Vu la requête, enregistrée le 3 juin 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Michel X, demeurant ..., par
Me Carton ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 00-4794 en date du 27 mars 2003 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant du commandement de payer émis le 5 mai 2000 par le trésorier principal d'Hénin-Beaumont pour avoir paiement des taxes foncières dues par la SCI X 2 au titre des années 1989, 1990, 1991, 1992 et 1993 pour un montant total de 147 955,41 francs (22 555 euros) ;
2°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer résultant du commandement litigieux ;
Il soutient que le commandement de payer litigieux est nul est de nul effet car contraire aux dispositions de l'article 1857 du code civil ; que l'administration n'apporte pas la preuve d'avoir délivré un tel commandement à Mme X ; que la décision de rejet aurait dû être prise par le trésorier-payeur général du Pas-de-Calais ; que le receveur des finances de Boulogne-sur-Mer était incompétent pour prendre une décision de rejet ; que le délai d'action de l'administration en vue du paiement de l'impôt est atteint par la prescription ; qu'au surplus l'administration n'apporte pas la preuve d'avoir vainement poursuivi la société X 2 ainsi que l'exigent les textes, la documentation administrative et la jurisprudence ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 août 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il soutient que le trésorier d'Hénin-Beaumont a bien adressé un commandement à Mme X par lettre recommandée ; que les deux commandements détaillent les sommes dues par chacun des associés ; que le trésorier-payeur général a bien autorisé le receveur de Boulogne-sur-Mer à exercer le traitement des oppositions à poursuites ; qu'au surplus les vices de forme concernant la décision de rejet du trésorier-payeur général sont sans incidence sur les questions soumises au juge fiscal ; que les créances ne sont pas prescrites et que la Cour de Cassation a jugé que les poursuites étaient vaines à l'encontre d'une SCI dès lors que celle-ci était en liquidation judiciaire ;
Vu le mémoire, enregistré le 22 septembre 2003, présenté pour M. X qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2005 à laquelle siégeaient Mme Helmholtz, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur et
M. Bauzerand, premier conseiller :
- le rapport de M. Bauzerand, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Le Goff, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par jugement du 25 juin 1993, le Tribunal de grande instance de Béthune a prononcé l'extension, avec confusion des patrimoines, de la procédure de liquidation judiciaire de la SA X à la SCI X 2, dont M. X et Mme X-Y possédaient chacun la moitié du capital social ; que, le 12 mai 2000, le même Tribunal a prononcé la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de ces deux sociétés ; que, le 15 mai 2000, le trésorier d'Hénin-Beaumont a adressé à chacun des deux associés de la SCI X un commandement de payer concernant les taxes foncières établies au nom de cette société pour les années 1989 à 1993 et restant dues pour un montant total de 147 955,41 francs ; que M. X a demandé le 6 juin 2000 la décharge de cette obligation de payer et que Mme X-Y a demandé la décharge des impositions mises à sa charge ; qu'après rejet de leur réclamation le
10 juillet 2000, M. et Mme X ont saisi le Tribunal administratif de Lille de cette décision par demande en date du 15 septembre 2000 ;
Considérant que par jugement en date du 27 mars 2003 le Tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de M. et Mme X ; que M. X interjette seul appel de ce jugement ;
Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré par M. X de ce que le fonctionnaire qui a signé le rejet de sa contestation en matière de recouvrement n'aurait pas reçu une délégation régulière est inopérant ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'examen du commandement de payer notifié le 15 mai 2000 au requérant que ce document indique clairement que le montant dû par celui-ci en tant qu'associé pour moitié de la SCI X s'élève à 73 977,70 francs, soit la moitié de la somme due par la société ; que M. X n'est pas fondé par suite, à soutenir que ce commandement méconnaîtrait les dispositions de l'article 1857 du code civil en vertu desquelles les associés répondent indéfiniment des dettes sociales à l'égard des tiers à proportion de leur part dans le capital social ;
Considérant, en troisième lieu, que le fait que le commandement de payer délivré à
Mme X, autre associée de la SCI ne lui aurait pas été régulièrement adressé est, en tout état de cause, sans incidence sur le présent litige relatif uniquement à l'obligation de payer résultant du commandement adressé à M. X ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : « Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle, perdent leur recours et sont déchus de leurs droits et de toute action contre ce redevable. Le délai de quatre ans…, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu ... par tous autres actes interruptifs de la prescription » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SCI X 2 s'est vue étendre, par jugement en date du 25 juin 1993, la procédure de liquidation judiciaire à laquelle avait été soumise la
SA X ; qu'à cette date, elle restait redevable de taxes foncières pour un montant de
147 955,41 francs qui lui avaient été assignées au titre des années 1989, 1990, 1991, 1992 et 1993 par des avis de mise en recouvrement respectivement en date des 31 octobre 1989,
31 octobre 1990, 30 septembre 1991, 31 août 1992 et 31 août 1993 ; que l'administration ayant produit ses créances entre les mains du syndic à la liquidation judiciaire le 11 août 1993, celles-ci ont été inscrites sur « l'état des créances admises » arrêté par le juge-commissaire le 6 octobre 1994 ; que les opérations de liquidation de biens ont été clôturées pour insuffisance d'actif par un jugement du 12 mai 2000 sans que la dette fiscale de la SCI X 2 ait été honorée ;
Considérant que la production par le comptable au Trésor de ses créances a eu pour effet d'interrompre la prescription sans que le requérant puisse utilement faire valoir, pour s'opposer à cette interruption que le certificat d'admission des créances en cause indique « SA X » dès lors qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la SCI X 2 s'est vue étendre, le 25 juin 1993, la procédure de liquidation judiciaire de cette société avec confusion de patrimoine ; que le jugement de clôture du 12 mai 2000, qui a redonné au comptable public son droit individuel de poursuites, a fait courir un nouveau délai de prescription fixé à quatre ans par l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, lequel n'était pas expiré lorsque, le 15 mai 2000, le trésorier
d'Hénin-Beaumont a émis à l'encontre de M. X le commandement de payer en cause ;
Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 1858 du code civil : « Les créanciers ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu'après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale » ;
Considérant que si l'ouverture de la procédure collective ne suffit pas à établir l'inanité des poursuites exigées par les dispositions précitées de l'article 1858 du code civil, dans la situation, qui est celle de l'espèce, où l'actif social, qui est le gage des créanciers, s'est révélé manifestement inexistant dès lors que la procédure de liquidation judiciaire a été clôturée pour insuffisance d'actif, la production de sa créance par le comptable du Trésor au passif de la société, qui constitue une mesure de poursuites, s'avère suffisante au sens des dispositions précitées pour mettre en oeuvre le recouvrement à l'encontre des associés ; que M. X ne peut dès lors utilement soutenir que le comptable était tenu avant l'ouverture de la procédure collective de mettre en oeuvre tous les moyens pour recouvrer sa créance sur le patrimoine de la SCI X 2 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Michel X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Michel X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie sera transmise au trésorier-payeur général du Pas-de-Calais.
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N°03DA00608