La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/06/2006 | FRANCE | N°05DA00033

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation a 3, 13 juin 2006, 05DA00033


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le

11 janvier 2005 par télécopie et régularisée par la production de l'original le 13 janvier 2005, présentée pour la COMMUNE D'AVIRON (27930), par Me Bineteau ; la COMMUNE D'AVIRON demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0000783 du 14 octobre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Rouen l'a condamnée à verser, à M. Didier Y, la somme de 129,50 euros en remboursement de la franchise laissée à sa charge à la suite de l'inondation, le 30 octobre 1998, du sous-sol de sa pr

opriété et, à la mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF), la s...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le

11 janvier 2005 par télécopie et régularisée par la production de l'original le 13 janvier 2005, présentée pour la COMMUNE D'AVIRON (27930), par Me Bineteau ; la COMMUNE D'AVIRON demande à la Cour :

11) d'annuler le jugement n° 0000783 du 14 octobre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Rouen l'a condamnée à verser, à M. Didier Y, la somme de 129,50 euros en remboursement de la franchise laissée à sa charge à la suite de l'inondation, le 30 octobre 1998, du sous-sol de sa propriété et, à la mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF), la somme de 16 445 euros en remboursement de l'indemnité versée à M. Y, son assuré ;

2°) de rejeter la demande présentée par la MAIF et M. Y devant le Tribunal administratif de Rouen ;

3°) de condamner le syndicat de voirie du canton d'Evreux à la garantir des éventuelles condamnations qui seraient mises à sa charge ;

4°) de condamner la MAIF et M. Y à lui verser une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La COMMUNE D'AVIRON soutient :

- à titre principal, que la demande présentée par la MAIF et M. Y devant le Tribunal administratif de Rouen était irrecevable comme mal dirigée, le syndicat de voirie du canton d'Evreux, dont l'exposante est membre, s'étant vu transférer la compétence de l'entretien de la voirie communale, dont le fossé mis en cause constitue un accessoire ;

- à titre subsidiaire, que cette demande n'était pas fondée, alors que le dommage trouve sa cause déterminante dans un défaut d'entretien dudit fossé et que l'exposante a assuré, quant à elle, un entretien régulier et adéquat des ouvrages dont elle a la responsabilité ; qu'en outre, M. Y et son assureur n'ont pas apporté la preuve que le dommage dont ils demandent réparation revêt un caractère anormal et spécial ;

- que les précipitations, qui se sont produites durant quarante huit heures sur le territoire communal et qui sont à l'origine de l'inondation de la propriété de M. Y, ont revêtu un caractère de force majeure ;

- que le fait d'un tiers a favorisé la survenance du dommage ;

- que le tribunal administratif s'est livré à une appréciation erronée du préjudice subi par

M. Y et son assureur ;

- que, compte tenu de la responsabilité encourue par le syndicat de voirie du canton d'Evreux, l'exposante est fondée à demander à être entièrement garantie par lui des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 mars 2005, présenté pour la mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF), dont le siège est 11 rue André Meynier, CS76914 à Rennes (35069) et pour M. Didier Y, demeurant ..., par

Me Deboeuf ; la MAIF et M. Y concluent au rejet de la requête et à la condamnation de la commune d'AVIRON à verser à la MAIF une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent :

- que leur demande de première instance était recevable comme bien dirigée ;

- que cette demande était fondée, le maire d'AVIRON n'ayant accompli aucune diligence dans le cadre de ses pouvoirs de police pour prévenir l'inondation et la COMMUNE D'AVIRON n'ayant pas assuré l'entretien normal des ouvrages d'évacuation d'eaux pluviales dont elle a la charge ; qu'en outre, le dommage dont ils demandent réparation et qui trouve sa cause directe dans un défaut chronique d'entretien du fossé, pratiquement comblé, longeant la voie communale, est anormal et spécial ;

- que les précipitations qui se sont produites en l'espèce n'ont pas revêtu le caractère de force majeure, des pluies de même intensité étant d'ailleurs intervenues précédemment sans donner lieu à aucune inondation de la propriété ;

- que la COMMUNE D'AVIRON ne peut tenter de s'exonérer de sa responsabilité en invoquant le fait d'un tiers ;

Vu la lettre en date du 13 avril 2006, par laquelle le président de la formation de jugement a, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, informé les parties que la décision est susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office ;

Vu le mémoire en réponse audit moyen, parvenu au greffe de la Cour par télécopie le 20 avril 2006 et confirmé par courrier original le 21 avril 2006, présenté pour la commune d'Aviron, concluant aux mêmes fins que sa requête ;

Vu le mémoire en réponse audit moyen, enregistré le 24 avril 2006, présenté pour la MAIF et M. Y, concluant aux mêmes fins que leur précédent mémoire, la somme demandée sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative étant, toutefois, portée à

2 500 euros, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 mai 2006, présenté pour la commune d'Aviron, concluant aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, parvenu par télécopie au greffe de la Cour le 29 mai 2006, soit après la clôture de l'instruction, présenté pour la MAIF et M. Y ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 mai 2006 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Corinne Signerin-Icre, président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :

- le rapport de Mme Corinne Signerin-Icre, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Robert Le Goff, commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité de la COMMUNE D'AVIRON :

Considérant, en premier lieu, que les tiers peuvent rechercher, pour obtenir la réparation des dommages imputables à un ouvrage public qu'ils ont subis, la responsabilité soit du maître de l'ouvrage soit de la collectivité publique qui assure l'entretien de cet ouvrage ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'inondation survenue les 30 et 31 octobre 1998 dans la propriété de M. Didier Y, située à Aviron (Eure), qui a endommagé le garage aménagé au sous-sol de l'habitation et occasionné de nombreux dégâts matériels, trouve sa cause dans le débordement du fossé de collecte des eaux de ruissellement longeant le chemin communal situé à proximité de ladite propriété et qui s'est trouvé obstrué par la végétation ainsi que par de la terre et des résidus de récolte provenant d'un champ voisin ; que M. Y a la qualité de tiers par rapport audit ouvrage public, dont la COMMUNE D'AVIRON ne conteste pas être le maître d'ouvrage ; que, par suite et alors même que le syndicat intercommunal de voirie du canton d'Evreux Nord, auquel a été transférée la compétence de l'entretien de ce chemin, aurait en charge l'entretien dudit fossé, la COMMUNE D'AVIRON n'est pas fondée à soutenir que la demande présentée par la MAIF, en partie subrogée dans les droits de M. Y, et par ce dernier était mal dirigée ;

Considérant, en deuxième lieu, que s'il est constant que les précipitations qui se sont produites sans discontinuer les 30 et 31 octobre 1998 sur le territoire de la COMMUNE D'AVIRON et des communes environnantes étaient particulièrement importantes, elles ne présentaient pas, alors même que la COMMUNE D'AVIRON et deux autres communes concernées auraient saisi le préfet pour lui demander d'engager une procédure de reconnaissance d'état de catastrophe naturelle, un caractère de violence imprévisible et irrésistible constituant un cas de force majeure de nature à exonérer la COMMUNE D'AVIRON de sa responsabilité ;

Considérant, enfin, que la COMMUNE D'AVIRON ne peut utilement se prévaloir de ce que des pommes de terres laissées sur place après la récolte sur un champ voisin ont été entraînées par les eaux de ruissellement et sont venues s'ajouter à la végétation et à la terre obstruant l'ouvrage public en cause, dès lors que cette circonstance, qui résulte du fait d'un tiers, n'est pas de nature à l'exonérer en tout ou partie de sa responsabilité à l'égard de M. Y ; que, par ailleurs, eu égard à la nature accidentelle des dommages subis par M. Y, la COMMUNE D'AVIRON ne peut davantage utilement se prévaloir de ce que les conséquences dommageables de ces inondations ne présenteraient pas un caractère anormal et spécial ;

Sur le préjudice :

Considérant que la COMMUNE D'AVIRON n'apporte aucun élément de nature à établir que les premiers juges se seraient livrés à une inexacte appréciation du préjudice subi par M. Y et par la MAIF ; qu'il y a lieu, dès lors, de confirmer sur ce point le jugement attaqué ;

Sur les conclusions d'appel en garantie dirigées contre le syndicat intercommunal de voirie du canton d'Evreux Nord :

Considérant que si la COMMUNE D'AVIRON demande à la Cour de condamner le syndicat intercommunal de voirie du canton d'Evreux Nord à la garantir de la condamnation prononcée à son encontre, il résulte de l'instruction que de telles conclusions n'ont pas été présentées devant le Tribunal administratif de Rouen ; que, dès lors, ces conclusions, qui sont nouvelles en appel, sont irrecevables et doivent, par suite, être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE D'AVIRON n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen l'a déclarée responsable des conséquences dommageables de l'inondation survenue les 30 et 31 octobre 1998 sur la propriété de M. Y et l'a condamnée à indemniser celui-ci et son assureur des préjudices en résultant ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. Y et de la MAIF, qui ne sont pas, en la présente instance, partie perdante, la somme que la COMMUNE D'AVIRON demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, en application des mêmes dispositions et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMMUNE D'AVIRON la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la MAIF et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE D'AVIRON est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE D'AVIRON versera à la mutuelle assurance des instituteurs de France la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE D'AVIRON, à M. Didier Y, ainsi qu'à la mutuelle assurance des instituteurs de France.

5

N°05DA00033


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 05DA00033
Date de la décision : 13/06/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Helmholtz
Rapporteur ?: Mme Corinne (AC) Signerin-Icre
Rapporteur public ?: M. Le Goff
Avocat(s) : SCP HUGLO LEPAGE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2006-06-13;05da00033 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award