur son droit à l'admission au séjour ; que si le requérant invoque les liens qui l'unissent à son oncle et sa tante, il ressort clairement des éléments du dossier et notamment des entretiens avec l'intéressé que ses parents demeurent en Algérie de même que son frère et ses trois soeurs et qu'il a de fréquents contacts avec ceux-ci ; que le centre des intérêts familiaux de M. X se situe donc en Algérie ; que le refus de séjour attaqué n'a, dès lors, pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, et n'a ainsi méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien modifié ;
- que rien ne fait obstacle à la poursuite de la scolarité de M. X en Algérie dans un lycée technique ; que l'intéressé, qui est célibataire et dont l'ensemble de la famille réside en Algérie, a d'ailleurs été scolarisé dans ce pays, où il a toujours vécu, jusqu'à son arrivée récente en France à l'âge de 18 ans ; que, dans ces conditions, la décision attaquée n'est pas entachée d'erreur dans l'appréciation des conséquences qu'elle comporte sur la situation personnelle de
M. X ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 21juin 2007, présenté pour M. X, par Me Dorléac ; M. X conclut aux mêmes fins que sa requête et, en outre, à titre subsidiaire, à ce que son assignation à résidence à son adresse actuelle soit prononcée, par les mêmes moyens et, en outre, par les moyens :
- qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté préfectoral du 4 juillet 2005 a été notifié à l'exposant, ce qui entraîne son irrégularité et le rend inopposable à M. X ;
- que l'arrêté attaqué a été pris par le secrétaire général qui n'avait pas délégation de signature ;
- que l'autorité préfectorale n'a pas pris en compte la circonstance que le père de l'exposant vient régulièrement en France dans le cadre de son activité professionnelle ; que l'exposant est ainsi dépourvu d'attaches réelles dans son pays d'origine, son père étant omniprésent sur le territoire français depuis le début de l'année 2007 ; que, dans ces conditions, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont méconnues ;
- que l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 24 juillet 2006 lui est applicable dès lors qu'il a obtenu d'excellents résultats au cours de sa scolarité en France, alors qu'il ne maîtrisait pas la langue française à son entrée sur le territoire national ; que ces circonstances suffisent à établir que le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'arrêté attaqué sur sa situation personnelle et professionnelle ;
Vu l'ordonnance en date du 25 juin 2006 prononçant la réouverture de l'instruction ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu la loi 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 septembre 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Patrick Minne, premier conseiller :
- le rapport de Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité externe :
Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué a été signé par M. Stéphane Y, secrétaire général de la préfecture de l'Eure, qui bénéficiait d'une délégation de signature conférée par arrêté du préfet de l'Eure en date du 26 juillet 2004, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Eure ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la loi susvisée du
11 juillet 1979 modifiée : « La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. » ; qu'il ressort de l'examen des motifs de la décision attaquée que ceux-ci énoncent les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement ; que, par suite et alors même que ces motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation personnelle et familiale de
M. X, en particulier l'existence de l'acte dit de « kafala », cette décision est suffisamment motivée au regard des exigences posées par les dispositions précitées ;
Considérant, en troisième lieu, que les conditions dans lesquelles une décision administrative individuelle est notifiée à son destinataire sont sans incidence sur sa légalité ; que, dès lors, à supposer établi que la décision attaquée ne lui aurait pas été notifiée, un tel moyen, qui est inopérant, ne peut qu'être écarté ;
Sur la légalité interne :
Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, dans sa rédaction issue du 3ème avenant en date du 11 juillet 2001 entré en vigueur le
1er janvier 2003 : « (…) Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (…) 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (…) » ;
Considérant, en premier lieu, que M. X fait valoir qu'il vit chez son oncle et sa tante à qui il a été confié par un acte dit de « kafala » établi par acte notarié à Batna (Algérie) le 7 janvier 2005, qu'ils veillent quotidiennement sur lui, suivent ses études et qu'il entretient des liens privilégiés avec eux ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que M. X, qui est célibataire et sans charge de famille, est né le 10 décembre 1986 et n'est entré en France que le 10 novembre 2004, après avoir vécu habituellement durant près de dix-huit ans en Algérie où demeurent, selon les éléments que l'intéressé a lui-même indiqués à l'administration, ses parents, un frère et trois soeurs ; que, dans ces conditions, alors même que son père viendrait fréquemment en France et malgré l'existence de l'acte dit de « kafala » par lequel ses parents ont unilatéralement déclaré confier la garde et l'entretien de leur fils à sa tante maternelle et au mari de celle-ci, résidant en France, et qui n'émane pas en tout état de cause d'une autorité judiciaire algérienne, la décision de refus de séjour attaquée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a ainsi méconnu ni les stipulations précitées de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié, ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, en deuxième lieu, que la seule circonstance que M. X est inscrit dans un lycée technique en France où il poursuit avec succès ses études est insuffisante à établir, alors que l'intéressé était, jusqu'à son entrée récente sur le territoire français, scolarisé en Algérie, que la décision de refus de séjour attaquée serait entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences qu'elle comporte sur sa situation personnelle ;
Considérant, enfin, que M. X n'était pas, contrairement à ce qu'il soutient, en situation de se prévaloir des dispositions à présent codifiées à l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qui, issues de la loi du 24 juillet 2006, n'étaient pas en vigueur à la date à laquelle l'arrêté attaqué a été pris ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de
non-recevoir opposée par le préfet de l'Eure, que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que, dès lors, les conclusions aux fins d'injonction assorties d'astreinte présentées par le requérant ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que lesdites dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, en la présente instance, la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. Hamdi X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Hamdi X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.
Copie sera transmise au préfet de l'Eure.
N°07DA00278 2