Vu la requête, enregistrée le 3 mars 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Me X, ès qualité d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société Z, dont l'étude est située ..., par la SELARL Cabinet Benoît Vettes ; le requérant demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement nos 9801748-9901477-9900545 en date du 5 décembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de la Seine-Maritime en date des 28 août 1998, 12 février 1999 et 20 juillet 1999, relatifs à l'injonction qui lui a été faite de dépolluer le site de l'ancienne usine située à Martin-Église ;
2°) d'annuler lesdits arrêtés ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime d'enjoindre à la SCI Y de procéder aux travaux de remise en état du site ;
Il soutient que le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen tiré de ce qu'il n'était pas habilité à administrer le site concerné ; qu'en l'absence de déclaration, la créance éventuelle relative à la pollution est éteinte ; qu'il n'est pas prévu qu'il pût être adressé des injonctions de faire à un administrateur judiciaire ; que les poursuites sont suspendues et que d'ailleurs une ordonnance du juge-commissaire du Tribunal de commerce de Louviers lui a interdit de verser la somme réclamée par le titre de perception du 20 juillet 1999 et que dès lors il ne peut lui être fait grief ne pas l'avoir fait ; qu'il n'est pas habilité à administrer le site concerné ; qu'il revient à la SCI Y de remettre le site en état dès lors que la société Z est insolvable ;
Vu le jugement et les décisions attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 octobre 2004 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présenté par le ministre de l'écologie et du développement durable, qui conclut au rejet de la requête ; le ministre soutient, à titre principal, que la requête est irrecevable en ce qu'elle se borne à reprendre l'argumentation développée en première instance ; à titre subsidiaire, que la méconnaissance des règles relatives au redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises en difficulté ne peut être invoquée devant le juge administratif, et le moyen tiré de l'absence de déclaration de créance est inopérant ; qu'en l'absence de successeur exploitant, il revient à la société Z de remettre le site en état ; que la société Z subsistant toujours, elle peut faire l'objet des mesures contestées ; que son éventuelle insolvabilité est sans incidence ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 25 février 2005, présenté pour Me X, ès qualité d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société
Z, qui persiste dans ses conclusions ; il soutient qu'il a critiqué le jugement attaqué ; que l'administration doit suivre les règles de la procédure collective pour recouvrer une créance ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement et le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 pris pour son application ;
Vu la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises ;
Vu la loi n° 85-99 du 25 janvier 1985 relative aux administrateurs judiciaires, aux mandataires judiciaires à la liquidation des entreprises et experts en diagnostic d'entreprise ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mars 2005 à laquelle siégeaient
M. Merloz, président de chambre, M. Dupouy, président-assesseur et M. Le Garzic, conseiller :
- le rapport de M. Le Garzic, conseiller ;
- et les conclusions de M. Lepers, commissaire du gouvernement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'écologie et du développement durable :
Considérant que le ministre de l'écologie et du développement durable soulève une fin de non-recevoir tirée de ce que Me X, ès qualité d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société Z, serait dénuée de moyens d'appel ; que cependant sa requête comporte une critique du jugement attaqué ; que cette fin de non-recevoir ne peut qu'être rejetée ;
Sur la légalité des arrêtés du préfet de la Seine-Maritime en date des 28 août 1998,
12 février 1999 et 20 juillet 1999 et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 85-99 susvisée du 25 janvier 1985 alors en vigueur : Les administrateurs judiciaires sont les mandataires chargés par décision de justice d'administrer les biens d'autrui ou d'exercer des fonctions d'assistance ou de surveillance dans la gestion de ces biens ; qu'aux termes de l'article 31 de la loi n°85-98 susvisée du 25 janvier 1985 alors en vigueur : I. - Outre les pouvoirs qui leur sont conférés par le présent titre, la mission du ou des administrateurs est fixée par le tribunal. / II. - Ce dernier les charge ensemble ou séparément : / 1° Soit de surveiller les opérations de gestion ; / 2° Soit d'assister le débiteur pour tous les actes concernant la gestion ou certains d'entre eux ; / 3° Soit d'assurer seuls, entièrement ou en partie, l'administration de l'entreprise. (...) ; qu'aux termes du premier alinéa de son article 32 : Le débiteur continue à exercer sur son patrimoine les actes de disposition et d'administration, ainsi que les droits et actions qui ne sont pas compris dans la mission de l'administrateur ;
Considérant que, par un jugement en date du 23 avril 1998, le Tribunal de commerce de Louviers a nommé Me X administrateur judiciaire de la société Z, avec mission d'assistance à la société pour tous les actes de gestion ; que celui-ci a été confirmé dans cette qualité par un jugement en date du 24 décembre 1998 ;
Considérant que par un arrêté en date du 28 août 1998, le préfet de la Seine-Maritime a imposé à Me X, ès qualité d'administrateur judiciaire de la société Z, un certain nombre de mesures de remise en état d'un site que la société avait préalablement exploité ; que par un arrêté en date du 12 février 1999, il l'a mis en demeure d'effectuer lesdites mesures ; que par un arrêté en date du 20 juillet 1999, il a émis à son encontre un titre de perception à fins de consignation entre les mains du trésorier payeur général de la somme de 20 000 francs (3 048,98 euros) ;
Considérant qu'à l'encontre de ces arrêtés, Me X fait notamment valoir que le préfet ne pouvait adresser une telle injonction de faire à un administrateur judiciaire ; qu'en l'espèce, Me X n'avait pas pour mission d'assurer l'administration de la société mais simplement de l'assister pour tous les actes concernant sa gestion ; que, dès lors que la société n'avait pas été dessaisie de l'administration de ses biens au profit de l'administrateur judiciaire, celui-ci ne pouvait accéder à l'injonction adressée par le préfet, laquelle aurait dû être adressée à la société ;
Considérant que Me X, ès qualité d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société Z, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation des arrêtés pris par le préfet de la Seine-Maritime les 28 août 1998, 12 février 1999 et 20 juillet 1999 ;
Sur la demande d'injonction :
Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que par suite ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement nos 9801748-9901477-9900545 du Tribunal administratif de Rouen du 5 décembre 2002 ainsi que les arrêtés du préfet de la Seine-Maritime des 28 août 1998,
12 février 1999 et 20 juillet 1999 sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions de Me X, ès qualité d'administrateur judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société Z, est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me X, à la société Z et au ministre de l'écologie et du développement durable.
Copie sera transmise au préfet de la région Haute-Normandie, préfet de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience du 3 mars 2005 à laquelle siégeaient :
- M. Merloz, président de chambre,
- M. Dupouy, président-assesseur,
- M. Le Garzic, conseiller,
Lu en audience publique le 17 mars 2005.
Le rapporteur,
Signé : P. LE GARZIC
Le président de chambre,
Signé : G. MERLOZ
Le greffier,
Signé : B. ROBERT
La République mande et ordonne au ministre de l'écologie et du développement durable en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le Greffier
B. ROBERT
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N°03DA00214