Vu la requête, enregistrée le 28 juillet 2006 par télécopie et régularisée par l'envoi de l'original le 2 août 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour
M. John-Egbe X, demeurant ..., par Me Rouly ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0601482 du 16 juin 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juin 2006 du préfet des Yvelines décidant sa reconduite à la frontière et la décision du même jour fixant le pays de destination et à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 juin 2006 pour excès de pouvoir ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 900 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient qu'il est fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de séjour, tirée du défaut de communication de l'avis médical et de l'impossibilité de suivre un traitement approprié au Nigéria ; qu'en application de l'article 7-5 du décret du 30 juin 1946, le préfet devait saisir pour avis le médecin inspecteur de santé publique avant de décider sa reconduite à la frontière ; que l'absence de traitement dans son pays d'origine fait obstacle à la mesure d'éloignement en application de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu l'ordonnance en date du 2 août 2006 fixant la clôture de l'instruction au
6 septembre 2006 ;
Vu l'examen des pièces du dossier desquelles il ressort que la requête a été communiquée au préfet des Yvelines qui n'a pas produit de mémoire en défense ;
Vu la lettre en date du 12 octobre 2006 par laquelle le président de la 2ème chambre a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de soulever un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité du moyen de légalité externe nouveau en appel tiré du défaut de consultation du médecin inspecteur de santé publique ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié réglementant les conditions d'entrée et de séjour en France des étrangers (et notamment son article 7-5) ;
Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades prévus à l'article 7-5 du décret n° 46-1574 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 novembre 2006 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant,
président-assesseur et M. Patrick Minne, premier conseiller :
- le rapport de Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre ;
- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (…) » ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. John-Egbe X, de nationalité nigériane, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le
10 juin 2005, de la décision du préfet des Yvelines du 7 juin 2005 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Sur l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour du 7 juin 2005 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (…) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (…) » ;
Considérant qu'aux termes de l'article 7-5 alors applicable du décret du 30 juin 1946 modifié : « (…) le préfet délivre la carte de séjour temporaire, au vu de l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé. A Paris, l'avis est émis par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Cet avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'intégration, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur (...) » ; que l'arrêté du 8 juillet 1999 pris pour l'application de ces dispositions impose au médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales d'émettre un avis précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement médical approprié dans son pays ;
Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que la décision rejetant la demande de titre de séjour de M. X a été prise au vu de l'avis du médecin chef du service médical de la préfecture de police en date du 10 février 2005 ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait la communication de cet avis à l'intéressé ; que dès lors, le refus de titre de séjour contesté a été pris suivant une procédure régulière ;
Considérant, d'autre part, que M. X fait valoir que la maladie dont il souffre pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité, au motif qu'il est atteint de l'hépatite B pour laquelle il ne peut recevoir les soins appropriés dans son pays d'origine ; que l'intéressé produit à l'appui de ses dires trois certificats médicaux établis par un hépato-gastro-entérologue, constatant la nécessité d'une surveillance régulière de l'évolution de son état de santé, et des documents généraux concernant la situation sanitaire au Nigéria et le virus de l'hépatite B, qui ne suffisent pas à remettre en cause l'avis du médecin chef du service médical de la préfecture de police selon lequel il pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'ainsi,
M. X n'est pas fondé à soutenir qu'il remplissait les conditions pour obtenir une carte de séjour temporaire de plein droit en application des dispositions précitées ; que par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur sa recevabilité, l'exception d'illégalité n'est pas fondée ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. X n'a présenté que des moyens de légalité interne devant le Tribunal administratif de Rouen ; qu'il n'est dès lors pas recevable à présenter en appel le moyen de légalité externe tiré de ce que l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière aurait été pris en l'absence de l'avis du médecin inspecteur de santé publique en méconnaissance des dispositions de l'article 7-5 du décret du 30 juin 1946 modifié ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (…) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi » ;
Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit, qu'il n'est pas établi que M. X ne pourrait bénéficier de la surveillance nécessaire à son état dans son pays d'origine ; que, par ailleurs, l'intéressé n'allègue pas que son état de santé se serait aggravé à la date de l'arrêté attaqué ; que dès lors, les dispositions de l'article L. 511-4 10° ne faisaient pas obstacle à ce qu'il soit reconduit à la frontière ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Yvelines du 12 juin 2006 décidant sa reconduite à la frontière ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande M. X au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. John-Egbe X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. John-Egbe X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
Copie sera adressée au préfet des Yvelines et au préfet de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience du 14 novembre 2006 à laquelle siégeaient :
- Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre,
- Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur,
- M. Patrick Minne, premier conseiller.
Lu en audience publique le 28 novembre 2006.
L'assesseur le plus ancien,
Signé : B. PHEMOLANT
Le président-rapporteur,
Signé : C. V. HELMHOLTZ
Le greffier,
Signé : M. T. LEVEQUE
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le Greffier
M. T. LEVEQUE
N°06DA01026 2